Retrouvez les nouvelles têtes sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Au Nouvelle Tête avec vous Mathilde Serrel, le rendez-vous des talents de demain, je le rappelle.
00:05 Aujourd'hui vous êtes avec un acteur qui vient de se découvrir.
00:08 Samuel Kircher, bonjour !
00:10 Bonjour !
00:10 Il venait d'avoir 18 ans, il était beau comme un enfant, fort comme un homme.
00:19 Bien sûr, je pense à cette chanson d'Alida, depuis que je sais que vous allez venir ici Samuel Kircher.
00:24 Vous venez d'avoir 18 ans, c'est vrai, pardon d'insister, mais vous avez la candeur infernale de votre jeunesse.
00:30 Et ça vous rend presque insolent.
00:32 De certitude !
00:36 C'est ce qui transparaît, en tout cas, de votre personnage de Théo, votre premier rôle au cinéma, dans le nouveau film de Catherine Bréa l'été dernier.
00:44 Film qui a marqué son grand retour à Cannes en compétition officielle et qui sortira en salle la semaine prochaine.
00:49 Théo a 17 ans, une réputation de garçon à problème et il va entraîner Anne, 30 ans de plus, dans une liaison.
00:55 Il m'a dit j'ai envie de toi, il avait vu au cinéma le blé en herbe.
01:06 Alors, petite variable en revanche par rapport à la chanson d'Alida ou au film "Le blé en herbe" de Claude Autant Lara, adapté de Colette, Théo couche avec sa belle-mère.
01:16 Je veux une bière.
01:20 Il va falloir d'abord passer par le magnétophone.
01:22 Il va falloir me raconter ta première fois.
01:24 C'est Léa Drucker qui incarne cette belle-mère et qui excelle dans l'ambivalence morale.
01:30 Pour vous, Samuel Kircher, premier rôle, je le disais, première scène d'amour incestueuse directement.
01:35 Ça ne devait pas être évident ?
01:37 Oui, c'est vrai.
01:39 Au début, on se demande un peu comment ça va être.
01:41 Catherine Bréa m'a beaucoup rassuré dès le départ, dès le premier jour du casting.
01:47 On a parlé parce qu'on avait tous les deux un peu peur avant.
01:54 C'est du cinéma, il n'y a pas de contact, il y a énormément de monde, c'est hyper chorégraphié.
02:00 C'est du cinéma et en même temps, vous ne saviez pas tant que ça ce que c'était.
02:03 C'est un premier rôle, un premier film, un premier casting et en même temps vous passez le bac.
02:08 C'était quel filière ? Est-ce que vous l'avez eu ?
02:11 Oui, je l'ai eu. Il n'y a plus de filière pour le bac mais je faisais un maths.
02:14 C'est mon côté humeuse.
02:16 Non, je suis neuf, du coup je faisais des maths.
02:19 Donc vous avez eu votre bac et le film.
02:22 C'est votre frère Paul Kircher, 21 ans, découvert dans le lycéen de Christophe Honoré
02:26 qui lui a valu une nomination au César.
02:28 Depuis, il enchaîne les films qui vous ont entraîné dans cette histoire, dans cette voie.
02:31 Finalement, il a eu raison, Samuel Kircher ?
02:33 Ah oui, c'est vrai, c'est très généreux. Il a eu raison.
02:36 Il m'a proposé de faire ce film, il m'a proposé de passer le casting
02:39 parce qu'il ne pouvait plus le faire comme il faisait le film de Thomas Cahier.
02:42 Du coup, je suis passé, il m'avait donné des conseils pour le casting.
02:45 Il vous a dit quoi ? D'ailleurs, je crois qu'il a eu des conseils décisifs pour vous.
02:48 Il vous a vraiment entraîné pour ces essais avec Catherine Bria.
02:52 Oui, c'est vrai. Il m'a dit de se présenter un peu.
02:55 En fait, un casting pour proposer, pas pour montrer qu'on est le rôle,
02:58 pour se présenter soi-même comme une des propositions.
03:01 Pour se présenter soi-même, Samuel, bonjour, voilà.
