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Christine Kelly et Marc Menant reviennent sur les personnages célèbres qui ont fait l’histoire dans #LesGrandsDestins
Devenue comtesse du Barry par mariage, Jeanne Bécu (1743-1793) fût la dernière favorite de Louis XV. Chassée de la cour par Louis XVI, elle se fit oublier avant d’être décapitée en 1793.

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00:00 Bonjour à tous, ravie de vous accueillir dans cette émission "Les Grands Destins"
00:04 avec Marc Menand. Nous allons évoquer encore aujourd'hui un des personnages qui a fait l'histoire,
00:09 aujourd'hui le grand destin, de la Comtesse du Barry. Alors c'est la dernière favorite du roi Louis XV.
00:16 Elle sauve le roi de la mélancolie. Bien qu'ayant aucune intention de participer à la politique,
00:22 elle marque l'histoire et c'est la raison pour laquelle nous allons nous intéresser à ce personnage.
00:27 Marc, vous avez certainement des raisons particulières, supplémentaires.
00:31 Oui, parce qu'elle incarne la féminité resplendissante. On pourrait dire que, sans abuser, on pourrait brandir le mot "déesse".
00:43 Non seulement sa beauté fascine tout l'entourage du roi, mais tous ceux qui l'approchent.
00:51 Elle est une sorte de phare incroyable. Mais au-delà de ça, c'est un personnage qui touche parce qu'elle est dans l'incandescence du cœur.
01:00 Et cette femme-là est remarquable. Je dirais qu'elle est Brigitte Bardot avant l'heure.
01:06 Vous voyez une femme qui vit dans la liberté, qui n'appartient à aucune caste, qui part de rien et qui s'impose par sa personnalité.
01:15 C'est fascinant en soi. Et puis, il y a plusieurs films. Il y a eu celui de Christian-Jacques en 1954 et puis il y a celui de Mai Wen.
01:25 Donc, immanquablement, il nous fallait parler de Madame Dubary.
01:31 Et quelle personnalité, quel parcours, quelle histoire ? On en parle, mais on commence avec une anecdote.
01:38 Vous avez parlé de sa générosité et peu de personnes connaissent cette générosité.
01:42 L'anecdote pour bien planter le décor, pour définir notre personnage.
01:51 Oublions Madame Dubary quelques instants. Et par la pensée, on se transpose dans le vexin, à une époque où le vexin, c'est vraiment le fin fond de la campagne.
02:04 Et dans une ferme, une adolescente, elle a 16 ans. Malheureusement, elle a été emportée par l'Empire d'essence.
02:16 La voilà enceinte, elle s'appelle Apolline et elle accouche dans une grange toute seule, le nourrisson et mort-né.
02:25 Forcément, elle pleure, mais de toute façon, c'est presque pour elle un soulagement.
02:32 Et pour éviter le scandale, elle ne déclare pas le décès de cet enfant mort-né.
02:40 Malheureusement, la vérité est découverte. Elle est traduite devant le tribunal, qui la condamne pour infanticide, la condamne à mort.
02:53 Et Madame Dubary apprend la nouvelle par un courrier qui lui est adressé. Aussitôt, elle se précipite chez le roi, au cabinet du roi.
03:03 Elle lui dit « Sire, Majesté, je vous demande de m'entendre. Une affaire abominable.
03:08 Dans votre royaume, si vous saviez les choses qui se passent, parfois la justice se comporte de façon intolérable.
03:15 Je vous demande de prendre compte de cette histoire. »
03:19 Elle narre ce que je viens d'évoquer. Le roi est touché et lui dit « Madame, je suis enchanté que la première faveur pour laquelle vous me forcez soit un acte d'humanité. »
03:39 Et il accorde la grâce à la petite Apolline.
03:42 Voilà comment Madame Dubary intervient auprès du roi, contrairement à la pompadour qui l'avait précédée quelques années auparavant,
03:53 qui cherchait à inférer dans les affaires politiques, elle à chaque fois qu'elle intervient.
03:59 C'est pour un cas particulier. C'est pour un cas de cœur.
04:02 Et on verra d'ici la fin de l'émission que personne n'a cherché à la sauver, elle. Quel destin !
04:08 On commence par son enfance, c'est parti.
04:11 Alors ce destin incroyable commence dans la honte et cette petite aînée dans la honte.
04:21 Vous allez nous expliquer comment le 19 août 1743.
04:25 « À vos couleurs, en Lorraine, presque dans la clandestinité.
04:30 Bah oui, maman n'est pas mariée et pour cause, car elle est le fruit, cette petite qui apparaît, que l'on va prénommer Jeanne, du nom de sa marraine.
04:43 Alors c'est dans la journée même qu'elle est baptisée.
04:46 Et la petite Jeanne est la fille de Jean-Baptiste Gomart de Vaubernier.
04:51 Alors on dit, tiens, c'est un homme. Oui, c'est un homme, ses origines.
04:54 Mais surtout, il était moine. On le surnommait d'ailleurs Frère Ange.
05:00 Maman étant couturière au monastère, s'est laissée râler à quelques coquineries avec cet homme qui était déjà pratiquement, je dirais, comme on les nomme souvent, vous savez, les moines défroqués.
05:16 Et c'est ainsi que la petite est apparue.
05:21 Les premiers mois, eh bien, on a la chance que cette femme soit aussi belle que sa fille.
05:27 On pourrait prendre la réciprocité.
05:30 Toujours est-il qu'un homme qui est munitionnaire la remarque et la prend sous sa protection.
05:37 Qu'est-ce qu'un munitionnaire ?
05:38 Ce sont ces gens qui font fortune en vendant aux armées ce dont elles ont besoin, et les munitions, et les vivres.
05:47 Et ensemble, ils remonteront à Paris.
05:49 Cet homme étant marié, il a heureusement à ses côtés un personnage qui s'appelle Monsieur Rançon.
