SMART PATRIMOINE - Enjeux patrimoine du jeudi 25 mai 2023

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Jeudi 25 mai 2023, SMART PATRIMOINE reçoit Vincent Bodin (Directeur adjoint au développement, Fondation de France)
Transcript
00:00 *Générique*
00:04 Et c'est parti pour Enjeu Patrimoine aujourd'hui, retour sur le passage de l'ISF à l'IFI.
00:09 Comment cette réforme fiscale a-t-elle modifié les comportements des donateurs ?
00:13 Il semblerait qu'il soit moins avantageux de faire des dons caritatifs
00:16 et pourtant les chiffres montrent que le montant global des dons augmente.
00:19 En 2021, paradoxe, nous faisons point aujourd'hui avec notre invité Vincent Baudin,
00:24 directeur adjoint marketing et développement à la Fondation de France.
00:27 Bonjour.
00:27 Bonjour.
00:28 Bienvenue dans Smart Patrimoine, Vincent Baudin. Merci beaucoup de nous accompagner.
00:31 Ma première question est simple, grosso modo.
00:34 Combien de ménages sont in fine sortis du champ de l'impôt sur la fortune après cette réforme ?
00:40 La réforme de l'ISF à l'IFI avait fait que, comme il n'y avait plus que le patrimoine immobilier qui était assujetti,
00:47 c'est près de deux tiers des foyers en France qui étaient assujettis à l'ISF qui ne l'étaient plus à l'IFI.
00:53 Et puis pour ceux qui restaient assujettis, ils payaient moins d'impôts puisque c'était seulement sur l'immobilier.
00:58 Et c'est vrai que la conséquence que ça a eue pour les dons qui étaient attachés à cet impôt,
01:04 ça a été aussi une baisse significative pour le secteur global.
01:09 Il y a eu une baisse d'environ 58 % entre 2017 et 2018 des dons réalisés au titre de l'ISF puis de l'IFI.
01:18 Quelle est la différence entre les foyers restés imposés sur la fortune vs. IFI,
01:23 le taux appliqué aux dons caritatifs, pour qu'on ait un peu une idée ?
01:27 Alors le taux, il n'y a pas une si grande différence que ça puisque quand on donne à une organisation au titre de l'impôt sur le revenu,
01:35 la réduction minimum est de 66 %, 75 % pour d'autres mêmes organisations et la réduction pour l'IFI ou l'ISF est de 75 %.
01:46 Donc il y a au maximum neuf points de différence.
01:49 Mais c'est vrai que certains donateurs profitaient de la réduction qu'ils avaient sur l'IFI
01:54 pour à la fois déduire de leur impôt sur le revenu et en plus de leur ISF.
01:59 Voilà ce qui se cachait derrière.
02:02 Comment on explique alors que la générosité, c'est ce qu'on disait tout à l'heure,
02:04 se concentre de plus en plus sur les niveaux de revenus les plus importants ?
02:08 Oui, vous le disiez en introduction, si on regarde l'évolution des dons en France,
02:14 des montants donnés par les Français, c'est en croissance.
02:16 Au global, c'est en croissance ?
02:18 D'environ 3 % chaque année.
02:21 Il y a eu une vraie accélération des dons lors de la crise sanitaire
02:24 où les Français ont été très généreux.
02:26 Ça a été le cas aussi en 2022 avec le conflit en Ukraine
02:32 où les Français ont répondu massivement à l'appel à la générosité des organisations.
02:36 Ça a été le cas à la Fondation de France quand on s'est mobilisé pour aider le peuple ukrainien.
02:40 On le voit encore en 2023 malgré la crise du pouvoir d'achat et de l'inflation
02:45 avec les séismes en Turquie, en Syrie où les Français se sont encore massivement mobilisés.
02:50 Il y a de plus en plus de montants donnés.
02:54 Mais quand on regarde dans le détail et qu'on essaie de voir plus clairement ce qui se passe,
02:59 ça cache une disparité.
03:01 C'est que les ménages qui ont les revenus les plus faibles, eux, donnent de moins en moins.
03:07 On peut le comprendre depuis la crise de 2008 et accéléré depuis quelques mois par l'inflation.
