Judikael Hirel, agression pour avoir défendu une femme : "C'est l'archétype de la décivilisation"

  • l’année dernière
Avec Judikael Hirel, journaliste, pour son livre « concorde rouge » aux éditions Le cherche midi.

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Transcript
00:00 Sud Radio Bercov, dans tous ses états, le face à face.
00:06 Et pour le face à face, nous avons le plaisir d'avoir avec nous
00:09 Judith K. Lirel, auteure d'un excellent livre.
00:12 Un livre à lire cet été, "Concorde rouge, dans la peau d'une victime d'agression",
00:17 publié au Cherche Midi. Judith K. Lirel, bonjour.
00:20 Bonjour.
00:21 Bienvenue sur Sud Radio.
00:22 Ce livre, c'est votre histoire de victime d'agression,
00:25 le 13 novembre 2017, à la station Concorde, parce que vous portez secours à une femme
00:30 victime d'une agression sexuelle.
00:32 Oui, exactement, c'est un petit peu ce qui peut arriver à n'importe qui dans les transports en commun,
00:35 n'importe quand, et notamment à Paris, parce que le métro parisien est le plus grand de France.
00:40 Mais on imagine toujours que ça arrive aux autres, ou que ça ne va pas arriver,
00:43 et puis à un moment vous rentrez dans cette réalité parallèle,
00:45 où vous devenez victime d'agression, en l'occurrence en défendant une jeune femme
00:48 qui était elle-même victime d'une agression sexuelle.
00:50 Votre agresseur est ivre et probablement drogué,
00:53 il arrive par derrière et personne ne vous porte secours ?
00:57 Non. D'ailleurs, personne n'a porté secours à cette jeune femme avant,
01:00 quand il a commencé à s'en prendre à elle,
01:02 et après, la seule personne qui m'est portée secours quand j'étais KO au sol,
01:05 après que ce charmant jeune homme m'ait assommé, exposé la tempe et roué la tête de coup de pied,
01:09 c'est la jeune femme que j'avais défendue quelques minutes avant,
01:11 mais à 19h30, finalement en pleine heure de pointe des transports en commun parisiens,
01:14 quand les gens rentrent chez eux, c'est vrai que ça pose question sur le fait de regarder sans agir.
01:19 Dans l'escalier, vous restez groggy, maculé de sang,
01:23 qu'est-ce que vous ressentez à ce moment-là ?
01:26 C'est assez bizarre parce qu'en fait, vous vous réveillez,
01:29 le seul souvenir que j'ai de cette agression, vu que j'ai été mis KO directement
01:32 par un grand coup de poing avec un grand coup de bouteille à la tempe,
01:34 c'est que finalement c'est un peu comme dans les jeux vidéo,
01:36 je l'ai vu rouge et puis j'ai vu noir, comme quand on éteint l'écran et qu'on est mort dans un jeu vidéo.
01:40 Donc quand je me suis réveillé, j'ai mis un moment à comprendre en fait ce qui m'était arrivé,
01:43 et là je me dis "ah mais en fait, je me suis fait agresser, je me suis fait frapper,
01:46 je viens de me réveiller, et si je me réveillais pas, je serais même pas au courant que je suis mort".
01:51 - Ah oui, c'est à ce point ?
01:53 - Oui, on réalise tout d'un coup que j'aurais été d'un lien informé en quelque sorte.
01:57 - Est-ce que l'effet de sidération, c'est ce que vous avez vécu ?
02:01 - Autour de moi, oui. Parce qu'effectivement, quand les gens voient une agression,
02:05 ils sont habitués à voir de la violence au cinéma, à la télévision...
02:08 - Mais c'est du cinéma ?
02:09 - Mais c'est du cinéma, et on ne réalise pas que c'est vrai.
02:11 C'est un peu comme une vitre de voiture en sucre,
02:13 on la voit cassée, on pense que c'est facile, et on se fait mal quand on essaie.
02:16 Donc là, la violence, quand on la voit en vrai, le cerveau met un petit moment à comprendre ce qui se passe,
02:20 à dire "mais ce que je vois là, c'est vrai en fait, c'est une vraie agression".
02:23 Donc c'est cet effet de sidération qui fait qu'en général, les gens qui voient une agression,
02:27 quelques secondes, ne bougent pas.
02:30 Et après, ils décident ou non de réagir, mais c'est la peur qui peut prendre le dessus,
02:33 ou c'est autre chose, et ils interviennent ou pas,
02:36 mais en tout cas, au début, le premier réflexe, c'est d'assister passivement,
02:39 parce qu'on ne comprend pas que ce que l'on voit existe réellement.
02:42 - Et vous racontez votre transport en ambulance,
02:46 et votre surprise que les gens qui vous portent secours sont toujours par deux.
02:50 - Oui, c'est assez bizarre. - C'est assez amusant dans votre livre d'ailleurs.
02:53 - Oui, oui. En fait, quand on se réveille et qu'on est bien KO,
02:55 et je ne sais pas comment font les boxeurs d'ailleurs pour survivre à un genre de choses à répétition,
02:58 vraiment, le monde est très réduit autour de vous, vous êtes un commun enfant,
03:01 vous ne voyez plus qu'à un mètre autour de vous.
03:03 Moi, je me rappelle que j'avais l'impression d'être dans un tunnel de Hobbit,
03:05 vous voyez, tout petit, dans le noir, un peu perdu.
03:07 Et autour de moi, j'ai vu deux agents de la RATP d'abord,
03:10 qui insistaient pour me demander mon nom et mon numéro de téléphone, c'est gentil à eux.
03:13 Puis après, j'ai vu deux policiers qui, pareil, avaient des questions,
03:16 j'enquête autour de moi. Puis après, j'ai vu arriver deux pompiers,
03:18 qui m'ont emmené en fauteuil roulant jusqu'à une ambulance pour m'emmener aux urgences.
03:22 - Vous vous plaignez aussi des rues pavées dans l'ambulance ?
03:26 - Est-ce que je devrais me plaindre des rues rues pavées ?
03:29 Parce que finalement, contenu en ambulance avec le gyrophare,
03:31 on peut rouler vite à Paris, ce qui n'est pas si courant que ça.
03:33 - Oui, mais les pompiers vous amènent donc aux urgences de l'hôpital Saint-Antoine,
03:38 on est deux ans avant le Covid, parce que le Covid c'est fin 2019, début 2020,
03:42 et c'est déjà les urgences, une véritable cour des miracles
03:46 que vous racontez dans votre livre, c'est incroyable.
03:49 Surtout que vous êtes quand même très grièvement blessé.
03:51 - Oui, mais en fait, on ne s'en rend pas très compte que je suis très grièvement blessé,
03:54 parce que dans mon cas, j'avais le visage qui était éparpillé façon Paul,
03:57 comme on aurait dit chez Audiard, mais c'était sous la peau.
03:59 - Dans les temps qu'on flingue.
04:00 - Voilà, donc on avait l'impression, je me suis juste fait casser le nez,
04:02 et puis voilà, que ce n'était pas dramatique,
04:03 que ce n'était pas comme une fracture ouverte ou autre.
04:05 Bon voilà, une personne de plus qui s'est bagarrée aux urgences,
04:07 ce n'est pas la priorité des priorités.
04:09 Mais quand j'y suis arrivé, et vu les quelques heures que j'y ai passé à attendre
04:11 avant de m'évanouir, pour être sincère,
04:13 j'ai vraiment eu l'impression d'être aux portes des enfers,
04:16 avec tous ces gens qui arrivent en permanence,
04:18 des cas entièrement différents, ces médecins, ces infirmières
04:21 qui passent leur temps à re-hierarchiser les urgences, à prioriser.
04:24 Je me dis, mais c'est quand même dingue.
04:26 On voit vraiment toute la misère humaine, toute la douleur,
04:28 en un concentré dans une grande salle d'attente des urgences,
04:31 et on n'imagine pas, tant qu'on n'y est pas,
04:33 le boulot énorme que ça représente,
04:35 avec parfois trois bouts de ficelle pour travailler.
04:37 Donc je suis très très admiratif de la médecine publique française,
04:39 parce que c'est formidable ce qu'ils font.
04:41 - Mais on vous a expliqué, parce que géographiquement,
04:43 la Concorde et Saint-Antoine, ce n'est pas le même coin,
04:45 on ne pouvait pas vous amener dans un hôpital plus proche,
04:47 ou on vous aurait peut-être pris plus vite, ou dans une clinique même ?
04:49 - Aucune idée. J'ai été pris en charge par les sapeurs-pompiers de Paris,
04:52 rapide et efficace, et très efficace aussi pour vous empêcher
04:54 de pas être connaissant en vous parlant tout au long du trajet.
04:57 Mais à part ça, je ne sais pas pourquoi celui-ci, pourquoi un autre.
05:00 - Vous repartez le lendemain matin chez vous, comment se passe votre retour ?
05:04 - Un peu surréaliste, j'avoue, parce que finalement,
05:06 je suis arrivé en début de soirée aux urgences,
05:08 j'ai attendu toute la soirée d'être pris en charge,
05:10 ce qui ne me choque pas, parce que je n'étais pas la priorité des priorités.
05:13 J'ai passé un scanner, on a étudié mon cas,
05:15 on a commencé à bien s'occuper de moi,
05:17 quand j'ai commencé à raconter ce qui s'était passé.
05:19 Je trouvais que tout au long de mon parcours de victime,
05:21 j'ai été choyé comme un bébé, parce qu'à chaque fois,
05:23 je disais que j'avais été agressé pour avoir défendu une femme victime d'agression,
05:26 et ça touchait aussi bien le corps médical que les policiers, que tout le monde.
05:29 Donc j'ai toujours été adorablement traité.
05:31 Mais vers le matin, quand j'ai fini mes examens,
05:34 je suis rentré chez moi en taxi, tout simplement.