05:57 Il lui dit "Du donc, ce serait bien que tu puisses devenir le mari de cette jeune femme."
06:05 Et c'est ainsi que Monsieur Rançon, pour permettre à ce couple illicite d'avoir quelques rapports, sert de couverture.
06:13 Mais il devient effectivement le mari, tant de fois amoureux de son épouse.
06:17 Vous voyez, on est dans des histoires un peu compliquées. Toujours est-il qu'à six ans,
06:21 on choisit de placer la petite dans une éducation très religieuse, donc chez les bonnes sœurs.
06:30 Et là, c'est un institut, enfin un couvent, qui est le couvent de Saint-Or.
06:36 Ce sont les admiratrices du Sacré-Cœur.
06:41 La règle est très stricte.
06:43 C'est un endroit où ce sont des enfants qui doivent obéir, comme il n'est pas permis, la dévotion.
06:50 Mais en revanche, une instruction remarquable qui est digne de celle accordée aux petites de la noblesse.
06:57 Alors qu'est-ce qu'elle apprend ?
06:58 Elle apprend la grammaire, elle apprend à lire merveilleusement bien, à écrire, l'arithmétique, la musique,
07:05 puis forcément les leçons religieuses. Et à tout cela, il y a en coiffe, je dirais, l'histoire.
07:11 C'est donc une jeune fille qui pourra briller aussitôt qu'elle sera dans la vie civile.
07:17 Cette vie civile se présente lorsqu'elle a 15 ans.
07:21 Elle a été tout de suite admirée, et par ses corps religionnaires, elle est tellement douce.
07:27 Elle a toujours le sourire, elle est dans l'insouciance, elle est joyeuse.
07:32 Et puis, veille à ce que chacune, quand ses enfants ont une petite blessure, un petit chagrin,
07:40 retrouve le bonheur de l'existence.
07:45 Et puis, elle est tellement admirable que les sœurs n'ont cessé de la couver.
07:48 Et les résultats scolaires qui sont les siens sont formidables.
07:52 Quant à la 15 ans, on décide de la placer chez un coiffeur.
07:58 Pourquoi un coiffeur ?
07:58 Parce que ça donne un bel élan dans la société.
08:02 C'est un métier qui sort de l'ordinaire, surtout si vous êtes dans une place remarquable.
08:08 Et c'est le cas, c'est l'un des coiffeurs les plus célèbres de Paris.
08:12 C'est une chance, en fait.
08:13 Oui.
08:14 La dextérité, là encore, elle s'impose.
08:16 Mais on ne voit pas ses doigts, on voit son visage, rayonnant, éclatant.
08:22 On voit sa douceur.
08:24 On voit ce sourire qui fleurit en permanence, et les uns et les autres.
08:29 Et surtout le coiffeur.
08:30 Non, et vous avez une veuve, c'est la veuve d'un général.
08:36 C'est un nom compliqué, Madame de Delay de La Garde.
08:41 Ah ben voilà !
08:43 Et quand elle échange quelques propos avec la jeune fille, elle s'aperçoit qu'elle est brillante.
08:48 Elle dit "mais je vous engage, si vous êtes d'accord, comme lectrice, c'est-à-dire demoiselle de compagnie".
08:56 Et dans son salon, c'est l'époque où les gens qui ont un peu de moyens aiment convier ceux qui brillent par l'esprit.
09:05 Et c'est le cas de cette veuve de général.
09:10 Et viennent là de grands aristocrates, des écrivains.
09:16 On la remarque, et aussi les deux frères de la dame en question.
09:24 Vous savez, quand on a la beauté, il y a des tentations.
09:28 Quand on veut être libre, il n'est pas question de buter sur les règles morales.
09:33 Alors elle se laisse aller.
09:35 Mais quand la dame veuve du général apprend qu'elle a de tels comportements
09:43 qu'elle pourrait être digne d'être targuée de gourgandine,
09:46 hop, dehors, je ne peux vous voir ici.
09:49 Et là, elle trouve refuge dans un magasin de mode qui est très à la mode.
09:55 Là encore, elle se distingue tellement qu'elle n'a pas de mal à trouver un bon placement.
10:01 Et c'est chez monsieur Labille.
10:03 Du jour au lendemain, on quadruple la fréquentation.
10:08 Et il y a plus d'hommes que de femmes.
10:10 Là encore, les aristocrates, les écrivains, et les uns et les autres qui essaient de deviser avec elle.
10:19 Dans la semaine, on dort au-dessus de la boutique.
10:23 Mademoiselle Labille, la fille de la maison, est extrêmement douée pour la peinture.
10:30 D'ailleurs, elle se fera connaître Labille-Guillard.
10:33 Et ce qui fait qu'il y a des peintres qui lui rendent visite.
10:36 Et grâce à elle, elle sera en relation entre autres avec Drouet et Pajoux,
10:40 qui réaliseront ses premiers portraits.
10:42 C'est là où on a la chance de pouvoir disposer de cette physionomie rayonnante qui est la sienne.
10:52 Mais le week-end, forcément, elle se laisse aller à quelques rencontres.
10:58 C'est plus fort qu'elle. Elle est libre.
11:00 Libre comme Brigitte Bardot à son époque.
11:03 Et un jour, M. Rançon, que j'ai cité tout à l'heure, son beau-père,
11:10 lui présente un homme qui s'appelle Jean-Baptiste Dubarry.
11:14 Et lui aussi, munitionnaire, mais il a un nombre de trafic.
11:19 On le surnomme le rouet.
11:21 Et cet homme-là, quand il la voit, il est subjugué.
11:25 Il propose à Rançon une mutation en province.
11:30 Et il dit "je garderai votre épouse et votre belle-fille à mes côtés pour garder ma maison".
11:36 Car il se trouve que cet homme qui est marié a laissé tomber sa femme depuis des années.
