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Anne Fulda reçoit Bruno de Cessole pour son livre «Le sceptre et la plume» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 Bienvenue à l'heure des livres Bruno Tseyssol.
00:03 Merci Anne.
00:04 Vous êtes historien de formation, vous êtes journaliste, vous êtes aussi écrivain.
00:09 Et vous venez de publier "Le sceptre et la plume", un livre passionnant qui est paru chez Perrin,
00:14 qui analyse une tradition bien française, c'est les liaisons étroites qui existent entre pouvoir et écriture.
00:20 Vous écrivez "La France représente depuis des lustres la terre des lections de la littérature, la république des lettres par prédestination".
00:27 Néanmoins, ces liaisons particulières, est-ce qu'elles sont vraiment propres à la France ?
00:33 C'est une singularité française ?
00:35 Écoutez, je ne vois pas dans l'histoire européenne d'autres pays où il y a eu une telle liaison,
00:41 je dirais presque incestueuse, entre le pouvoir politique et la littérature.
00:45 Si on prend l'exemple de nos voisins britanniques par exemple,
00:49 être considéré comme un écrivain ou un intellectuel en Grande-Bretagne, c'est presque une insulte.
00:54 Et donc les hommes politiques, il y a eu deux exceptions, il y a eu Benjamin Disraeli au XIXe siècle,
01:00 qui était romancier, mais pas considéré comme quelqu'un de très sérieux,
01:03 et il y a eu surtout Churchill au XXe siècle, qui a été un peu l'équivalent du général de Gaulle pour nous,
01:09 tant comme de pouvoir et comme de lettres.
01:12 Mais sinon, est-ce que vous imaginez Mme Merkel par exemple, écrire des romans,
01:17 et imaginez qu'écrire un roman ou un essai ajouterait quelque chose à sa dimension politique ?
01:22 Non, c'est vraiment une singularité française depuis au moins le XVIIe siècle.
01:26 C'est ce que vous prouvez, ce que vous démontrez dans votre livre, où vous partez de montagne,
01:31 où vous évoquez Tocqueville, Napoléon, Victor Hugo, il y a eu beaucoup de...
01:37 Léon Blum, de Gaulle bien sûr, Mitterrand, soit des écrivains qui ont eu un rôle politique,
01:45 soit des hommes politiques qui se sont targués d'être des écrivains.
01:49 Vous parlez de rapport consanguin dans le livre, d'ailleurs vous venez de dire que c'est presque limite incestueux.
01:56 Oui, d'ailleurs je prononçais le mot incestueux du reste.
01:59 Pourquoi ? Parce qu'il y a une forme de fascination réciproque entre les deux univers.
02:04 Toujours, il y a entre les hommes politiques et les hommes de lettre, une sorte de fascination,
02:11 parfois une sorte de répulsion aussi, mais une fascination réciproque.
02:14 C'est-à-dire que les hommes politiques, malgré leur réussite,
02:18 semblent envier aux écrivains une notoriété ou une gloire qui dépassera un mandat électoral en quelque sorte.
02:27 Donc si autant d'hommes politiques se sont voulu écrivains, c'est pour obtenir une sorte de brevet pour la postérité
02:34 qu'ils n'espéraient pas obtenir en tant qu'hommes politiques.
02:37 Mitterrand, auquel je consacre un long chapitre, personnage très fascinant et très emblématique
02:45 de ces relations entre littérature et politique, Mitterrand croyait profondément à la futilité de la politique.
02:51 Et au fond, il était persuadé qu'il passerait à la postérité en tant qu'homme de culture,
02:55 en tant qu'écrivain, beaucoup plus qu'en tant qu'homme politique.
02:58 Je crois que la plupart des hommes politiques s'imaginent que le devoir d'inventaire qui succède à leur mandat
03:05 fait qu'il ne serait souvent, il restera assez peu de choses de leur action en tant qu'homme politique.