05:36 Et c'est d'ailleurs la seule dépense que j'aurai eue pendant toutes mes aventures,
05:39 c'est payer un taxi pour rentrer chez moi,
05:41 et je suis rentré chez moi à l'aube, un peu comme les gens qui rentrent de discothèque,
05:44 sauf que moi, ce n'était pas exactement le cas.
05:46 Mais au moins, je ne voulais vraiment pas dormir à l'hôpital et continuer à rester,
05:48 je voulais rentrer chez moi et montrer à mes proches et à mon épouse
05:51 que ça n'allait quand même pas si mal que ça.
05:53 Ce qui est une vue d'esprit de ma part, mais au moins j'étais rentré.
05:55 - Vous vantez le système de santé français d'ailleurs dans votre livre.
05:58 - Oui. Je regrette juste de ne pas savoir combien j'ai coûté à la collectivité.
06:01 Parce que les heures d'opération, les hospitalisations,
06:03 c'est quand même des sommes assez conséquentes,
06:05 c'est des grands professionnels qui vous opèrent en chirurgie maxilofaciale,
06:08 comme on appelle ça,
06:09 et je n'ai aucune trace de ce que ça a pu coûter à la communauté.
06:13 Mais c'est là qu'on comprend pourquoi est-ce qu'on paye des impôts.
06:15 - Le médecin légiste vous prescrit 90 jours d'ITT.
06:18 L'interruption temporaire de travail, c'est très lourd.
06:21 - C'est beaucoup.
06:22 Ça veut dire que je suis passé, comme on me l'a expliqué aux urgences,
06:24 à deux coups de pied dans la tête du cimetière, pour être clair.
06:27 - Oui, un coup de pied de la mort.
06:28 - C'est un peu ça.
06:29 Et quand je suis arrivé deux jours après ou trois jours après,
06:32 je ne me souviens plus très bien aux urgences maxilofaciales,
06:34 le temps que tout ça dégonfle un petit peu,
06:36 l'interne qui était là de permanence m'a clairement dit
06:40 "s'il n'y avait pas la peau, votre visage tomberait".
06:42 Et c'est ça qui a frappé le médecin légiste aussi.
06:44 "Frapper", ce n'est peut-être pas le bon terme me concernant.
06:46 - Vous êtes un médecin légiste, vous êtes bien là avec nous.
06:48 - Oui, voir un médecin légiste en vivant, c'est très bizarre.
06:50 Mais heureusement, c'est possible.
06:52 Il m'a mis 90 jours d'ITT, et après j'ai appris que c'était beaucoup.
06:56 Je ne connaissais pas cette norme auparavant.
06:58 - Je peux vous dire, c'est énorme.
06:59 Vous ouvrez de 14 fractures faciales.
07:03 - Ah oui, ce charmant jeune homme bourré et sans doute drogué ne m'a pas raté.
07:07 Je crois qu'il voulait vraiment me tuer,
07:08 parce qu'il m'a éparpillé, comment dirais-je plutôt,
07:12 il a émietté les os du visage à coups de pied.
07:14 Donc j'avais le nez brisé, la mâchoire brisée en plusieurs endroits,
07:17 des dents cassées, tout ce qu'on appelle ce qui est en dessous des yeux entièrement brisé aussi.
07:22 Donc on m'a remis pour fixer tout ça, une cinquantaine de petites plaques de titane
07:25 sous la peau de la taille d'un ongle qui tenait les os en place pour que tout ça ne s'effondre pas.
07:29 - Vous racontez une anecdote où un interne met un doigt dans votre bouche
07:32 et fait bouger tout votre visage.
07:34 - Oui, c'est pas trop.
07:35 - Quand on dit ça...
07:36 - Il avait beaucoup de chance, parce que comme j'avais la mâchoire brisée,
07:38 je ne pouvais pas lui mordre le doigt.
07:40 - Vous auriez fait le volant du nez sinon.
07:42 - Mais ça m'a tenté.
07:43 J'étais content de servir d'exemple médical.
07:45 Il a dit à ces trois jeunes gens qui étaient là,
07:47 "Regardez, vous ne verrez pas ça très souvent quand même, c'est incroyable,
07:50 on appuie là, il y a tout le visage qui bouge, regardez bien."
07:52 Bon, on se sent un petit peu aussi reux que quand même,
07:54 mais bon, c'était pour faire la culture générale des futurs médecins, c'est pardonnable.
07:57 - Vous avez eu peur d'être défiguré ?
07:59 - Non, j'ai eu peur de perdre la vue.
08:01 - Oui.
08:02 - Parce que je suis journaliste.
08:03 - Vous avez voulu essayer de perdre la vue ?
08:04 - Non, mais c'était ma honteuse personnelle.
08:06 Je crois qu'on a chacun ses peurs dans la vie.
08:08 Et moi, comme mon travail, c'est principalement d'écrire,
08:10 vu que je suis journaliste,
08:11 perdre la vue, c'est la chose la plus horrible à mes yeux.
08:13 - Et il faut attendre que les chairs dégonflent
08:15 pour vous opérer une très très longue opération.
08:18 - Oui, une bonne bonne journée de...
08:20 - Vous la racontez d'ailleurs,
08:22 enfin pas le moment où vous êtes endormi, mais le réveil, etc.
08:24 - Je ne me rappelle pas très bien.
08:25 Je peux juste dire que c'est très efficace,
08:26 parce que je n'ai même pas eu le temps de remercier l'équipe
08:28 qui me prenait en charge à l'aube.
08:29 Et autant que je veuille leur dire merci,
08:31 je me suis endormi tellement les produits agissent vite.
08:33 Je regrette un peu, je n'ai pas pu les remercier de vive voix en tout cas.
08:35 - Mais vous les avez remerciés dans votre livre.
08:37 - Oui.
08:38 - Un excellent livre.
08:39 Concorde rouge dans la peau d'une victime d'agression
08:41 de Judith K. Lirel.
08:43 On le retrouve dans quelques instants,
08:44 pour continuer à en parler,
08:45 parce qu'il parle de sa condition de victime,
08:47 il parle de l'insécurité en France.
08:49 Vous avez été victime d'agression ?
08:51 Un ou une de vos proches a été victime d'agression ?
08:53 Vous avez aussi été passés par pertes et profits,
08:56 par les pouvoirs publics ?
08:57 Appelez-nous pour témoigner au 0826 300 300.
09:00 - Et avec nous Judith K. Lirel, journaliste,
09:10 auteure de Concorde rouge dans la peau d'une victime d'agression,
09:13 publiée aux Cherches Midi.
09:15 On a relaté de votre agression,
09:16 comme au début du livre, Judith K. Lirel,
09:18 dans le chapitre "Un sentiment d'insécurité".
09:21 Vous mettez le doigt où ça fait mal.
09:23 On commence par le déni du garde des Sceaux,
09:25 surtout quand on voit les chiffres et leur évolution.
09:27 Ils sont terrifiants, il n'y a pas d'autre mot.
09:30 - Oui, parce qu'on ne se rend pas compte.
09:32 En réalité, au quotidien, on va voir un fait divers
09:34 qui va monter dans les médias de ci de là,
09:35 plus ou moins grave, plus ou moins traité.
09:37 Et puis après, on va passer à autre chose.
09:38 Comme d'ailleurs la grand-mère et la petite-fille,
09:40 l'autre jour à Bordeaux.
09:41 On parle des victimes pendant 2-3 jours,
09:42 on s'apitoie, et puis après,
09:44 l'un clouche face à l'autre et on les oublie.
09:46 Sauf que les victimes, elles restent victimes à vie.
09:47 Et puis quand on commence à gratter un tout petit peu le vernis,
09:49 on se rend compte qu'il n'y a pas une victime,
09:51 il n'y a pas deux victimes.
09:52 Il y en a 150 000, 200 000 par an.
09:54 Vous rajoutez les proches qui sont des dommages collatéraux,
09:56 et vous vous rendez compte que ça concerne
09:57 des centaines de milliers de personnes en France.
09:59 Mais comme on est chacun dans notre coin
10:00 avec notre drame personnel,
10:02 finalement, il n'y a pas cet effet de masse
10:03 qui fait qu'on s'en soucie.
10:04 Mais globalement, en France, on peut compter
10:06 à peu près 350 agressions violentes par jour.
10:09 - Par jour, c'est comme ça ?
10:10 - Si on s'en inquiétait, si on en prenait conscience,
10:12 peut-être qu'on s'en occuperait un peu plus.
10:14 Je ne dis pas que j'ai la formule magique.
10:15 Moi, ce qui m'intéresse, c'est d'annoncer qu'il y a des victimes
10:17 et dire qu'il faut qu'on s'en occupe pour les éviter,
10:19 et après, une fois qu'on n'a pas pu l'éviter.
10:21 Mais c'est énorme !
10:23 - Vous êtes interviewé par France 2
10:25 pour passer dans le 20h sur les lieux de votre agression,
10:28 et le sujet n'est jamais diffusé
10:30 sans qu'on vous donne aucune raison.
10:32 - Jamais.
10:33 J'ai discuté par Twitter à l'époque
10:36 avec le jeune journaliste qui avait géré le dossier.
10:38 On avait enregistré la chose, il était très sympathique.
10:40 La prise de son, les images, in situ.
10:43 On vous recontactera, on vous dira quand ça passe.
10:45 Et puis, au bout de quelques semaines, j'ai commencé à m'en inquiéter.
10:47 Et puis, ça n'est jamais passé.
10:48 Le garçon avait changé de boulot entre-temps.
10:50 Il suffit que ça ne passe pas,
10:52 parce qu'en tant que journaliste, je me choque,
10:53 parce qu'on va au bout des choses.
10:54 - Oui, quand on fait du boulot, on est bien...
10:56 - Et puis, on respecte les gens qu'on interview
10:57 parce qu'on leur prend du temps aussi, donc c'est normal.
