Avec Sylvain Bersinger, enseignant d'économie en lycée aujourd’hui économiste au cabinet Astères vient nous présenter son nouveau livre « Et ça vous étonne qu’on ne trouve plus de profs ? » paru chez Enrick Éditions
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NewsTranscription
00:00 Sud Radio Bercov dans tous ses états, le face à face.
00:06 Et dans le face à face, j'ai le plaisir de recevoir Sylvain Bersinger,
00:10 qui a été enseignant en économie et qui est aujourd'hui chef économiste au cabinet Asterès,
00:15 pour son nouveau livre, et ça vous étonne qu'on ne trouve plus de prof,
00:20 pourquoi j'ai embrassé puis quitté la profession, un livre publié chez Henrik B.
00:25 Sylvain Bersinger, bonjour.
00:26 Bonjour.
00:27 Bienvenue sur Sud Radio, tout d'abord, pourquoi ce livre ?
00:31 Vous êtes un lanceur d'alerte en racontant comment ça se passe dans le système éducatif français ?
00:37 Non, un lanceur d'alerte, ce serait un grand mot.
00:39 Non, je pense que c'est un livre qui est un peu une réédition d'un précédent livre,
00:42 je ne vais pas refaire tout le fil, mais on avait fait un premier livre sur ce thème-là,
00:46 qui n'avait pas très bien marché parce qu'on l'avait mal présenté, je pense,
00:49 et on avait encore d'autres choses à dire avec mon éditeur, donc on l'a un peu remodelé.
00:53 Je pense que, déjà, un livre, souvent, on l'écrit pour soi-même,
00:56 parce que pour le plaisir qu'on a à l'écrire, parce qu'on se met les idéaux clairs en l'écrivant,
01:00 c'est un moment, je trouve, de plaisir.
01:03 Et aussi, pas forcément pour être un lanceur d'alerte, mais je pense plutôt
01:07 que c'est un livre qui peut intéresser un jeune, qui serait comme je l'étais moi,
01:11 je suis toujours relativement jeune, mais enfin, en sortie d'études,
01:14 qui se demande un peu ce qu'il va faire, et qui envisagerait l'enseignement,
01:19 et d'avoir un peu ce retour de quelqu'un d'autre qui s'est un peu cherché
01:22 dans son parcours professionnel, comme ça a été mon cas,
01:25 qui a essayé l'enseignement, qui a vu des bons et des moins bons côtés.
01:28 Donc je pense que la principale cible, ce serait peut-être le jeune de 20 ans,
01:32 qui se questionne sur son avenir professionnel.
01:34 Après, oui, j'ai un certain nombre de critiques, voire de propositions,
01:39 plus ou moins réalistes, à faire sur le système éducatif,
01:43 sur le recrutement des professeurs, par exemple, etc.
01:46 Donc c'est un point public assez large, en fait.
01:49 - Alors justement, on parlera de tout ça.
01:51 Vous avez été un prof atypique, puisque vous n'avez pas passé de concours,
01:53 expliquez-nous votre parcours.
01:55 - Oui, j'ai un parcours un peu atypique.
01:58 J'ai commencé à enseigner en thèse, puisque j'avais commencé une thèse
02:01 en économie, en sciences de gestion plus précisément,
02:03 il y a de ça bientôt 12 ans.
02:06 Et donc j'avais commencé à faire des TD,
02:07 donc des travaux dirigés, à la fac.
02:10 Il y a le cours en amphithéâtre, avec le professeur un peu sous l'annelle,
02:12 et puis les cours en plus petits groupes, qu'on appelle les travaux dirigés.
02:15 Je n'en avais fait quelques-uns, donc déjà j'avais une petite expérience.
02:18 Bon, pour tout un tas de raisons, j'ai arrêté assez rapidement ma thèse,
02:21 et j'ai fait d'autres choses.
02:23 J'avais aimé enseigner, je crois que j'ai un peu ça dans cette fibre-là,
02:27 et je me suis dit, l'enseignement ça pourrait me plaire,
02:29 je ne savais pas trop que faire de ma vie professionnelle.
02:32 Et donc j'ai enseigné en tant que vacataire,
02:35 donc on trouve des postes sur Pôle emploi.
02:38 - Ah oui, maintenant on fait même des "Speak Day"
02:40 - Oui j'ai entendu ça, moi je n'ai pas fait ça,
02:42 mais c'était des postes sur Pôle emploi.
02:44 Après j'ai fait trois établissements,
02:46 donc presque trois ans, pas tout à fait trois années scolaires entières.
02:49 Et je me suis demandé est-ce que je passe les concours,
02:51 j'ai hésité, à un moment je vais même commencer à m'inscrire,
02:54 et j'ai senti que ma vocation vacillait,
02:56 que je ne voulais pas faire ça toute ma vie,
02:58 donc je me suis dit non, je ne vais pas passer le concours.
03:00 Donc c'est vrai que j'ai été vacataire pendant trois ans,
03:03 et je n'ai pas sauté le pas du concours,
03:05 j'aurais pu faire des concours en interne d'ailleurs,
03:07 parce qu'une fois qu'on est rentré un peu dans le système,
03:10 c'est plus facile ensuite.
03:12 Mais voilà, j'ai senti que je ne me voyais pas faire ça
03:15 pendant encore 30 ou 35 ans,
03:17 donc je n'ai pas passé les concours.
03:18 J'ai une approche un petit peu atypique,
03:21 comme vous le dites, j'ai enseigné en lycée public agricole,
03:25 en lycée privé catholique,
03:27 donc plusieurs, et en université, et en fac un peu,
03:30 des TD, même un peu des cours.
03:32 - Alors vous dites qu'il n'y a pas tant de différence que ça
03:34 entre l'enseignement public et le privé,
03:36 alors que le privé a meilleur presse. Pourquoi ?
03:38 - Ce que je dis dans le livre,
03:42 c'est uniquement de mon ressenti,
03:44 d'autres peuvent avoir d'autres ressentis,
03:45 moi j'ai fait toute ma scolarité dans le public,
03:47 des collèges, des lycées publics,
03:48 tout à fait standard de province,
03:50 et j'ai enseigné dans deux lycées catholiques, privés,
03:54 privés sous contrat, donc quand même très liés au domaine public.
03:58 Mon sentiment, c'est qu'il n'y a pas de différence fondamentale
04:02 dans l'organisation et dans le niveau.
04:04 Parce qu'on a un peu coutume de dire,
04:06 le public, le niveau baisse, etc., le privé c'est mieux.
04:09 Il faut voir qu'il peut y avoir des cas
04:11 où le privé doit remplir ses classes,
04:13 et accepte des élèves qui ont pu être exclus
04:16 de plusieurs autres établissements.
04:18 Donc, je ne pense pas que le privé
04:20 soit toujours de meilleur niveau que le public,
04:22 ça peut être le cas de certains établissements,
04:24 mais je ne pense pas que ce soit quelque chose d'universel,
04:27 et pour avoir fréquenté différents types d'établissements,
04:30 il n'y a pas de différence de niveau ou d'attitude
04:32 qui m'a sauté aux yeux.
04:33 - Vous avez enseigné en fac,
04:35 ça doit être complètement différent du secondaire.
04:37 - Oui, alors moi j'ai enseigné en fac,
04:39 mais surtout en licence,
04:40 donc entre un élève de terminale et un élève de première année,
04:43 en fait il n'y a pas tant de différence que ça.
04:45 Ce qui est surtout,
04:47 alors on a en fac aussi des problèmes de bavardage
04:49 et de comportement parfois,
04:50 il ne faut pas se mentir.
04:52 Ce qui est différent, c'est le rapport aux élèves,
04:54 parce qu'au lycée, vous devez faire l'appel,
04:58 en fac pas toujours, ça dépend,
04:59 il y a des cours magistraux où il n'y a pas d'appel,
05:02 et vous êtes, je dirais, plus responsable de vos élèves.
05:04 Vous rigolez, mais c'est vrai,
05:06 parce que s'il y a un problème dans la classe,
05:08 ou s'il y a un élève qui aurait dû être là,
05:09 mais n'est pas là, il fait une connerie,
05:10 je ne sais où, ou un problème,
05:12 vous pouvez avoir des problèmes.
05:13 Alors en fac, les élèves sont majeurs,
05:15 il y a beaucoup moins cette relation,
05:17 cette contrainte un petit peu administrative, disons.
05:20 Mais après, en train d'aider de première année en fac,
05:22 une classe de travaux dirigés de première année en fac,
05:25 et une classe de terminal en SES,
05:28 ce n'est pas le jour et la nuit non plus.
05:29 - Alors, vous écrivez que la question de la rémunération
05:32 n'est pas primordiale pour expliquer
05:34 le manque de vocation des enseignants,
05:36 ce n'est pas ce que disent les syndicats d'enseignants.
05:38 - Alors, quand je dis pas primordial,
05:39 je ne dis pas que le sujet n'existe pas.
05:41 C'est sûr que si on augmentait très fortement
05:43 tous les profs, il y aurait plus de vocation.
