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Anne Fulda reçoit Eugénie Bastié pour son livre «Sauver la différence des sexes» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 Bienvenue à l'heure des livres, Jenny Bastier.
00:02 Alors, vous êtes journaliste au Figaro, vous êtes chroniqueuse, vous êtes essayiste,
00:06 vous avez déjà écrit beaucoup d'essais, dont "Adieu, Mademoiselle",
00:09 dont "La guerre des idées".
00:11 Vous venez de publier "Sauver la différence des sexes".
00:14 C'est un texte que vous avez prononcé lors d'une conférence
00:18 qui s'était tenue devant l'Académie des sciences morales et politiques.
00:21 Et c'est un texte qui est publié dans la collection "Tract" de Gallimard.
00:25 Un texte qui est clair, engagé, percutant.
00:29 Mais vous l'écrivez d'emblée, on se demande pourquoi, aujourd'hui,
00:33 est-il nécessaire d'écrire un livre qui s'appelle "Sauver la différence des sexes".
00:37 Oui, c'est vrai, je pense toujours au film "Hibernatus"
00:40 et je me dis si Hibernatus se réveillait en 2023
00:43 et qu'il trouvait dans nos librairies des livres avec écrit "Sauver la différence des sexes",
00:47 il se demanderait ce qui a bien pu se passer.
00:50 Mais effectivement, je le dis, dès le début, ça peut paraître évident,
00:53 mais il est venu le temps de défendre des évidences
00:56 puisqu'effectivement, déjà, un certain nombre de personnes
01:00 sont aujourd'hui poursuivies et même accablées d'insultes,
01:04 et même censurées, parce qu'elles osent dire
01:07 qu'un homme est un homme et qu'une femme est une femme,
01:10 et que la différence des sexes est une condition, une limite consubstantielle à l'humanité.
01:16 Je pense par exemple à J.K. Rowling, l'auteur d'Harry Potter,
01:19 qui se voit poursuivre d'une haine farouche des transactivistes
01:24 parce qu'elle a osé rappeler cette évidence.
01:26 Et puis, plus globalement, je trouve que dans l'ensemble de la société,
01:29 pas seulement dans ces groupuscules,
01:31 il y a un phénomène de déconstruction du bien fondé de la différence des sexes.
01:36 Alors, pour appuyer votre démonstration,
01:38 puisque vous devez faire vous passer par une confirmation que oui, il y a bien de sexe,
01:43 vous vous appuyez autant sur Aristote que sur la féministe Antoinette Fouque,
01:48 et vous estimez que cette différence semble donc aujourd'hui menacée,
01:52 mais pourquoi et par qui ?
01:54 Oui, alors je dis d'abord que oui, elle existe,
01:57 deux, elle est menacée, et pourquoi est-ce qu'il faut la sauver ?
01:59 Parce que ce n'est pas fort, on pourrait se dire, après tout,
02:01 elle peut disparaître, quel est le problème ?
02:04 Et donc, j'essaie de démontrer comme ça en plusieurs étapes.
02:07 Et donc, oui, elle existe, ça me paraît assez évident,
02:11 et oui, elle est menacée parce qu'il y a effectivement tout un mouvement de fond
02:16 qui est une troisième, je dirais que c'est la troisième vague du féminisme.
02:20 Vous avez eu un féminisme de droit politique,
02:23 un féminisme qui a réclamé la révolution sexuelle et les droits sexuels
02:27 et l'égalité de droit, et vous avez une troisième vague,
02:30 qui est une vague féministe qu'on peut appeler aussi théorie du genre,
02:33 et qui consiste à dire finalement que toute différence sexuelle
02:38 est une construction sociale au service de la domination masculine,
02:42 et qui donc prétend qu'il faut déconstruire cette différence des sexes
02:46 pour aboutir à l'émancipation féminine ou à l'émancipation LGBT, etc.
02:51 Et je m'érige contre ce paradigme parce que j'estime qu'il porte,
02:57 il annonce une société à mon avis, enfin, dangereuse.
03:02 Alors, vous dites même que la théorie du genre est en fait en passe
03:06 de remplacer les grandes utopies du XXe siècle.