10:59 Et finalement, il aura fallu que je sorte un livre
11:01 et que je fasse un petit peu de bruit
11:02 pour que France 2 et la gentillesse de m'inviter.
11:04 - Et il y a beaucoup de médias qui vous ont invité pour votre livre ?
11:06 - Énormément, sauf le service public radiophonique.
11:10 - D'accord. Ce qui est moyennement étonnant.
11:12 Justement, est-ce que le fait que ce soit pas diffusé sur France Télévisions,
11:16 je citais Adèle Filernot tout à l'heure,
11:18 c'est pas parce qu'elle veut montrer le monde
11:20 tel qu'elle aimerait qu'il soit,
11:21 plutôt que tel qu'il est.
11:22 Est-ce qu'il n'y a pas un déni ?
11:24 Je prends un exemple, je crois que c'était sur le service public,
11:27 Mathieu Kassovitz, qui dit à la veuve du bus de Bayonne
11:30 qui s'est fait tuer par des voyous, vous vous en rappelez ?
11:33 Qui dit "oui, je suis désolé, mais c'est un fait divers".
11:35 Est-ce qu'il n'y a pas quand même une revalativisation totale
11:37 de la souffrance des victimes,
11:39 et le fait de dire "cachez donc ces agressions que je ne saurais voir".
11:42 - C'est exactement ça. J'ai l'impression que les victimes d'agressions
11:44 sont la poussière qu'on remet sous le tapis.
11:46 Mais le tapis commence à être assez épais,
11:47 vu la quantité de poussière qu'il y a.
11:49 Et puis surtout, une victime, c'est pas sexy.
11:51 Ni pour les politiques, ni pour les journalistes,
11:53 parce qu'une victime, c'est un constat d'échec.
11:55 Si on a été agressé, c'est qu'on n'a pas pu l'éviter, finalement.
11:57 C'est pas la faute de la victime,
11:58 même si les victimes se sentent souvent coupables d'avoir été agressées,
12:00 c'est la faute de l'agresseur.
12:02 - Mais il n'y a pas une idéologie sur le sentiment d'insécurité en France ?
12:05 - Je pense qu'il y a une négation.
12:06 On ne veut pas voir la réalité,
12:07 parce que cette réalité supposerait de prendre des décisions,
12:09 et on n'a pas envie de prendre ces décisions.
12:11 Donc c'est une chaîne de causalité,
12:12 et les politiques veulent toujours vous dire que ça va bien.
12:14 C'est vraiment pour ça que j'ai voulu faire ce livre,
12:15 c'est parce que j'avais l'impression qu'on ne parlait pas des victimes,
12:18 voire même, soyons clairs, qu'on s'en foutait entièrement.
12:20 Donc du coup, je me suis dit, à force d'entendre,
12:22 ça m'a agacé, ces séquences de communication
12:25 auxquelles on est soumis en tant que journaliste en permanence,
12:27 avec les plans de com', des politiques,
12:28 tout va bien, une annonce par jour,
12:29 je me suis dit, mais en fait, il n'y a jamais d'annonce sur les victimes.
12:32 On ne parle pas des victimes dans l'élection présidentielle,
12:34 on n'en parle pas aux législatives,
12:35 on en parle un peu aux municipales.
12:37 Et finalement, il fallait disrupter un petit peu ça,
12:39 faire un peu le grain de sable dans la machine,
12:41 pour leur dire, "Eh, on existe !"
12:43 - Pourtant, vous aviez porté ce cours à une femme,
12:45 ça aurait dû vous valoir qu'on vous traise des lauriers,
12:47 mais vous n'avez peut-être pas le bon profit,
12:49 vous étiez un mâle blanc depuis le 50 ans,
12:51 c'était ça le problème pour le service public ?
12:53 - Peut-être, peut-être, je ne sais pas,
12:55 il faudrait leur poser la question.
12:56 En tout cas, j'ai une mère dans ma vie,
12:58 une catextre sympathique,
12:59 qui m'a fait donner une décoration,
13:00 ce qui a fait beaucoup de plaisir à mes enfants,
13:02 la médaille pour acte de courage et dévouement,
13:04 à laquelle je suis très attaché,
13:05 parce que généralement, c'est les policiers, les pompiers,
13:07 les hommes qui l'ont, qui mettent leur vie en danger pour la voir.
13:09 Moi, j'ai fait quelque chose d'utile dans ma vie,
13:11 pendant 30 secondes,
13:12 eux, ils font ça toute la journée, c'est un peu différent.
13:14 - Alors, justement, vous plaignez, vous en avez parlé,
13:16 vous l'avez effleuré, le débat du second tour de la présidentielle,
13:18 5 minutes en tout et pour tout,
13:20 pour parler de l'insécurité.
13:21 - Ah oui, c'est sûr que ce n'est pas le sujet
13:23 qu'on avait envie d'aborder,
13:24 donc, c'est allé très très vite.
13:26 Si on rapproche ça du nombre de victimes,
13:28 on se dit, ça fait combien de millième de secondes
13:30 par victime d'agression ?
13:32 - Mais vous parlez au début du livre de personnes mortes
13:34 en portant secours à quelqu'un,
13:36 un gamin, enfin un jeune adulte,
13:38 qui porte secours à sa copine,
13:40 qui se fait piquer son portable,
13:41 qui se fait tuer à Marseille, etc.
13:43 Il fallait du courage pour faire ce que vous avez fait ?
13:46 - Peut-être, c'est ce qu'on m'a dit en tout cas.
13:48 - Du courage ou de l'inconscience ?
13:49 - Non, c'est parce qu'on ne réfléchit pas à l'inconscience,
13:51 c'est faire des choses dangereuses sans y réfléchir,
13:53 enfin, stupidement, on va dire.
13:55 Le courage, je pense que c'est surtout de faire ce qu'on a à faire,
13:58 tout simplement.
13:59 Je ne me suis pas posé de question,
14:00 c'est ce qu'il fallait faire à ce moment-là.
14:02 Ce type venait de mettre une énorme main en fesse
14:04 à cette jeune mame dans un couloir de métro,
14:06 il était ivre, il avait une bouteille de bière à la main,
14:08 un litre de bière, pas un centilitre,
14:10 et il commençait à s'embrouiller.
14:11 Pour moi, il était évident que dans les secondes qui allaient suivre,
14:13 il allait la frapper.
14:14 Et je n'allais quand même pas attendre que ce type la frappe
14:16 pour intervenir, il a déjà l'agressé.
14:18 Donc ça tombe sous le sens,
14:19 mais je pense que ça devrait tomber sous le sens de tout le monde
14:21 et qu'il appartient à chacun de penser à tous
14:23 et que plus on est nombreux à intervenir,
14:25 plus on intervient à se mettre en danger.
14:26 Quand on est tout seul, c'est vrai, c'est plus dangereux.
14:28 - Votre plainte a été classée en deux mois,
14:30 on n'a même pas recherché votre agresseur
14:33 qui a priori était russe.
14:35 - On l'a un peu recherché, parce que je suis allé au commissariat
14:37 regarder le fichier, vous savez, on regarde les images sur un écran,
14:39 je ne l'ai pas reconnu.
14:41 Il a disparu du métro, il a filé dans la ville,
14:43 on n'a pas les systèmes pour retrouver les gens après,
14:45 pour les "loger" comme on dit, pour les retrouver.
14:47 Donc il était des pays de l'Est,
14:49 en tout cas il avait un fort accent des pays de l'Est,
14:51 russe ou ukrainien, je ne sais pas,
14:52 il avait vraiment le look de petit mafieux,
14:54 d'homme de main, très efficace et très violent,
14:56 mais il ne faut pas vouloir discuter avec.
14:58 Mais oui, ce n'est pas un sujet très sexy,
15:00 finalement, de rechercher ce type de personnes.
15:02 Et puis au moment où c'est arrivé,
15:04 où l'affaire a été classée, d'un point de vue policier,
15:06 ce n'est pas non plus l'affaire la plus sexy, encore une fois,
15:08 parce qu'il n'y a pas d'armes, il n'y a pas de coups de couteau,
15:10 je ne suis pas mort, est-ce que c'est moi ?
15:12 Si j'étais mort, ça aurait peut-être été plus intéressant,
15:14 mais étant vivant et plutôt en pas si mauvaise forme que ça,
15:16 ce n'était pas le sujet du jour.
15:18 - Mais en termes de nombre de dossiers qu'il a traités toute l'année, la police fait son job.
15:20 - Mais est-ce que quelque part, ça ne nous met pas la puce à l'oreille,
15:23 en se disant qu'à Londres, ville qui est truffée de caméras de vidéosurveillance,
15:27 c'est quand même une très bonne chose, parce que quand il y a eu les attentats de Londres,
15:30 de mémoire en juillet 2005,
15:32 on a pu tracer les terroristes du début à la fin.
15:34 - Entièrement, c'est ce qui permet, comme on dit dans mon langage policier,
15:36 de loger des malfaiteurs.
15:38 Mais c'est un arbitrage un peu compliqué à faire.
15:40 Qui plus est en France, patrie les droits de l'homme
15:42 sur les atteintes aux libertés individuelles
15:44 par rapport à la sécurité.
15:46 A quel moment est-ce que tout ça peut aussi être mal utilisé par un mauvais régime ?
15:49 Entre de bonnes mains et avec de bons sentiments, c'est bien.
15:52 Entre de mauvaises mains, ça peut devenir dramatique.
15:54 Comme les réseaux sociaux d'ailleurs, qui enregistrent beaucoup de choses sur nous.
15:56 Et là, Londres est un bon exemple.
15:58 Est-ce qu'on est capable à Paris, pour les Jeux Olympiques
16:00 ou la Coupe du monde de rugby de faire ça ? Je ne sais pas.
16:02 Est-ce qu'on le voudra politiquement ? Je ne sais pas non plus.