05:47 Donc, c'est pas que c'est un non-sujet,
05:49 mais je pense qu'il y a, mon ressenti,
05:52 et voilà, pour avoir côtoyé beaucoup d'enseignants,
05:55 les profs savent qu'ils ne feront pas fortune en étant profs.
05:58 Moi, j'ai fait des études d'économie et de finance,
06:00 quand je suis allé enseigner en lycée,
06:01 je savais que ce n'était pas la voie
06:03 qui me rémunérait le plus.
06:04 Si j'avais voulu gagner de l'argent,
06:05 je serais allé en finance de marché,
06:07 en autre chose.
06:08 Donc, je pense que la grande majorité des profs
06:13 ont une forme de passion,
06:15 une forme de volonté de transmettre,
06:17 du service public ou autre.
06:19 Et je pense que s'il y a des moyens à mettre
06:21 pour attirer les vocations,
06:22 c'est plus sur les conditions de travail,
06:25 le nombre d'élèves par classe, par exemple,
06:27 la qualité des bâtiments ou tout un tas de choses,
06:29 que sur les rémunérations.
06:30 Même si les rémunérations jouent,
06:31 on a aussi une contrainte de finances publiques.
06:32 Je ne suis pas économiste pour rien.
06:34 - Chef économiste.
06:35 - Je suis chef économiste.
06:36 - Pour vous, le principal problème
06:37 dans le manque de vocation,
06:39 c'est l'absurdité administrative
06:42 du déroulement des carrières.
06:43 Expliquez-nous.
06:44 - Oui, je pense qu'un frein,
06:47 quelque chose qui m'a gêné,
06:48 et quand je discute avec d'autres personnes,
06:50 je crois que c'est quelque chose qui revient,
06:51 c'est que je trouve que la cohérence
06:53 de la carrière d'un professeur
06:55 manque de pertinence.
06:57 - La cohérence qui manque de pertinence,
06:59 c'est très bien.
07:00 - Oui, enfin, la première,
07:01 c'est peut-être pas la meilleure.
07:03 Par exemple, vous prenez les concours.
07:07 Que je n'ai pas passés,
07:08 mais j'ai envisagé de les passer,
07:09 donc je vois à peu près ce qu'il y a dedans.
07:12 Je pense que le gros défi d'un prof,
07:14 en tout cas dans le secondaire,
07:16 c'est qu'il se retrouve à 25 ans
07:17 devant 30 adolescents
07:19 qui ne pensent qu'à une chose,
07:20 c'est de regarder sous les jupes de la copine
07:22 et pas du tout à l'équation
07:23 que vous êtes en train de calculer au tableau.
07:25 Et comment vous gérez ça ?
07:26 Il y a un défi très important à ce niveau-là
07:28 sur la motivation, la discipline, etc.
07:30 Et la manière de recruter les enseignants
07:33 est basée presque exclusivement
07:35 sur des questions scolaires, intellectuelles.
07:37 On vous demande d'être un bon mathématicien,
07:39 un bon économiste, etc.
07:41 Et on met très peu l'accent sur le côté
07:43 pédagogie, transmission, autorité,
07:45 qui est quelque chose de très important
07:47 et souvent difficile à gérer,
07:48 je l'explique dans le livre.
07:49 Donc ça, c'est un exemple.
07:50 Par exemple, l'évaluation,
07:53 les inspections,
07:56 elles n'ont pas trop de sens.
07:57 L'inspecteur prévient trois mois avant qu'il va arriver...
07:59 - On va en parler de l'inspecteur.
08:00 - Mais le déroulé des rémunérations,
08:02 ces rémunérations qui augmentent mécaniquement
08:04 à l'ancienneté,
08:05 l'agrégation qu'on passe
08:07 juste pour avoir une meilleure paye,
08:08 et dont on sait très bien qu'on fera
08:09 exactement les mêmes cours
08:10 une fois qu'on l'a passé.
08:11 Donc il y a tout un tas de petites incohérences
08:13 qui, je trouve, découragent
08:15 les jeunes vocations,
08:17 découragent les bonnes volontés.
08:19 - 13h11, Sylvain Bersinger,
08:21 et ça vous étonne qu'on ne trouve plus de profs.
08:24 On a dégrossi le début du livre.
08:26 Ensuite, on va parler de vos expériences
08:28 en tant qu'enseignant.
08:30 Il y a beaucoup de choses,
08:31 y compris très drôles.
08:32 Vous voulez poser des questions à Sylvain Bersinger,
08:34 vous étiez prof, vous avez rendu le tablier,
08:37 ou vous rêvez de devenir prof,
08:39 appelez-nous au 0826 300 300.
08:42 - Et dans Bercoff, dans tous ces états,
08:51 pour le face-à-face,
08:52 nous avons le plaisir d'avoir avec nous
08:54 Sylvain Bersinger pour "Et ça vous étonne
08:56 qu'on ne trouve plus de profs",
08:58 "Pourquoi j'ai embrassé puis quitté la profession",
09:00 publié chez Henrik B.
09:02 Vous voulez réagir ?
09:03 Rappelez-nous au 0826 300 300.
09:06 - Oui, c'est vrai que les travaux dirigés
09:27 à l'université, les profs titulaires
09:30 ne s'empressent pas forcément pour les prendre,
09:32 les cours de première année,
09:34 et donc on les redonne un peu
09:36 aux jeunes thésards,
09:38 à qui veut bien les faire,
09:40 et c'est vrai que j'avais un certain collègue
09:44 qui n'était pas d'une...
09:45 J'ai pas été dans leur cours,
09:47 mais un, comme vous l'avez dit,
09:48 qui avait été mon prof,
09:50 qui n'avait pas un talent pédagogique
09:52 époustouflant, on va dire ça comme ça.
09:54 - D'accord.
09:55 En secondaire, vous refusiez systématiquement
09:58 de faire des bacs pro,
10:00 vous écrivez même, et ça m'a beaucoup fait rire,
10:02 que plutôt qu'un master ou un doctorat,
10:04 une formation dans une compagnie de CRS
10:06 ou un bataillon de parachutistes
10:07 aurait été plus utile.
10:09 C'est la cour des miracles, les bacs pro ?
10:11 - Alors, j'exagère.
10:12 Moi, j'ai eu une expérience avec une classe de bacs pro
10:14 qui s'est, il faut le dire, mal passée.
10:15 Donc après, c'est...
10:16 On peut pas non plus extrapoler sur tous les bacs pro,
10:18 mais c'est vrai que j'ai eu...
10:20 J'ai enseigné une fois dans une classe
10:22 avec des bacs pro-vente,
10:24 qui était une classe, il faut le dire, rugueuse.
10:26 C'était la classe la plus rugueuse que j'ai eue.
10:28 Et c'est vrai que c'est pas évident
10:30 d'enseigner dans une classe où vous avez beaucoup d'élèves
10:32 qui sont là avant tout pour contester votre autorité,
10:34 qui passent leur temps à se chamailler l'un l'autre,
10:37 qui attendent de voir quand est-ce que vous allez
10:39 essayer de sanctionner l'un plutôt que l'autre,
10:41 qui font évidemment ça quand vous avez le dos tourné au tableau, etc.
10:43 Donc oui, ça a été une expérience...
10:45 Alors après, enrichissante aussi,
10:47 parce qu'on apprend des choses de ces expériences-là,
10:49 mais j'ai compris, si vous voulez,
10:53 que certains profs peuvent péter un câble, pour dire la chose clairement.
10:56 Ça m'est pas arrivé, mais j'ai compris
10:58 que ça puisse arriver à certains profs
11:00 qui ont vraiment des classes qui peuvent être rugueuses.
11:02 - Vous avez notamment un élève,
11:04 alors là c'est plus l'enseignement,
11:06 c'est l'éducation, qui flatule bruyamment,
11:08 sans aucune gêne, en plein cours,
11:10 je peux vous raconter.
11:12 On aurait fait ça à mon époque,
11:14 alors j'ai eu le bac il y a près de 40 ans,
11:16 on se serait fait virer, coller, etc.
11:18 - Oui, mais c'est vrai que c'est une classe en fait
11:20 où beaucoup des élèves, pas tous,
11:22 mais la plupart, étaient dans une logique,
11:24 n'aimaient pas forcément l'école,
11:26 étaient dans une logique de contestation
11:28 de l'autorité,
11:30 et aussi très chamailleurs entre eux,
11:32 c'est-à-dire que non seulement
11:34 ils essaient de titiller le prof,
11:36 mais ils titillaient entre eux aussi.
11:38 - Et ils se tapaient dessus en cours ?
11:40 - Non, non. - Ils s'insultaient ?
11:42 - Il y avait des pics,
11:44 c'était pas de la violence physique,
11:46 il ne faut pas non plus extrapoler,
11:48 mais on sentait une volonté latente
11:50 de chercher la limite,
11:52 piétiner la ligne blanche,
11:54 essayer de voir jusqu'où on peut aller trop loin, etc.
