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Dans son édito du 23/10/2024, Mathieu Bock-Côté revient sur [thématique de l'édito]

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Transcription
00:00Je crois que nous sommes obligés de traiter cet homme, Andy Kerba, comme un symptôme.
00:06Comme un symptôme de ce que sont devenus, on pourrait dire en France, mais on pourrait dire partout en Occident,
00:11ce que sont devenus nos élites politiques, d'une forme d'effondrement de l'intelligence,
00:17d'un effondrement de la culture, d'un effondrement de la capacité à gouverner,
00:20d'un effondrement de la qualité des représentants du peuple.
00:24Et cet homme, son parcours, ce qu'il représente, Andy, beaucoup finalement sur cet effondrement.
00:30Alors, parce qu'on a tous un peu l'impression, disons-le poliment, je ne parle pas de lui en particulier,
00:34d'être gouverné aujourd'hui par des ploucs.
00:36Et cette espèce de ploucosphère qui est aujourd'hui le pouvoir représenté,
00:40nous allait nous dire comment expliquer cette faiblesse terrible des élites.
00:44Comment se fait-il qu'on ait eu, il n'y a pas si longtemps que ça, dans l'histoire des hommes,
00:47une qualité immense pour nous gouverner, et aujourd'hui qu'on se retrouve avec des gens
00:51confinés en d'autres circonstances, même pas la gestion d'un parc municipal abandonné.
00:55Alors, comment comprendre cela?
00:58L'explication de base, mais ensuite on déclinera de manière plus précise,
01:02c'est que le pouvoir a quitté la politique depuis longtemps.
01:05Le véritable pouvoir dans nos sociétés a migré vers la finance, a migré vers les médias,
01:10a migré vers l'université, quoi qu'on en dise, a migré vers la technocratie,
01:14a migré vers les autres instances internationales, les organisations transnationales de la gouvernance globale,
01:19a migré vers les tribunaux.
01:21Si vous voulez exercer du pouvoir dans nos sociétés, ce n'est plus vers la politique
01:25que vous vous dirigez spontanément.
01:27Ou alors, vous l'utilisez comme un marchepied pour vous rendre plus loin dans la société.
01:31Mais le vrai pouvoir est ailleurs.
01:33Et que reste-t-il en politique?
01:35On pourrait dire soit des gens qui ne sont pas au courant que le pouvoir a quitté la politique,
01:39soit souvent des ambitieux, paresseux et médiocres
01:44qui trouvent là un espace de réalisation possible,
01:46parce que c'est moins difficile de réussir en politique effectivement
01:49que dans la haute technologie, la technocratie, le droit.
01:54C'est moins compliqué quelques fois.
01:56On trouve aussi certains derniers idéalistes, il faut le dire,
01:59des gens qui continuent, qui veulent croire que la politique compte aujourd'hui,
02:02mais globalement, c'est un repère de gens qui n'ont pas compris que le pouvoir n'est plus là.
02:07Ça en dit beaucoup déjà.
02:09Si on voulait rencontrer des élites de qualité, il faudrait aller ailleurs.
02:13Faisons une petite sociologie de notre classe politique aujourd'hui en trois temps.
02:17Le Bloc central, le camp national et la gauche radicale.
02:21Le Bloc central, ce qu'on appelle la macronie, qu'est-ce que ça rassemble?
02:24On pourrait dire que c'est la fin de ligne, les derniers restes du pouvoir technocratique d'hier.
02:30C'est le résidu d'élite, je le disais, c'est le cœur du pouvoir.
02:34Les élites du Bloc central ont migré depuis longtemps vers les instances de pouvoir dont je vous parlais.
02:38La technocratie, la finance, les médias, et ainsi de suite.
02:41Que reste-t-il dans le Bloc central?
02:43Le petit personnel chargé de faire fonctionner la boutique.
02:46Ceux qui n'ont pas encore enregistré l'information que le pouvoir était ailleurs.
02:50Ce sont des gestionnaires plutôt médiocres, souvent incultes,
02:53souvent incapables d'avoir la moindre idée politique
02:55et qui sont les télégraphistes de l'idéologie dominante telle qu'elle s'exprime au moment présent.
03:00On se retrouve avec des gens qui, en d'autres temps, n'auraient pas réussi à être conseillers ministériels
03:05ou conseillers du conseiller du ministre et qui, aujourd'hui, se retrouvent ministres quelques fois davantage.
03:10Gardons ça à l'esprit.
03:12Ensuite, il y a ce qu'on pourrait appeler le camp national.
03:15Rennes et apparentés.
03:17Quel est le problème du camp national?