03:12 Ces ménages-là ont un pouvoir d'achat contraint et ne sont plus en capacité de donner.
03:18 Donc ils arrêtent de donner aux organisations ou donnent des sommes plus faibles qu'avant.
03:23 Mais c'est compensé largement par les foyers, par les plus riches qui donnent de plus en plus.
03:31 Comment vous l'expliquez ?
03:33 Je pense que les personnes les plus aisées se rendent compte que l'État ne peut plus tout, ne peut pas tout.
03:40 Quand on voit ce qu'il y a à faire dans le système de santé, quand on voit le conflit en Ukraine,
03:46 on se rend bien compte qu'on ne peut pas tout attendre de l'État, qu'on ne peut plus tout attendre
03:51 et que chacun a un rôle à jouer, chacun a sa part d'intérêt général.
03:55 Et chacun, au-delà de ses impôts, peut, avec un don, décider d'agir, d'accélérer,
04:00 d'agir en faveur d'une cause qui lui parle, que ce soit l'environnement, l'aide aux plus démunis ou la recherche médicale.
04:07 Donc vous, vous diriez que cette réforme fiscale sur le don caritatif, elle a eu un effet positif ?
04:13 Alors, positive la réforme de l'ISF en IFI, je n'irai peut-être pas jusque-là,
04:17 mais ce que je veux dire, parce qu'il y a eu quand même un à-coup sur ce dispositif-là,
04:22 mais globalement, vous avez raison...
04:23 Qu'on se sépare tout de même d'une partie de donateurs, quelque part, qui eux sortent des radars.
04:30 Ils ont dû sortir un peu des radars, mais globalement, les foyers les plus aisés donnent de plus en plus.
04:35 Et ça, la réforme n'a pas ralenti cette tendance de fond, qui est aujourd'hui que les personnes qui en ont les moyens
04:41 ont envie d'être de plus en plus solidaires.
04:43 Vers où, dites-nous, la majorité des dons se dirigent-elles aujourd'hui ?
04:47 Alors, en termes de causes, les causes les plus soutenues, ce sont les causes de la recherche médicale,
04:52 la recherche sur le cancer, la recherche sur les maladies neurodégénératives, notamment.
04:57 Ce sont aussi l'aide aux plus démunis.
05:00 En France, ça s'est accéléré, notamment lors de la crise sanitaire.
05:04 C'était déjà une cause très importante pour les Français.
05:07 Ça l'est encore plus devenu.
05:08 Et puis, la solidarité internationale, comme dans des conflits en Ukraine ou les séismes dont j'ai parlé,
05:15 mais aussi pour lutter contre la faim, aider des projets de développement dans des pays qui en ont besoin.
05:23 Vous, qu'est-ce que vous constatez à la Fondation de France ?
05:25 Quel est le profil de ces donateurs ?
05:27 Comment, vous, sur le terrain, vous avez constaté cette petite évolution ?
05:33 Alors, à la Fondation de France, on retrouve vraiment cette tendance qu'on voit dans l'ensemble du secteur de la générosité.
05:40 Il y a une vraie corrélation, quand on regarde les études, entre l'âge et le don.
05:45 Plus on est âgé, plus on donne.
05:48 C'est assez logique, puisqu'on n'a plus d'enfants à charge, plus de prêts à rembourser pour sa maison.
05:54 Et puis, le passage à la retraite, c'est aussi l'occasion d'avoir plus de temps pour des activités bénévoles.
05:59 Et pour toutes ces raisons-là, on se met à plus donner.
06:03 Et donc, il y a une vraie corrélation entre l'âge et le fait de donner, entre le niveau de revenu, on l'a vu, et le fait de donner.
06:11 Ça ne veut pas dire que les tranches d'âge les plus jeunes ne sont pas forcément, ne sont pas généreuses.
06:16 Elles le sont pour une partie d'entre eux, vraiment.
06:19 Et les jeunes, d'ailleurs, quand ils sont généreux, ils le sont vraiment, sur des montants importants.
06:24 Mais avec des causes différentes.
06:26 On va retrouver les causes de l'environnement, de la protection de l'environnement,
06:31 de chez les générations les plus jeunes, sur les questions d'égalité, hommes-femmes, de diversité.