16:04 - Et entre peines de prison non effectuées,
16:07 classement sans suite, comme pour vous,
16:09 au QTF non déexécuté,
16:11 je vais poser la question cash, parlons vrai,
16:13 est-ce qu'on est en train de livrer la France à la violence ?
16:16 - En tout cas, le sentiment d'insécurité augmente.
16:18 Ce n'est pas qu'un sentiment, c'est une réalité.
16:20 Les agressions sont là.
16:22 Le constat est aussi que dès qu'on met des hommes en face,
16:24 l'insécurité baisse.
16:25 Quand la police augmente ses patrouilles,
16:26 quand il y a plus d'hommes dans les rues
16:27 ou sur les quais de métro,
16:28 il y a moins d'agressions parce que ça décourage.
16:30 Ce ne sont pas les caméras qui vont décourager.
16:31 En revanche, la présence humaine, ça décourage quelques-uns déjà.
16:34 Après, ce qui est vrai, c'est que l'impunité existe.
16:36 Mon agresseur a agressé une femme, il a failli me tuer en 5 minutes chrono.
16:40 On ne l'a jamais retrouvée, il n'a pas été condamné.
16:42 C'est un exemple parmi combien.
16:44 C'est pareil comme ça tous les jours.
16:45 On peut rajouter à ça ceux qui ne vont pas aller en prison
16:48 parce qu'en dessous d'un an, on ne va plus en prison,
16:50 il n'y a pas assez de place.
16:51 - Même en dessous de deux ans régulièrement,
16:52 parce qu'il n'y a pas assez de place en prison,
16:54 on met un bracelet électronique.
16:55 - Le cas de Bordeaux, il n'y a pas de place non plus.
16:56 En hôpital psychiatrique,
16:57 on sent des personnes qui apparemment ne sont pas saines d'esprit
16:59 ou que la drogue a abîmé.
17:00 Elles ne devraient pas être dans la rue.
17:01 Le meilleur des agresseurs, c'est celui qu'on ne croise pas finalement.
17:04 Mais le type qui n'est pas mis en prison ou qui n'est pas interné, soyons clairs,
17:08 évidemment on peut retomber sur lui dans la rue
17:10 et c'est au bout de X victimes qu'on va commencer à s'en soucier.
17:12 C'est dommage.
17:13 - Jeudi, quelle, iréelle, la justice est-elle laxiste avec les agresseurs ?
17:17 - Je pense qu'il y a quand même un parti pris de certains juges
17:21 qui est clairement politique.
17:23 Vous savez, j'ai fait des études de droit à l'origine,
17:24 avant d'être journaliste.
17:26 Et je me rappelle le camarade de fac qui me disait
17:28 "moi je veux être magistrat", ils étaient d'extrême gauche, soyons clairs,
17:31 "je veux être magistrat pour changer la société de l'intérieur par mes jurisprudences".
17:34 Ils sont tous devenus magistrats aujourd'hui.
17:36 - C'est la jurisprudence de Baudot, c'est ça ?
17:38 - Oui, c'est l'antrisme en fait, c'est une vieille méthode trotskiste aussi.
17:40 Vous rentrez dans les médias, dans les communications, dans la politique, dans la justice
17:43 et vous changez les choses de l'intérieur selon vos idées.
17:45 Vous ne voulez pas que le réel existe, vous voulez que le réel prenne la forme que vous voulez lui donner.
17:49 Donc là en l'occurrence, si on est contre la prison, contre les peines, contre l'autorité,
17:53 et bien on va, par ces décisions, faire exactement l'inverse.
17:56 - Quand vous voyez des sociologues, il y en a une sur Twitter,
17:58 je n'ai pas envie de la citer, elle travaille aux Etats-Unis,
18:00 qui demande, elle a même écrit un livre, de supprimer la police.
18:03 Vous avez envie de crier quoi ?
18:05 Au fou, à l'inconscience, ou là, c'est irrécupérable ?
18:08 - Sans aller aussi loin, Elfid, il y a quelques jours,
18:10 disait qu'il fallait que la police intervienne le moins possible,
18:12 qu'elle soit le moins armée possible suite au drame de Nahel.
18:14 Il y a peut-être des justes milieux, on est toujours dans l'invectif,
18:17 dans les engueulades entre politiques de tous bords,
18:20 mais j'ai l'impression d'assister à un vaste jeu de rôle,
18:22 quand dans nature, vous savez, chacun remplit son rôle, chacun a ses phrases,
18:25 comme une grille de bingo qu'on remplirait.
18:27 Alors, insécurité, agression, instrumentalisation,
18:30 puis une fois qu'on a fait le tour des mots, on passe à une autre affaire,
18:32 on repart sur une autre séquence de com', et les victimes, elles restent victimes.
18:35 - Votre colère, vous le dites, elle est chaque jour avec vous,
18:38 depuis le 13 décembre 2017 ?
18:40 - Ah toujours, c'est même un très bon moteur la colère en fait,
18:43 on la maîtrise bien et on la contrôle bien,
18:44 elle m'a aidé à écrire ce livre pour essayer de faire bouger 2-3 petites choses.
18:47 Quand j'ai écrit ce livre, j'avais en tête des choses que je voulais voir changer
18:49 pour les prochaines victimes et pour éviter quelques victimes.
18:52 Si j'y arrive, je me dirais que ça aurait servi à quelque chose.
18:54 - Une phrase du préfet, parce que vous avez été décoré,
18:57 ça ne vous donne pas le droit à la pension par contre,
18:59 vous n'avez pas le droit à de l'argent pour la médaille,
19:02 une phrase du préfet du Val-de-Marne vous révolte lorsqu'on vous décore,
19:06 je cite le préfet, vous le saviez, vous savez d'habitude,
19:09 personne n'intervient jamais.
19:11 - Oui, je crois que c'est ça et le nombre de femmes qui se sont vues me raconter
19:14 leurs mésaventures et leurs agressions et leurs peurs quotidiennes
19:17 qui m'ont décidé à prendre la plume,
19:19 parce que c'est quand même incroyable quand on se dit,
19:21 on est en 2023, tous les jours, des femmes autour de nous ont peur de prendre les transports,
19:25 se font agresser et personne n'intervient.
19:28 Et quand on vous décore, on était deux civils décorés
19:32 pour avoir protégé des femmes, tous les deux d'ailleurs,
19:34 au milieu d'une bonne centaine de policiers ce jour-là,
19:36 et on se demandait un peu ce qu'on faisait là,
19:38 et on se disait surtout qu'on n'était pas très très nombreux.
19:40 - Quand vous voyez que des légionnaires qui avaient porté secours
19:42 il y a quelques années à une femme qui était agressée dans le métro
19:45 ont été lourdement condamnés parce qu'ils avaient peut-être mis
19:47 une ou deux gifles de trop à l'agresseur,
19:50 est-ce que ce n'est pas fait pour dissuader les gens de porter secours ?
19:53 On a vu encore plus près il y a quelques semaines,
19:56 trois cambrioleurs, la personne cambriolée arrive à immobiliser un des cambrioleurs,
20:01 la police ou les gendarmes arrivent,
20:03 il a été plus condamné que son cambrioleur pour séquestration.
20:07 Est-ce qu'on n'est pas chez les fous ?
20:08 Est-ce que la France n'est pas open bar pour la délinquance et la criminalité ?
20:11 - Surtout une américanisation des choses, j'ai l'impression, dans le côté judiciaire.
20:14 - S'il y aurait une américanisation des choses, les gens seraient armés ?
20:17 - Du côté avocat.
20:19 L'avocat de l'agresseur va attaquer celui qui s'est défendu
20:23 en disant "c'est scandaleux, il a usé d'une violence excessive,
20:26 il a dépassé les règles de légitime défense", comme on dit,
20:29 et effectivement à ce moment-là le défenseur devient le coupable.
20:33 Donc c'est vraiment, on marche à l'envers.
20:36 - Mais le drame c'est qu'il y a des lois quand même qui assurent l'impunité, par exemple,
20:39 qui assurent la sanction contre le cambriolé qui arrête son cambrioleur.
20:43 Il faudrait abroger des lois comme ça.
20:45 - De même qu'il existe un article de loi qui permet à n'importe qui
20:48 d'interpeller quelqu'un et l'amener au commissariat le plus proche.
20:50 Ce n'est pas illégal, on a vu le cas à Lorient récemment pendant les émeutes.
20:53 Il n'est pas illégal d'intervenir et d'arrêter quelqu'un,
20:56 et après de le confier aux forces de l'ordre.
20:58 - Judy K. Lirel, Concorde Rouge, un livre à lire absolument
21:01 dans la peau d'une victime d'agression.
21:03 Vous voulez réagir ? Vous voulez poser des questions à Judy K. Lirel
21:06 pour son vécu de victime ? Pour ce qu'il a ressenti dans ce jour-là ?
21:11 Ce qu'il a ressenti et qu'il raconte dans ce livre, dans cet excellent livre ?
21:14 On attend vos appels au 0826 300 300.
21:17 - Et nous avons le plaisir d'avoir avec nous Judy K. Lirel,
21:29 journaliste pour son livre Concorde Rouge,
21:31 dans la peau d'une victime d'agression.
21:33 Je rappelle pour ceux qui ont raté le début de l'émission,
21:35 que Judy K. Lirel a failli mourir en portant secours
21:38 à une femme victime d'une agression sexuelle dans le métro.
21:41 C'était le 13 novembre 2017, et je vous dis franchement,
21:44 bravo pour votre courage.
21:46 Les statistiques d'agression dans les transports en commun,
21:49 vous les écrivez, elles sont effarantes, surtout pour les femmes,
21:52 et en plus, elles sont totalement sous-évaluées.
21:55 - Oui, parce que les statistiques, c'est fondé sur celles qui portent plainte.
