Mardi 29 août 2023, SMART BOURSE reçoit Thierry Guille (Président, Raymond James Euro Equities)
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00:10 Le dernier quart d'heure de Smart Bourse reste le quart d'heure thématique avec un thème ce soir qui nous amène à évoquer les actions américaines.
00:18 Thierry Guil est avec nous en plateau, le président de Raymond James, Euroécoutise. Bonsoir Thierry.
00:22 Merci beaucoup d'être là, je suis ravi de vous retrouver dans cette semaine de rentrée en tout cas pour l'émission Smart Bourse.
00:28 On dresse un état des lieux des grands marchés du marché action américain. La question c'est le titre de notre entretien, de notre discussion Thierry.
00:38 Wall Street, un été pour rien ? Point d'interrogation. J'ai regardé le niveau du S&P, on est peu ou prou sur les niveaux qu'on connaissait à la fin du mois de juin.
00:46 Oui c'est à peu près ça avec des disparités quand même dans le sens où la bourse américaine si on prend comme référence c'est pas l'été mais à partir de Memorial Day,
00:56 à partir du mois de mai jusqu'à peu près aujourd'hui a plutôt bien tiré son épingle du jeu à la montée d'à peu près presque 5%.
01:02 Là où les marchés européens ont été quand même beaucoup plus faibles, l'Eurostox a perdu presque 2,5%, le CAC a perdu 1,5%, donc le marché américain s'en est plutôt bien sorti.
01:14 Alors vous êtes venu avec un graphique justement, c'est la période Memorial Day, Labor Day c'est ça qui vous intéresse avec différents benchmarks, différents indices américains qu'on va pouvoir afficher.
01:30 Donc Memorial Day c'est fin mai c'est ça, Labor Day aux Etats-Unis c'est j'ai vu le 4 septembre, c'est lundi prochain.
01:36 Et alors sur cette période ça c'est la performance historique moyenne des indices américains, alors que vous avez décomposé avec effectivement il y a des indices Gross, des indices Value, des indices Mid Cap, des indices Large Cap etc.
01:50 Mais bref tous les indicateurs du marché américain sont historiquement en moyenne dans le vert sur cette période Memorial Day, Labor Day.
01:57 Absolument, c'est une période où en fait et on le voit sur ce graphique il y a si bien de la croissance ou de la value, au milieu vous avez effectivement la performance du Standard & Poor's 500 qui a monté de 4,8%.
02:08 Et c'est là donc que je vous expliquais que finalement sur cette durée le marché américain s'est finalement pas trop mal défendu, on sait que c'était en grande partie lié à une partie de la tech.
02:18 Mais encore une fois je parle d'une période qui a démarré au mois de mai, les performances des grosses valeurs de tech cet été ont été un petit peu plus étale en quelque sorte.
02:28 On a mis deux noms Nvidia et Tesla, les autres valeurs ce sont plutôt qui avaient déjà bien payé sur la première partie de l'année 2023 ont plutôt marqué le pas.
02:36 Et c'est intéressant parce que moi j'ai toujours le "Sell in May and Go Away" mais en fait en tout cas faut peut-être vendre d'autres marchés mais faut surtout pas vendre le marché américain au mois de mai.
02:47 "Sell in May and Go Away" c'est une expression que je fréquente depuis de nombreuses années qui sonne bien à l'oreille mais qui n'a pas jamais prouvé sa véracité.
02:56 Très sincèrement les marchés américains sont généralement plutôt porteurs sur les fins d'année, on sait que la période août, septembre, octobre on est en plein dedans.
03:04 Et tu parles plutôt molle pour les marchés ce qui est le cas, moi d'où tu le confirme, juillet avait été assez solide, octobre t'as moi qui est tristement célèbre mais qui correspond souvent au point bas des marchés.
03:15 Mais les années se ressemblent jamais totalement.
03:18 Bon si on essaie d'anticiper au-delà de l'ébordet effectivement donc au-delà du 4 septembre c'est la nouvelle période qui va commencer.
03:24 Memorial Day, l'ébordet c'est positif, qu'est-ce qui peut se passer ensuite ? Quel état des lieux vous dressez du marché américain, de ses forces, ses faiblesses ?
