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François-Noël Buffet, sénateur Les Républicains du Rhône, spécialiste des questions d’immigration et rapporteur entre autre d’une commission d’enquête sur l’immigration à Mayotte, est l'invité de Dimitri Pavlenko à l'occasion du vendredi thématique "Mayotte, terre d’immigration clandestine".

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Transcription
00:00 - 7h45 sur Europe 1 de Dimitri Pavlenko.
00:04 - Votre club de la presse Europe 1, on la surnomme l'île hippocampe pour sa forme qui rappelle le petit poisson à profil de cheval.
00:12 Et oui, des hippocampes sont des poissons.
00:14 Mayotte, 8000 km de Paris, 200 000 habitants en 2010, sans doute le double aujourd'hui.
00:20 Augmentation du seul fait ou presque de l'immigration clandestine.
00:24 Je vais vous donner une comparaison. Imaginez 35 millions d'étrangers arrivant en métropole en l'espace de 12 ans.
00:30 35 millions de nouveaux venus qu'il faut loger, nourrir, scolariser, employer.
00:35 Quel pays pourrait encaisser un tel choc ?
00:38 C'est ce que vit pourtant Mayotte.
00:40 Pour tenter de déloger ces irréguliers, les autorités françaises lancent l'opération Wambushu, ça veut dire reprise en langue chimaoré.
00:48 On vous en parle aujourd'hui sur Europe 1.
00:50 C'est votre vendredi thématique. Avec nous jusqu'à 9h pour tenter d'évaluer les chances de succès de cette opération.
00:57 Peut-on sauver Mayotte de l'immigration clandestine ?
01:00 L'un des meilleurs experts des questions d'immigration au Parlement est avec nous.
01:04 Bonjour François-Noël Buffet.
01:05 - Bonjour.
01:06 - Bienvenue sur Europe 1. Vous êtes sénateur Les Républicains du Rhône,
01:09 président de la Commission des lois du Sénat, co-rapporteur entre autres d'un rapport d'information sur l'immigration à Mayotte
01:16 où vous vous êtes rendu à plusieurs reprises, notamment fin 2021.
01:20 Alors un mot d'abord sur cette opération policière Wambushu, François-Noël Buffet.
01:25 Êtes-vous optimiste sur les chances de succès ?
01:28 - Écoutez, il faut le souhaiter. Il faut souhaiter que cette opération fonctionne.
01:33 En tous les cas, elle me semble être absolument nécessaire compte tenu de la situation mahoraise.
01:39 50% de la population de Mayotte est une population étrangère et dans ces 50%, 25% sont en situation irrégulière.
01:49 La situation est explosive sur cette île. J'ai vécu la différence de vie sur ce territoire entre 2006,
01:57 où je suis allé une première fois sur le thème de l'immigration clandestine, et une deuxième fois, vous l'avez rappelé, en 2021.
02:05 La situation s'est dégradée à une vitesse incroyable.
02:09 Une population, évidemment, qui a augmenté fortement, vous venez de le dire, mais également une violence qui s'est installée.
02:15 Une violence assez incroyable et en plus une population qui est très jeune.
02:20 Je rappelle que la population de Mayotte est à 50% à moins de 18 ans, et donc très très jeune.
02:26 - Pourquoi ? - Il y a un climat de violence terrible.
02:29 - Alors on va y revenir, mais peut-être d'abord, François-Noël Buffet,
02:32 on a dit que ces clandestins venaient très massivement des Comores voisines,
02:36 un archipel qui se trouve à 80 km seulement des rives de Mayotte.
02:40 Mais pourquoi ces clandestins viennent-ils t'aussi nombreux à Mayotte ?
02:45 Comment on explique cette attraction finalement qu'exerce Mayotte sur sa région ?
02:50 - C'est assez simple. En réalité, Anjouan est à 70 km.
02:55 Les gens peuvent traverser sur des bateaux qui s'appellent des kwasa-kwasa,
03:01 qui arrivent sur les plages maoreses et viennent principalement pour essayer d'obtenir
03:06 un moment ou un autre la nationalité française,
03:09 et pour bénéficier, disons les choses telles qu'elles sont,
03:12 de la vie qui dans cet ensemble qui est très difficile,
03:16 représente une sorte d'îlot de jouvence presque,
03:20 parce qu'on accueille les gens et qu'on les traite.