11:56 Et c'est vrai que c'est usant,
11:58 surtout que moi j'ai pas forcément une autorité naturelle
12:00 débordante, il y a des gens qui ont de la poigne,
12:02 qui arrivent à tenir une classe comme ça,
12:04 il n'y en a pas beaucoup, moi c'est pas forcément mon cas,
12:06 et c'est vrai que c'est des heures de cours
12:08 où on dépense une énergie folle,
12:10 on rame,
12:12 c'est pas évident.
12:14 Après, moi je suis pas partisan
12:16 du tout-sanction et du tout-sécuritaire,
12:18 je peux coller la moitié de la classe,
12:20 ça n'avance à rien,
12:22 mais c'est vrai qu'il y a un vrai défi
12:24 dans certaines classes,
12:26 mais d'autorité, comment je place l'autorité,
12:28 comment je prends l'autorité, et ça c'est pas facile à gérer.
12:30 - Cette classe de bac pro, elle était plutôt dans un quartier
12:32 favorisé ou défavorisé ?
12:34 - C'était un lycée
12:36 catholique, privé, d'une petite ville
12:38 de province.
12:40 - Donc c'était pas du tout un quartier difficile ?
12:42 - Pas réputé tel, non,
12:44 c'était un établissement comme il peut y en avoir
12:46 mille ou dix mille dans toute la France.
12:48 - Alors, dans votre livre, vous racontez
12:50 un débat en cours sur Lidl et Apple
12:52 qui est franchement surréaliste.
12:54 Vous pouvez nous en parler un peu ?
12:56 - Oui, en fait...
12:58 - Lidl et Apple, c'est vraiment les deux extrêmes.
13:00 Là c'est le hard discount et l'autre c'est le...
13:02 - Voilà, en fait,
13:04 cette classe d'élèves de bac pro
13:06 qui n'étaient pas très scolaires, qui avaient plein de qualités à côté,
13:08 mais être assis
13:10 pendant une heure devant un livre,
13:12 c'est pas leur truc. Donc j'essayais de leur donner un peu
13:14 des exemples, de les faire réagir, et je leur ai dit
13:16 c'était une classe commerciale,
13:18 je sais plus le titre exact de leur cursus,
13:20 mais qui se dessinait à des vendeurs.
13:22 Donc je leur ai dit... - Bac pro-vente ?
13:24 - Oui, bac pro-vente, quelque chose comme ça, je sais plus le titre exact.
13:26 Je leur ai dit, "Tenez,
13:28 prenons deux exemples de magasins,
13:30 un Lidl et un Apple Store.
13:32 C'est tous les deux des magasins dans lesquels on vend des produits.
13:34 - Oui. - Donc le but
13:36 de ce lieu, c'est le même.
13:38 Et pourtant, c'est deux lieux de magasins
13:40 qui ne se ressemblent pas du tout.
13:42 Donc j'ai essayé de les faire réagir
13:44 pour qu'ils m'expliquent,
13:46 pour qu'ils réfléchissent à
13:48 quel type de produit on vend, à quel public on s'intéresse,
13:50 quel niveau de vie
13:52 du client on essaie de capter,
13:54 comment on essaie de mettre en avant ou pas le produit.
13:56 Et en fait,
13:58 j'étais presque, sur cet exemple-là,
14:00 un peu victime de mon succès.
14:02 Tout le monde a voulu réagir un peu dans tous les sens.
14:04 Il y en a un qui commençait à lever le doigt bien sagement,
14:06 qui attendait que je la parole, et puis après
14:08 un autre qui voulait mettre son grain de sel, etc.
14:10 Et en fait, il y a des fois
14:12 des cas où, c'est pas que les élèves
14:14 veulent forcément être désagréables ou autres,
14:16 mais il y a un peu une énergie qui va
14:18 jaillir tout en une fois
14:20 et qu'il est difficile de canaliser.
14:22 Parce que si on la canalise pas, très vite,
14:24 elle va partir sur autre chose et il ne sera plus du tout question
14:26 de magasins ou de ventes ou de tout ce que vous voulez.
14:28 - Ah, le débat est surréaliste.
14:30 Quand on lit d'ailleurs, on rit beaucoup.
14:32 - Oui, après, il faut en rire un petit peu,
14:34 il faut prendre ça avec un peu de légèreté, un peu de recul,
14:36 parce que sinon, on se tape la tête contre les murs.
14:38 - Vous parlez d'ailleurs de la rédaction
14:40 d'un rapport de stage. On a l'impression
14:42 qu'aujourd'hui, un élève de Bac Pro,
14:44 ça équivaut grosso modo au niveau
14:46 d'un élève de cinquième il y a 40 ans,
14:48 ou quatrième, je me trompe ou pas ?
14:50 - Je sais pas, en fait, je sais pas... - Vous étiez pas né il y a 40 ans.
14:52 - Voilà, j'étais pas né il y a 40 ans, donc je sais pas trop quel était le niveau.
14:54 Donc, sur la question
14:56 de l'évolution du niveau,
14:58 moi, je manque un peu, à titre personnel,
15:00 je manque évidemment de recul.
15:02 Donc, là-dessus, je me prononce pas trop,
15:04 mais c'est vrai qu'on se rend compte que pour beaucoup
15:06 de ces élèves, rédiger
15:08 un texte simple, c'est-à-dire d'écrire ce que j'ai fait
15:10 en stage, pour beaucoup, c'est un défi.
15:12 Je parle pas de l'orthographe, je parle juste de se lancer
15:14 à écrire. - Se surrendre dans l'orthographe, là, c'est le désastre.
15:16 - Oui, c'est le désastre. Bon, après, moi, j'ai toujours fait beaucoup de fautes
15:18 d'orthographe, donc je suis très indigènant avec ça, mais enfin, bref,
15:20 c'est un autre débat, mais...
15:22 Alors, pas tous, il y a des élèves
15:24 qui s'en sortaient bien, mais il y en a vraiment
15:26 où on se rend compte qu'écrire
15:28 un texte simple, raconter
15:30 en 15 lignes, j'ai fait ça en stage,
15:32 j'ai mis les produits en rayon, etc., on se rend compte
15:34 que c'est une difficulté
15:36 et c'est quelque chose...
15:38 Vous voyez, moi, j'avais... Bon, j'ai un bagage
15:40 d'économiste et en économie en finance
15:42 universitaire, et en fait, on est parfois
15:44 un petit peu désarmé pour se dire "comment
15:46 cet élève qui tout simplement n'arrive pas à faire jaillir
15:48 des mots, je vais essayer de
15:50 l'aider, de le faire progresser,
15:52 etc. Donc, on...
15:54 Des fois, on a pu faire à la fac
15:56 plein de modèles économiques très complexes,
15:58 on se retrouve face à des situations
16:00 qui sont un peu triviales, mais qui en fait
16:02 sont très bloquantes pour l'élève, et qui sont pas
16:04 forcément faciles à
16:06 appréhender. Dans ce cas-là, les élèves étaient
16:08 plein de bonne volonté, je dis pas qu'ils voulaient mal faire,
16:10 mais voilà, il y avait des blocages... - Mais ils manquaient les bases !
16:12 - Ils manquaient les bases, et c'est difficile
16:14 de savoir comment les donner, ces bases.
16:16 - Mais est-ce que le problème, on est en période
16:18 de baccalauréat, c'est pas un des mots
16:20 de l'éducation en France,
16:22 le fait de vouloir absolument 80%,
16:24 et maintenant on est même à nettement plus,
16:26 d'une classe d'âge au bac. Est-ce que ça veut dire
16:28 quelque chose, comme disait Elisabeth Lévy
16:30 dans un de ses éditos la semaine dernière,
16:32 comme on n'arrivait pas à mettre 80% des élèves
16:34 d'une classe d'âge au bac, on a mis
16:36 80% des élèves au niveau du bac.
16:38 - Oui, alors c'est vrai que
16:40 moi je serais plutôt
16:42 partisan d'un
16:44 système éducatif un peu plus, je dirais, germanique,
16:46 c'est-à-dire où les formations
16:48 professionnelles ont une vraie reconnaissance.
16:50 Il y a un peu en France, je trouve...
16:52 - Il y a très peu d'élèves allemands qui ont l'Abitur,
16:54 qui ont le bac allemand par rapport à la France.
16:56 - Oui, en Suisse, il y en a moins par rapport à la France.
16:58 Et je trouve qu'en France, on a
17:00 un certain dénigrement des formations
17:02 professionnelles, et c'est pour ça que je...
17:04 Quand je dis que j'ai une classe de bac pro difficile,
17:06 je ne dis pas que les élèves de classe professionnelle
17:08 sont forcément des cancres, etc.
17:10 Mais je dis que vu qu'on considère ces classes-là
17:12 avec un certain dédain, on n'y oriente que les élèves
17:14 qui sont d'un échec scolaire. Donc après, statistiquement,
17:16 se retrouvent plutôt dans ces classes-là
17:18 des élèves qui ont une relation plutôt difficile
17:20 avec l'autorité de l'enseignant, parce que
17:22 ils sont plutôt en souffrance pour certains.