03:19C'est une élite alternative qui veut encore croire à la politique.
03:22Ce sont des gens qui disent qu'on n'a pas simplement une autre méthode pour gouverner le pays.
03:26On considère que cette élite a fait faillite.
03:28Elle a échoué. Elle n'est plus à la hauteur.
03:30Et nous voulons remplacer cette élite.
03:33Qu'est-ce qu'elle fait?
03:34Mais que trouve-t-on dans cette élite du camp national?
03:37On retrouve des gens qui sont, pour l'essentiel, les laissés-de-côté de la société présente.
03:42Les persécutés de la société présente.
03:44Les infréquentables de la société présente.
03:46Donc, les proscrits du régime.
03:47Ceux qui pensent mal et qu'on a traités de tous les noms.
03:49Extrême-droite, extrême-droite, extrême-droite.
03:51Les catégories sociales laissées coupe-pour-compte par ce régime.
03:54Ceux qui ne profitent pas, par exemple, aujourd'hui, de la mondialisation libérale ou de la construction européenne.
04:00Donc, ces catégories sociales-là se disent qu'on va chercher à se greffer un groupe nouveau qui veut remplacer la classe politique ancienne.
04:07Des ambitieux aussi, nous ne les oublions pas, ils comptent toujours,
04:10qui trouvent que la réascension sociale n'est pas assez rapide en ce moment
04:13et qui se disent qu'on va être désormais les leaders du groupe alternatif.
04:17Et là, on va avoir une possibilité de promotion sociale rapide.
04:20Ça a souvent été le cas, d'ailleurs, des numéros 2 dans l'histoire du RN ou du FN autrefois.
04:25Je note que parce que ça vient d'un milieu assez déclassé, souvent.
04:28Ce ne sont pas des gens qui ont l'habitude du pouvoir.
04:30Ils n'ont pas tous les codes de ce qu'on doit dire, pas dire dans les médias,
04:34ce que l'on peut dire, ce qui est permis, pas permis à la télévision.
04:37Donc, c'est très facile de trouver des dérapages chez eux.
04:40C'est très facile.
04:41D'ailleurs, c'est comme ça qu'on les exécute à chaque élection.
04:44On fouille dans le temps.
04:45Et là, qu'est-ce qu'on voit?
04:46Inévitablement, il y en a quelques-uns qui se sont permis des phrases, des propos de comptoir
04:49qu'ils n'auraient pas tenu s'ils connaissaient les codes du pouvoir.
04:52Et il ne suffisait pas de leur donner une cravate pour qu'ils apprennent les codes du pouvoir.
04:56Donc, ce sont des gens qu'on peut facilement persécuter,
04:58mais c'est une forme d'élite de remplacement qui attend un jour sa place,
05:03mais qui, pour l'instant, c'est le syndicat des proscrits du régime.
05:07Et le troisième camp, LFI et apparenté, on pourrait dire la gauche radicale plus largement,
05:12qui ne représente pas l'alternative, non pas le pouvoir, mais l'élément chaotique dans notre société.
05:18Et ça, je pense qu'on doit se tourner vers Marx.
05:20Je le cite rarement, mais aujourd'hui, ce sera le cas.
05:22Il parlait de lumpenproletariat.
05:24Autrement dit, au-delà même du prolétariat, en deçà, il y a les éléments asociaux,
05:28les éléments déclassés, les éléments qui sont souvent dans une société désorganisée
05:34et qui sont travaillés souvent aussi par le ressentiment, par l'envie, par la colère,
05:39par le désir de détruire.
05:41Et ça, c'est ce qu'on pourrait appeler aujourd'hui quelquefois des voyous, des enragés, des zombies,
05:46ceux qui rêvent de voir le monde brûler.
05:48C'est l'élément chaotique.
05:50Des gens qui rêvent de révolution parce qu'ils rêvent d'une révolution en soi.
05:53Ce sont des gens qui, dans une société normale, sont plutôt laissés à la périphérie de la société.
05:58Mais quand on est dans une société de l'inversion des valeurs, pour reprendre une formule que vous appréciez,
06:02dans une société d'inversion des valeurs, ceux qui normalement seraient à la marge
06:06se retrouvent au centre et sont présentés comme les nouveaux héros des temps présents.
06:10Et ces gens ont normalement besoin d'un leader qui, lui, aime le chaos
06:14parce qu'ils voient dans ce chaos l'occasion de jouer le rôle qu'ils souhaitent jouer à la hauteur de l'histoire.
06:18C'est évidemment Jean-Luc Mélenchon, le leader maximo de la gauche radicale.

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