03:34 C'est vrai que dans les phénomènes marquants de l'été il y a eu la saison de publication des résultats du deuxième trimestre qui est d'ailleurs encore en cours.
03:41 Le T2, le T1 est publié aujourd'hui par exemple, Nvidia la semaine dernière, Salesforce demain, donc il y a quand même encore des poids lourds et en tout cas des entreprises emblématiques du marché américain qui publient.
03:51 Qu'est-ce qu'on peut retenir de cette séquence de publication ? Est-ce que le T2 américain aura été le point bas des bénéfices des entreprises américaines ?
03:59 On n'est pas loin de le penser, c'est-à-dire que le Q1 avait déjà vu aux Etats-Unis des résultats qui étaient en fait meilleurs qu'attendus.
04:08 On a vu un point d'inflexion vraiment à l'issue de ce trimestre. On s'interrogeait, il y avait un effet surprise sur le Q1.
04:13 Au Q2 on s'attendait peut-être moins à un effet surprise et pourtant on l'a malgré tout eu, ce sont globalement des bons résultats.
04:20 Quand on regarde en fait ce qui a payé depuis la période que j'évoquais avec vous, on se rend compte que finalement ce sont les valeurs cycliques qui ont tiré leur épingle du jeu sur le marché américain.
04:30 C'est-à-dire les industriels, l'énergie, les valeurs financières. Ce qui est assez logique, ce qui correspond un peu au scénario qui aujourd'hui fait un relativement consensus sur le marché, c'est-à-dire le fameux scénario du soft lending.
04:46 Rappelez-vous, il y a une fin d'année dernière, beaucoup de gens pensaient que les 6 premiers mois de l'année les marchés allaient s'effondrer, qu'on allait avoir une récession, que les taux allaient baisser.
04:56 C'est passé exactement l'inverse, donc il faut être très prudent sur les anticipations. La difficulté maintenant c'est d'anticiper comme toujours cette fin d'année, ces 4 derniers mois.
05:04 Mais donc les valeurs cycliques ont vraiment tiré plutôt leur épingle du jeu. Les valeurs défensives par contre ont marqué le pas. Je pense à la santé, je pense à une partie de l'immobilier, pas tout mais une bonne partie de l'immobilier.
05:14 Donc la vraie question aujourd'hui, elle repose un petit peu sur la lecture à la fois de l'inflation et de la macro, c'est vraiment la clé. Et à ce sujet, sur l'inflation, on le répète chez nous depuis de nombreux mois, je ne peux pas dire que ce n'est plus un sujet, mais c'est vraiment ancré.
05:32 Beaucoup de nos clients nous avaient demandé la semaine dernière qu'est-ce que Poel va dire. Je dis, je réponds un petit peu par une pirouette en disant, Poel il va surtout attendre les chiffres de cette semaine.
05:40 C'est-à-dire jeudi, comme vous le savez, la lecture de l'inflation qui est la lecture préférée de la Fed. Et globalement, si vous sortez un chiffre core à 0,2, le chiffre brut ne sera pas très bon autour de 0,7 parce qu'il y a eu pas mal de...
05:56 Les retailers vont avoir un impact plutôt négatif, entre autres il y avait l'Amazon Day qui peut avoir un impact négatif. Mais la lecture core, on attend 0,2.
06:04 C'est l'un mois sur l'autre.
06:05 Oui, c'est du month over month. Si vous sortez 0,2, ça sera bien. Parce que là, on sera plus sur un phénomène mensuel mais sur une tendance à 3 mois. Et là, il faudra être de mauvaise foi pour ne pas dire l'inflation est en voie de résolution.
06:18 Il l'a signalé dans son discours rapide de Jackson Hole. Il regarde évidemment les mesures d'inflation traditionnelles et puis il y a des mesures expurgées. Maintenant, on regarde le core services ex-housing.
06:29 C'est l'inflation dans les services core en dehors des phénomènes immobiliers, en dehors de l'immobilier du logement, du poids du logement dans les indices d'inflation.
06:39 Sur cette métrique-là, Jérôme Poel a affirmé qu'il y avait des signes d'encouragement. Ce qu'il ne disait pas il y a encore un mois ou deux.
06:46 Oui, il y a une évolution qui est importante. La composante immobilière dans l'inflation américaine, c'est à peu près 45% de l'indice. La composante salariale, c'est l'autre impact.