17:24 Donc je pense un peu comme vous,
17:26 que vouloir à tout prix que tout le monde ait le bac,
17:28 ce n'est pas tant le sujet.
17:30 Le sujet, c'est qu'il y ait des élèves qui apprennent des choses
17:32 à l'école, et que quand ils sortent de l'école,
17:34 il y ait une formation qui leur permette de s'insérer dans le monde du travail.
17:36 Qu'on appelle ça bac ou que ce soit des BEP
17:38 ou autre, à la limite, peu importe.
17:40 - Et puis on trouvera
17:42 beaucoup plus facilement du travail qu'un CAP de boucherie
17:44 ou de plomberie qu'avec un Master 2 de sociologie.
17:46 - Ça peut être le cas, oui.
17:48 Non, mais c'est vrai que
17:50 j'ai eu le cas d'élèves que les parents
17:52 voulaient à tout prix pousser vers
17:54 - à l'époque on appelait ça bac ES, général,
17:56 maintenant les filières ont été modifiées -
17:58 mais vers des filières
18:00 un peu intellectuelles, un peu scolaires,
18:02 qui ne correspondaient pas à l'enfant.
18:04 Parce qu'il y a le côté
18:06 "mon fils, ma fille, doit
18:08 faire une belle carrière, doit faire
18:10 un parcours plutôt intellectuel",
18:12 et qui des fois ne correspond pas à l'élève.
18:14 Et donc des fois on se retrouve avec des élèves
18:16 en souffrance, qui n'aiment pas ce qu'ils font,
18:18 qui du coup, pour certains,
18:20 - pas toujours, mais pour certains - vont contester
18:22 l'autorité, vont faire un peu les pitres,
18:24 parce qu'ils sont mal là où ils sont.
18:26 Et donc je crois qu'il faudrait
18:28 essayer de
18:30 donner un vrai
18:32 poids, une vraie reconnaissance
18:34 aux filières professionnelles.
18:36 Moi j'ai enseigné un an au lycée agricole,
18:38 et je me lamente que l'enseignement agricole soit regardé
18:40 avec un certain dédain de la part de tout le reste
18:42 du système éducatif, parce qu'il y a plein de bonnes choses
18:44 dans l'enseignement agricole, une proximité avec le monde
18:46 professionnel, tout établissement
18:48 a une ferme en parallèle où les élèves
18:50 vont, il y a des profs qui viennent
18:52 plus du milieu professionnel, et il y a une insertion
18:54 professionnelle qui peut être facilitée. Donc je pense
18:56 que le côté insertion professionnelle
18:58 et formation utile dans un
19:00 métier ne doit pas être regardé avec une
19:02 certaine condescendance, ce qui est trop souvent le cas, je trouve.
19:04 - En parlant de lycée agricole, vous racontez une histoire
19:06 folle. Vous êtes en lycée agricole et on vous
19:08 demande d'enseigner l'allemand, parce que
19:10 vous avez travaillé en Allemagne,
19:12 et vous avez pas, vous le dites vous-même,
19:14 le niveau pour être prof d'allemand, et vous utilisez la méthode
19:16 forte en regardant des tonnes de films en VO
19:18 avec le dictionnaire sur les genoux.
19:20 C'est surréaliste. - Non, ça c'est
19:22 une histoire vraie, mais un petit peu exceptionnelle, c'est-à-dire que
19:24 il se trouve que c'est un lycée agricole, donc
19:26 en zone rurale, il se trouve
19:28 que le professeur d'allemand, c'est malheureux à dire,
19:30 mais est décédé pendant les vacances.
19:32 Et il y avait des classes pour lesquelles il n'y avait pas de remplaçants.
19:34 Pas beaucoup, mais quelques-unes.
19:36 Et moi j'avais travaillé un peu en Allemagne quelques années plus
19:38 tôt, et donc le proviseur m'a demandé
19:40 "On a personne, est-ce que tu veux pas
19:42 faire le cours d'allemand ?" Et je lui ai répondu
19:44 "Bah non, j'ai pas le niveau, moi je parle allemand
19:46 comme ça au quotidien,
19:48 mais je peux pas enseigner l'allemand." Et il est revenu
19:50 vers moi en me disant "On a personne, donc c'est toi ou rien."
19:52 Et donc c'est vrai que
19:54 j'ai fait ces cours d'allemand pendant quelques
19:56 mois, ça a pas duré très longtemps pour finir l'année,
19:58 mais c'est une expérience alors un petit peu
20:00 rigolote, parce que
20:02 j'avais
20:04 objectivement pas le niveau, et le
20:06 proviseur le savait très bien, et je l'ai dit aux élèves,
20:08 d'ailleurs j'étais très franc avec eux en leur disant
20:10 que j'étais pas un prof d'allemand, mais
20:12 tout compte fait,
20:14 bon je pense que j'ai réussi à faire apprendre deux-trois
20:16 choses aux élèves quand même, on lisait
20:18 Astérix en allemand, on faisait des petits
20:20 ateliers comme ça,
20:22 et l'un dans l'autre,
20:24 j'ai beaucoup transpiré, mais je pense
20:26 que je m'en suis à peu près sorti.
20:28 - Ah le Cédornung ! Vous comparez
20:30 le prof à Louis de Funès,
20:32 alias Stanislas Lefort,
20:34 le chef d'orchestre dans "La Grande Vadrouille",
20:36 et ça pousse la ressemblance
20:38 jusqu'à la fin d'une tirade, c'était
20:40 pas mauvais, c'était très mauvais.
20:42 - Oui, c'est vrai que
20:44 je trouve que le prof, il faut un petit peu,
20:46 on a cette classe devant nous, et il faut
20:48 arriver à la faire un peu jouer
20:50 comme un chef d'orchestre ferait jouer ses musiciens, c'est-à-dire
20:52 à l'entraîner, on sent qu'un tel est
20:54 en train un petit peu de piquer du nez, hop, on le questionne
20:56 pour le ramener,
20:58 on sent qu'il y en a un qui commence à bavarder,
21:00 on lui envoie une petite remarque
21:02 pour qu'il se calme, et
21:04 il faut essayer de sentir sa classe, c'est un groupe,
21:06 il y a en moyenne une trentaine d'élèves,
21:08 entre 25 et 30 et quelques selon
21:10 les classes, et donc
21:12 en fait, c'est avant tout
21:14 de la relation humaine, c'est avant tout
21:16 un courant qu'on essaie de faire passer
21:18 qui des fois ne passe pas, qui a du mal à passer,
21:20 mais oui, je trouve que l'analogie avec
21:22 l'orchestre est pas mal, il faut essayer de faire
21:24 jouer ses différents musiciens
21:26 pour que chacun participe à son niveau,
21:28 mettre sa petite note au moment
21:30 où il peut, etc. - Du premier violon
21:32 au triangle. - Voilà.
21:34 - Et ça vous étonne qu'on ne trouve plus
21:36 de profs, pourquoi j'ai embrassé et puis quitté
21:38 la profession de Sylvain Bersinger
21:40 un livre publié chez Henrik Bédition,
21:42 vous voulez réagir, vous voulez poser
21:44 des questions, vous avez quitté l'éducation
21:46 nationale, vous rêvez d'être prof, ou vous êtes
21:48 prof et vous vous éclatez dans votre métier,
21:50 vous êtes même peut-être devenu proviseur,
21:52 on attend vos appels au 0826 300 300.
21:54 Sud Radio,
21:56 Bercov dans tous ses états,
21:58 midi 34h, Philippe David.
22:00 - Et aujourd'hui dans le face-à-face, nous avons le plaisir
22:04 pardon d'avoir avec nous
22:06 Sylvain Bersinger et ça vous étonne
22:08 qu'on ne trouve plus de prof,
22:10 pourquoi j'ai embrassé et puis quitté la profession
22:12 publié chez Henrik Bédition.
22:14 Vous écrivez une chose très amusante,
22:16 vous écrivez qu'un prof peut connaître
22:18 l'extase quand il fait
22:20 progresser ses élèves.
22:22 Expliquez-nous quel type d'extase c'est.
22:24 - Alors extase, je me suis peut-être un peu
22:26 enflammé. - Ah vous avez écrit extase ?
