Les 4 vérités - Marie Toussaint

  • l’année dernière
Jeff Wittenberg reçoit Marie Toussaint, députée européenne EELV sur la plateau des 4 vérités. 

Category

📺
TV
Transcript
00:00 Bonjour Marie Toussaint, merci d'être avec nous ce matin.
00:05 Une question d'actualité d'abord à la responsable écologiste que vous êtes,
00:09 les écologistes qui ont souvent participé à des manifestations de soutien aux Palestiniens
00:13 réclamant un cessez-le-feu. La trêve qui est en train de se mettre en place là-bas,
00:17 avec en échange de la libération promise de 50 otages et de 150 prisonniers
00:24 détenus dans les prisons israéliennes. Est-ce que pour vous c'est une lueur d'espoir
00:27 ou une simple pause sans lendemain ?
00:30 La libération des otages était absolument nécessaire. On parle de femmes, d'hommes,
00:35 parfois d'enfants qui sont pris en otage dans des conditions qu'on ne connaît pas,
00:41 d'ailleurs avec une très forte inquiétude pour leur famille, auxquelles j'envoie mes pensées.
00:45 C'est une impérieuse nécessité. Pour autant, ça ne peut pas s'arrêter là.
00:49 On ne peut pas avoir une simple trêve de quelques jours avant que ça ne reprenne
00:53 dans les conditions dans lesquelles ça se passe aujourd'hui et qui sont terribles.
00:57 Vous savez, ça peut peut-être paraître un peu illusoire, mais je crois en la force de la politique.
01:01 La seule solution pour apporter la paix à Israël et la justice en Palestine,
01:05 c'est la solution à deux États. Je veux rappeler l'esprit des accords d'Oslo,
01:10 ce pour quoi nous devons œuvrer, c'est pour la paix et c'est cette solution à deux États.
01:14 Maïa Loquet le rappelait en vous présentant, vous êtes députée Europe Écologie des Verts,
01:18 mais vous êtes aussi la tête de liste pour les élections européennes de votre parti des écologistes.
01:23 On va peut-être d'ailleurs découvrir votre affiche qui a été dévoilée il y a quelques jours.
01:27 Voilà, justice, paix, écologie, c'est votre slogan.
01:29 Vous serez donc l'une des têtes d'affiche de ces prochains mois.
01:32 Et hier, ici même à votre place, Raphaël Glucksmann, qui lui devrait conduire la liste socialiste,
01:38 s'inquiétait de ce qui se passe aujourd'hui en Europe avec une poussée des mouvements nationalistes d'extrême droite.
01:44 On l'a encore vu lors des élections aux Pays-Bas avec la victoire de Gerd Wilders.
01:48 Est-ce que ce n'est pas ce vent-là plutôt que celui de l'écologie qui risque de souffler en juin prochain ?
01:52 Écoutez, c'est une catastrophe ce qui est en train de se passer en Europe.
01:55 C'est une catastrophe qui met en risque l'existence du projet européen lui-même,
01:59 qui met en jeu nos valeurs, les valeurs sur lesquelles l'Union Européenne se sont fondées.
02:03 Et donc, il faut se battre pied à pied.
02:05 Et c'est effectivement ce que je compte faire dans le cadre de ces élections européennes
02:09 pour faire reculer les extrêmes droites, les nationalismes,
02:12 qui font écho d'ailleurs à l'ultrapopuliste Ravier Meleï, récemment élu en Argentine.
02:17 Mais ce que je veux expliquer aussi, c'est qu'on a aujourd'hui une alliance croissante des droites
02:21 au niveau de l'Union Européenne.
02:22 Et cette alliance croissante qui parvient au pouvoir en Italie, en Finlande, en Suède,
02:27 peut-être demain aux Pays-Bas, et bien elle se noue contre l'écologie.
02:31 Mais si je peux me permettre, en France, lorsque vous regardez les enquêtes d'opinion,
02:34 vous voyez qu'aujourd'hui, c'est le Rassemblement National qui caracole largement en tête des intentions de vote.
02:39 Est-ce que ça ne donne pas des arguments à ceux qui prenaient une liste unique de la gauche
02:43 que les écologistes, mais pas qu'eux, ont refusé ?
02:46 C'est ce que voulait notamment la France insoumise.
02:48 Est-ce que ça n'aurait pas eu un potentiel électoral plus important ?
02:51 Vous savez, pourquoi il faut qu'on se batte, c'est pour notre projet européen
02:55 et notre projet sur le fond global pour la planète aussi.
02:59 Moi, je suis tête de liste des écologistes, vous l'avez dit, je me bats pour la justice,
03:04 pour la paix, pour l'écologie.
03:06 Et je crois que nous ne devons pas laisser penser qu'il n'y a qu'une opinion, qu'une vision sur l'Europe.
03:12 Vous savez, moi, je siège au Parlement européen, vous l'avez rappelé.
03:15 Vous n'avez pas la même que celle de la France insoumise, par exemple ?
03:17 Nous nous battons chaque jour sur des combats qui sont nos combats, sur nos priorités.