06:58 Ça, c'est le deuxième chiffre très important. Vendredi, on est le premier vendredi du mois, donc traditionnellement, chiffre du chômage américain. Et là, il faudra voir l'évolution des salaires.
07:09 Si on est sur un rythme, ce qu'on avait le mois dernier, 0, enfin 35 bips, si vous l'annualisez, ça vous met 4,2. Ça sera acceptable. En fait, tout l'enjeu de la Fed, c'est de reçir cette espèce de tour de passe-passe.
07:21 Et ça sera vraiment mettre au crédit de Poel, qui a démarré un peu tard, mais qui, pour l'instant, a pris la mesure des choses. C'est que si vous êtes sur une inflation, vous arrivez à contenir, et il veut ces 2 %,
07:30 le discours de la semaine dernière, c'est « ça sera pas 3 », il va essayer de s'approcher de 2. Et que de manière concomitante, vous arrivez à avoir un niveau de chômage qui lui, qui sera acceptable,
07:41 la Fed, je pense, se satisferait d'un niveau de 4,2, 4,3, 4,5 l'année prochaine. C'est des chiffres qui nous font rêver en Europe. Si le prix à payer s'est passé de 3,5 à 4,5, il aurait gagné son pari.
07:52 — Oui, on est loin du niveau de douleur qu'on imaginait il y a encore quelques mois. Si on arrive à stabiliser les prix et 4, 4,5 taux de chômage aux États-Unis, vous dites « ce sera une victoire pour la Fed ».
08:04 — Oui, ça... — Ce sera objectivement une victoire pour la Fed. — Et ça se présente plutôt bien. Après, tout l'enjeu, les débats suivants, c'est le débat d'effectivement récession par récession et...
08:14 — Oui, c'est ça. Quel niveau de douleur... Par quel niveau de douleur il faut passer ou de refroidissement de l'économie il faut passer. De ce point de vue-là, il y a toujours... Alors ça commence à faire longtemps qu'on en parle, maintenant.
08:26 Mais dans les marchés, il y a toujours ce facteur technique de la courbe des taux. Et une courbe des taux aux États-Unis qui reste quand même très inversée. Alors tout dépend effectivement
08:34 les écarts qu'on prend et qu'on regarde. On peut regarder 3 mois 10 ans. On peut regarder 2 ans 10 ans, généralement. C'est ça. Donc on voit cette courbe de taux, cette inversion de la courbe des taux aux États-Unis.
08:45 Là aussi, il faut mettre un peu les choses en perspective. Vous dites et ce que disent les stratégistes que vous suivez chez Raymond James, Thierry, c'est que le problème, c'est pas l'inversion de la courbe des taux.
08:57 Généralement le problème, il arrive quand la courbe des taux commence à se repentifier.
09:02 D'où ce graphique. Effectivement, vous voyez à l'écran, toutes les zones qui sont grisées, ça remonte jusqu'en...
09:09 Ce sont des récessions, généralement.
09:10 Ce sont des récessions. Et la ligne bleue, en fait, c'est le différentiel tôt 2 ans, tôt 10 ans. Vous voyez qu'en fait, les lignes grises n'apparaissent que lorsque les lignes bleues sont repassées au-dessus du 0.
09:21 Par la ligne noire. Donc on se porte forcément à aujourd'hui, on regarde sur la partie droite du graphique et on voit que les lignes bleues atteignent un niveau de -100 BP.
09:32 C'était fin juillet. Et donc toute la question était de comprendre déjà pourquoi est-ce que les taux de 10 ans se sont retendus en début de mois.
09:40 Alors nous, on fait une lecture un peu différente. On pense que c'est pas tant lié à l'activité économique que certains phénomènes techniques.
09:46 Un des premiers, c'était effectivement les Japonais qui ont modifié leur taux directeur et qui a eu pour impact.
09:54 C'est ce que dit notre stratégiste. Il dit quand vous avez des économies comme le Japon, alors c'est plus vrai sur la Chine, tournées vers l'extérieur et qu'à un moment donné, ils veulent défendre leur monnaie,
10:02 ils vont vendre en quelque sorte leur bijou de famille qui est souvent de la dette souveraine américaine. Et ceci a contribué en partie à une relative fermeté du taux 10 ans américain.