03:10 Alors qu'un livre peut traverser les siècles.
03:14 Alors ce cas de François Mitterrand, il fait penser un peu à celui d'Emmanuel Macron.
03:20 Vous arrêtez le livre à Mitterrand, mais vous parlez beaucoup d'Emmanuel Macron dans l'introduction,
03:26 parce que lui aussi, en tout cas avant d'être élu, il a beaucoup dit qu'il palassait la littérature au-dessus de tout.
03:32 Il a d'ailleurs écrit un roman qui n'est pas paru.
03:36 Après, on ne sait pas, il fait des grands discours, mais qu'il n'écrit pas pour la plupart.
03:41 Alors ça continue en fait. Pourquoi vous êtes arrêté à Mitterrand ?
03:46 Je me suis arrêté à Mitterrand parce que je ne voulais pas traiter les vivants.
03:50 Parce que dans le cas des hommes politiques contemporains, ceux qui vivent toujours,
03:53 d'abord on n'est jamais sûr, ils ont signé des livres, mais les ont-ils écrits ?
03:57 On n'en est jamais certain.
03:59 Et en deuxième lieu, il me semble que Mitterrand termine en beauté cette liaison séculaire entre la littérature et la politique.
04:11 Et je voulais commencer par Montaigne, parce qu'il est aussi emblématique du début justement de cette tradition,
04:16 et Mitterrand parce qu'il clôt magnifiquement cette tradition.
04:20 Macron, bien sûr. J'ai été très étonné de découvrir que Macron, dans ses trois entretiens au 1,
04:26 au moment de sa campagne présidentielle, avouait que sa véritable vocation au fond était beaucoup plus la littérature que la politique.
04:33 Et ça m'a frappé, c'est la raison pour laquelle je commence d'ailleurs par parler de lui dans mon introduction.
04:39 Et peut-être faudra-t-il attendre qu'il ait quitté la politique pour se mettre à la littérature,
04:44 ce qu'il laisse peut-être entendre d'ailleurs dans cet entretien,
04:47 qu'une fois qu'il aura quitté le pouvoir, il se consacrera peut-être à cet autre travail,
04:53 à cette autre ambition qui est l'ambition littéraire.
04:56 Enfin, dernière question rapidement. Comment avez-vous choisi ce dont vous parlez ?
05:00 Parce que c'est une sélection assez subjective, ce n'est pas exhaustive.
05:03 Oui, bien sûr. J'ai choisi, d'abord, comme on dirait en football, les joueurs de première division.
05:13 Donc il y a forcément des auteurs que je ne pouvais pas ne pas parler.
05:16 Et ensuite, il y a eu effectivement une dimension subjective.
05:19 J'ai préféré par exemple parler de Guizot plutôt que de Thiers.
05:22 J'ai préféré parler de Léon Blum plutôt que de... je ne sais plus qui d'ailleurs.
05:31 Bref, oui, il y a aussi mes choix personnels.
05:34 Non seulement la dimension reconnue par la postérité qui est la célébrité,
05:38 mais aussi des goûts personnels.
05:40 Je suis plus attiré par certains d'autres, par certains écrivains, par certains politiques que par d'autres.
05:45 En tout cas, vraiment, je vous conseille de lire. C'est vraiment très intéressant.
05:49 "Le sceptre et la plume", c'est paru chez Perrin.
05:52 C'est très instructif sur cette tradition bien française, sur ces liens, ces liaisons en voie de disparition.
05:58 Enfin, vous dites ça, mais Bruno Le Maire vient de publier un livre.
06:03 Édouard Philippe s'apprête à le faire. Donc, ce n'est pas totalement épuisé non plus.
06:07 Merci Bruno de Cessol. Merci.
06:09 Merci Adjuta.
06:10 Merci Adjuta.
06:11 Merci Adjuta.
06:13 Sous-titrage Société Radio-Canada
06:16 [Musique]
06:19 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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