11:40 Il s'occupe maintenant de son petit garçon qu'il a placé comme page du roi.
11:45 Et donc, il dit "il faut que ma maison puisse être bien tenue".
11:49 Et c'est ainsi qu'elle s'installe avec cet homme.
11:52 Et là encore, ils vont monter un de ces salons,
11:56 tel celui de la veuve du général, où tout le monde viendra,
12:00 y compris le duc de Richelieu,
12:02 le duc de Richelieu de la famille du cardinal,
12:07 l'un des descendants, petits-neveux.
12:09 Et cet homme-là, grand libertin de réputation,
12:12 connaîtra quelques étreintes avec Jeanne.
12:16 L'histoire va durer pendant trois ans.
12:18 Et c'est le lieu d'effervescence de la capitale.
12:21 Une beauté exceptionnelle et conquérante.
12:24 C'est ce qu'on va voir maintenant.
12:25 Donc, c'est par l'intermédiaire de son beau-père, M. Rançon,
12:33 qu'elle rencontre l'homme qui va finalement changer tout son destin.
12:37 Il s'appelle Jean-Baptiste Dubary.
12:39 Alors oui, ils ont monté ce salon.
12:43 Il y a ces rencontres. Il en est fier.
12:45 C'est incroyable.
12:46 Il aime se promener avec elle.
12:48 Il sait que forcément, il y a les tentations auxquelles elle succombe.
12:52 Mais il n'est pas contre.
12:54 On le surnomme "le roué" parce que c'est l'homme de toutes les escroqueries.
12:58 Il n'y a pas un domaine dans lequel il ne se laisse aller à quelques petites corruptions.
13:03 Mais au début, il ne s'est pas présenté comme un corrompu.
13:06 Non, non, non.
13:06 Il l'a séduit.
13:07 Non, mais c'est…
13:08 Non, mais ils se sont séduits mutuellement.
13:10 Ce qui est extraordinaire dans tout ça,
13:12 certains pourraient y voir, osons le terme, le vice.
13:15 Ce n'est pas le vice.
13:16 C'est une vie en incandescence.
13:17 C'est une vie en légèreté.
13:20 À la fois, on se promet, mais on se promet l'instant et non le lendemain.
13:24 Mais lorsque l'on est ensemble, on est dans la sincérité.
13:29 En revanche, bon, bien, les vents vous portent
13:31 et on ne sait jamais jusqu'où ils vous conduisent.
13:34 Et quand il y a quelque chose de plus chatoyant, éventuellement, on se laisse aller.
13:39 Alors parlez-nous de ce Jean-Baptiste Edubari.
13:41 Assez particulier.
13:42 Très particulier.
13:44 Dans son salon, il y a à la fois les intellectuels qui viennent,
13:50 il y a Crébillon Fils, il y a tous les grands intellectuels.
13:53 Il y a aussi des jeux, parce que ces gens ont le goût d'une sorte de fête permanente.
14:01 Et puis de temps en temps, forcément, derrière un rideau,
14:04 on mène quelques trafics qui permettent l'enrichissement.
14:07 Et puis il y a les sorties au théâtre.
14:09 Et c'est comme ça qu'un jour, il se présente avec elle
14:13 dans les loges de la comédie italienne.
14:18 On a l'impression que la scène, ce sont les loges
14:21 et que les comédiens n'ont plus à se produire.
14:25 Tout le monde est là dans l'ébahissement,
14:28 y compris ceux qui depuis longtemps filent M. Edubari,
14:31 à savoir les services de police.
14:34 Car ce personnage a beau avoir de très bonnes relations,
14:37 il est bien de tenir quelques dossiers sur lui.
14:40 On ne sait jamais, ça peut servir.
14:43 Et là, dans les rapports de police, c'est extraordinaire
14:46 parce qu'on a un homme commissaire qui écrit
14:50 "Je n'ai jamais rien vu en ma vie de plus agréable,
14:55 de plus céleste que cette dame."
14:58 Vous vous rendez compte ?
14:59 Un policier, un homme qui est habitué à connaître
15:03 toutes les mondaines, demi-mondaines, gourgandines,
15:07 eh bien il la trouve au-delà de celles qui paraissent
15:12 et qui font courir la capitale.
15:15 On les retrouve ensuite à l'opéra.
15:18 Même chose, la parution, la parution, la parution.
15:22 Et dans tout cela, comme cet homme finit par se lasser,
15:26 ça fait trois ans qu'ils sont ensemble,
15:28 qu'il voit les effets.
15:31 Depuis longtemps, il en est conscient,
15:33 mais il se dit qu'on pourrait peut-être aller plus loin dans l'ambition.
15:36 Le roi a perdu Madame Pompadour depuis quelques années maintenant.
15:41 On sait qu'il est dans la mélancolie.
15:45 Et on imagine que s'il était au contact de cette femme,
15:49 peut-être qu'il pourrait se passer quelque chose.
15:52 Alors, par l'intermédiaire de Le Bel, le valet du roi,
15:56 Richelieu fait en sorte que lors d'une de ses sorties
16:01 dans la Galerie des Glaces, où le roi passe en majesté,
16:04 elle soit au premier rang.
16:06 Alors, vous allez nous raconter justement cette rencontre
16:08 qui a complètement basculé, bouleversé la vie de celle
16:13 sur qui tout le monde se retourne.
16:15 La rencontre, la rencontre avec le roi.
16:17 Alors, comment se passe justement cette rencontre ?
16:25 Imaginez, le roi sort du conseil.
16:28 Vous avez tous les courtisans qui sont alignés.
16:31 Chacun guigne l'instant où éventuellement il baissera la tête,
16:36 ce qui montrerait qu'il est distingué, qu'il est repéré.
16:39 Mais là, il ne voit personne.
16:41 C'est comme s'il y avait un soleil qui brillait au milieu de ces colonnes.
16:47 De chaque côté, il la regarde, il est comme foudroyé.