03:23 La maternité de Mamoudzou est probablement la première maternité de France
03:29 avec plus de 10 000 naissances.
03:31 Donc vous avez beaucoup de jeunes femmes comoriennes, anjouanaises,
03:36 qui arrivent en donnant naissance à leur enfant
03:39 et en espérant que celui-ci, restant sur le territoire,
03:42 puisse obtenir la nationalité française et aller à l'école.
03:45 C'est assez étonnant. L'école dans laquelle je me suis rendu
03:49 lorsqu'il y allait en 2021, vous aviez 12 classes par niveau.
03:54 - 12 classes par niveau ? C'est énorme.
03:57 - 12 classes de CP, 12 de CE1, etc. - Exactement.
04:01 - Il y a combien d'élèves dans ces écoles ? C'est quoi ?
04:04 C'est des classes de 2 000 élèves ?
04:07 - Des écoles de 2 000 élèves, mais des classes de 30, 35 élèves.
04:12 Je me souviens très bien de cela.
04:14 Et qu'est-ce qu'ils vous disent, ces enfants ?
04:16 Ils vous disent "on a peur de venir à l'école parce qu'on se fait agresser,
04:20 mais on est content une fois qu'on est dans l'école
04:22 et on a peur de rentrer chez nous parce qu'on a peur d'être agressé".
04:24 Et puis une grande partie d'entre eux sont en situation irrégulière,
04:27 en tous les cas, parce que leurs parents le sont.
04:29 Et de ce fait, le seul espoir pour ces familles, c'est de se dire
04:33 "je vais pouvoir rester en France, faire des études et essayer de m'en sortir".
04:36 C'est ça la raison principale.
04:38 Et puis la deuxième raison, elle tient bien évidemment au fait que
04:42 les comores ne font rien pour limiter le flux.
04:45 Ils ont les choses telles qu'elles sont.
04:47 - Je vais donner un chiffre. Le PIB par habitant en métropole,
04:51 c'est de l'ordre de 40 000, 35 000, 40 000 euros.
04:54 À Mayotte, c'est 10 000 euros, mais c'est 10 fois supérieur
04:57 à la moyenne de la région quand vous allez au Mozambique.
05:00 - Bien sûr.
05:01 - On est à 1 000 euros par tête.
05:03 Donc forcément, Mayotte devient naturellement
05:06 une espèce d'aimant à misère.
05:08 Revenons un instant à Wambushu, à cette opération de police
05:11 qui démarre avec l'idée de démanteler.
05:13 Alors le ministre de l'Intérieur tourne un peu autour du pot
05:16 parlant d'une opération de lutte contre l'habitat insalubre
05:19 parce que ces clandestins vivent dans des bidonvilles
05:22 qui se constituent dans les interstices de la ville.
05:26 La question qui peut se poser quand même, François-Noël Buffet,
05:29 c'est est-ce qu'avec Wambushu, on ne voit pas trop grand ?
05:32 Je vous pose cette question parce que je disais que l'objectif,
05:34 c'était 10 000 expulsions de clandestins.
05:36 Mais quand on voit qu'à Toulon, au mois de janvier,
05:38 quand il y a eu 234 migrants à traiter,
05:41 la justice a été totalement débordée.
05:43 Elle a été forcée de relâcher une partie de ces migrants dans la nature.
05:46 Et là, on vise 10 000.
05:48 Est-ce qu'on va y arriver ?
05:50 - Alors, il faut bien admettre que la situation juridique en Outre-mer
05:54 est un peu différente de celle de la métropole.
05:57 Mais le CRA de Mayotte...
06:01 - Donc le centre de rétention.
06:03 - Le centre de rétention fonctionne à plein en permanence.
06:05 Avec une opération de cette nature,
06:08 il est nécessaire d'adapter les moyens.