06:38 On va retrouver, ou d'accès au droit humain, des causes différentes en fonction de l'âge et des profils.
06:45 - Pour qu'on ait une idée des montants, c'est vrai qu'on imagine que ceux qui sont assujettis à l'impôt sur la fortune ou à l'IFI sont des gens plutôt aisés.
06:53 En termes de proportions, de montants, vous dites, ils sont moins, mais ils donnent plus.
07:00 Qu'est-ce que ça veut dire ?
07:01 Et quand on a un portefeuille un peu moins important, combien on donne ?
07:06 Est-ce que vous avez quelques chiffres aussi à nous donner pour qu'on se rende compte un peu ?
07:09 - Globalement, les gens qui donnent aux organisations, en moyenne, toutes organisations confondues, environ 500 euros par an.
07:17 C'est déjà un montant très significatif.
07:20 Et le don moyen des personnes qui donnent au titre de l'IFI, c'est plus de 5 000 euros.
07:26 On voit qu'on est dans un rapport de 1 à 10, donc très différent.
07:32 On est sur des montants très significatifs, mais au global, le secteur de la générosité, c'est environ 3,5 milliards d'euros de dons faits par les Français tous les ans.
07:42 Et c'est un peu moins de 200 millions au titre de l'IFI.
07:45 Donc on voit que l'IFI ne pèse qu'une petite part au global de la générosité des Français.
07:50 - Comment vous voyez cette tendance évoluer ces prochaines années ?
07:54 - Si on a envie de voir les choses positivement, je crois vraiment que les Français vont continuer à être de plus en plus généreux.
08:01 Je pense qu'il y a cette vraie tendance de fond.
08:03 On en a parlé des foyers les plus aisés qui souhaitent donner de plus en plus.
08:09 Et nous, on voit à la Fondation de France, on accueille plein d'entrepreneurs qui viennent créer leur fondation abritée à la Fondation de France.
08:16 Et on voit justement ce profil-là vraiment arriver d'entrepreneurs qui ont réussi, qui vendent des parts de leur société à 40, 45, 50 ans après une très belle réussite entreprenariale.
08:26 - Une nouvelle forme d'engagement, c'est ça que vous nous dites ?
08:29 - Et de dire je veux partager la valeur, je veux partager ma réussite avec ceux qui en ont besoin et je crée ma fondation abritée à la Fondation de France
08:40 et je vais m'engager pour la cause qui m'intéresse. Et ça, on voit vraiment cette accélération-là qui se dessine.
08:48 Et puis j'espère que les foyers qui ont des revenus plus contraints, que l'impact de l'inflation pour eux va diminuer et vont pouvoir renouer avec leur pratique de dons.
08:59 On est convaincu que c'est aussi quelque chose d'essentiel.
09:02 - Parce qu'on rappelle qu'il y a un intérêt en termes de fiscalité notamment à donner.
09:05 - Oui, mais au-delà de ça, le don à la base, parce que quand on regarde les études, oui la fiscalité accélère, mais ça n'est jamais la première motivation de donner.
09:12 Et la première motivation de donner, c'est d'être utile à une cause qui nous intéresse et c'est aussi un facteur vraiment de lien social.
09:19 Et je pense dans notre société où on voit ce repli sur soi de chacun, parfois monter, ces tensions naître, eh bien le don, le fait de donner,
09:29 le fait de s'impliquer bénévolement dans des associations, c'est ça qui fait qu'on arrive tous à vivre ensemble, à faire société.
09:35 Et donc j'espère vraiment que le don va continuer sous toutes ses formes à se développer.
09:40 - C'est magnifique, on va terminer là-dessus. Merci beaucoup Vincent Baudin d'avoir été avec nous aujourd'hui dans ce matin à Trémolins.
09:44 Je rappelle, vous êtes directeur adjoint marketing et développement à la Fondation de France.
09:48 Merci beaucoup de nous avoir accompagnés, merci à vous de nous avoir suivis.
09:52 On se retrouve très vite pour un nouveau numéro de Smart Patrimoine, à très vite sur Bsmart. Ciao.
09:58 [Musique entraînante diminuant jusqu'au silence]

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