16:51 Et lorsque il est passé, il appelle Le Bel, il lui dit
16:55 "il faut que vous me disiez qui est cette dame, il faut la retrouver".
16:59 Le Bel, qui le complice, n'a aucun mal à lui fournir les renseignements.
17:03 Il demande à ce qu'elle se présente devant le roi.
17:07 Là, on n'a pas les détails.
17:08 Ce que l'on sait, c'est que rapidement, elle devient la femme
17:13 qui apparaît dans les relations permanentes de Louis XV.
17:19 Reste que Choiseul dit "mais quelle est cette mauvaise relation ?
17:24 C'est une relation dégradante".
17:27 Choiseul, c'est pratiquement le Premier ministre.
17:30 Il souhaite qu'elle disparaisse.
17:32 Il dit "mais de toute façon, ça sera une de ces consommations éphémères".
17:35 Eh bien non, ça dure, ça dure, ça dure.
17:38 Et le roi, déjà, imagine qu'il aimerait la présenter à la cour,
17:43 qu'elle puisse paraître à ses côtés.
17:45 Le drame, c'est que pour la présenter officiellement comme maîtresse,
17:49 il faut qu'elle ait un statut et qu'elle soit d'abord mariée,
17:52 ce qui n'est pas le cas.
17:53 Et Dubarry, lui, il a une femme, même s'il l'a abandonnée il y a longtemps.
18:00 Il a un garçon qui s'appelle Adolphe, je vous l'ai dit,
18:04 qui a été placé d'ailleurs comme page du roi.
18:07 Et alors, comment faire ?
18:08 C'est simple, il a un frère qui s'appelle Guillaume,
18:11 il est dans le Languedoc, le balourd, personne n'a voulu convoler avec lui.
18:16 On lui promet une affaire extraordinaire,
18:20 il suffit qu'il se plie aux exigences.
18:22 On rédige un contrat de mariage complètement leunen,
18:25 elle a tous les avantages,
18:27 c'est-à-dire qu'elle a l'argent, la liberté, etc.
18:29 On comprend que c'est véritablement un rôle de figuration
18:33 auquel il devra se tenir, il accepte tout.
18:36 Mais maintenant, il y a un autre problème,
18:38 c'est que le mariage est bien exécuté,
18:41 mais il faut aussi qu'elle puisse être en splendeur
18:45 par rapport à une dame de la cour et richelieu, à une parente,
18:50 la comtesse du Berne, et elle sera l'une des dames d'honneur.
18:54 C'est comme ça qu'on pourra la présenter.
18:56 Reste qu'il est impatient le roi,
18:59 mais un grand drame, c'est que Marie Lexinsca, la reine, décède.
19:05 Ça fait longtemps qu'ils étaient en complicité,
19:07 ne croyez pas qu'il la trompe comme ça.
19:09 C'est que d'elle-même, elle lui a interdit sa chambre il y a des années de cela,
19:14 car tous les ans, comme elle dit, tous les ans,
19:17 grosse, grosse, grosse, elle en avait assez,
19:19 et elle lui a dit « Dorénavant, nous ne serons plus que des amis ».
19:24 Et il l'émet tendrement, il a beaucoup de chagrin,
19:28 il se retire à Compiègne, où il fait venir la comtesse du Bari,
19:36 et la présentation se fera lorsque le deuil officiel est terminé.
19:43 Il sort du cabinet, devant lui, on a la comtesse du Béarn qui est là,
19:51 à ses côtés, cette dame qui l'attendait forcément,
19:55 elle lui fait six révérences, elle est d'une élégance,
19:59 toute la cour s'extasie.
20:01 Il est vrai que, par exemple, Madame de Pompadour,
20:04 elle n'était pas toujours dans cette capacité à paraître,
20:09 elle avait quelque chose d'un peu moins étincelant.
20:12 Et là, tout le monde est conquis.
20:15 Il la fait même venir quand il passe les troupes en revue.
20:19 Alors il est là, sur son cheval, avec à ses côtés le dauphin,
20:25 le futur Louis XVI, qui est tout jeuneau,
20:28 et elle, elle est dans un phathéon, et on lui rend les hommages.
20:33 Les troupes sont au garde-à-vous.
20:36 Le soir, elle organise un formidable dîner,
20:38 tous les officiers se précipitent,
20:40 choiseul et furieux, en disant "ce n'est pas digne de vous, messieurs,
20:44 ce n'est que la maîtresse du roi".
20:48 Mais il n'en reste pas moins,
20:50 que le roi, apprenant le mécontentement de son ministre,
20:54 le tense, et il dit "dorénavant, je vous l'ai dit,
20:57 je veux entendre que des éloges sur Madame du Paris".
21:03 Voilà une jeune fille qui n'avait aucun atout au départ dans la vie
21:08 et qui se retrouve là, présentée à la cour.
21:10 On verra dans la deuxième partie comment elle mène une vie
21:13 de presque reine, grandeur, mais grandeur et décadence.
21:17 On verra comment elle termine Guillotinée,
21:20 dans quelles circonstances, dans un instant.
21:22 La deuxième partie du grand destin de Jeanne du Barry.
21:24 Retour sur le grand destin de Jeanne du Barry.
21:30 Dans la première partie, on a vu comment elle n'avait aucun atout
21:33 pour arriver jusqu'à la cour et être présentée à la cour du roi.
21:36 Et dans cette deuxième partie, on verra évidemment sa fin terrifiante.
21:40 On verra la mort du roi qui a beaucoup marqué
21:42 et révélé aussi sa personnalité.
21:45 Et on commence avec cette deuxième partie, Marc Menon,
21:47 avec sa vie, sa vie de presque reine à la cour auprès de Louis XV.
21:52 Alors Marc Menon, comment mène-t-elle cette vie de presque reine ?
22:02 Déjà, très rapidement.