06:10 Parce que si les moyens ne sont pas adaptés,
06:12 effectivement, l'opération du ministre ne pourra pas aboutir.
06:16 Il faut qu'il ait des lieux de rétention administratifs.
06:19 Je crois que j'ai lu que ça avait été prévu.
06:21 C'est-à-dire d'autres lieux de rétention,
06:23 qui puissent être sur le territoire.
06:25 Il faut que les forces de police soient renforcées.
06:27 Il faudra que les moyens nautiques pour raccompagner les personnes
06:30 soient également renforcés.
06:32 On dit que l'opération va durer deux mois,
06:34 mais c'est une opération de grande envergure.
06:36 Fallait-il être plus en retrait ?
06:40 Je crois qu'il y a un élément dans cette opération
06:43 qu'il ne faut pas négliger.
06:45 C'est l'élément aussi message envoyé aux Comores.
06:49 En disant qu'on ne peut pas continuer,
06:51 ou que la France ne peut pas continuer d'accepter
06:53 des arrivées aussi massives sur son territoire.
06:56 Et qu'il faudra aussi, à un moment ou à un autre,
06:58 que les Comores acceptent la discussion.
07:01 Et qu'il y a un travail diplomatique extrêmement fort
07:03 entre la France et les Comores.
07:05 Ça n'est pas possible.
07:06 De toute façon, l'avenir de Mayotte n'existera
07:10 que si on est capable d'avoir, dans l'immédiateté des choses,
07:13 des moyens de sécurité extrêmement forts
07:15 et des moyens de justice extrêmement forts.
07:17 Et ensuite un projet économique pour cette île.
07:20 Et un projet de relation internationale,
07:22 il faut l'appeler comme ça, avec les Comores.
07:25 Une discussion au plus haut niveau sur le plan diplomatique
07:27 pour essayer de calmer le jeu.
07:29 Sinon, nous y retournons dans 5 ans, dans 6 ans,
07:32 on recommence la même chose.
07:34 - William Molinier, l'envoyé spécial d'Europe 1 aux Comores,
07:36 nous expliquait tout à l'heure que la Russie
07:38 est en train de souffler aussi au creux de l'oreille
07:40 des dirigeants comoriens.
07:42 Et notamment de leur suggérer de se montrer un peu réticent
07:46 sur la délivrance des fameux "laissés-passer consulaires"
07:49 qui sont nécessaires pour renvoyer des clandestins
07:51 dans leur pays d'origine.
07:53 On va se heurter aussi...
07:55 C'est l'une des conséquences finalement inattendues
07:57 du conflit en Ukraine.
07:59 - Tout à fait.
08:01 Là où la France est présente dans le monde,
08:03 on se rend compte que dès que la Russie peut intervenir
08:07 pour nous mettre en difficulté,
08:09 par exemple de l'Afrique subsaharienne,
08:11 singulièrement du Mali,
08:13 l'exemple que vous venez de donner sur Mayotte
08:15 n'est absolument pas surprenant.
08:17 Il y a cette volonté de lutter contre nous.
08:20 Cela ne veut pas dire qu'il faut qu'on soit faible,
08:22 au contraire, je crois qu'il faut qu'on affirme les choses.
08:24 Je rappelle que les Mahorais de nationalité française,
08:28 nos concitoyens, vivent dans une situation
08:30 extrêmement difficile.
08:32 Je suis allé moi dans tous ces lieux,
08:36 à Congo et dans ces bidonvilles,
08:38 parce qu'il faut les appeler comme ça,
08:40 ce sont des bidonvilles, je suis allé voir les gens,
08:42 c'est un état de misère qui est absolument terrible,
08:44 et on ne peut pas accepter sur le territoire national
08:47 de telles situations.
08:49 Et on ne peut pas accepter non plus le fait de ne rien faire,
08:52 et de considérer que tout ça est un scénario au fil de l'eau,
08:55 ça n'est pas possible, sinon Mayotte est perdue,
08:57 disons les choses telles qu'elles sont.
08:59 - Alors François Noël Buffet, justement,
09:01 je vais vous poser une question très directe,
09:03 je vais dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas,
09:05 à savoir que finalement, pourquoi la métropole
09:07 s'embête aujourd'hui avec un territoire
09:09 aussi problématique, aussi complexe ?
