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Anne Fulda reçoit Marc Lavoine pour son livre «Quand arrivent les chevaux» dans #HDLivres

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Transcription
00:00Bienvenue à l'Heure des Livres, Marc Lavoine.
00:02On est ravis de vous recevoir.
00:04Je suis ravi d'être là.
00:05On n'a pas trop besoin de vous présenter.
00:07Vous êtes un artiste complet qui chante, qui écrit, qui tourne.
00:11Et là, vous venez de publier un livre
00:14qui s'appelle Quand arrivent les chevaux,
00:16qui est paru chez Fayard.
00:18En fait, c'est une lettre d'amour.
00:20C'est un livre émouvant, tourmenté.
00:22C'est un peu le livre de quelqu'un défêlé,
00:25au sens de quelqu'un qui a des fêlures,
00:27laisse passer la lumière.
00:29C'est un livre que vous avez consacré à votre mère,
00:33dix ans après celui que vous avez écrit sur votre père.
00:36C'est un hasard.
00:38C'est un hasard.
00:39Je l'avais écrit avant,
00:40mais j'ai laissé...
00:42Après la mort de ma mère, je l'ai écrit comme ça.
00:45Et je l'ai laissé sur mon atelier, traîné.
00:49J'avais du café renversé dessus, des tâches de peinture.
00:53Et j'avais réécrit dedans, au stylo, des choses, des corrections.
00:58Je l'avais oublié, je ne l'ai pas relu pendant ces années-là.
01:01Et on m'a demandé de le sortir.
01:05Et donc, panique à bord, je ne savais pas ce qu'il y avait dedans.
01:08J'avais oublié.
01:09J'ai demandé à Marie, mon attachée de presse,
01:12si elle voulait bien le lire en même temps que moi.
01:15Au milieu, je l'ai appelé en lui disant que c'était pas mal.
01:18Le deuxième jour, j'ai dit que c'était pas mal.
01:20Donc, prenons le risque.
01:23Vous mettez en prologue une phrase de Romain Garry.
01:26Elle avait des yeux où il faisait si bon vivre
01:29que je n'ai jamais su où elle est depuis.
01:31C'est votre cas.
01:33Vous êtes, depuis, comme un peu un enfant perdu,
01:36depuis qu'elle n'est plus ?
01:37Ou c'était jus ?
01:39Oui, c'est vrai que...
01:41Non, non, mais je...
01:43Jusqu'à ce que je le relise, là, il n'y a pas longtemps,
01:47il y a à peu près neuf mois.
01:52J'étais un enfant perdu.
01:55Et puis...
01:58le bonheur est revenu
02:00au moment où je sors le livre, au moment où je sors mon disque aussi.
02:06Chose à laquelle je ne croyais plus du tout, en fait.
02:08Enfin, je pensais que c'était terminé, quoi.
02:11Je voulais peut-être même arrêter de travailler, un peu.
02:14Je voulais écrire des livres, mais arrêter d'être à Paris...
02:18J'aimais plus Paris, j'aimais plus...
02:22J'aimais plus tellement l'existence, en fait.
02:25Et ça sort au bon moment.
02:28Ça me surprend.
02:30C'est...
02:32Le bonheur existe, et il ne faut pas en avoir peur.
02:36Alors, dans le livre, vous racontez vos visites,
02:39les derniers jours de votre mère, dans une clinique d'Antony,
02:42la chambre 36.
02:44Évidemment, vous racontez aussi qu'il a été difficile à écrire,
02:47ce livre, vous racontez des dialogues avec votre éditrice,
02:51qui vous dit, alors, on en est où ?
02:53Alors, on va dormir, entre fiction et réalité, j'imagine.
02:57Alors, Marc a écrit le prologue du livre.
03:00Ensuite, c'est un roman, et c'est vrai qu'il a été difficile à...
03:04Parce que le fait que ma mère me dise...
03:07Elle est mal morte, je lui ai réécrit, ça, d'abord.