21:58 Donc effectivement, c'est la partie émergée de l'iceberg,
22:01 mais il faut imaginer toutes les personnes qui ne portent pas plainte,
22:04 parce qu'elles se disent soit que ça fait une perte de temps, soit que ça...
22:07 de toute façon on ne trouvera pas la personne, donc bon, on laisse tomber.
22:10 Donc déjà, les statistiques sont sous-évaluées, la réalité est pire.
22:13 Après, quand on regarde les statistiques, on se rend compte que
22:15 quand une femme a peur de prendre les transports en commun,
22:17 et pas seulement à Paris, de façon générale,
22:19 les bus, les métros, les tramways, les RER,
22:22 elle a raison d'avoir peur. Ce n'est pas une vue d'esprit,
22:24 encore une fois, on n'est pas dans un sentiment à la sécurité.
22:26 Les femmes sont largement en première ligne de l'insécurité de nos jours.
22:29 Ça doit être, si je prends le métro parisien de tête,
22:32 94% des agressions sexuelles, évidemment les victimes sont des femmes,
22:35 et les agresseurs sont des hommes.
22:37 Ça tombe sous le sens, malheureusement.
22:39 70% à peu près des agressions violentes, c'est les femmes.
22:43 Donc à chaque fois, elles sont en première ligne.
22:45 Et dans les agressions violentes, il y a de plus en plus de mineurs.
22:47 Il faut imaginer une jeune fille qui prend le métro, une étudiante, une lycéenne,
22:50 qui va se faire agresser, et toute sa vie, elle va s'en rappeler derrière.
22:53 Et ça, c'est sidérant. Et en 2023, ça me paraît absolument inacceptable
22:56 que ça ne soit pas, excusez-moi de le dire, mais une cause nationale.
22:59 Le fait que nos filles, nos femmes, nos compagnes,
23:01 n'aient pas peur d'aller au travail et de revenir du travail.
23:04 Ça devrait être une priorité évidente du quotidien,
23:06 et j'ai l'impression que globalement, tout le monde s'en fiche.
23:09 - Vous parlez du silence des féministes.
23:12 Elles ont piscine, parce que quand on voit le nombre de femmes agressées
23:15 dans votre livre, moi je m'attendrais à entendre les féministes
23:18 qui pleurent sur l'écriture inclusive, ou les barbies non-genrées,
23:21 qu'elles parlent de ce que vivent les femmes tous les jours
23:24 dans les transports en commun, non ?
23:25 - Non, je pense pas qu'elles ont piscine, elles ont barbecue.
23:27 - Elle est très bonne.
23:30 La parole des femmes, c'est très bon.
23:33 La parole des femmes proches de vous s'est libérée
23:36 suite à votre agression. Racontez-nous.
23:39 - Quand je suis revenu de ma convalescence, effectivement,
23:42 aussi bien des collègues que des amis, que des voisines,
23:45 que des personnes que parfois je connaissais depuis 25 ans,
23:47 sont venus me parler, parce que, ayant été agressé
23:50 en défendant une femme, je sais pas si j'avais changé de camp
23:52 par rapport à l'agresseur potentiel que peut être un homme,
23:54 et tout d'un coup on pouvait me parler de ça,
23:56 parce que c'est des sujets peut-être dont on ne parle pas
23:58 avec son conjoint, avec sa famille, et je suis horrifié
24:01 du nombre de femmes qui m'ont raconté leur agression,
24:03 leur agression sexuelle, leur peur, et leur stratégie
24:06 pour éviter de se retrouver en face d'un agresseur.
24:08 Donc ne pas mettre de talons dans le métro,
24:10 ne pas prendre le train à telle heure, s'il y a des types
24:12 dans la rue, à cet endroit-là, prendre l'autre rue,
24:14 ou carrément prendre, à Paris, le vélo, voire la voiture,
24:16 ce qui est très courageux, pour se déplacer,
24:18 pour ne pas prendre les transports en commun.
24:20 Et je n'avais jamais imaginé que dans la charge mentale
24:22 féminine au quotidien, il y avait cette surcouche,
24:24 on va dire, de défense contre une insécurité potentielle
24:28 et un agresseur potentiel. C'est "qu'est-ce que je vais faire
24:30 pour éviter de me retrouver en situation de me faire agresser ?"
24:32 - Et vous dites "les femmes qui vous sont proches,
24:36 dont la parole s'est libérée, vous n'en avez jamais parlé,
24:38 et il y a tout type d'agression, ça va de la main aux fesses
24:40 au sac à main arrachée, ça va de l'agression verbale
24:43 à l'agression physique, en passant par l'agression sexuelle,
24:45 on se dit que les transports, c'est devenu vraiment
24:50 le Bronx il y a quelques années, avant la tolérance zéro.
24:52 - Je pense qu'il y a quand même une augmentation
24:54 du nombre de personnes qui traînent,
24:56 qui sont foncièrement dangereuses et qui n'ont rien à faire là.
24:58 Ce qui me pose une vraie question, parce que notamment
25:00 pour les transports en commun parisiens,
25:02 on paie un billet pour y être, on paie un billet pour y entrer,
25:05 et normalement, en face de ça, on a une sorte d'obligation
25:07 de service, on doit avoir un métro, un train,
25:09 qui arrive à l'heure, à la bonne destination.
25:11 On sait bien la régularité, c'est formidable,
25:13 quand ça ne marche pas, on est les premiers à grogner.
25:15 Mais il n'y a pas que ça, je pense que la responsabilité
25:17 d'une régie de transport, c'est de faire que ces usagers
25:19 arrivent sains et saufs d'un point A à un point B.
25:21 Et là, on a un peu plus de problèmes.
25:23 - Justement, vous parlez de la RATP,
25:25 qui se moque royalement des victimes sur son réseau,
25:27 puisque vous n'avez jamais eu de nouvelles de sa part,
25:29 à part les deux personnes qui vous ont porté secours
25:31 le 13 novembre 2017,
25:33 vous n'avez jamais eu un coup de téléphone,
25:35 ils n'ont jamais pris de nouvelles de votre part,
25:37 alors que vous aviez failli mourir,
25:39 chez eux, donc, à mon avis,
25:41 sous leur responsabilité.
25:43 - C'est là où c'est magique de faire un livre, parce qu'évidemment,
25:45 dès que le livre est sorti et que j'ai un petit peu grogné dans les médias,
25:47 tout d'un coup, on m'a appelé pour que je rencontre
25:49 M. Jean Castex, qui aujourd'hui dirige la RATP,
25:51 avec qui j'ai passé plusieurs heures à discuter,
25:53 c'était vraiment intéressant, et je trouvais quelqu'un
25:55 qui faisait son travail et qui le faisait bien,
25:57 avec un très bon accent du Sud-Ouest en plus.
25:59 - Du Sud-Centre, hein, du Sud-Centre.
26:01 - Oui, vous avez raison. - C'est plus tout à fait le Sud-Ouest,
26:03 je défends certaines chapelles.
26:05 - Mais vous avez raison.
26:07 - Et il aura fallu quand même que j'attende de toutes ces années
26:09 pour qu'un responsable de la RATP, en l'occurrence le président,
26:11 me présente des excuses pour le fait de ne jamais
26:13 avoir eu de nouvelles, et on m'a confirmé
26:15 qu'on ne rappelle pas les victimes
26:17 d'agressions. Les victimes d'agressions sexuelles,
26:19 il y a des choses qui ont été mises en place,
26:21 les sexuels et les sexistes, les services qui les accompagnent de plus en plus,
26:23 et on les rappelle pour prendre soin d'elles.
26:25 Les victimes d'agressions, maintenant, il va falloir mettre en place
26:27 des choses pour les rappeler, selon la gravité de l'agression,
26:29 leur demander si ça va, leur demander si elles veulent un psy,
26:31 leur demander s'ils veulent porter plainte, mais il y a encore beaucoup de boulot.
26:33 - Mais c'est complètement fou, parce que j'ai appris
26:35 en lisant votre livre que les vidéos des agressions
26:37 sont effacées automatiquement
26:39 tous les trois jours, donc si vous êtes
26:41 hospitalisé ou dans le coma parce que vous avez pris
26:43 un mauvais coup, bah c'est effacé,
26:45 et plus de preuves
26:47 contre l'agresseur ou les agresseurs.
26:49 - C'est la vieille histoire des Anglais du Stade de France,
26:51 c'est exactement la même chose. En fait, les vidéos
26:53 techniquement et juridiquement parlant, je crois qu'on peut les garder
26:55 un mois. Techniquement,
26:57 en revanche, il faut avoir la capacité de stockage de ces vidéos,
26:59 après tout c'est du digital, donc c'est juste une question
27:01 d'argent, soyons clairs. - Oui, c'est clair. - A l'heure de Netflix
27:03 et du streaming, je pense qu'on peut classer des vidéos
27:05 et les garder, les indexer quand on perd une agression.
27:07 Après, combien de gens ne
27:09 pourront pas avoir des preuves parce que les vidéos ont été
27:11 détruites, c'est dur à mesurer. Mais effectivement,
27:13 elles ne sont gardées que deux ou trois jours, d'une part,
27:15 et d'autre part, pour être sincère, la qualité est pitoyable.
27:17 Donc moi j'ai vu les vidéos de mon agression
27:19 longtemps après, parce qu'il faut quand même avoir envie de se faire
27:21 de se voir se faire taper dessus, c'est pas très
27:23 agréable. La qualité est pitoyable. On voit
27:25 un type avec une capuche filmée de haut, floue,
27:27 avec du grain, vous voyez,
27:29 en noir et blanc, et le moindre smartphone
27:31 fait 10 000 fois mieux aujourd'hui. - C'est pas comme les vidéos
27:33 à Londres lors des attentats en 2005,
27:35 il y a près de 20 ans où on voyait leur visage,
27:37 etc. - Ou dans certaines villes d'ailleurs, qu'on a très
27:39 bonnes vidéos sur les rangs. - Oui, dans certaines villes. Vous regrettez
27:41 de ne pas avoir fait de procès à RATP ? - Non.
