Elisabeth Lévy : "L'essence même de la démocratie, c’est qu’on a le droit de la contester"

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##LEVY_SANS_INTERDIT-2023-05-11##

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Transcription
00:00 - Il est 8h11, vous en avez entendu parler depuis une semaine,
00:04 après la première manifestation qui a eu lieu à Paris, Gérald Darmanin, donc le ministre de l'Intérieur, qui demande maintenant au préfet
00:11 d'interdire toutes les manifestations de l'ultra droite. On voit ça avec vous, Elisabeth Lévy, Lévy sans interdit, bonjour.
00:19 - Bonjour Patrick, bonjour Laurie, bonjour à tous.
00:21 - Donc vous revenez sur cette histoire, cette polémique.
00:24 - Oui, parce que donc c'est la suite de la polémique,
00:26 donc qui est née de cette manifestation de samedi dernier, le fameux comité du 9 mai,
00:32 cette manifestation que le préfet Laurent Nunez n'avait pas voulu interdire,
00:36 je précise, je rappelle, qu'il n'a pas à l'autoriser, on doit déclarer une manifestation, on peut l'interdire,
00:42 mais il n'y a pas une autorisation préalable. Alors toute la classe politique émet Elisabeth Borne en tête,
00:47 c'est indigné, critique en vertement Laurent Nunez, et puis de plus le gouvernement a été pris un peu à revers
00:53 par le Rassemblement National qui a dénoncé ce défilé contraire à nos valeurs,
00:58 je crois que c'est Jacobelli qui a dit ça, Laurent Jacobelli.
01:00 Alors on peut dire que c'est un contre-feu pour faire oublier la présence de deux ex-proches de Marine Le Pen
01:08 à cette manifestation, mais de toute façon il n'y a vraiment pas la moindre proximité aujourd'hui
01:13 programmatique et idéologique entre l'ERN et ces fous furieux.
01:17 Donc Gérald Darmanin demande donc au préfet d'interdire toute manifestation déclarée
01:21 par des militants des associations ou des collectifs, je cite, d'ultra droite ou d'extrême droite,
01:27 fort bien, sauf que ça ne veut rien dire, parce que qui va décider ce qui est d'extrême droite ou d'ultra droite ?
01:34 Pour l'IBE et au France Inter par exemple, ça commence au chasseur, et il n'y a pas de définition claire,
01:41 on peut évidemment dissoudre un groupe, on peut interdire un événement, on n'interdit pas des idées,
01:46 on peut en revanche les combattre.
01:48 - Alors qu'en pensez-vous ? Il ne faut pas interdire ces manifestations ?
01:52 - Alors en tout cas cette question centrale, cher Patrick, de la liberté d'expression,
01:57 mérite un débat me semble-t-il d'une autre tenue que les échauffourées politiciennes auxquelles nous avons eu droit.
02:03 Alors parlons d'abord du droit. La loi française n'interdit évidemment aucune opinion, heureusement,
02:08 mais elle prévoit des délits, elle sanctionne des délits. L'appel à la haine ou à la discrimination,
02:14 la violence, le trouble à l'ordre public, mais aussi l'injure, la diffamation.
02:19 Et je précise que le visage masqué, contrairement à ce qu'on a beaucoup dit, n'est pas interdit de façon générale,
02:25 il est interdit seulement quand il s'accompagne de l'intention de commettre un délit,
02:29 ce qui est quand même assez compliqué à prouver.
02:31 - Bon, mais malgré tout cela, je suis sûr que si on veut, on peut trouver pour ces manifestations,
02:36 celle de samedi, celle du comité du 9 mai, ou celle d'autres gens, d'autres groupes de ce genre,
02:43 on peut certainement trouver des motifs d'interdiction qui tiennent la route.
02:46 Alors reste à savoir si c'est souhaitable.
02:48 Et de mon point de vue, l'enjeu est beaucoup plus politique, intellectuel que juridique.
02:52 La liberté d'expression, donc de manifestation qui en découle, n'est évidemment jamais absolue dans aucune société.
03:00 Il y a toujours des interdits, mais pour nous, pour nous les Français, elle a une dignité particulière,
03:04 c'est un des droits les plus précieux de l'homme, dit la Déclaration des droits de l'homme,
03:08 on ne doit donc la restreindre qu'en tremblant.
03:11 Et surtout, elle n'a pas de sens si on ne l'accorde pas aux gens qui ne pensent pas comme nous.
03:16 Or, que le réflexe courant aujourd'hui, c'est de renverser la phrase attribuée à Voltaire,
03:22 "je ne partage pas vos idées, je me battrai pour que vous ne puissiez jamais les exprimer".
03:27 Alors la vraie question, c'est est-ce que cette liberté doit bénéficier aux adversaires de la démocratie ?
03:32 Il y a véritablement une discussion, pour moi, l'essence même de la démocratie,
03:36 c'est qu'on a le droit de la contester, donc oui, même pour les ennemis de la démocratie.
03:41 Et de ce point de vue, par exemple, l'interdiction, samedi prochain,
03:45 il y a un premier rassemblement de l'action française qui est interdit à Paris,
03:48 et ça me semble parfaitement liberticide.
03:51 Alors, ce qui est vrai en revanche, c'est qu'il semble totalement saugrenu
03:55 d'interdire les casserolades et pas les fachos, ces nazillons,
03:59 sur lesquels tout le monde est d'accord, ils sont vraiment horribles, déplaisants,
04:03 on n'a pas envie de les voir, mais aussi puériles soient-elles,
04:06 il ne faut pas interdire les casserolades, il faut parfois les encadrer.
04:10 Alors oui, c'est pénible, c'est pénible pour nous tous de voir ces néo-nazis,
04:14 ces vrais fachos, parce que là on peut vraiment parler de fachos,
04:17 encagoulés, mais je préférerais toujours la douleur de la liberté à l'étouffoir de la censure.
04:23 Merci Elisabeth Lévy.

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