22:03 Alors, dans un premier temps, elle hérite, malheureusement pour elle,
22:08 celui qui est servi d'intermédiaire, le valet Le Bel est décédé.
22:12 Elle hérite de son appartement dans les combles.
22:14 Et rapidement, le roi l'anniche au second étage de Versailles,
22:18 juste au-dessus de son appartement, derrière la bibliothèque.
22:22 Il y a un petit escalier qui permet à l'un et à l'autre d'aller et venir
22:28 selon les pulsions qui les animent.
22:30 En toute clandestinité.
22:32 Rien n'est trop beau pour elle.
22:34 C'est-à-dire que des bijoux,
22:36 pratiquement tous les jours, vous avez un bijoutier qui se présente
22:41 et qui lui montre ses dernières créations.
22:44 Si soudain, elle a le cœur, le roi achète.
22:48 Il lui offre Louvcienne, un petit château qui se trouve à quelques kilomètres de Versailles.
22:55 Elle y fera ériger une sorte de temple d'amour
22:59 et dans lequel, avec le roi, ils auront simplement quelques intimes.
23:05 Il hérite aussi du petit trianon qui avait été construit pour Madame de Pompadour.
23:10 Le matin, elle se lève à 9h et apparaît un petit bonhomme qui écarte,
23:15 c'est un lit avec quatre grandes colonnes, il écarte les rideaux.
23:20 Ce petit bonhomme, elle l'a rencontré quand il avait 7 ans.
23:23 Oh, quel destin !
23:26 Il est de couleur, il est né au Bengale
23:29 et c'est un officier anglais qui l'a ramené avec lui.
23:33 Elle l'a trouvé tellement mignon, tellement scintillant
23:37 qu'elle a voulu l'adopter et le voilà à ses côtés.
23:42 - Et rappelons qu'elle n'a pas d'enfant et qu'elle n'en a jamais eu.
23:44 - Non. Alors, il y a le fils d'Hubarry,
23:47 qu'elle couvre, Adolphe, vous savez que je l'ai cité tout à l'heure.
23:49 Elle le rat toujours en précaution, si je puis dire, en amour.
23:54 Elle veillera toujours sur son existence.
23:56 Et puis, il y a ce petit bonhomme.
23:59 Elle lui fait, donc déjà, il sera baptisé.
24:01 Elle est samaraine. Il s'appelle Zamor.
24:04 Une éducation.
24:06 L'arithmétique, la grammaire, la rhétorique et l'histoire.
24:12 C'est incroyable pour un domestique.
24:15 Et il vient, donc, le matin, il est le premier à se présenter.
24:20 Il tire les rideaux après, lorsqu'elle a eu le plaisir
24:24 de se détendre dans un bain à peine tiède,
24:26 car elle prouve que le froid raffermit les chairs.
24:32 Il lui porte le petit café.
24:35 On a la cérémonie de la coiffure.
24:38 N'oubliez pas ce que Marie-Antoinette a réussi à imposer
24:42 comme style, ces coiffures qui n'en finissent pas.
24:45 Avec Marie-Antoinette, ça ne se passe pas très bien.
24:47 Dès la première rencontre, lorsque la jeune dauphine
24:53 aperçoit cette dame en splendeur, elle dit "qui est-elle ?"
24:57 et le roi est content de noter qu'elle la trouve effectivement
25:01 très charmante, mais quand elle insiste pour savoir
25:05 quel est le rôle qu'elle tient auprès du roi,
25:09 c'est pour s'amuser.
25:11 Là, elle la condamne littéralement.
25:13 Elle dit "alors, je la hais".
25:15 Et elle ne cesse de vouloir lui nuire,
25:17 au point que sa mère, l'impératrice, lui écrit
25:21 en lui demandant d'avoir un tout petit peu de mesure.
25:24 Revenons à la journée.
25:26 Lorsque la coiffure est terminée,
25:30 il y a le roi qui se présente, il s'incline devant elle.
25:34 Ensuite, le grand dîner.
25:37 Le dîner, c'est le déjeuner pour nous.
25:39 Et l'après-midi, le salon où on joue de la musique.
25:44 Un orchestre est là de temps en temps.
25:46 Elle accompagne, elle joue merveilleusement bien.
25:49 Elle chante aussi.
25:51 Et puis, les écrivains se présentent.
25:55 Petite promenade dans une très belle calèche.
26:00 Tout le monde est là, et le petit zamor
26:03 qui ne cesse de l'accompagner.
26:05 Des singes, des animaux, car elle adore les perroquets,
26:10 être entourée.
26:11 Et à chaque fois, eh bien le roi, je vous dis,
26:14 chaque jour, cherche à lui offrir quelque chose
26:18 qui la marque.
26:20 Il est vrai que sans lui, sans doute que cet homme
26:23 serait tombé dans la déprime la plus totale.
26:26 Et il la remercie.
26:29 Reste que ses amours enchantressent
26:31 avec les séjours à Louvcienne.
26:34 À Louvcienne, elle est adorée.
26:36 Pourquoi elle est adorée ?
26:38 Parce que sous la France de Louis XV,
26:41 il y a des périodes de famine,
26:43 il y a des périodes où la population est dans la souffrance.
26:47 Eh bien elle, elle fait en sorte qu'ils aient
26:50 les victoires nécessaires pour survivre au quotidien.
26:52 S'il y en a un qui est dans la peine, qui est malade,
26:55 aussitôt, elle porte secours.
26:57 C'est-à-dire que d'un côté, c'est vrai qu'elle est très dépensière,
26:59 mais c'est son insouciance.
27:01 Mais à côté de cela, elle veille aux plus démunis.
27:06 Et notre Madame Dubary se retrouve un jour
27:11 au petit trianon avec le roi.
27:14 Le roi qui se sent de plus en plus fatigué.
27:18 Néanmoins, il mène une grande chasse avec le dauphin.
27:23 Il revient, il a des maux de tête.