03:09 Oui, c'est vrai qu'on ne peut plus changer la vie,
03:12 vous savez, c'était le slogan de Mitterrand, donc on peut changer son genre.
03:15 On change sa vie, on change son genre.
03:17 Et je pense que c'est en effet une utopie de substitution,
03:20 comme il n'y a plus de grande révolution économique, sociale,
03:24 qui a plus d'horizon émancipateur global et commun,
03:28 et bien cette théorie du genre donne une espèce d'illusion de progrès individuel,
03:33 et c'est pour ça qu'elle a autant de succès, je pense,
03:35 parce que quand on voit à quel point elle est reprise par la jeunesse
03:38 et elle infiltre les institutions, je pense que ça fait écho
03:42 à ce désir de progrès qui est profondément enraciné chez les post-modernes
03:46 et la théorie du genre, et pour moi c'est un mensonge.
03:49 Oui, parce qu'on pourrait croire que ces thèses sont agitées
03:52 par une minorité certes agissante, mais une minorité.
03:55 Mais ce que vous craignez, c'est qu'en fait, ce que vous écrivez,
03:59 ce qui était autrefois revendiqué comme une forme de marge,
04:02 devienne la revendication d'une nouvelle norme.
04:04 C'est ce qui est en train de se passer.
04:06 Oui, et puis surtout je pense qu'au-delà de la question trans,
04:08 qui est en effet marginale, mais qui est quand même, je trouve, importante,
04:11 parce qu'elle s'appuie sur un déni, un déni de la différence biologique,
04:14 au-delà de ça, on martèle finalement que la différence des sexes
04:18 n'est pas précieuse, mais est un obstacle et une entrave.
04:21 Et moi c'est ce contre quoi je mérite, je ne vois pas pourquoi
04:24 on devrait démanteler cette différence entre hommes et femmes,
04:26 qui est aussi une richesse, et je m'inquiète des conséquences
04:29 que ça peut avoir, notamment une forme...
04:31 Sur les femmes, est-ce qu'on est sûr de la démontrer ?
04:33 Sur les femmes, parce qu'on leur demande, on nie par exemple
04:35 la question de la maternité, puisque la femme n'existe pas,
04:37 il n'y a pas de définition de la femme, donc la maternité n'est plus prise en compte,
04:40 notamment par le mouvement féministe, on nie cette dimension-là,
04:43 qui est essentielle pour comprendre les inégalités.
04:45 Et du côté des hommes, on leur offre que la déconstruction,
04:50 la virilité est immanquablement associée à la déconstruction,
04:54 il faut la déconstruire.
04:55 Or non, je pense qu'on a besoin d'hommes virils,
04:57 et qu'on a besoin d'une masculinité, et je ne vois pas pourquoi...
05:01 Je trouve que c'est... Moi j'ai deux petits garçons,
05:03 je me dis dans quel monde vont-ils grandir ?
05:05 Un monde où on leur apprendra qu'être un homme, c'est être toxique,
05:08 c'est... On associe la virilité qu'à la toxicité,
05:12 il n'y a même pas de petit modèle pour les petits garçons, par exemple.
05:14 Moi je suis assez effarée, quand vous rentrez dans une librairie aujourd'hui,
05:17 à Paris, vous avez des étalages entiers de livres pour les petites filles,
05:21 une super princesse, super héroïne, etc.
05:23 Vous n'avez rien, par exemple, pour les petits garçons.
05:25 On n'offre pas de modèle, et je trouve que ça prépare une société déséquilibrée.
05:30 En tout cas, on n'a pas le temps, juste peut-être un dernier mot
05:34 que vous citez, Pascal, en préconisant ce qu'il appelait l'esprit de finesse,
05:41 qui serait peut-être la porte de sortie.
05:43 En tout cas, je vous conseille vraiment ce texte qui est brillant,
05:48 en fait, et percutant, et bien écrit, ça se lit très vite,
05:52 et c'est un texte important.
05:55 Il faut lire aujourd'hui pour mettre les points sur le i.
05:57 Ça s'appelle "Sauver la différence des sexes".
05:59 Merci Eugénie Bastier, et c'est donc paru dans la collection Tract de Telhuma.
06:02 Merci Adjima.
06:05 [Musique]
06:08 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]