22:28 - Non, je pense que l'enseignement ça peut être
22:30 un métier très plaisant et très gratifiant,
22:32 parce qu'on parle toujours des
22:34 moments qui se passent mal, parce qu'on parle toujours des trains qui arrivent en retard,
22:36 mais il y a aussi des classes avec qui ça se passe bien,
22:38 il y a des élèves, je suis arrivé,
22:40 ils étaient complètement largués en économie
22:42 et on s'est quittés quelques
22:44 mois plus tard, et je ne dis pas que c'est devenu des économistes,
22:46 mais en fait on sentait
22:48 vraiment la progression et on sent vraiment qu'il y a des fois
22:50 où la classe est très réceptive,
22:52 où les élèves sont contents d'apprendre,
22:54 il y a des fois où ça se passe très bien, et où
22:56 les élèves sont contents, le prof est content, il y a vraiment
22:58 un courant
23:00 entre les gens qui arrivent à passer, une progression
23:02 qui s'opère, et ça
23:04 c'est des moments très plaisants, oui,
23:06 c'est des moments qui existent aussi, il ne faut pas parler que des moments
23:08 rugueux, où il y a des problèmes de
23:10 discipline ou autre. - Alors, vous
23:12 avez une classe de Terminal ES,
23:14 c'était économique et social à l'époque,
23:16 vous dites que c'est la plus petite
23:18 classe de France, vous avez
23:20 5 élèves, alors
23:22 que généralement les profs se plaignent des classes
23:24 surchargées, comment peut-on
23:26 avoir une classe avec 5 élèves ?
23:28 - Alors, comment, je ne sais pas trop
23:30 comment s'organisait ce lycée, parce que moi j'y étais
23:32 arrivé un peu en cours d'année, c'était un remplacement
23:34 maternité, mais effectivement il y avait
23:36 5 élèves dans cette classe, je pense que c'était
23:38 la plus petite de France, il y en a peut-être des plus petites, je ne sais pas.
23:40 - 5 élèves, c'est dur de faire moins quand même !
23:42 - Donc c'était un lycée privé
23:44 rural, et ils avaient
23:46 un peu de mal à justifier
23:48 leur classe, donc ils prenaient
23:50 tous les élèves qui se présentaient,
23:52 et oui, on avait 5 élèves,
23:54 donc là, c'est plus du tout le même,
23:56 alors c'est très facile, on n'est plus
23:58 du tout sur les mêmes problématiques.
24:00 - Il n'y a pas besoin d'avoir une grande classe.
24:02 - Non, il n'y a pas besoin d'avoir une grande salle,
24:04 c'est vrai que toutes les questions de discipline, du coup,
24:06 mécaniquement se dissipent, parce que c'est
24:08 beaucoup plus facile, quand il y a 5 élèves
24:10 devant soi, si il y en a un qui fait le con, on le voit tout de suite !
24:12 Les élèves
24:14 n'ont pas cet effet de masse,
24:16 mais du coup, il y a vraiment des élèves dans cette
24:18 toute petite classe, que j'ai vraiment vu progresser,
24:20 on peut vraiment s'attacher
24:22 à l'élève, à son apprentissage,
24:24 faire un peu du cas par cas, il y en a vraiment
24:26 qui ont
24:28 complètement évolué au cours
24:30 des 6 mois qu'on a passé ensemble. - Alors on ne peut pas
24:32 imaginer des classes à 5 élèves dans toute la France,
24:34 il faut un tel nombre d'établissements,
24:36 de salles de cours
24:38 et de profs que ce n'est pas possible,
24:40 mais est-ce que le nombre d'élèves, ça joue sur la qualité
24:42 de l'enseignement ? - Moi, je pense
24:44 beaucoup de mon expérience,
24:46 la classe de bac pro dont je parlais,
24:48 qui était une classe assez rugueuse, des fois on la prenait en demi-groupe
24:50 avec mes collègues, et là ça se passait beaucoup mieux,
24:52 parce qu'on peut vraiment être plus
24:54 proche des élèves, je pense que
24:56 si on veut mettre des moyens
24:58 dans l'éducation, et je pense qu'il faut en mettre,
25:00 la division des classes,
25:02 faire un certain nombre de cours en classes divisées,
25:04 je pense que c'est une bonne démarche,
25:06 parce que je trouve vraiment que quand on a
25:08 12-15 élèves au lieu d'en avoir
25:10 30 ou 35, ça change
25:12 vraiment les choses, on peut vraiment plus
25:14 prendre du temps pour chaque difficulté de chaque élève,
25:16 il n'y a pas l'effet broie, il n'y a pas l'effet masse
25:18 qu'il peut avoir dans une grande classe,
25:20 et je pense que c'est une très bonne
25:22 chose d'essayer de diviser les classes et de mettre
25:24 des moyens là-dessus. - Vous racontez une chose
25:26 absolument dingue, vous avez un élève de
25:28 Terminales qui croit
25:30 que l'Italie a une économie
25:32 planifiée à la soviétique.
25:34 Racontez-nous ça,
25:36 parce que quand j'ai lu ça, je l'ai relu trois fois en me disant
25:38 "mais comment peut-on imaginer,
25:40 quand on connaît le nombre de boîtes privées italiennes
25:42 bien connues en France,
25:44 que l'Italie, c'est l'URSS ?"
25:46 - Oui, alors mais
25:48 c'est vrai qu'il y a cet élève qui m'avait dit ça,
25:50 et puis il soutenait d'ailleurs, il me disait
25:52 "ah non, non, mais monsieur, moi je suis sûr",
25:54 il était un peu entêté là-dedans, mais lui, ça fait partie
25:56 des élèves qui ont vraiment énormément progressé d'ailleurs,
25:58 entre parenthèses, sur les quelques
26:00 mois qu'on a passés ensemble. - Donc à la fin,
26:02 il pensait que l'Italie,
26:04 c'était plus une économie planifiée,
26:06 c'était une économie de marché,
26:08 sociale de marché, comme on dit aujourd'hui. - Oui,
26:10 en fait, c'est une économie assez semblable à la France, l'économie italienne,
26:12 dans les grandes lignes. Non, mais
26:14 c'est vrai qu'en fait, il y a des choses qui
26:16 peuvent nous paraître évidentes, en tant que prof,
26:18 et quand on connaît une discipline, mais qui en fait
26:20 peuvent l'être pas du tout pour
26:22 quelqu'un qui connaît moins,
26:24 ou qui ne connaît pas, et si j'étais dans d'autres
26:26 disciplines où je suis absolument ignorant, j'aurais peut-être
26:28 des réactions tout aussi
26:30 lunaires, ou qui pourraient paraître telles par
26:32 des personnes qui savent. Donc en fait,
26:34 c'est un peu un piège, c'est de
26:36 mettre
26:38 la barre trop haut, c'est-à-dire de ne pas rappeler
26:40 certaines bases, et je crois que c'est important, souvent,
26:42 de prendre cinq minutes pour rappeler certaines bases,
26:44 pour être sûr qu'aucun d'élèves n'est largué,
26:46 et pour après repartir avec toute la classe. - Mais, il vous a
26:48 dit où il avait lu ça ? Parce que l'Italie,
26:50 économie équivalente à l'URSS, je sais pas dans
26:52 quel livre on peut lire ça, excusez-moi ! - Je sais
26:54 pas où il l'avait lu, je sais pas où il l'avait
26:56 pioché, mais peut-être qu'il avait pas très bien compris
26:58 ce qu'était l'économie, peut-être qu'il se mélangeait
27:00 des choses dans sa tête, peut-être qu'URSS,
27:02 il l'avait confondu avec je ne sais quoi, mais...
27:04 - Il vous a pas dit que la Corée du Nord avait une économie
27:06 libérale version Margaret Thatcher ?
27:08 - Il est pas allé jusque-là, quand même !
27:10 - Vous dites que cet élève, justement, n'a rien
27:12 à faire en ES, et qu'il y a un gros
27:14 problème d'orientation. Il y a un gros problème
27:16 d'orientation dans l'éducation nationale ?
27:18 - Bah en fait, je...
27:20 On en a déjà un peu parlé, c'est-à-dire que je trouve que des fois,
27:22 il y a un peu le côté...
27:24 Je trouve qu'il y a souvent des parents,
27:26 d'ailleurs, quand on est en réunion
27:28 avec un grand prof, on le ressent,
27:30 qui veulent que leurs enfants fassent
27:32 des études qu'ils jugent plus prestigieuses,
27:34 et parfois,
27:36 malheureusement, l'élève n'est pas
27:38 adapté à cette filière-là.
27:40 Et donc, lui, il avait un niveau...
27:42 Il avait déjà raté son bac deux fois.
27:44 Il a eu la troisième, quand même.
27:46 Mais lui, ça se passait très bien,
27:48 il n'y avait pas de problème de discipline, il a progressé, etc.
27:50 Mais des fois, on sent qu'il y a des élèves qui, du coup,
27:52 ne sont pas dans la filière,
27:54 dans la formation qui leur conviendrait le mieux,
27:56 qui, du coup, sont malheureux d'être là,
27:58 peuvent faire rejaillir
28:00 ce malaise
28:02 en titillant leurs camarades,
28:04 en bavardant, je ne sais quoi.
28:06 C'est vrai que...
28:08 Mais là, c'est peut-être plus les parents qui sont en cause,
28:10 c'est-à-dire qu'il ne faut pas forcément
28:12 vouloir tout de suite que son fils
28:14 débouche un jour sur Polytechnique s'il n'aime pas les maths.
28:16 Je caricature, mais c'est un peu ça.