03:11Le fait qu'elle me dise que c'est une enfant de 12 ans,
03:14puisqu'elle triche un peu sur son âge, toujours,
03:17et que quand sa jument, qui s'appelait Majument,
03:20est morte dans ses bras, et qu'elle a avalé son dernier soupir,
03:24elle est aussi un cheval, elle est devenue sa jument,
03:27elle est devenue Majument, donc elle me demande,
03:29s'il t'appelait Marc, arrête de m'appeler Maman,
03:32tu m'appelles Majument.
03:33Donc, ce principe de l'enfance et du cheval n'est pas un hasard.
03:37Ensuite, les lunes, tous les aspects,
03:39et la dérive que Marcel fait, ce sont les mots du monde.
03:43Parce que la mort, dans nos pays, n'est pas la même mort qu'en Asie,
03:47ni la même mort qu'en Inde, ni la même mort qu'en Afrique,
03:51où tout est vivant, là-bas.
03:52Ici, tout est mort.
03:53Dans nos villes verticales, on regarde la mort autrement,
03:57et on dit, comment ça va, votre mari, il est en chimio,
04:00ça va très bien, votre mari va très bien.
04:02On a une forme de pudeur ou de peur de l'affronter.
04:05Et donc, ça nous met dans une situation difficile.
04:08Et là, j'ai essayé de replonger la mort dans la vie,
04:11parce qu'on sait pas ce que c'est que la vie,
04:13on sait pas ce que c'est que la mort,
04:15on sait pas ce que c'est que l'amour.
04:18Donc, il fallait essayer d'être équilibriste
04:20dans l'écriture du livre, pour essayer de sortir un livre.
04:23Vous venez de dire, oui, c'est écrit dans le livre,
04:27d'ailleurs, Maman est mal morte,
04:28donc, là, lui consacrer un livre, c'est la rendre bien morte ?
04:32Oui, c'est-à-dire, c'est la rendre vivante dans sa mort.
04:36Parce que la mort nous laisse quelque chose.
04:39Et puis, il y a certains qui pensent qu'après, il y a quelque chose.
04:43Ils pensent qu'après, il y a autre chose.
04:45On le sait pas, vraiment.
04:47Mais on n'en est pas sûrs, on n'est pas certains que ça n'existe pas.
04:51Donc, si vous voulez,
04:52la vie d'une personne qui s'en va continue en vous,
04:56elle évolue en vous, elle continue à vous surprendre,
04:59elle vous a laissé des clés qui ouvrent des portes nouvelles
05:02que vous ne compreniez pas à l'époque.
05:04C'est comme une chanson de Brassens,
05:06vous l'écoutez une fois, et puis mille fois.
05:08Et à chaque fois, le petit cheval, il a une autre...
05:11Vous avez une autre vision de lui, parce que vous avez avancé,
05:15si vous voulez, ce qui est difficile,
05:18les objets qu'on perd, les maisons qu'on perd,
05:21mais les êtres qu'on perd sont irremplaçables.
05:24C'est inacceptable.
05:25Alors, la poésie, peut-être, nous permet d'accepter ça, je crois.
05:29Et dernière question, qu'est-ce qu'elle vous a appris ?
05:33Elle m'a tout appris.
05:35Elle m'a tout appris.
05:37Elle m'a appris à pas trahir.
05:39Elle m'a appris l'honnêteté et la pureté.
05:42Et c'est ce que j'essaye de...
05:44Bien sûr, on a tous des défauts et on fait des conneries,
05:47mais j'essaye d'être fidèle à sa mémoire, là-dedans.
05:51Je pense que, dans mon panthéon, il y a une personne au centre,
05:55et j'ai envie de lui plaire, qu'elle soit heureuse
05:57de ce que je fais aujourd'hui, de ce que je suis devenu grâce à elle.
06:02Eh bien, peut-être de là où elle lira ce livre.
06:05En tout cas, Quand arrivent les chevaux, c'est un très joli livre.
06:08C'est paru chez Fayard.
06:09Merci d'être venu ici nous en parler.

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