10:10 Après la lecture, c'est qu'est-ce qu'on fait du taux de 2 ans ? Là, l'interprétation que nous, on en fait, c'est plutôt sur les raisons techniques.
10:17 Car vous savez que depuis le mi-juin dernier, le gouvernement américain a décidé effectivement de déplafonner la dette.
10:24 Donc, ça permet au Trésor américain de... - D'y mettre comme jamais. - D'y mettre. Mais sur des échéances courtes de 10 ans.
10:32 Et donc, ce qui nous intéresse, c'est ce spread. Quand est-ce que ce spread va repasser positif ? C'est pas dans 2 ans, mais c'est pas dans les 3 mois.
10:40 Donc, il va se passer un certain nombre de temps. Et c'est pour ça que nous, on est dans une optique de penser qu'on pourrait avoir,
10:46 si récession il y a et on fait partie de ceux qui pensons qu'on aura une décélération assez sensible, on n'est pas forcément dans le camp du soft lending.
10:54 Et ça sera probablement dans le courant de 2024, voire plutôt dans le deuxième semestre. Donc, il y a du temps. Et donc, toute la question, c'est qu'est-ce qu'on fait en ce temps ?
11:01 - Et voilà. J'allais dire, est-ce qu'il est déjà temps d'organiser les portefeuilles dans la perspective probable ou possible d'une récession, d'une décélération plus marquée
11:11 qui enfoncerait un peu l'idée du soft lending ? Ou est-ce que pour l'instant, il faut rester dans le schéma soft lending tel qu'on le constate ?
11:19 On verra ce que donne l'emploi américain ce vendredi. Mais est-ce qu'il faut rester avec des stratégies d'investissement qui restent dans ce monde-là du soft lending ?
11:28 - Je réponds un peu par une pirouette, dans le sens où je pense qu'il est compliqué de savoir, et on ne saura probablement pas avant la fin d'année, quel scénario va prévaloir.
11:36 Franchement, c'est difficile de savoir aujourd'hui, soft lending, chacun ses convictions, ou...
11:41 - Récession, stagflation, on en discutait avant, c'est du un tiers, un tiers, un tiers.
11:46 - Voilà. Donc une manière, je pense, d'aborder, je parle des marchés américains, c'est d'essayer d'aller trouver des thèmes. Et c'est ce qu'on essaye de faire chez nous.
11:52 Donc pour répondre à votre question, je pense que c'est bien évidemment prématuré d'anticiper une récession. Et on verra en novembre, décembre, ce qu'on aura eu à se mettre sous la dent avec les chiffres sur l'inflation.
12:03 Donc je préfère me focuser en fait sur des thèmes. Et il y en a trois qu'on regarde en ce qui nous concerne.
12:08 Il y a le thème de la cybersécurité encore et toujours. Et les résultats de Palo Alto, publiés il y a une dizaine de jours, vont dans ce sens. C'est un thème qui reste très porteur.
12:17 Le deuxième, c'est l'intelligence artificielle. Vous l'avez évoqué dans l'entretien avant avec NVIDIA. Nous, on reste toujours acheteurs, même dans les cours actuels.
12:25 C'est vrai que ça a monté de 220% ou un peu plus depuis le début d'année. Mais on pense qu'il y a encore de la place.
12:30 Et le troisième sujet, c'est tout ce qui est le re-sharing. En fait, c'est la politique de Biden. Voilà. C'est à peu près les trois thèmes avec des idées à l'intérieur de chacun de cela.
12:39 Et puis on verra à un moment donné si en directionnel, il faut faire des choix sur la fin d'année.
12:44 Merci beaucoup Thierry. Merci pour votre éclairage de rentrée sur la situation des marchés américains et la stratégie ou les thématiques qui vous semblent intéressantes aujourd'hui à jouer sur ces marchés d'action américaines.
12:57 Thierry Guille, président de Raymond James, euro-ecoutise, qui était avec nous, l'invité de ce dernier quart d'heure de Smart Bourse ce soir.
13:03 Très bonne soirée. Smart Bourse revient évidemment demain à retrouver en replay sur bsmart.fr et en podcast sur l'ensemble de vos plateformes.
13:10 [Musique]