Vendredi 17 novembre 2023, ART & MARCHÉ reçoit Alexandre Millon (Commissaire-priseur, président, Millon) et Sandrine Gintzburger (Fondatrice, Triptyc)
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans Art et Marché, votre émission hebdomadaire
00:12 consacrée au marché de l'art.
00:14 Pour l'actualité de la semaine, la maison de vente aux enchères Milon propose désormais
00:17 à ses collectionneurs de certifier la traçabilité des objets achetés grâce à une puce NFC.
00:23 La première vente proposant ce dispositif a eu lieu il y a quelques jours.
00:28 Nous verrons avec son président Alexandre Milon pourquoi avoir fait ce choix et surtout
00:32 comment se déroule son application.
00:34 On passera ensuite à l'interview de la semaine.
00:37 On s'intéresse au monde de l'immobilier et à son soutien au monde de l'art.
00:41 Sandrine Ginzburger, fondatrice de l'agence Triptik, spécialisée dans la gestion de
00:46 projets artistiques pour le secteur de l'immobilier, sera mon invitée.
00:49 On vous en dit plus tout de suite dans Art et Marché.
00:52 Le 7 novembre dernier, la maison de vente aux enchères Milon a proposé aux collectionneurs
01:01 participant à la vente de doter les lots achetés d'une puce NFC.
01:05 Cette puce est liée à une carte d'identité digitale de l'oeuvre sécurisée sur la blockchain.
01:11 Bonjour Alexandre Milon, vous êtes commissaire priseur et président de la maison de vente.
01:16 Merci beaucoup d'être avec nous.
01:17 Est-ce que vous pouvez tout simplement nous dire pourquoi avoir fait ce choix d'apporter
01:22 cette option aux collectionneurs participant à la vente ?
01:25 Bonjour à tous.
01:27 Oui, c'était un choix qui était assez évident, ça s'imposait.
01:31 Il y a un maître mot en ce moment qui domine le marché, pas que le nôtre, pas que le
01:36 marché de l'art, c'est la provenance.
01:39 Je vais dire les choses un peu plus crûment, il s'agit de toujours laver plus blanc que
01:46 blanc et pouvoir prouver les traçabilités des provenances.
01:49 Alors lorsqu'on peut offrir sur une blockchain une carte d'identité digitale d'une oeuvre
01:55 qui recense toute bibliographie, certification, authentification et autres éléments qui
02:01 créent un contexte rassurant, évidemment on s'est jeté dessus.
02:09 C'est aussi une technologie qui est efficace, on va dire vraiment maintenant, contrairement
02:15 à il y a quelques années où l'idée n'est pas « neuve » mais absolument en réflexion
02:20 d'efficace maintenant.
02:21 Oui, on a fait, les étapes sont désormais abouties.
02:27 Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment ça a pu être mis en place ? Est-ce que c'était
02:33 compliqué techniquement ?
02:34 Non, d'abord nous nous sommes rapprochés d'une société qui s'appelle Arteia, qui
02:41 s'est plutôt rapprochée de nous, qui avait besoin d'une maison de vente à un certain
02:45 relief pour essayer de créer une légitimité à agir, à travers notre système, notre flux,
02:52 c'est-à-dire qu'au moment où nous proposons des ventes, et donc les achats se réalisent,
02:59 pour aller un petit peu plus loin encore dans ce que l'on peut offrir aux acheteurs en
03:03 termes de réassurance et pour inscrire définitivement l'authenticité, puisque c'est quand même
03:10 l'appalage des Français, des commissaires-priseurs français, des ordonnances françaises, que
03:14 d'offrir une garantie d'acheteur.
03:17 Et ça, c'est quelque chose qui ne nous fait pas peur.
03:21 Donc toute technologie qui nous permettait de l'inscrire définitivement dans une blockchain,
03:25 donc à vie, ça nous permettait d'aller encore un petit peu plus loin dans notre recherche
03:33 de perfection, de transaction parfaite.
03:36 Mais techniquement parlant, comment ça se passe en fait, la puce NFC, comment elle
03:39 se pose, comment elle se met par rapport aux oeuvres, aux lots achetés ?
03:42 C'est un petit peu étonnant parce que c'est à la fois extrêmement basique matériellement,
03:48 puis après, la technologie qui en découle est un peu plus complexe.
03:53 En fait, vous avez une petite puce qui fait quelques millimètres, qui vient se coller
03:59 sur l'objet, à un endroit bien sûr qui est plus propice que d'autres.
04:03 Alors ça dépend bien évidemment des supports, des matériaux que vous pouvez trouver.
04:08 Et puis le fait qu'elle se colle l'empêche d'être décollée, et si elle est décollée,
04:14 en fait, elle la détruit entièrement.
04:16 Donc là, à ce moment-là, la garantie qu'on cherche à offrir à travers ça n'existe
04:21 plus.