27:43 Non, parce que quand on est victime,
27:45 à un moment je pense qu'on a envie d'avancer, mais moi
27:47 je préférais embêter la RATP en la
27:49 faisant changer des choses, en faisant ce genre de choses,
27:51 c'est-à-dire un livre, plutôt que de faire un procès
27:53 pour gagner de l'argent. C'est pas le but.
27:55 - Castex, Jean Castex, il vous a dit qu'il allait
27:57 prendre des mesures pour mieux
27:59 protéger les usagers
28:01 du métro et ne pas effacer
28:03 les bandes. Il vous avait dit des choses intéressantes ?
28:05 - On a la chance d'approcher la coupe du monde du rugby,
28:07 tant mieux d'ailleurs, et
28:09 des Jeux Olympiques, donc du coup c'est en haut
28:11 de la liste des priorités des autorités,
28:13 des pouvoirs publics et des forces de sécurité à l'heure actuelle
28:15 que ça se passe bien et qu'il y ait moins de victimes, moins d'agressions.
28:17 Donc oui, ils font attention, il y a du boulot.
28:19 Les vidéos, il va falloir améliorer les caméras
28:21 et râper les victimes. Donc il s'est engagé
28:23 à quelques petites choses, maintenant j'attends de voir.
28:25 - Enfin, quand on voit la finale de la Ligue des Champions et ses derniers jours
28:27 en France, on a quelques doutes que ça se passe bien.
28:29 Mais c'est mon point de vue.
28:31 Vous y décrivez que l'immense majorité
28:33 des victimes est française.
28:35 - Oui, ce qui est assez logique vu qu'on est en France.
28:37 Mais en même temps, dans les transports en commun,
28:39 je m'attendais à avoir plus de touristes, pour être sincère.
28:41 - Oui. - Voilà. Et donc, oui,
28:43 la majorité, la grande, grande majorité des victimes
28:45 sont françaises, et comme ce sont des femmes, elles sont
28:47 françaises à double titre. - Oui.
28:49 Et il y avait des statistiques qui avaient été données que, par contre,
28:51 les agresseurs étaient très fortement d'origine étrangère.
28:53 - Oui, moi, je me suis moins
28:55 intéressé aux agresseurs dans le livre, mais c'est
28:57 Gérald Darmanin, je crois, qui avait sorti, il y a un peu plus
28:59 d'un an, pour la première fois, en France,
29:01 parce que c'est un sujet qu'on n'aborde pas généralement,
29:03 des statistiques qui donnaient l'origine des personnes.
29:05 - Absolument. - Et effectivement, il y avait une forte majorité
29:07 de personnes d'origine étrangère
29:09 dans les agresseurs. Et...
29:11 on en est resté là, tout simplement. Mais c'est vrai
29:13 que rien que la question, entre guillemets,
29:15 les mineurs isolés posent un vrai souci
29:17 à toutes les municipalités, à tous les services
29:19 de transport et aux services sociaux,
29:21 parce que c'est ingérable. - Vous parlez
29:23 de votre visite chez le médecin expert
29:25 judiciaire, c'est cascaillien, parce que le premier
29:27 veut pas de vous, le deuxième veut pas de vous,
29:29 et vous tombez sur un ancien médecin militaire
29:31 qui, lui, fait contre mauvaise fortune
29:33 bon cœur. - Oui, effectivement, lui,
29:35 il fait son travail, parce que c'est un médecin militaire
29:37 et c'est le troisième qui m'a accepté. C'est là que j'ai découvert
29:39 qu'en fait, quand on est victime, on doit passer
29:41 une expertise judiciaire, qui doit mesurer
29:43 à quel point on est en bon ou en mauvais état
29:45 au bout d'un certain nombre d'années. - Mais alors, trouver
29:47 un expert, c'est la croix à la bannière.
29:49 - C'est paradoxal, parce que sur leur carte de visite et leur jolie plaque
29:51 sur leurs hôtels particuliers, c'est marqué
29:53 "expert" ou "après la cour", mais quand vous voulez
29:55 les contacter, ils refusent des cas, parce qu'ils
29:57 en ont déjà 200 en attente, d'une part,
29:59 donc ils vous disent "je peux pas, j'en ai trop", et après ils vous disent
30:01 "je peux pas, parce qu'en plus, la justice me paye
30:03 peu et tard". Donc, si on ne veut pas
30:05 faire ça, faut pas se dire expert, d'une part,
30:07 d'autre part, ça serait bien si la justice
30:09 payait mieux et plus vite les médecins qu'elle ait fait appel.
30:11 - Je vous avais fait de l'humour sur les barbecues,
30:13 je vais vous en faire un peu, il y a trois types
30:15 de clients, ceux qui payent à vue, ceux qui payent
30:17 à longue vue et ceux qui payent à perte de vue,
30:19 et l'État fait partie de la troisième catégorie.
30:21 Les affaires élucidées, c'est
30:23 l'illiputien, quand on lit votre livre. - Oui.
30:25 Franchement, ce type d'affaires où il y a
30:27 "pas mort d'homme", je pense qu'il doit y avoir
30:29 quelques pourcentages de résolution
30:31 réelle des affaires, c'est très...
30:33 c'est épiphénoménal, c'est suicidéron.
30:35 - Vous parlez de cette montée de la violence,
30:37 et vous parlez de la légitime défense,
30:39 est-ce que pour vous, la légitime défense,
30:41 les gens vont y venir, c'est-à-dire
30:43 s'acheter un taser, une bombe à poivre,
30:45 etc., peu importe que ce soit
30:47 légal ou pas, parce qu'au moins,
30:49 autant avoir de quoi se défendre
30:51 vu le nombre d'agressions qu'il y a. Est-ce que pour vous,
30:53 on parlait d'américanisation de la société,
30:55 on va en arriver là ? - Moi, évidemment,
30:57 je suis en subjectif parce que c'est mon ressenti
30:59 et ce que j'ai entendu par toutes
31:01 les personnes qui ont discuté avec moi, mais oui, évidemment.
31:03 Et simplement, les gens s'en vont pas.
31:05 Mais autour de moi, des gens qui ont discuté avec moi,
31:07 notamment des femmes, mais pas seulement, m'ont confirmé
31:09 que, de plus en plus souvent, ils avaient
31:11 un truc pour faire une alarme puissante,
31:13 une bombe à poivre,
31:15 un spray, voire un taser.
31:17 Oui, on se dirige vers ça. Et l'étape suivante,
31:19 si les coupables continuent d'être en liberté,
31:21 ce sera que les gens se feront justice eux-mêmes.
31:23 On a déjà quelques cas dans l'effet de l'hiver
31:25 qui sont arrivés, où les gens, à force d'en avoir marre,
31:27 décident de le faire eux-mêmes.
31:29 Et là, ça devient le Far West, dans ce cas-là.
31:31 Vous n'avez pas peur que ça vire au Far West, un de ces jours ?
31:33 Parce que quand on voit les émeutes, quand on voit les boutiques
31:35 pillées, les gens qui ont eu
31:37 leur entreprise qui a intégralement brûlée,
31:39 moi, on me racontait une entreprise
31:41 de poids lourd qui a été brûlée dans l'Est de la France
31:43 pas plus tard qu'hier, c'est complètement dingue.
31:45 Des gens ont tout perdu. Est-ce qu'un de ces cas,
31:47 il n'y en a pas un qui va se défendre pour de bon,
31:49 comme l'État n'est pas capable d'assurer
31:51 sa protection ? - On va avoir la réponse dans 3 jours,
31:53 puisque, au-delà des rudements tâts,
31:55 je voyais passer un mail de M. Lysnard,
31:57 qui est le président de la maire de France, si je ne me trompe pas,
31:59 qui disait que des consignes avaient été données pour que toutes les forces
32:01 de l'ordre n'interviennent pas, au le moins possible, le 14 juillet
32:03 au soir. Donc, évidemment, en termes de symboles
32:05 d'autorité, c'est magnifique de dire aux policiers
32:07 "N'y allez surtout pas, on ne veut pas de problèmes".
32:09 - Il y a une chose qui vous énerve beaucoup, c'est quand Clément Beaune
32:11 ou Gérald Darmanin fanfaronnent. Vous en parlez dans
32:13 votre livre. - Gérald Darmanin fanfaronne un petit peu
32:15 moins, cet an-ci, j'avoue. - Il faut dire que,
32:17 vu les circonstances, ça ne sera peut-être pas bienvenu.
32:19 - Oui, déjà. Mais après, les statistiques
32:21 qu'il avait sur certains points de
32:23 sécurité n'étaient pas mauvaises. Je dois reconnaître
32:25 quand il y a des bons points, il faut les donner aussi.
32:27 Là où ils ont augmenté les patrouilles, l'insécurité
32:29 a baissé. Ça, c'est vrai. Simplement, il faudrait faire ça
32:31 de façon générale et on n'a pas assez de forces de l'ordre.
32:33 Et à côté de ça, en plus, ces forces de l'ordre
32:35 passent leur temps à arrêter les mêmes.
32:37 Donc, ça serait bien de pouvoir s'occuper des nouveaux éventuellement
32:39 ou d'empêcher qu'il y en ait, plutôt que d'arrêter 20 fois les mêmes
32:41 qui viennent les habituer, qui ont peut-être
32:43 une carte de fidélité à la longue, mais gendarmes
32:45 de la campagne ou policiers en ville,
32:47 ils en ont marre, excusez-moi, de rarrêter les mêmes tout le temps.
32:49 Ils les arrêtent, ils ressortent, ils font pas de fermes
32:51 et pendant ce temps-là, on peut pas s'occuper du reste.
32:53 - Il faudrait changer la justice des mineurs parce que là
32:55 il y a quand même un gros trou dans la raquette.