28:18 Et je crois que ça,
28:20 ce n'est pas tant un problème de l'éducation nationale
28:22 que peut-être un problème des parents
28:24 qui fantasment un peu
28:26 sur leur enfant, "mon fils, ma fille, tu feras
28:28 telle étude, tu feras tel métier", et des fois, ça ne correspond pas
28:30 à la personnalité du jeune.
28:32 - Les parents, est-ce qu'ils sont autant,
28:34 quand on veut bien le dire, en soutien de leurs enfants ?
28:36 Puisqu'on dit souvent maintenant
28:38 que quand un prof pudit un élève,
28:40 c'est les parents qui viennent le voir, en disant que c'est scandaleux,
28:42 même si l'élève a fait
28:44 quelque chose d'inadmissible. - Alors, moi, je n'ai pas
28:46 eu ce cas-là, j'ai entendu des profs qui parlent de ça.
28:48 Moi, je n'ai quand même
28:50 pas trop eu ce cas-là. C'est-à-dire que les fois
28:52 quand même où il m'arrivait de sanctionner des élèves,
28:54 je n'ai jamais eu de retour
28:56 du parent qui me dise "mais c'est scandaleux,
28:58 mon fils est parfait", etc. J'ai même eu des parents
29:00 qui me disaient, en réunion par un prof,
29:02 par exemple, qui me disaient "bon, mon gamin,
29:04 s'il fait une connerie, n'hésitez pas à serrer la vis".
29:06 Alors, je n'ai pas eu ce cas-là, donc je ne peux pas en témoigner,
29:08 mais je sais que ça existe, je sais qu'il y a des profs
29:10 à qui c'est arrivé, les retours des parents
29:12 qui s'insurgent, mais
29:14 moi, je ne l'ai pas vécu, donc
29:16 je ne pense pas que ce soit non plus quelque chose de généralisé,
29:18 je ne pense pas que ce soit un tsunami de parents
29:20 qui ne veulent plus aucune autorité, etc.
29:22 - Alors, dans "Faut-il être
29:24 blond pour être prof?",
29:26 vous expliquez ce qui est
29:28 pour vous un bon prof
29:30 en citant De Gaulle et Cavana,
29:32 pas franchement le même registre,
29:34 pour vous, un bon prof, c'est quoi ?
29:36 - C'est très difficile d'être un bon prof,
29:38 je pense sincèrement que je ne l'étais pas forcément,
29:40 je n'étais pas un mauvais prof, mais je n'étais pas non plus un bon prof.
29:42 - Vous êtes connu pour votre grande modestie.
29:44 - Oui, mais je sais que j'ai des lacunes.
29:46 Ce qui est très difficile, c'est qu'il faut
29:48 avoir, je dirais, une sorte d'autorité bienveillante.
29:50 C'est-à-dire que si vous êtes juste autoritaire,
29:52 vous faites un cours sec,
29:54 il n'y a rien qui se transmet, donc ça ne fait pas un bon prof.
29:56 Mais il faut avoir
29:58 une poigne pour tenir sa classe et pour dire
30:00 "Écoutez, là, c'est moi le prof, c'est moi le chef pendant une heure,
30:02 donc on va faire ce que je dis",
30:04 mais avec un grand fond
30:06 de bienveillance, c'est-à-dire pas de l'autorité
30:08 au sens où si tu mouffes,
30:10 je te fous trois heures de colle.
30:12 - C'est-à-dire, c'est de l'autorité, mais pas de l'autoritarisme.
30:14 C'est une autorité où
30:16 il faut que vous acceptiez
30:18 que moi, enseignant, c'est moi le chef
30:20 pendant l'heure qu'on va passer ensemble, mais que je
30:22 suis là pour vous apprendre des choses, pour vous
30:24 tirer vers le haut. Et il faut arriver à manier les deux.
30:26 Et c'est très difficile.
30:28 C'est beaucoup une question de personnalité, je pense.
30:30 C'est un peu quelque chose qu'on a ou qu'on n'a pas
30:32 en soi, comme un acteur.
30:34 On a ou pas, ou un chanteur.
30:36 C'est des métiers, en fait, où il faut
30:38 arriver à faire passer un courant avec d'autres
30:40 êtres humains, et c'est des choses
30:42 qu'on peut difficilement apprendre sur le banc d'une université.
30:44 - On a toutes et tous un ou deux
30:46 ou trois profs qui nous ont marqués, qui nous ont
30:48 fait aimer, parfois passionnément, une matière.
30:50 Vous, c'est un excellent prof d'économie
30:52 qui vous a fait aimer l'économie
30:54 au point de devenir chef économiste.
30:56 - Alors, je...
30:58 Pas forcément un prof directement. L'économiste
31:00 qui m'a le plus marqué, je ne l'ai jamais rencontré, c'est
31:02 Paul Krugman. C'est un Américain, pré-Nobel, que j'ai
31:04 jamais rencontré. - Alors, avoir Paul Krugman comme prof,
31:06 c'est peut-être Harvard ou Stanford.
31:08 - Oui, il a été enseigné, effectivement,
31:10 au MIT, notamment. - Au MIT.
31:12 - Donc, je ne l'ai jamais rencontré,
31:14 évidemment, mais j'ai lu ses livres qui m'ont énormément marqué.
31:16 Et je crois que c'est peut-être lui qui m'a le plus
31:18 marqué en tant qu'économiste. Après, j'ai eu
31:20 des bons profs d'économie au lycée, en fac.
31:22 Mais il n'y en a pas
31:24 un qui a été le déclic, où je me suis
31:26 dit "Ah oui, voilà, j'ai vu la lumière,
31:28 j'ai vu ma vocation, et
31:30 je veux faire ça". Mais j'ai eu beaucoup de bons profs, oui.
31:32 - Alors, il y a un
31:34 moment que tous les enseignants craignent,
31:36 la visite de l'inspecteur. On joue sa carrière
31:38 en quelques heures ? - Non,
31:40 je ne pense pas, parce que, déjà, les visites
31:42 de l'inspecteur, elles sont rares. Moi, j'en ai
31:44 eu une fois en trois ans.
31:46 Et je crois qu'il y a des profs pour qui c'est encore plus espacé
31:48 que ça. Je crois qu'il y a des profs qui passent dix ans sans voir
31:50 un inspecteur. - Ah oui, effectivement. - Quoi, ils ont eu dix ans, je ne sais pas
31:52 exactement, mais souvent, c'est plusieurs
31:54 années. Et souvent, c'est une visite
31:56 qui est annoncée longtemps à l'avance. Donc, on a quand même
31:58 le temps de s'y préparer, de se dire "Ben voilà, dans telle classe,
32:00 à telle date, je sais qu'il y aura ça, donc
32:02 je vais, voilà, potentiellement
32:04 peaufiner un peu des choses."
32:06 Non, moi, je suis assez critique
32:08 de ces inspections,
32:10 parce qu'elles sont très espacées,
32:12 parce qu'on est prévenu
32:14 très longtemps à l'avance qu'il y aura l'inspection. Donc, en fait,
32:16 voilà, c'est... - On briefe
32:18 les élèves, etc. - Alors, moi, je ne l'avais pas fait,
32:20 mais on peut tout à fait dire aux élèves
32:22 "On va être inspectés, et on peut
32:24 acheter un peu la paix sociale." Il y a des profs
32:26 qui peuvent faire ça, c'est-à-dire "Ok, vous ne me cassez
32:28 pas la baraque quand il y aura
32:30 l'inspecteur, et puis derrière, moi,
32:32 je serai sympa." Ça peut arriver,
32:34 ce genre de choses, je ne dis pas que c'est
32:36 la majorité. Mais non, je pense que les inspections,
32:38 pour qu'elles aient
32:40 vraiment un
32:42 impact, une signification,
32:44 il faudrait qu'elles soient plus fréquentes, et puis
32:46 annoncer quand même un peu moins à l'avance, pour qu'il y ait vraiment
32:48 un côté "inspection", quoi. - Vous racontez
32:50 une inspection hors établissement
32:52 dans l'enseignement catholique, à Bordeaux,
32:54 qui est surréaliste.
32:56 Vous êtes jugé inapte, mais tous vos élèves
32:58 font le bac cette année-là. Là, c'est surréaliste.
33:00 C'est pas le public,
33:02 c'est le privé. - Oui, oui.
33:04 C'est pas totalement une inspection, c'est-à-dire que j'étais
33:06 vacataire dans un lycée
33:08 privé catholique,
33:10 privé sous contrat, et on m'avait
33:12 ... l'administration
33:14 de l'académie, je sais plus comment ça s'appelle,
33:16 m'avait convié à
33:18 une sorte de
33:20 ... pas vraiment
33:22 d'entretien d'embauche, mais en gros, "Est-ce que vous voulez
33:24 continuer dans l'enseignement ?"
33:26 Et c'est vrai que
33:28 cet entretien s'est assez mal passé,
33:30 parce qu'en fait, les personnes qui étaient en face de moi,
33:32 à aucun moment n'ont essayé
33:34 de juger, d'estimer
33:36 "Est-ce que je pouvais être un bon prof ? Est-ce qu'ils avaient envie
33:38 de me garder ?" Ils voulaient juste que je leur tire les pompes.