03:04 Vous avez fait ça, Samuel, bonjour, voilà. Il vous a dit le casting.
03:07 Attendez, il ne faut pas envoyer les gens sur des mauvaises pistes quand même.
03:10 Non, je crois que surtout l'idée, c'est de ne pas faire l'acteur américain.
03:13 Oui, c'est ça.
03:14 Ce n'est pas de soulever les sourcils, c'est d'essayer de filtrer quelque chose de soi, de proposer.
03:19 C'est ça, en fait. C'est-à-dire qu'on vient avec une énergie.
03:21 On peut penser à quelqu'un qu'on aime bien, à un texte qu'on a lu,
03:24 qui nous parle sur la scène et on le propose.
03:27 En fait, il faut avoir des choses à défendre aussi, je crois.
03:29 Il faut avoir quelque chose à l'intérieur qu'on défend, qu'on compose.
03:32 Oui, qui nous donne envie de faire la scène.
03:34 On ne va pas cacher votre généalogie. Votre frère, j'en parlais, Paul.
03:37 Et vous, Samuel, vous êtes les enfants d'Irène Jacob et Jérôme Kircher,
03:40 deux grands acteurs d'une classe infinie, en tout cas, je le pense vraiment.
03:44 Comment ils voient votre entrée à vous dans le cinéma ?
03:48 Avec beaucoup. Ils sont très attentionnés, avec beaucoup d'aide et d'accompagnement.
03:54 La critique du "nepo-baby", comme on dit aujourd'hui,
03:57 du "fils de", comme on disait avant, ça fait quoi sur vous ?
04:00 Non, moi, je suis clair avec ça.
04:03 Peut-être au début, mais j'ai entendu un jour une interview de Catherine Deneuve
04:07 avec Jacques Chancel dans les radios de Copie.
04:09 Ah oui, vous écoutez des vieilles interviews de...
04:11 Les radios de Copie, je les écoute, c'est vrai.
04:13 Et donc, elle disait ?
04:14 Ses parents étaient comédiens, donc elle me racontait que non.
04:18 Ça ne la dérangeait pas plus que ça.
04:20 Donc je me suis dit "Ah ouais".
04:21 C'est bon, c'est validé par Catherine.
04:23 Vous, vous vouliez faire de la danse, au départ, vous vous entraînez 10 heures par semaine.
04:26 Vous n'alliez pas être danseur, Samuel Kershaw ?
04:28 Non, mais en tout cas, j'étais dans un collège de danse, j'aimais beaucoup ça.
04:31 Mais je pense que ça m'a servi dans le film.
04:33 Je pense que ça a imprimé aussi la manière de bouger son corps,
04:36 de trouver une liberté aussi.
04:38 Alors, vous êtes jeune, je vous le rappelle, vous avez 18 ans.
04:41 On peut penser que vous écoutez du rap, mais pas du tout, vous écoutez ça, vous ?
04:44 C'était bien, chez Laurette
04:50 Quand on faisait la fête
04:55 Michel Delpech
04:58 Un retour de succès chez les 18 ans, Samuel Kershaw.
05:03 Vous l'aviez dans le casque, je crois, pour préparer le tournage.
05:06 C'est ça, pour préparer les scènes, je m'imbibais de musique.
05:10 C'était une des chansons, je ne sais pas pourquoi,
05:15 elle me faisait penser à une émotion qui doit être dans Théo, dans le personnage du film, que je jouais.
05:22 Il y en avait plusieurs, je ne sais pas trop si ça s'explique.
05:24 C'était surtout dans la scène où la belle-mère coupe d'un coup la relation.
05:31 Ce qui passe sur le visage de cette enfant, c'est peut-être la musique qu'on entend.
05:37 Je la chantais Laurette.
05:39 Il a 17 ans, Théo, dans le film. Il est mineur, c'est important.
05:41 C'est un film qui traite aussi du consentement.
05:43 Comment ça résonne dans votre génération, quand on a grandi avec Me Too,
05:46 puisqu'en 2017, vous aviez 12 ans, Samuel Kershaw ?