32:57 - Oui, puis peut-être avoir des places de prison, des municipalités
32:59 qui acceptent d'avoir des prisons et des hôpitaux psychiatriques
33:01 avec de la place aussi.
33:03 C'est un ensemble, mais effectivement, j'ai l'impression
33:05 que ça va mal tourner. Ça a déjà mal tourné ces jours-ci,
33:07 on l'a bien vu avec ces émeutes.
33:09 Excusez-moi, mais j'ai encore l'exemple en tête
33:11 d'un jeune garçon qui a été tué
33:13 à Toulouse en allant aider une jeune fille
33:15 parce que justement, il avait laissé les affaires
33:17 dans une voiture vandalisée, il y va, il va chercher les affaires,
33:19 il s'est fait bastonner à mort,
33:21 ça aurait été son anniversaire aujourd'hui, je crois.
33:23 Tout le monde s'en fiche. Il n'y a pas eu des émeutes
33:25 pour lui, ce garçon de 24 ans qui a été tué
33:27 juste parce qu'il a rendu service à une jeune fille à Toulouse.
33:29 C'est dans La Dépêche ce matin, si je ne me trompe pas.
33:31 - Oui, je vais regarder ça. - C'est sidérant.
33:33 Mais ça va mal finir,
33:35 je crois que c'est un livre de François Fillon qui disait ça.
33:37 - Ce ne serait pas bien de faire un ministère des victimes
33:39 comme il y a des ministères un peu pour tout ?
33:41 - Je pense qu'un secrétariat d'état de victime, au moins,
33:43 ce serait pas mal, effectivement, pour à la fois les éviter en amont
33:45 et s'en occuper en aval.
33:47 - Judith K. Lirel, un livre passionnant,
33:49 Concorde rouge, dans la peau d'une victime
33:51 d'agression, publié au ChercheMidi.
33:53 On se retrouve tout de suite,
33:55 dans quelques instants.
33:57 Sud Radio, Bercov,
33:59 dans tous ses états, midi, 34h,
34:01 Philippe David.
34:03 - Et notre invité du jour,
34:05 Judith K. Lirel, pour son livre
34:07 Concorde rouge, dans la peau d'une victime
34:09 d'agression, publié au ChercheMidi.
34:11 Ça réagit au 0826 300 300.
34:13 Direction Montpellier,
34:15 bonsoir, bonjour, pardon,
34:17 je ne suis pas dans les vraies voix, Philippe.
34:19 - Bonjour, Philippe David, bonjour,
34:21 Judith K. Lirel.
34:23 Et bien, ça réagit tout simplement, parce que
34:25 je trouve que ce que vous avez fait, c'est juste extraordinaire.
34:27 Je ne sais pas si je ferais
34:29 3% de ce que vous avez fait.
34:31 Vous êtes hyper
34:33 positif quand vous racontez tout ça.
34:35 Hyper positif, en tout cas,
34:37 je n'ai pas senti d'agressivité dans tout ce que vous avez dit.
34:39 Et rien que pour ça,
34:41 je voulais appeler, vous dire bravo.
34:43 Et j'ai deux questions.
34:45 La première, c'est est-ce que la personne que vous avez
34:47 défendue a pris
34:49 des nouvelles de vous ? Ça, c'est la première.
34:51 Et la deuxième question, c'est
34:53 est-ce que toute cette méchanceté,
34:55 toute cette guerre qui
34:57 existe aujourd'hui
34:59 au quotidien,
35:01 n'est pas voulue,
35:03 désirée par
35:05 certaines personnes ou je ne sais quoi ?
35:07 Voilà. - Alors, on va faire
35:09 réagir Judith K. Lirel.
35:11 Restez avec nous. C'est à la fin
35:13 du livre. Racontez-nous les
35:15 rapports que vous avez entretenus avec cette jeune fille.
35:17 Elle est très jeune, elle a 25 ans au moment de l'agression.
35:19 - Elle avait 25 ans à ce moment-là. Elle a pris quelques années
35:21 comme nous tous. - Oui, c'est clair.
35:23 - On s'est revus au bout de quelques années, parce que le Covid est passé par là,
35:25 donc on a mis un petit peu de temps à se recroiser. Mais ça m'a
35:27 paraissu important de la revoir pour savoir comment elle avait
35:29 vécu elle, parce qu'elle m'avait quand même vu, soyons clairs,
35:31 me faire démonter la tête par celui qui l'avait agressé quelques minutes
35:33 avant. Et le côté plus désagréable, c'est elle
35:35 qui l'a vécu, je trouve. Donc, on s'est
35:37 revus, ça s'est très bien passé.
35:39 On a rediscuté tout ça, on a changé un peu
35:41 nos souvenirs. Et elle m'a appris
35:43 deux choses. La première, c'est que quand j'étais
35:45 emmenée à l'hôpital, elle avait voulu venir
35:47 avec moi dans l'ambulance, et qu'on lui avait
35:49 interdit parce qu'elle n'était pas une proche.
35:51 Et du coup, on lui avait aussi interdit de me donner ses coordonnées.
35:53 Ce qui est dommage, parce que sinon, on serait resté en contact
35:55 plus rapidement, et j'aurais pu justement
35:57 être sûr qu'elle avait bien vécu tout ça.
35:59 Et...
36:01 Je sais plus ce que je voulais dire après, excusez-moi.
36:03 - Et comment est-ce que vous êtes arrivés à vous retrouver ? Parce que vous connaissiez pas
36:05 son nom, son prénom ? - En fait, elle a témoigné.
36:07 Elle a témoigné par rapport à mon dossier,
36:09 donc son nom était dans mon dossier pénal.
36:11 Et du coup, j'ai simplement fait comme tout le monde, j'ai cherché
36:13 sur Facebook si ce nom correspondait à quelqu'un, et j'ai mis à peu
36:15 près trois minutes à la trouver. Donc, je lui ai envoyé un message.
36:17 - Et finalement, elle était pas sous pseudo ? - Voilà, donc je lui ai envoyé un message,
36:19 et il lui a la gentillesse de me répondre au bout d'un petit moment.
36:21 Et puis, on s'est revus, on a déjoué ensemble,
36:23 tout simplement. Et c'est là que j'ai appris,
36:25 et c'est comme ça que j'ai fini l'ouvrage d'ailleurs,
36:27 c'est que, quand j'étais KO au sol,
36:29 qu'on me bourrait la tête de coup de pied,
36:31 elle s'est couchée sur mon visage,
36:33 elle a pris des coups de pied dans le dos,
36:35 et qui sinon auraient été dans ma tête,
36:37 et je serais pas là pour en parler, puisque je suis passé avec quelques coups de pied
36:39 du cimetière. Donc, elle ne se rend pas compte,
36:41 elle ne s'était pas rendue compte qu'en fait, elle m'avait sauvé la vie.
36:43 Moi, j'étais intervenu quelques minutes plus tôt
36:45 pour empêcher que son agression s'aggrave,
36:47 mais finalement, à mes yeux, la vraie héroïne,
36:49 c'est elle. Elle a été courageuse en se faisant
36:51 agresser, elle est courageuse tous les jours,
36:53 là, elle m'a aidé, et depuis, en plus, elle a aidé une autre jeune femme
36:55 qui se faisait agresser à Paris. - Oui, vous racontez
36:57 d'ailleurs qu'une femme se fait agresser,
36:59 et elle va voir le type, elle lui dit
37:01 "J'ai appelé les flics, tire-toi,
37:03 et arrête de l'emmerder en faisant la bise à la fille."
37:05 C'est complètement fou ! - C'est formidable !
37:07 Moi, je suis admiratif de ce genre de choses.
37:09 - Mais, vous racontez,
37:11 la police non plus, vous n'avez pas donné ses coordonnées,
37:13 il a fallu un coup de chance que vous lisiez les choses,
37:15 alors qu'elle a voulu prendre de vos nouvelles,
37:17 on a refusé de lui en donner. - Oui, ça m'a surpris,
37:19 mais effectivement, c'est que les proches,
37:21 il n'y a que les proches qui peuvent accompagner les victimes à l'hôpital
37:23 ou prendre des nouvelles, donc je suppose que c'est la loi,
37:25 malheureusement. Parfois, on pourrait peut-être faire
37:27 un tout petit écart quand c'est du bon sentiment, tout simplement.
37:29 - Et pour répondre à la deuxième question,
37:31 Philippe qui dit "on a l'impression qu'il y a quand même un laissé-faire",
37:33 on en parlait pendant la pause,
37:35 quand on voit qu'en France,
37:37 par exemple, une victime n'a pas le droit
37:39 de faire appel d'un verdict de procès
37:41 aux assises, par exemple, mais que le coupable
37:43 a le droit, est-ce que ça pose pas problème ?
37:45 Vous disiez que vous seriez pour un secrétariat d'État aux victimes,
37:47 est-ce que ça pose pas quand même un problème
37:49 que la justice française ait un deux poids,
37:51 deux mesures, qui penche systématiquement
37:53 du côté des coupables et jamais des victimes ?
37:55 - Oui, mais c'est aussi parce que,
37:57 encore une fois, les victimes, c'est pas sexy,
37:59 alors que les coupables, c'est passionnant.
38:01 D'ailleurs, on le voit avec l'ensemble des journaux,
38:03 des émissions de radio qui sont consacrées à des coupables,
38:05 des tueurs en série, des tueurs... - Des tueurs en série qui reçoivent
38:07 des lettres d'amour et des demandes en margage ?
38:09 - Qui ont des séries Netflix sur leur carrière de meurtrier,
38:11 on va jamais faire ça sur une victime.
38:13 Donc finalement, le coupable est toujours plus intéressant
38:15 que la victime, on se fait un petit peu peur.
38:17 La victime, c'est pas drôle, excusez-moi des victimes,
38:19 on se plaint, on a mal,
38:21 on va demander des sous,
38:23 on va rappeler que ça s'est mal passé, que ça aurait pas dû arriver.