04:22 Donc vous avez ce geste, tout à fait classique, de coller comme une étiquette, et ensuite
04:29 vous enregistrez les informations que vous voulez dessus, puis ensuite bien sûr ça
04:32 part sur la blockchain, et alors là c'est une autre étiquette qui est collée.
04:34 Et là, on est à quelques jours de cette première vente qui a eu lieu.
04:38 Est-ce que très rapidement, vous pouvez vous dire si déjà les collectionneurs se sont
04:41 manifestés pour avoir cette puce ?
04:43 Oui, c'est-à-dire juste après la vente pour tous les acquéreurs, on leur a proposé
04:49 cette technologie.
04:50 On leur a proposé de la offrir dans un premier temps, parce qu'on considère que c'est
04:56 de notre service, ça participe à ce que l'on doit à nos clients.
05:02 Et beaucoup sont déjà revenus, j'ai envie de vous dire environ 40% sont revenus avec
05:09 des questions ou simplement l'envie de le faire.
05:11 Alors on comprend un petit peu que d'abord il y a vraiment un gain, le premier bénéfice
05:18 c'est la logique, c'est la logistique, c'est comment je peux référencer mon patrimoine,
05:24 ma collection, comment je pourrais facilement imaginer, même la transmettre, sans avoir
05:30 à imaginer que mes héritiers se retrouvent face à ce que c'est que cet objet, ce tableau,
05:36 même combien il vaut, puisqu'on offre même la possibilité, et c'est là que c'est intéressant
05:41 à nos clients, d'inscrire ou non le prix d'achat.
05:45 Ils ne sont pas obligés de le mettre.
05:48 Nous ce que l'on certifie c'est la garantie, la provenance, l'authenticité.
05:53 Le prix est une option qui, fiscalement parlant, peut-être avoir aussi des réalités pour
05:59 eux-mêmes et pour leurs ayants droit ensuite.
06:04 Donc c'est la raison pour laquelle on leur laisse cette option.
06:08 Mais les retours seront très bons.
06:10 Merci beaucoup Alexandre Milan.
06:13 Je rappelle que vous êtes président et commissaire priseur de la maison de vente aux enchères
06:17 Milan.
06:18 Et tout de suite on passe à l'interview de la semaine.
06:19 Le programme Un Immeuble, une oeuvre qui place la création artistique au sein de l'espace
06:29 public a atteint le chiffre de 650 oeuvres d'art commandées et installées sur l'ensemble
06:34 du territoire français.
06:36 L'occasion pour nous de faire un point sur les liens créés entre le secteur de l'immobilier
06:40 et le monde de l'art.
06:42 Sandrine Ginzburger qui est fondatrice de l'agence Triptik, spécialisée dans la gestion
06:46 de projets artistiques pour le secteur de l'immobilier, est en plateau avec moi.
06:50 Bonjour, merci beaucoup d'être avec nous.
06:52 Bonjour Sybille.
06:53 Avant même de parler du dispositif Un Immeuble, une oeuvre, parlons déjà du soutien public
06:59 qui lui est assez historique.
07:02 Est-ce que vous pouvez nous expliquer quel est le dispositif public déjà mis en place
07:05 depuis un certain nombre d'années ?
07:08 Alors déjà il faut savoir que l'art et l'immobilier ont toujours collaboré ensemble.
07:13 Il y a eu des périodes plus ou moins fastes et des périodes où il ne s'est malheureusement
07:18 rien passé, notamment je pense à la période de l'entre-deux-guerres et après la deuxième
07:23 guerre mondiale pour des raisons évidentes et économiques.
07:25 Donc il faudra attendre 1951 pour que l'Etat oblige les pouvoirs publics qui ont des projets
07:34 de construction, de rénovation d'immeubles, intègrent 1% du prix global de la construction
07:44 à des projets artistiques.
07:46 Donc ça c'est pour la partie publique.
07:48 Est-ce qu'il y a des modalités particulières pour ce fonds ? Pour respecter ce 1% ?
07:55 Oui, tout à fait.
07:57 D'abord c'est une obligation, je le rappelle, c'est une obligation de la part des pouvoirs
08:02 publics à mettre 1% de la somme des fonds alloués pour la construction.
08:10 Et puis ça ne doit s'adresser qu'à des artistes vivants.
08:14 L'idée c'est vraiment de vivre avec les artistes contemporains, avec les artistes
08:19 qui marquent notre histoire.
08:21 Donc ça c'est un soutien.
08:23 Est-ce qu'on a un retour de plusieurs dizaines d'années ? Ça fonctionne bien ?
08:28 Oui, ça fonctionne bien puisqu'aujourd'hui on compte plus de 12 500 œuvres d'art réparties
08:37 partout dans la France et plus de 4000 artistes ont participé à ce programme.
08:44 En revanche, la question est intéressante, est-ce qu'on peut se demander aussi si tous
08:51 les pouvoirs publics jouent le jeu ? Est-ce qu'à chaque fois qu'il y a une construction,
08:56 est-ce qu'il y a un projet artistique associé ? On n'en a pas la transparence totale.