09:11 On entend les ministres, et je pense par exemple
09:13 à Sébastien Lecornu, qui avant était aux Outre-mer,
09:16 disant il n'y a pas si longtemps que ça,
09:18 l'appartenance de Mayotte à la France n'est pas négociable.
09:21 Pourquoi y a-t-il un tel attachement de la France
09:23 aujourd'hui à Mayotte ?
09:25 - Parce que les Mahorais ont choisi la France.
09:28 Au moment du référendum, lorsque les Comores
09:31 ont voulu leur indépendance, la seule île,
09:33 l'archipel des Comores,
09:36 qui a décidé de voter pour la France,
09:38 c'est Mayotte. - Quatre référendums, hein,
09:40 depuis 1974. - Oui, absolument,
09:42 et c'est Mayotte.
09:44 C'est désormais le 102ème,
09:46 survie de ma part, département français.
09:48 101ème. C'est la France.
09:50 Et puis, au-delà du territoire lui-même,
09:53 c'est aussi la présence de notre pays
09:56 sur l'océan Indien, et sur
09:58 une des mers du monde.
10:00 Nous sommes un des rares pays, je reviens des Antilles,
10:02 pour une mission, pour le Sénat,
10:04 la semaine dernière,
10:06 le drapeau français flotte sur toutes les mers du monde.
10:08 C'est donc une présence très importante pour nous.
10:10 - Mayotte est stratégique, François-Noël Buffet ?
10:13 - Je pense que Mayotte est stratégique,
10:16 comme beaucoup d'autres territoires, dans ce secteur-là
10:18 de l'océan Indien. Il y a des enjeux économiques
10:20 qui sont réels. Le développement du port,
10:22 notamment, a été une des grandes ambitions.
10:24 On peut jouer un peu sur le trafic
10:26 maritime, en termes commerciales, j'entends.
10:29 La question est un peu toujours la même,
10:31 avec nos Outre-mer, je le dis très directement,
10:33 nos Outre-mer doivent être traitées
10:35 comme une chance pour le pays.
10:37 À une condition, c'est qu'effectivement,
10:39 on se donne les moyens de relever cette chance.
10:41 Et je pense que Mayotte est en une situation
10:43 où il faut se donner les moyens
10:45 de la sauver. A défaut, effectivement,
10:47 nos concitoyens sont en très grande difficulté.
10:49 Et la France, parce qu'elle est la France,
10:51 parce qu'elle a un message, parce qu'elle a une présence,
10:53 parce qu'elle joue avec les grandes nations du monde,
10:56 doit être présente. Mais cette ambition,
10:59 j'allais dire, de la France,
11:01 cette présence-là,
11:03 elle ne vaut que si elle se donne les moyens
11:05 de la porter.
11:07 Et je crois que ça fait partie aussi
11:09 de cette exception française qui est là.
11:11 Donc ne négligeons pas cela non plus.
11:13 Et puis, les Mahorais,
11:15 nos concitoyens Mahorais, ont fait le choix
11:17 d'être avec nous.
11:19 Je me rappelle qu'en 2006,
11:21 lorsque je suis allé à Mayotte,
11:23 en juin, quelques temps avant,
11:25 quelques semaines avant, avait ici
11:27 le drapeau français. Bon, évidemment,
11:29 la situation s'est arrêtée.
11:31 Mais qu'est-ce que je veux dire par là ?
11:33 Je veux dire qu'effectivement, vous l'avez rappelé,
11:35 Mayotte est un îlot de réussite,
11:37 ou en tous les cas,
11:39 un îlot social réel,
11:41 sur ce territoire, pour les autres.
11:43 Mais à charge pour nous de le préserver.
11:45 Mais ne laissons pas... La pire des choses,
11:47 ce serait une politique du laissé-aller.
11:49 Merci François Noël Buffet, le sénateur
11:51 LR du Rhône. Merci d'avoir été avec nous ce matin
11:53 sur Europe 1 pour nous parler de Mayotte.

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