27:25 Il se couche, se plaint un peu.
27:29 Elle est à ses côtés, passe la nuit à le veiller.
27:32 Mais le lendemain matin, ça ne va pas véritablement mieux.
27:37 On va voir que ça ne va pas véritablement mieux,
27:39 mais elle, elle restera auprès de lui.
27:43 La mort du roi.
27:45 Donc, vous disiez qu'ils ont l'habitude de se retrancher
27:53 au petit trianon.
27:54 Nous sommes en mai 1774.
27:56 Ce sera la dernière fois qu'ils se retranchent là-bas.
27:59 Oui, cette chasse terrible, les fièvres.
28:02 Le lendemain, le roi l'a encore porté par sa présence.
28:07 Il a dit "mais ce n'est pas grave, ça va passer".
28:10 Et malheureusement, ben non.
28:13 Les médecins se convoquent.
28:15 Rapidement, on en aura 18 à ses côtés avec les apothicaires,
28:19 chirurgiens.
28:20 Ils se consultent.
28:22 Ils sont un peu perdus.
28:24 Et il y a l'un d'entre eux qui dit "mais, Sire,
28:28 quand on est malade, c'est à Versailles".
28:29 Alors à Versailles, hop, préparez le carrosse
28:33 et on regagne le château.
28:37 Les décisions sont prises, première saignée.
28:42 Pas d'amélioration.
28:44 La nuit, elle reste à ses côtés.
28:48 Et puis, on s'aperçoit qu'il y a des petites pustules
28:52 qui sortent de la peau, qui émergent.
28:56 Et c'est donc le diagnostic terrible, la petite vérole,
29:01 à savoir la variole.
29:03 On tente de cacher au roi la réalité.
29:06 Il a envie d'être trompé.
29:08 Alors il fait comme s'il ne se rendait pas compte.
29:10 En revanche, on demande aux dauphins et à la dauphine
29:14 de ne plus se présenter.
29:15 La dauphine, elle a été vaccinée à la cour à Vienne.
29:19 Mais le petit dauphin, il n'est pas dans ce cas.
29:21 Extrêmement contagieux.
29:23 Extrêmement contagieux.
29:24 Et pour autant, Madame Dubarry, elle veille la nuit.
29:28 Les filles de Louis XV aussi, c'est peut-être la première fois
29:31 qu'elles sont en osmose ensemble.
29:34 Car elle la détestait, cette moins que rien.
29:37 Il n'y a pas d'autre terme pour elle.
29:39 C'est elle qui a accaparé leur père.
29:41 Et pour autant, il y a cette veille et le roi décline.
29:47 Il demande à ce qu'elle s'en aille.
29:51 Il l'appelle quand il est conscient que c'est cette maladie
29:54 qu'il a frappée et qu'il est perdu.
29:57 Alors il lui dit, Madame, il ne faut pas que le scandale de Metz
30:02 se reproduise à Metz.
30:04 Il avait une maîtresse et les dévots avaient dit
30:08 que c'était la faute de sa conduite qui lui avait valu la maladie.
30:14 C'était Dieu qui le punissait.
30:16 C'est un véritable scandale.
30:18 Il avait loué la France, le royaume à Marie pour en sortir.
30:24 Et là, par conséquent, il ne faut pas retomber dans ses travers.
30:28 Et qu'est-ce qu'elle va devenir ?
30:29 Elle se retire.
30:30 Elle se retire au château de Rueil.
30:33 Il décède le dimais.
30:34 Passons sur les circonstances qui le voient dépérir.
30:38 Et elle, c'est par une escorte de la marée chaussée
30:44 qu'elle est cueillie le 12 mai.
30:46 Et on lui dit, le roi est mort.
30:47 Mais le roi, la veille de son décès, avait signé un décret
30:52 comme quoi elle devait être placée dans un couvent.
30:56 Et la voilà, qui est acheminée plus loin que la nid là-bas,
31:00 en Seine-et-Marne, accueillie.
31:02 Elle retrouve les conditions de sa jeunesse, l'austérité.
31:07 Elle est dans une cellule, la cellule la plus éloignée.
31:11 Mais elle va les conquérir, ses sœurs.
31:13 Rester à leur contact pendant deux ans et demi,
31:16 les premiers mois, elle n'a même pas le droit à une visite.
31:18 Et puis, il y a quelques tolérances à la cour.
31:22 Celle qui veille à ce qu'il n'y ait pas la moindre tolérance,
31:27 c'est Marie-Antoinette.
31:29 Elle écrit, cette dame ne mérite pas d'être choyée.
31:35 Vous vous rendez compte, cette haine, on se demande pourquoi.
31:39 Toujours est-il qu'il y a un homme qui vient quand il obtient l'autorisation,
31:43 c'est le duc de Brissac.
31:45 C'est le colonel des Suisses, la garde rapprochée de Louis XVI.
31:49 Il est aussi le gouverneur de Paris.
31:51 Il a toujours été amoureux d'elle,
31:53 mais forcément, il ne pouvait pas se déclarer.
31:56 Et là, elle lui dit, Madame, je suis à votre service.
31:59 Il se laisse aller à quelques confidences.
32:05 Et lorsqu'enfin, elle sort de l'office,
32:09 deux ans et cinq mois plus tard,
32:11 eh bien, il l'accueillera chez lui.
32:13 Et puis, elle regagne enfin l'ouvre sienne après une petite période tampon.
32:19 Car quand même, même si Louis XVI a signé la libération,
32:23 on estime qu'elle ne peut pas encore regagner complètement sa demeure.
32:28 - Quelle vie elle mène à l'ouvre sienne, finalement ?
32:30 - Une véritable cour.
32:32 C'est un petit château.
32:33 Elle a ses intimes, toujours des gens qui sont extrêmement brillants.
32:38 Elle a cette capacité, elle a le choix,
32:41 puisque chacun se presse pour être à ses côtés.