03:23 Je suis convaincue aujourd'hui que le défi pour l'Europe au XXIe siècle,
03:28 c'est bel et bien l'écologie.
03:30 Et donc, c'est ce projet-là que je porterai auprès des électeurs et des électrices.
03:33 Pardon de rester un peu franco-français, la NUPES, vous y participez encore,
03:36 vous y croyez encore, les communistes n'y sont plus,
03:38 les socialistes ont émis un moratoire, et vous, côté écologiste,
03:42 vous faites encore partie de cette gauche, de cette union de la gauche.
03:47 Non, mais je comprends que ce soit ce qui vous intéresse.
03:49 Non, non, c'est une question qui se pose.
03:51 Oui, mais comprenez aussi que moi, je dois porter le projet des écologistes
03:55 pour les élections européennes.
03:56 Le projet des écologistes pour les élections européennes, il est particulier.
03:59 Nous sommes les plus pro-européens, les plus pro-fédéralistes.
04:02 Nous pensons que l'écologie est le défi du XXIe siècle,
04:05 qu'il faut lui apporter des réponses, des réponses à la transition écologique
04:08 dans la justice sociale.
04:10 Je vous l'ai dit, les droites pactisent avec les extrêmes droites
04:13 sur le dos de l'écologie.
04:15 C'est donc ma responsabilité de porter cette proposition-là.
04:19 Vous me demandez si on peut travailler avec les autres, c'est ça le fond de votre question.
04:22 Bien sûr, on peut travailler avec les autres.
04:24 On doit travailler avec les autres.
04:26 La NUPES, ça deviendra ce qu'elle deviendra.
04:28 Je ne vais pas vous cacher qu'en ce moment, c'est compliqué.
04:30 Voilà, donc on verra.
04:32 En tout cas, on a à construire une alternative à cette extrême droite
04:35 pour la France pour 2027.
04:37 Là, le sujet, ce sont les élections européennes.
04:39 La responsable écologiste que vous êtes,
04:41 comment elle regarde un événement qui a lieu aujourd'hui,
04:43 un événement commercial, c'est incontournable.
04:46 Il suffit d'habiter une agglomération, regarder autour de soi,
04:49 écouter ou voir toutes les publicités qui en sont faites.
04:52 C'est bien sûr le Black Friday.
04:54 Comment vous réagissez à cette opération commerciale
04:56 qui a évidemment un coût environnemental,
04:58 mais qui représente aussi une opportunité pour les foyers modestes
05:02 qui recherchent les bonnes affaires.
05:04 Vous êtes, vous faites partie d'une coalition de gauche.
05:06 Comment vous réagissez à ce Black Friday ?
05:10 Ce ne sont pas que les familles modestes qui participent au Black Friday.
05:13 Mais ça vous intéresse notamment, elle.
05:15 Oui, mais alors, deux choses.
05:17 Je vous l'ai dit, l'écologie dans la justice sociale.
05:19 La réalité, c'est qu'aujourd'hui, pour pouvoir vivre et vivre bien,
05:23 on a besoin de moins consommer.
05:25 On a surtout besoin de changer les pratiques des industriels.
05:29 Et on a aussi besoin de lutter contre la pauvreté.
05:31 Pas seulement pour des questions de transition écologique,
05:33 puisque la transition écologique appuie plutôt la lutte contre les inégalités,
05:37 mais parce qu'en soi, c'est un objectif.
05:39 Et moi, je constate que nous ne faisons plus de la lutte contre la pauvreté
05:43 un objectif politique.
05:45 Et donc je le souhaite, et je souhaite porter cette ambition
05:48 dans le cadre des élections européennes.
05:50 On a aujourd'hui des milliers d'enfants qui dorment à la rue.
05:52 Des députés écologistes sont d'ailleurs régulièrement à leur côté.
05:55 On a des inégalités qui explosent.
05:57 La lutte contre la pauvreté doit être un objectif en soi.
06:00 Et je souhaite que ce soit la colonne vertébrale de l'Union européenne.
06:03 Je distingue cela de la question de la sobriété et de la surconsommation.
06:07 Mais vous savez...
06:08 Le Black Friday, c'est uniquement de la surconsommation ?
06:10 Ou ça peut être aussi, par exemple, pour les...
06:12 Alors vous avez vu qu'il y a eu une controverse,
06:14 même au sein du gouvernement,
06:15 puisqu'il y a un spot publicitaire sponsorisé, si j'ose dire,
06:19 par le ministère de la Transition écologique, par Christophe Béchut,
06:23 qui appelle à moins acheter, à ne pas acheter de vêtements.
06:26 Vous avez entendu cette différence d'approche ?
06:28 Et d'ailleurs, je constate que Christophe Béchut a fait preuve d'un certain courage,
06:31 notamment face à Bruno Le Maire,
06:33 qui souhaite promouvoir une consommation infinie.
06:36 La question, elle est simple.
06:37 On ne peut pas pourchoiser une croissance infinie dans un monde fini.
06:41 Et vous savez, les scientifiques parlent de neuf limites planétaires.
06:43 Le climat, la biodiversité, les pollutions diverses.