33:40 Enfin, clairement, c'était ça. - C'est ce que vous lisez dans vos livres.
33:42 - C'était "Dites-nous que nous sommes géniaux et que vous voulez
33:44 rester chez nous parce que nous sommes géniaux." Alors, moi,
33:46 je m'étais déjà inscrit à la fac pour reprendre des études
33:48 d'économie, pour changer, donc j'avais plus rien à perdre.
33:50 Mais c'est vrai que c'est un peu dommage
33:52 qu'on ait, à ce moment-là,
33:54 et je pense que c'est pas un cas totalement isolé,
33:56 qu'on ait plus cherché à savoir si j'étais
33:58 docile et cireur de pompe, ou
34:00 essayer de voir ce que j'avais dans le ventre en tant
34:02 qu'enseignant. Donc je trouve que la manière
34:04 dont on a cherché à m'évaluer n'était pas la bonne.
34:06 - Parlons vrai. On vous cire pas les pompes,
34:08 mais on va avoir les auditeurs qui veulent vous poser
34:10 des questions. Dans quelques instants, Sylvain Bersinger,
34:12 vous pouvez appeler 0 826 300 300.
34:14 Il y a déjà pas mal de monde, et ça vous
34:16 étonne qu'on ne trouve plus de profs.
34:18 On se retrouve tout de suite.
34:20 Sud Radio,
34:22 Bercov dans tous ses états,
34:24 midi, 34h, Philippe David.
34:26 Et avec nous, Sylvain Bersinger
34:28 pour ce livre, et ça nous étonne qu'on ne trouve
34:30 plus de profs. Pourquoi ? J'ai embrassé,
34:32 puis quitté la profession, publié chez
34:34 Henrik B. Ça réagit beaucoup
34:36 au 0 826 300 300,
34:38 direction Perpignan. Bonjour Claude.
34:40 - Oui, bonjour Philippe,
34:42 bonjour Kif Dété, merci
34:44 de me laisser intervenir.
34:46 - Avec plaisir. - J'ai beaucoup aimé
34:48 votre invité, Sylvain Bersinger.
34:50 - Merci.
34:52 - Ce bon bouquin est fort intéressant,
34:54 et les idées qu'il développe aussi. Il a
34:56 laissé filtrer à un moment le fait
34:58 que parfois les parents pouvaient avoir
35:00 des objectifs pour leur enfant qui n'étaient pas
35:02 tout à fait conformes à ce que leur enfant finalement
35:04 cherchait au travers des études. Moi, je voulais
35:06 aborder un autre aspect, parce que
35:08 j'ai entendu souvent aussi dire
35:10 que dès qu'un
35:12 élève avait des
35:14 comportements un peu désadaptés
35:16 par rapport à ce qu'on attend d'une classe,
35:18 les parents trouvaient que cet élève
35:20 était HPI, qu'il avait tellement
35:22 haut potentiel que la classe... - Haut potentiel intellectuel.
35:24 - Est-ce qu'il a rencontré des cas comme ça où les
35:26 parents surestiment aussi largement
35:28 le potentiel de leur enfant ?
35:30 - Merci beaucoup Claude de Perpignan.
35:32 Est-ce que vous avez eu des élèves HPI,
35:34 Sylvain Bersinger ? - Non, très bonne question.
35:36 - Ça rappelle une série télévisée.
35:38 - Non, j'ai pas eu ce cas de parents qui
35:40 viennent me voir en me disant
35:42 "Oui, mon fils, ma fille
35:44 est un génie incompris, vous n'arrivez
35:46 pas à le faire progresser, à le faire éclore, c'est de votre faute."
35:48 J'ai pas eu ça. J'ai eu des élèves qui me disaient
35:50 "Ah mais monsieur, je bavarde trop, mais c'est parce que
35:52 je suis hyperactif, etc." Mais c'était plus
35:54 sous la forme de la boutade, je sais même pas si eux-mêmes
35:56 y croyaient vraiment. Donc non, pour vous répondre
35:58 Claude, j'ai pas eu ce cas-là. Alors peut-être
36:00 que ça existe sûrement, d'autres profs
36:02 auraient sûrement des exemples
36:04 à vous donner, mais moi j'y ai pas
36:06 été confronté, donc j'ai pas vraiment
36:08 de matière sur le sujet.
36:10 - Merci beaucoup Claude de Perpignan.
36:12 On met le cap au nord, direction Moulins,
36:14 préfecture de Lallier.
36:16 Bonjour Louise. - Oui, bonjour
36:18 et merci pour votre émission.
36:20 Je voulais revenir, parce que
36:22 j'étais enseignante, maintenant je suis à la retraite
36:24 depuis peu, et
36:26 j'étais enseignante en lycée agricole.
36:28 Et j'adhère complètement à
36:30 Sylvain, à propos de
36:32 de cette...
36:34 de l'enseignement qu'on donne dans les lycées agricoles
36:36 où quelquefois, enfin même souvent,
36:38 on récupérait des enfants cassés
36:40 parce qu'ils étaient pas bons en maths
36:42 ou en français, et qui se révélaient
36:44 complètement en lycée agricole.
36:46 Alors moi je voulais juste très rapidement
36:48 parler de... prendre mon pied, parce que
36:50 j'étais enseignante en
36:52 horticulture, et donc
36:54 presque tous les ans, je les emmenais
36:56 visiter des jardins un petit peu
36:58 partout en Europe, et surtout
37:00 en Hollande. Et alors
37:02 une fois, parce que ces
37:04 enfants, enfin ces jeunes, en
37:06 bac pro, étaient souvent des jeunes qui
37:08 n'étaient pas trop sortis de chez eux, puisqu'ils étaient
37:10 issus de la campagne, et
37:12 je me souviendrai toujours, je les avais
37:14 emmenés au Rijksmuseum à Amsterdam.
37:16 - Magnifique ! - Magnifique !
37:18 Et alors, j'ai eu un groupe
37:20 d'élèves qui sont venus vers moi, mais
37:22 complètement transformés
37:24 devant la peinture de Rembrandt,
37:26 la ronde de nuit, en disant
37:28 "Oh, madame, mais qu'est-ce
37:30 que c'est beau !"
37:32 Et bien je peux vous dire qu'à ce moment-là, je me suis dit
37:34 "J'ai fait quelque chose de bien."
37:36 Parce que, le faire
37:38 découvrir les musées aux jeunes,
37:40 c'est incroyable. - Votre témoignage
37:42 est magnifique, parce que justement, vous parliez d'un voyage
37:44 en Italie où c'est tout le contraire.
37:46 Ils pensent qu'à voir les magasins. - Oui.
37:48 - Merci beaucoup Louise, très beau témoignage.
37:50 - Je rejoins ce que dit
37:52 madame. J'ai fait un voyage en Italie
37:54 avec une classe, alors c'était pas
37:56 Amsterdam, mais c'est un peu la même logique,
37:58 et moi je suis un défenseur de ces voyages. Des fois on dit
38:00 "c'est juste pour aller se promener", etc. Je pense
38:02 que c'est vraiment important que les élèves
38:04 puissent sortir de leur cocon,
38:06 puissent voir autre chose. Alors c'est vrai que
38:08 souvent dans ces cas-là, les élèves passent
38:10 un peu plus de temps dans les boutiques qu'on aimerait,
38:12 mais on l'a sûrement tous fait,
38:14 et les adultes, d'ailleurs je le dis dans le livre, les profs font exactement la même chose.
38:16 Et je pense que
38:18 ces voyages-là sont vraiment
38:20 utiles, ils donnent un autre rapport entre
38:22 le prof et l'élève, ils font sortir des élèves qui, comme vous le dites,
38:24 n'ont pas toujours, pour ce
38:26 milieu modeste par exemple,
38:28 l'occasion de sortir de leur campagne,
38:30 parce que moi j'étais aussi dans des lycées ruraux.
38:32 Donc je pense que c'est très bien
38:34 d'avoir ces voyages, et sur l'enseignement agricole,
38:36 je vous rejoins totalement. Moi je pense qu'on devrait
38:38 beaucoup plus s'inspirer des lycées agricoles,
38:40 de leur proximité avec le milieu professionnel.
38:42 - Louise, notre amie Sylvain Persinger
38:44 a embrassé puis quitté la profession,
38:46 vous êtes une jeune retraitée de l'Éducation nationale,
38:48 ce sera à refaire, vous le referiez ?
38:50 - Oui, parce que
38:52 vous savez, quand vous avez
38:54 une classe de 20-30 élèves,
38:56 si vous avez intéressé déjà
38:58 10 élèves, et que, je dirais pas
39:00 grâce à l'équipe pédagogique,
39:02 vous avez réussi
39:04 à les sortir, et moi
39:06 j'en ai beaucoup maintenant qui sont chefs d'entreprise,
39:08 et bien rien que ça, ça donne envie
39:10 de le faire.
39:12 Et je peux vous dire que ça me manque.
39:14 - Bravo à vous et votre témoignage
39:16 sur le Rex Museum était vraiment magnifique.