32:47 Il y a la joie, il y a le jeu, il y a le théâtre.
32:49 - Il y a l'esprit.
32:51 - Tout pour passer des instants mirifiques.
32:55 Les petites promenades, les animaux, et toujours sa mort,
32:58 qui est à côté pour veiller sur elle.
33:00 Il y a sa belle-sœur aussi, que l'on surnomme Sean,
33:03 et qui a aussi une grande incandescence d'esprit.
33:06 Et tout ce monde voit le duc de Brissac apparaître de temps en temps,
33:11 une histoire extraordinaire.
33:14 Je dirais que ce sont les jours heureux.
33:16 Ce sont les jours où elle est dans la plénitude.
33:20 Elle est encore dans la jeunesse flamboyante.
33:25 Les avantages financiers de sa situation,
33:29 malheureusement la révolution surgit avec ce que cela impose,
33:35 même si dans un premier temps elle n'est pas directement concernée,
33:39 mais reste que dans les restrictions de budget
33:44 qui sont ceux votés par l'Assemblée,
33:48 il y a les droits que touchaient les aristocrates.
33:52 Et par conséquent, un manque à gagner.
33:55 Elle est obligée de vendre une partie de ses bijoux que le roi lui offrait.
34:00 Mais les bijoux, ce sera plus grave que cela.
34:03 - Et oui, puisque les bijoux, le 15 janvier 1791,
34:07 elle est victime d'un vol.
34:09 - Un vol terrible.
34:11 Alors, elle est partie rendre visite au duc de Brissac.
34:18 C'est pour tirer les rois.
34:20 C'est étonnant, on est en 1791, la révolution,
34:24 le roi est toujours sur le trône,
34:26 mais avec des pouvoirs qui sont plus que limités,
34:29 puisqu'on l'appelle uniquement "Monsieur Vétho".
34:32 Il a le droit de s'opposer à des décisions prises, mais c'est tout.
34:35 Et donc, lorsqu'au matin de cette soirée
34:40 se présente un gentil homme bouleversé
34:43 qui lui annonce que les bijoux ont été volés à Louvcienne,
34:48 elle cavale, si je puis dire, avec le carrosse,
34:52 chevaux au grand galop,
34:54 et elle découvre la chambre,
34:58 la petite commode qui est en soi un joyau,
35:01 qui a été littéralement brisée,
35:03 il n'y a plus de bijoux.
35:06 Tout a disparu, c'est une véritable fortune.
35:09 Elle décide de faire venir un joaillier,
35:12 avec Morin, qui est celui, son régisseur,
35:17 établir la liste potentielle de ce qui a disparu.
35:21 Oui, parce que pour elle, c'est tellement violent
35:24 qu'elle veut absolument retrouver ses bijoux,
35:26 parce que c'est toute sa fortune, c'est toute sa vie.
35:28 Bien évidemment.
35:29 Donc elle fait redessiner les bijoux pour dire "wanted".
35:32 Oui, exactement.
35:33 Avec des affiches et des placards qu'elle envoie dans toute l'Europe,
35:37 parce qu'elle sait bien qu'il y a des exilés
35:40 et que ça peut donc aller jusqu'à Bruxelles, Londres.
35:44 Et quelques jours plus tard, au mois de février,
35:46 il y a un diamantère à Londres qui s'appelle Lyon,
35:50 et qui dit "mais trois individus se sont présentés chez moi
35:54 et ils possédaient les bijoux".
35:57 Il leur demande de revenir s'ils ont un trésor encore plus important.
36:03 Forcément, il se laisse attraper.
36:05 Les voilà arrêtés.
36:08 On n'a pas le temps de tout raconter de cette histoire
36:10 qui va durer pratiquement jusqu'à sa mort.
36:13 Elle est obligée de faire des allers-retours en Angleterre.
36:16 Ce qui est intéressant, c'est que cette histoire de vol de bijoux
36:19 a attiré l'attention sur elle.
36:20 Forcément.
36:21 La Révolution, elle est morale.
36:23 Et en particulier, nombre de ceux qui se distinguent
36:27 sont comme Robespierre, des apologistes de la vertu.
36:32 Donc une fille de mauvaise mœurs, qui en plus était maîtresse du roi,
36:37 elle est satanique.
36:38 Il faut la punir pour ce qu'elle était.
36:41 Il n'y a pas que cela.
36:43 C'est que vous avez les jaloux, les envieux,
36:46 et qui cherchent à profiter de la situation
36:48 pour récupérer éventuellement la fortune.
36:50 Mais il y a quand même cette insouciance qui la gouverne.
36:54 L'amour aussi avec le duc de Brissac.
36:59 Mais là encore, ce sont les événements qui vont gâter son existence.
37:04 Il y a le 10 août 1792, l'envahissement des Tuileries.
37:09 Brissac, qui est le chef des gardes des Suisses.
37:12 Et puis le roi qui se trouve arrêté, conduit au temple.
37:17 Brissac, quelques jours plus tard, lui aussi est arrêté,
37:22 conduit en prison à Orléans.
37:24 Elle lui rendra quelques visites avec des escapades à Londres
37:28 pour tenter toujours de retrouver son trésor,
37:31 ce qui lui permettra de croire en son avenir.
37:34 Et puis, la convention d'Anton,
37:38 qui décide de faire transférer d'Orléans le duc de Brissac.
37:44 Celui qui est chargé de l'escorte, c'est un véritable salopard.
37:47 Il s'appelle Fournier.
37:49 Et Fournier est un transigeant.
37:51 Il a envie de bouffer, si je puis utiliser un terme trivial,
37:56 bouffer de l'aristo, bouffer des gens comme de Brissac.
38:01 Ils sont 53 placés dans cette charrette.
38:04 Dans la troisième, il y a Brissac.
38:07 Et sur la route, on crie "à mort, à mort, à mort".