09:03 D'accord, et on ne sait pas si, avant de parler du privé, si le public serait le principal
09:10 soutien de l'oeuvre d'art en termes d'immobilier.
09:13 Alors aujourd'hui oui, parce que historiquement, et le secteur privé lui est acteur sur art
09:23 et immobilier depuis le 2015.
09:26 Comment ça s'est passé ? Un groupement de 13 promoteurs immobiliers ont travaillé
09:32 avec la ministre de la culture de l'époque, Fleur Pellerin, pour créer un programme qui
09:40 s'appelle "Un immeuble, une œuvre".
09:42 Donc le périmètre est complètement différent puisque déjà les acteurs privés eux n'ont
09:50 pas d'obligation, ils ont une incitation.
09:53 Et pour les inciter à mettre une œuvre d'art dans leur programme de construction d'immeubles,
09:59 le gouvernement leur a accordé des avantages fiscaux.
10:04 Alors justement, allons-y, quelles sont les options ?
10:08 Alors déjà, je voudrais rappeler deux choses.
10:11 D'abord, le soutien, c'est pas parce qu'on dit soutien fiscal que c'est des œuvres
10:17 qui sont complètement défiscalisées à 100% et gratuites.
10:20 On va revenir sur le calcul après.
10:23 Et je voulais aussi vous préciser que cette fiscalité en faveur de l'achat d'art est
10:32 pour une fine aide les artistes.
10:35 Pourquoi, pour rappel, les artistes, contrairement aux acteurs, s'ils ne vendent pas d'œuvres
10:44 d'art, ils n'ont pas de revenus.
10:46 Parce que les acteurs peuvent faire des publicités ou autre chose ?
10:50 Oui, non, je pensais plus parce que les acteurs sont intermittents du spectacle et peuvent
10:57 toucher du chômage.
10:58 Alors que les artistes ne sont pas intermittents du spectacle et à ce titre, s'ils ne vendent
11:03 pas, ils n'ont pas de revenus.
11:05 D'où ces incitations fiscales pour le privé pour favoriser l'achat d'art.
11:13 Alors comment ça se passe pour les promoteurs quand ils ont un programme immobilier et qu'ils
11:20 mettent une œuvre d'art ?
11:21 Sur un plan fiscal, ils ont deux options.
11:23 La première option, c'est qu'ils peuvent passer la première année en charge l'ensemble
11:29 des frais.
11:30 Ça s'appelle la méthode de l'achèvement, donc une fois 100% des frais.
11:35 Ou alors, un peu similaire à l'amortissement, ils peuvent sur cinq ans diviser en un cinquième
11:44 le coût de l'œuvre d'art mais c'est plafonné à 10 000 euros par an ou 5 pour
11:51 1000 du chiffre d'affaires.
11:53 Et pareil, est-ce qu'il y a des modalités spécifiques à respecter ?
11:57 Et donc bien sûr les artistes vivants ?
12:00 Tout à fait.
12:01 Est-ce qu'il y a d'autres éléments ?
12:03 Alors, en termes d'éléments, aussi sur un plan comptable, l'œuvre d'art doit
12:07 être enregistrée dans un compte de réserve réglementé et au passif du bilan.
12:11 D'accord.
12:12 Et puis, une fois qu'on a parlé de la fiscalité et de la comptabilité, le programme doit
12:21 s'appliquer uniquement auprès des artistes vivants et l'œuvre d'art doit être à
12:26 disposition du public.
12:28 Donc c'est un moyen formidable de faire vivre avec des œuvres d'art les gens du
12:36 quartier ou de l'immeuble.
12:38 Et en tant que professionnel, vous avez des conseils à donner ? Je ne sais pas si une
12:44 entreprise nous regarde ?
12:45 Oui, bien sûr.
12:46 En 40 secondes.
12:47 Oui, en 40 secondes.
12:48 On va faire très vite.
12:49 Déjà, il faut définir ses objectifs et puis ses valeurs.
12:53 Qu'est-ce qu'on a envie de faire ?
12:54 Trouver le meilleur artiste en face avec ses valeurs et ses objectifs, l'aider, lui donner
13:04 ce cadre, faire toute la gestion du projet, le laisser totalement libre mais à l'intérieur
13:10 du cadre parce qu'un artiste n'est pas un illustrateur mais il doit créer à travers
13:16 un cahier des charges.
13:17 Merci beaucoup Sandrine Kinsburger.
13:18 Merci à vous.
13:19 Je rappelle que vous êtes fondatrice de l'Argence Triptych spécialisée dans la gestion de
13:24 l'artistique pour le secteur immobilier.
13:26 Et quand on n'a qu'à nous, on se retrouve la semaine prochaine pour un nouveau numéro
13:29 d'Art & Marché.
13:30 Merci.
13:31 Merci.
13:32 Merci.
13:33 ♪ ♪ ♪