38:25 Et moi, c'est une chose qui m'a beaucoup surpris
38:27 quand j'ai écrit ce livre, c'est qu'on m'a dit qu'il y avait très très peu
38:29 aussi de victimes à témoigner de leur parcours de victime.
38:31 Et c'est dommage, parce que
38:33 finalement, c'est intéressant pour savoir ce qui cloche.
38:35 - Cette jeune femme, vous la revoyez encore depuis ?
38:37 - On ne s'est pas revues récemment, non.
38:39 - Il y a quand même une question qui se pose,
38:41 vous avez été indemnisé parce que vous êtes victime,
38:43 mais là, comme on n'a jamais arrêté le coupable,
38:45 puisqu'on ne l'a quand même pas beaucoup recherché,
38:47 est-ce que vous avez reçu une indemnisation ?
38:49 - On a un système français qui fonctionne assez bien là-dessus,
38:53 une commission d'indemnisation des victimes,
38:55 ça s'appelle la CIVI, et une fois que vous êtes passé
38:57 devant un expert qui l'a jugé de votre état de santé,
38:59 vous passez devant un tribunal, le tribunal de Paris en l'occurrence,
39:01 me concernant, et là,
39:03 ils vont décider d'une somme d'argent qui va
39:05 correspondre à votre préjudice.
39:07 Donc en l'occurrence, quelques milliers d'euros, mais c'était pas
39:09 le but, mais c'est toujours utile.
39:11 - Merci beaucoup Philippe de Montpellier, on va à l'autre bout du Sud,
39:13 direction Bordeaux.
39:15 Bonjour Marc.
39:17 Nous vous écoutons,
39:19 Judith Calirel vous écoute.
39:21 - Déjà, je vous remercie de votre témoignage,
39:23 enfin témoignage que vous n'avez pas fait exprès,
39:25 mais de votre courage,
39:27 et de votre intervention.
39:29 - Merci.
39:31 - Ensuite, moi je voulais juste parler d'un fait,
39:35 qui aujourd'hui,
39:37 j'ai pris du recul,
39:39 mais ça me pose encore question.
39:41 Il y a quelques années,
39:43 je me suis fait gravement menacer
39:45 par mon ancien voisin,
39:47 tout simplement parce qu'il faisait
39:49 une crise de manque toxicomanique,
39:51 un toxicomane.
39:53 Voilà, et malheureusement,
39:55 ma porte d'appartement
39:57 donnait dans la rue,
39:59 et à 6h du matin, je devais partir
40:01 bosser, et là, il tapait sur la porte.
40:03 Voilà. J'ai appelé la police,
40:05 qui m'a dit,
40:07 tant qu'il ne vous a pas blessé, on ne peut rien faire.
40:09 Merci monsieur, au revoir.
40:11 - C'est hallucinant.
40:13 - Écoutez, j'en ai reparlé vite fait,
40:15 je crois,
40:17 avec des agents de police,
40:19 il y a quelques années.
40:21 Et en plus, ça ne date pas d'hier,
40:23 c'était il y a une dizaine d'années.
40:25 Donc,
40:27 honnêtement,
40:29 je leur ai d'ailleurs dit au téléphone,
40:31 qu'est-ce qu'il faut que je fasse ?
40:33 Que je me fasse tabasser pour que vous veniez ?
40:35 J'étais très en colère,
40:37 peur de surcroît.
40:39 Très honnêtement,
40:41 je n'allais pas sortir pour me faire tabasser.
40:43 Surtout qu'à l'époque,
40:45 je bossais à l'hôpital. Oui, j'aurais été aux urgences
40:47 directement, ça aurait été sympa.
40:49 Voilà. Mais je vous avoue
40:51 que ce genre de réponse,
40:53 ça pose question.
40:55 - On va faire réagir Julie Kael, Irel.
40:57 C'est hallucinant le témoignage de Marc de Bordeaux,
40:59 et ça ne date pas d'aujourd'hui.
41:01 Faites-vous tabasser, à la rigueur, même s'il a une arme,
41:03 il vous tue, là on pourra intervenir.
41:05 Mais en attendant, on ne peut rien faire.
41:07 On est chez les dingues, non ?
41:09 - C'est l'inverse. Si on attend que ça soit grave pour intervenir,
41:11 là où en l'occurrence, il aurait fallu des policiers
41:13 de proximité pour venir et pour dire au type
41:15 "Vous arrêtez tout de suite" ou pour l'embarquer
41:17 simplement parce que son état de manque faisait qu'il aurait dû
41:19 être hospitalisé. Mais ça devrait répondre
41:21 ça à gens. Faites-vous casser la tête
41:23 et on en reparle. C'est un peu ça. Si c'est grave, c'est intéressant.
41:25 Si c'est pas grave, on n'a pas que ça à faire. On a déjà
41:27 beaucoup de dossiers. Et c'est pas faux. Ils ont
41:29 beaucoup de dossiers et d'ailleurs on les classe par paquet de sang.
41:31 - Les policiers, ils sont désabusés,
41:33 ceux que vous avez rencontrés ?
41:35 - J'ai rencontré des policiers qui étaient plutôt sympas
41:37 parce que dans mon cas personnel, j'ai été agressé pour avoir
41:39 défendu une femme. Donc tout le monde a été super sympa.
41:41 Mais en parlant en off, effectivement,
41:43 ils croulent sous les affaires. Ils sont pas assez
41:45 nombreux. On leur prend la tête en permanence
41:47 et puis ils sont mal perçus et mal traités
41:49 finalement. Notamment dans les médias.
41:51 Il y a toujours eu les coupables, les policiers, les gendarmes
41:53 alors que défendre aujourd'hui, c'est quand même
41:55 un gros boulot. Mais là, ce que dit ce monsieur,
41:57 c'est vraiment lamentable. Ça ne pourrait pas arriver.
41:59 - C'est hallucinant. Tant qu'il n'est pas
42:01 rentré chez vous, qu'il ne vous a pas tapé.
42:03 Vous en avez parlé à des amis ? Si vous avez des amis
42:05 dans la police, etc. Marc ?
42:07 Ah, on a perdu Marc.
42:09 Oui, Marc, on vous entend.
42:11 - Oui, non,
42:13 j'ai pas d'amis dans la police.
42:15 J'en ai parlé quelques années après
42:17 un policier qui m'a dit
42:19 malheureusement, ça devait être un manque
42:21 d'effectifs parce que moi, c'était la gendarmerie
42:23 de proximité qui était à un kilomètre
42:25 de là où j'habitais.
42:27 Mais il était 6 heures du matin.
42:29 Et en gros, moi,
42:31 ce que j'ai pensé, c'est en gros,
42:33 ils ont d'autres affaires plus importantes, ils n'ont pas le temps
42:35 de venir. Mais par contre, très honnêtement,
42:37 je ne juge pas les policiers. Je ne juge personne.
42:39 La seule chose que je constate,
42:41 et ça va de mal en pille, quand on sait
42:43 que des commissariats ferment, quand on sait que des
42:45 voitures de fonction ne sont pas remplacées,
42:47 quand on sait que des hôpitaux des urgences
42:49 ferment, mais
42:51 franchement, et on dit qu'on
42:53 veut aller améliorer les choses.
42:55 Ça me fait doucement rire. Et après,
42:57 on est surpris. On se fait
42:59 squelandre parce qu'il y a des gens,
43:01 on n'a pas les moyens de... Non mais
43:03 ça fait des années, des années, des années
43:05 que ça court. Franchement,
43:07 voilà, il faut en arriver, malheureusement,
43:09 et alors à des
43:11 morts ou à des gens gravement
43:13 atteints pour que... - On les prenne en compte.
43:15 - Voilà, pour que ces gens...
43:17 J'ai rien contre eux. Ils ont sûrement des...
43:19 Je parle des grands gouvernants.
43:21 Ils ont sûrement un des budgets
43:23 plus importants à gérer,
43:25 genre le pétrole et le gaz.
43:27 C'est une autre histoire. Mais
43:29 quand même, le service public,
43:31 très honnêtement, même dans ma
43:33 commune aujourd'hui, j'en parlais avec
43:35 les policiers, mais c'est grave.
43:37 C'est grave. J'habite pas loin
43:39 de Bordeaux. La nuit,
43:41 il y a un service de
43:43 gendarmerie pour gérer trois communes.
43:45 - Oui. Et en plus, les communes sont
43:47 grandes en général. - Comment voulez-vous
43:49 qu'ils soient optimales partout ?
43:51 Ils peuvent pas, les mecs. Ils peuvent
43:53 pas. C'est pas possible. - C'est clair.
43:55 - Merci beaucoup, Marc. Dernière question.
43:57 C'est votre psychanalyse ?
43:59 - Non, parce que je suis beaucoup trop têtu pour être sensible
44:01 à quelque forme de psychanalyse que ce soit. Je suis même
44:03 allergique au concept de psychanalyse, j'avoue.
44:05 - Mais c'est votre deuxième vie ? - C'est ma deuxième vie.
44:07 Je la savoure tous les matins, en disant "chaque jour est une chance".
44:09 Et ça, c'est quand même pas mal. Et c'est dommage d'en arriver
44:11 là pour apprécier plus le quotidien, mais
44:13 c'est un petit peu une conséquence. - Merci beaucoup,
44:15 Judith K. Eliré, l'auteur de cet excellent
44:17 livre "Concorde rouge,
44:19 dans la peau d'une victime d'agression",
44:21 publié aux éditions du Cherche Midi,
44:23 un livre que vous trouvez dans toutes les bonnes librairies
44:25 de France et de Navarre. Merci à vous.
44:27 Vous êtes bien sûr sur Sud Radio, 13h56.
44:29 Dans quelques instants, Brigitte Lahaie.
44:31 On se retrouve demain à midi et demi.
44:33 Sud Radio. Parlons de la France.

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