38:10 Et quand ils arrivent à Versailles, parce qu'il a fait dérouter cette cohorte,
38:15 la foule se précipite.
38:17 On saute, on saute sur la charrette de Brissac.
38:24 Et là, avec des pics, on le transperce.
38:27 On arrache son cœur, on arrache ses viscères,
38:31 on place la tête sur une autre pic.
38:34 Et alors, embrumé par l'alcool,
38:38 on court en chantant le "ça ira, ça ira".
38:41 On court jusqu'à Loucienne, où on arrive nuitamment.
38:46 On chante, on bouscule les gardes et on entre dans le salon.
38:52 On fait rouler la tête de Brissac devant la comtesse,
38:58 Madame Dubarry, qui s'effondre en pleurs.
39:01 Et tout se resserre autour de la comtesse Dubarry.
39:04 On va voir sa fin terrifiante.
39:06 Longtemps, la comtesse Dubarry refuse de croire
39:14 que la terreur révolutionnaire l'emportera.
39:17 Et pourtant, le 6 décembre 1793, la voilà traduite
39:22 devant le tribunal révolutionnaire.
39:25 Le sinistre fou qui est un vilain.
39:27 Elle était à Sainte-Pélagie, la prison.
39:32 Et un jour, un prêtre se présente, c'est un prêtre irlandais.
39:35 Elle dit "Madame, je peux vous faire évader".
39:40 Elle dit "mais il faut que nous soyons deux".
39:42 Elle pense à la fille de Brissac,
39:44 qui elle, se trouve plus loin dans le nord
39:47 et qui a été arrêtée aussi.
39:49 Et lui dit "mais je ne peux en libérer qu'une seule".
39:51 Alors que ce soit Madame de Montemars.
39:54 Est-ce son insouciance ?
39:55 Est-ce que c'est son optimisme ?
39:57 Déjà par deux fois, elle a réussi à échapper à la prison
40:00 en écrivant à la convention.
40:02 Toujours est-il que là, elle est traduite
40:04 devant ce sinistre fou qui est un vil.
40:07 Qui va mener une plaidoirie réquisitoire, terrifiant.
40:10 Et alors, non seulement il lui reproche,
40:14 eh bien ses séjournages en Londres,
40:16 ça signifie bien qu'elle était parmi les émigrés.
40:19 Mais pourquoi serais-je revenu alors ?
40:21 On ne veut pas l'entendre, mais ce qui est le plus étonnant,
40:24 c'est qu'il la catalogue en messaline.
40:27 Et il dit "le libertinage et les mauvaises mœurs,
40:31 ce sont les plus grands ennemis de la Révolution.
40:35 Nous avons un peuple du bonheur, un peuple verteux".
40:37 Vous vous rendez compte ?
40:38 C'est-à-dire que c'est pour les "mauvaises mœurs"
40:41 qu'on lui demande sa tête.
40:43 Son avocat, qui est le même que celui de Marie-Antoinette,
40:48 ne peut rien pour elle et on la condamne à mort.
40:52 L'exécution doit se faire dès le lendemain.
40:56 Au petit matin, elle tente une manœuvre de subversion en disant
41:00 "mais je sais où sont mes bijoux, ceux que l'on n'a pas retrouvés.
41:04 Allez les chercher, laissez-moi ce temps".
41:07 On ne lui laisse pas le temps à 4h de l'après-midi.
41:10 On la conduit jusqu'à la place de la Révolution
41:16 où la guillotine a été dressée.
41:19 Quand on lui a annoncé la sentence, elle est tombée, évanouie.
41:22 Un garde l'a saisie, l'a placée dans ses bras.
41:25 Et là, elle est toujours prostrée.
41:27 Quand on la monte sur l'échafaud, on l'allonge sur la planche.
41:33 Elle pousse un hurlement de bête fauve.
41:37 Elle ne tient pas du tout la phrase que certains colportent.
41:43 "Bourreau, bourreau, laissez-moi encore quelques minutes".
41:46 Non, ce n'est qu'un cri de douleur.
41:50 Et la tête tombe.
41:51 Madame Dubarry s'en va.
41:53 Elle n'a que 50 ans.
41:55 C'était le 8 décembre 1793.
41:59 Alors, ce qu'on peut retenir de l'émission,
42:01 Néjeanne Bécu, fille naturelle d'une couturière et d'un moine.
42:05 À 6 ans, elle est placée chez les religieuses
42:07 et bénéficie d'une excellente instruction
42:09 dans les rigueurs de la règle.
42:11 À 16 ans, d'une beauté éblouissante,
42:14 elle est engagée comme lectrice par une aristocrate
42:17 et renvoyée deux ans plus tard pour excès de galanterie.
42:21 Alors, elle emménage avec Jean-Baptiste Dubarry.
42:23 Elle tient un salon qui attire les aristocrates,
42:25 les artistes, les financiers, les libertins.
42:27 Et dès sa première apparition à Versailles,
42:30 dans l'anonymat de la foule, Louis XV est foudroyé par sa vue.
42:34 Maîtresse de Louis XV jusqu'à sa mort,
42:37 une passion de 6 ans.
42:38 Et puis, le 8 décembre 1793,
42:42 elle est exécutée place de la Révolution
42:44 après avoir été accusée de lien contre-révolutionnaire
42:47 et coupable de mœurs.
42:49 Elle est donc exécutée.
42:50 Ainsi va la vie de la comtesse Dubarry.
42:53 Mais vous avez un livre à nous proposer.
42:55 La comtesse Dubarry, du duc de Castries,
42:57 s'écroustillant.
42:58 Il y a beaucoup de petites anecdotes.
43:00 On revit avec elle, dans sa splendeur,
43:02 dans son insouciance.
43:04 Merci l'insouciance jusqu'au bout.
43:06 Merci Marc Menand pour ce récit.
43:08 Excellente suite de programme sur CNews.
43:09 Merci à tous.

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