05:51 Oui, c'est ça. C'est évident que ce film le traite d'une manière...
06:00 Je ne dirais pas que c'est vraiment un film sur consentement,
06:02 c'est plutôt un film sur...
06:04 C'est une manière originale de montrer une histoire,
06:07 dans le sens où c'est un drame qui est montré en ne jamais dramatisant.
06:13 C'est-à-dire qu'elle essaie de montrer l'histoire uniquement comme elle est,
06:18 sans jamais la juger, sans jamais donner un avis sur les personnages.
06:24 Et vous, votre avis sur ce que ça a changé, Me Too, pour un garçon qui a eu de 17 à 12 ans ?
06:30 Non, je pense que c'est vraiment une évolution.
06:33 Vous m'auriez dit que ce n'était pas une bonne chose.
06:36 Oui, c'est ça. Je suis né dans la génération, c'est vrai que c'est vraiment normal.
06:40 Pour moi, à 12 ans, je grandis avec ça.
06:42 On va écouter l'autre inspiration qui vous accompagne.
06:46 La musique, c'est le langage de la détermination,
06:49 parce qu'elle conduit avec elle plusieurs lignes de sens, sans nous obliger à choisir.
06:53 Elle exprime, elle n'exprime pas.
06:55 Elle exprime des tas de choses ensemble, ou bien elle n'exprime rien, comme vous voudrez.
06:59 Donc c'est une expression équivoque, multivoque, et pas simple.
07:05 En ce moment, vous lisez Vladimir Jankelévitch, le philosophe et mélomane Samuel Kircher.
07:10 C'est une bonne indication sur le jeu, la musique ?
07:13 Oui, c'est ça.
07:14 Équivoque ?
07:16 Oui.
07:18 C'est certain, dans la manière dont on propose de la matière,
07:23 et puis le spectateur vient récupérer ce qui résonne en lui.
07:29 C'est peut-être ça.
07:30 Et c'est aussi ce que propose ce scénario.
07:32 C'est ça. En tout cas, la mise en scène de Catherine Bréa.
07:35 Parce que c'est une manière de faire un film, comme je disais,
07:38 où on propose une histoire, et le spectateur résonne de la manière dont il veut,
07:42 puisque ce n'est jamais jugé. On ne juge jamais le rapport au personnage.
07:45 Alors, une question Samuel Kircher.
07:47 Vous prenez les commandes de cette émission de la matinale, vous êtes venu avec un poème,
07:50 c'est Baudelaire, "Élévation d'un mot pourquoi ?"
07:53 Pourquoi ? C'est un poème avec qui j'ai eu une belle histoire un jour,
07:57 avec quelqu'un que j'aime beaucoup, on était en face de la mer,
08:00 et il me l'a dit, et ça m'a donné énormément d'énergie.
08:03 Donc je me dis peut-être que ça peut donner de l'énergie.
08:05 On vous écoute. Ça peut réveiller les gens. Il y en a encore à 9h57.
08:10 Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées, des montagnes, des bois, des nuages, des mers,
08:17 par-delà le soleil, par-delà les éthers, par-delà les confins des sphères étoilées,
08:22 mon esprit tu te meux avec agilité, et comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,
08:27 tu sillonnes gaiement l'immensité profonde avec une indicible et mâle volupté.
08:35 Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides, va te purifier dans l'air supérieur,
08:40 et bois comme une pure et divine liqueur le feu clair qui remplit les espaces limpides.
08:45 Derrière les ennuis et les vastes chagrins qui chargent de leur poids l'existence brumeuse,
08:49 heureux, celui qui peut d'une aile vigoureuse s'élancer vers les champs lumineux et sereins,
08:54 celui dont les pensées comme des alouettes vers les cieux le matin prennent un libre essor,
08:58 qui plane sur la vie et comprend sans effort le langage des fleurs et des choses muettes.
09:03 - Merci Samuel Kircher, votre exemplaire est jaune, tout corné et annoté.
09:08 Vous jouez votre premier rôle au cinéma l'été dernier de Catherine Bria en salle, mercredi prochain.