39:18 Merci beaucoup Louise de Moulins
39:20 dans l'Allier. Là on va aller à quelques milliers
39:22 de kilomètres, et on est très contents
39:24 de savoir qu'on écoute Sud Radio aux Antilles,
39:26 direction Saint-Martin.
39:28 Bonjour Carole,
39:30 bon matin pour vous, quelle heure est-il ?
39:32 - Oui, tout à fait, il est 7h50.
39:34 - Ah oui, bien matinal alors !
39:36 On vous écoute !
39:38 - Écoutez, moi je voulais juste intervenir
39:40 par rapport à mes deux enfants.
39:42 J'ai deux expériences différentes,
39:44 ma fille est en collège privé,
39:46 et mon fils
39:48 est en lycée public,
39:50 et ma fille a eu récemment
39:52 justement une descente
39:54 d'inspecteur dans son
39:56 établissement. Il faut savoir qu'à Saint-Martin
39:58 les établissements privés sont hors contrat.
40:00 Et donc
40:02 du coup
40:04 ils ont été soumis à une
40:06 inspection, ce qui est tout à fait normal,
40:08 puisque
40:10 ça reste dans la légalité.
40:12 C'est juste en fait
40:14 dans la forme qu'il y a été que
40:16 quand votre invité...
40:18 - Sylvain Bersinger.
40:20 - Voilà, qui était
40:22 prévenu à l'avance de l'inspection,
40:24 là ça n'a pas été du tout le cas.
40:26 Ils sont arrivés à 5 ou 6 dans les établissements,
40:28 ont visité
40:30 tous les établissements et ont demandé
40:32 les comptes.
40:34 Et ont pris surtout, moi ce qui m'a beaucoup choqué,
40:36 c'est quand ma fille m'est revenue en disant
40:38 "les inspecteurs sont venus
40:40 et ils ont pris en photo, ils nous ont pris en photo."
40:42 Alors en précisant qu'apparemment
40:44 ils allaient flouter les enfants,
40:46 pas les adultes.
40:48 Je me demandais le but de cette démarche
40:50 déjà, et ça a été
40:52 assez violent pour pas mal d'établissements
40:54 puisqu'en fait, là ils n'ont pas du tout
40:56 été prévenus concrètement à ce qu'a dit votre invité.
40:58 Ça c'est la première chose.
41:00 - Alors attendez, il va réagir, Sylvain Bersinger,
41:02 à la première et après on verra la deuxième.
41:04 - Oui, d'accord. - Bonjour,
41:06 je pense qu'on ne parle pas tout à fait de la même chose.
41:08 Moi quand je disais une inspection, c'est l'inspection
41:10 de l'enseignant, c'est-à-dire quand l'inspecteur vient
41:12 inspecter une classe, là je crois que
41:14 ce dont vous parlez c'est l'inspection de tout un établissement.
41:16 Donc je pense qu'on n'est pas tout à fait sur le même
41:18 type d'inspection. Je pense que la différence
41:20 peut venir de là. - D'accord, ok.
41:22 Et la deuxième chose, en fait,
41:24 elle était concernant, je suis
41:26 parent d'élève, donc pour le lycée de mon fils,
41:28 et
41:30 là, donc de toute l'année, j'ai assisté
41:32 à beaucoup de conseils de classe,
41:34 de différents niveaux dans le lycée, justement, pour pouvoir
41:36 avoir un aperçu un petit peu.
41:38 Et en fait, il n'y a pas eu un seul,
41:40 je dis bien pas eu un seul,
41:42 conseil de classe, sans qu'il n'ait été
41:44 évoqué le problème du
41:46 portable dans les classes.
41:48 C'est
41:50 quelque chose de viral.
41:52 Le problème, il est que, visiblement,
41:54 les chefs d'établissement
41:56 sont assez limités, en fait, dans
41:58 leurs actions, et que
42:00 les enseignants peinent
42:02 à, justement,
42:04 pouvoir faire respecter
42:06 le
42:08 non-usage du portable, parce que, en fait,
42:10 à la fois,
42:12 cet établissement n'a pas la capacité,
42:14 n'a pas la possibilité d'avoir des ordinateurs,
42:16 en fait, à disposition pour les élèves.
42:18 Il n'y a pas les
42:20 financements pour ça. Par contre,
42:22 donc, ils autorisent d'avoir le portable
42:24 dans le sac, sauf que c'est absolument pas
42:26 respecté, et le professeur, en fait, passe son
42:28 temps à demander
42:30 à ce que l'élève remette son
42:32 portable dans le sac. On a
42:34 évoqué, en fait, on a fait une demande comme quoi
42:36 les
42:38 portables soient mis
42:40 dans des boîtes, en fait, à l'entrée de la classe,
42:42 à l'entrée du cours, pour justement...
42:44 Mais, soi-disant,
42:46 il ne faut pas faire ça parce que
42:48 il y a un risque d'abîmer le portable.
42:50 Si jamais l'enfant
42:52 récupère son portable et qu'il y a une fêlure
42:54 sur son écran, il peut porter plainte.
42:56 - Ah oui ! - Donc, il y a
42:58 ce problème-là. Les casiers
43:00 pour mettre les portables, ce n'est pas possible, parce que ça
43:02 demande une trop grosse structure.
43:04 Enfin, il n'y a pas vraiment
43:06 de solution. Nous, on a carrément
43:08 proposé le brouilleur, mais là, pour le coup, les profs
43:10 n'étaient pas d'accord. - Et puis, ça boufferait
43:12 celui des profs et de la direction aussi ! - Ben voilà,
43:14 exactement. Donc,
43:16 en fait, c'est vraiment quelque chose
43:18 de très grave, parce que
43:20 ça perturbe
43:22 énormément les élèves, donc ils ne sont pas du tout
43:24 attentifs. Ça les rend
43:26 inintéressés,
43:28 enfin, complètement, au cours, puisqu'ils sont
43:30 constamment sur leur portable. - Ça, c'est terrible.
43:32 Alors, Carole, il nous reste à peine deux minutes. On va
43:34 faire réagir Sylvain Bersinger. Le portable
43:36 en classe, vous avez été confronté à cette problématique.
43:38 - Non, mais je rejoins ce que vous dites.
43:40 C'est vrai que les portables, c'est un vrai sujet.
43:42 Et les réseaux sociaux qu'il y a dessus, ça va même au-delà
43:44 du portable. - C'est-à-dire que ça balance des photos
43:46 sur Instagram, pendant
43:48 le cours, avec le prof qui est en train d'écrire
43:50 au tableau, quoi ? - Ça peut. Moi, j'ai pas forcément
43:52 eu ce cas-là, mais ça peut. Non, c'est vrai que
43:54 clairement,
43:56 les portables,
43:58 c'est un peu une bataille
44:00 permanente. Il y a des élèves qui sont...
44:02 Il y en a qui sont, je pense, dans des situations d'addiction
44:04 vis-à-vis des réseaux sociaux. Une minorité,
44:06 mais il y en a quelques-uns. Moi, je serais
44:08 favorable, si c'est possible, mais comme vous le dites,
44:10 à mettre en place,
44:12 c'est pas forcément facile. Moi, je serais favorable
44:14 à ce que les écoles soient des zones
44:16 sans portable. C'est-à-dire, soit on vient sans son
44:18 portable, soit on le pose à l'entrée, on n'y touche plus
44:20 de la journée et on le reprend le soir.
44:22 Mais je conçois qu'à mettre en place,
44:24 comme vous le dites, c'est pas évident
44:26 parce qu'il faut une infrastructure. Il y a des portables
44:28 qui peuvent valoir 1 000 euros ou plus,
44:30 si jamais il y en a un qui est cassé ou volé. Après, évidemment,
44:32 on va se retourner vers l'établissement, vers le professeur
44:34 qui a voulu le mettre dans une boîte, etc.
44:36 Ça peut poser des soucis.
44:38 C'est vrai que c'est un très gros problème, mais je suis un peu comme vous
44:40 et comme l'établissement dont vous parlez,
44:42 j'ai pas de solution miracle.
44:44 Est-ce qu'il faudrait
44:46 vraiment mettre de gros moyens pour avoir des casiers
44:48 sécurisés dans tous les établissements, pour qu'il n'y ait plus
44:50 aucun portable dans les classes ? Peut-être.
44:52 Mais c'est vrai que c'est un très gros problème sur lequel
44:54 j'ai pas de solution à proposer.
44:56 - Merci, Carole. On salue
44:58 tous nos auditeurs des Antilles,
45:00 Saint-Martin, ça laisse vraiment rêveur.
45:02 On aurait très envie de vous rejoindre.
45:04 Merci beaucoup, Sylvain Bersinger,
45:06 auteur de cet excellent livre
45:08 et ça vous étonne qu'on ne trouve plus
45:10 de prof, pourquoi j'ai embrassé
45:12 puis quitté la profession.
45:14 Un livre publié chez Henrik B.
45:16 Merci à vous. - Merci.
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