06:46 Dans la réalité, plus on consomme, plus on va prendre d'eau à la nature.
06:51 Donc l'eau vient à manquer.
06:52 Il y a aujourd'hui des millions de Français qui sont en difficulté
06:55 pour avoir accès à l'eau à leur robinet et pas que à Mayotte.
06:58 On a des détoxiques qui sont répandus partout.
07:02 La consommation, nous consommons trop.
07:04 Et donc, il faut lutter contre cette surconsommation.
07:06 Mais je peux vous donner un exemple qui lie la question de la sobriété
07:09 et de la justice sociale sur la question de l'énergie.
07:11 On a peur de la flambée des prix de l'énergie,
07:13 parce qu'il y a déjà eu une flambée dans les années qui viennent de se passer.
07:16 Moins on consomme d'énergie, moins elle est chère.
07:19 C'est vrai au niveau individuel, c'est vrai au niveau global.
07:22 Voilà, et donc cet enjeu de sobriété, il est indispensable.
07:25 Les petits commerçants, excusez-moi, je reviens à cette idée de la consommation.
07:30 Est-ce qu'ils doivent renoncer à attirer leur clientèle,
07:33 à vendre leurs produits, à maintenir leur activité économique et donc leurs emplois ?
07:37 Est-ce que, en l'occurrence, l'économie et l'écologie, ça peut aller ensemble ?
07:41 Je parle du petit commerce, encore une fois.
07:42 Alors ça va absolument ensemble.
07:44 Et les écologistes soutiennent les commerces, les artisans dans leur ville,
07:48 en tout cas là où nous sommes en responsabilité.
07:50 Donc il n'y a pas de doute sur cette question-là.
07:52 Mais en demandant de moins consommer, c'est paradoxal.
07:54 Peut-être que la plus grande menace pour les commerçants, ce n'est pas la sobriété,
07:57 mais ce sont les enseignes telles que, enfin qui ne sont pas des enseignes d'ailleurs,
08:00 mais le commerce numérique, "chaine", "tému", c'est ça qui nuit aujourd'hui au petit commerce.
08:05 C'est aussi l'aménagement du territoire, c'est le renchérissement des loyers.
08:08 Donc il y a tout un tas de dispositions à prendre pour protéger les petits commerçants et les petits artisans.
08:13 Vous êtes donc députée européenne sortante.
08:15 Vous avez parlé d'une mauvaise semaine pour l'Europe,
08:17 car mercredi, le Parlement a rejeté un texte qui visait à réduire de moitié l'usage des pesticides
08:24 dans le prolongement de la prolongation du glyphosate pour 10 ans.
08:28 Ce projet avait pourtant été proposé par la Commission européenne.
08:30 Ça veut dire quoi, Marie Toussaint, que le Parlement européen est moins écologiste que la Commission européenne elle-même ?
08:36 Par quoi il est travaillé aujourd'hui ?
08:38 Je vous ai parlé de cette alliance des droites, de l'extrême droite, parfois jusqu'aux libéraux,
08:42 qui se nouent contre l'écologie.
08:44 C'est ce qu'on voit dans les États membres.
08:45 C'est aussi ce qu'on vit de manière plus en plus forte au sein du Parlement européen.
08:48 On voit apparaître un front du refus écologique,
08:51 qui est très clairement sponsorisé, pas au sens monétaire, en tout cas je ne l'espère pas,
08:55 mais en tout cas qui pousse ces députés de droite à faire tomber toute législation écolo
09:00 dans le cas des pesticides.
09:01 Sur les pesticides, voilà.
09:03 Sur le règlement sur les emballages,
09:05 eh bien c'est le lobby de l'agro-business qui s'est battu contre les dispositions de ce texte.
09:10 Et donc finalement, en fait, l'Europe a deux choix.
09:12 Soit elle empoisonne, soit elle protège.
09:15 Au nom et pour protéger les lobbies de l'agro-business,
09:17 eh bien les droites pactisent, plutôt en faisant le choix de l'empoisonnement.
09:21 C'est un désastre environnemental et sanitaire.
09:24 Nous nous battrons pied à pied contre ces lobbies.
09:26 Vous parlez du problème des emballages.
09:28 Est-ce que les lobbies ont toujours le dernier mot ?
09:30 Une législation a quand même été décidée cette semaine
09:32 qui va réduire ces emballages de 40%, je crois, à l'horizon 2040,
09:38 de 20%, je crois, à l'horizon 2040 pour les emballages plastiques,
09:41 ceux qu'on trouve notamment dans les fast-foods.
09:43 Vous ne voulez pas voir la bouteille à moitié pleine, c'est toujours à moitié vide.
09:47 En tout cas, il n'y a pas de progrès pour vous.
09:48 Si je fais de la politique, c'est parce que j'y crois.
09:50 Et parce que je crois que face au pouvoir des lobbies,
09:52 face à ceux qui les soutiennent, eh bien on peut emporter des batailles.
09:55 Donc heureusement qu'on en emporte quelques-unes.
09:57 Il faut se mobiliser, il faut être fort.
09:59 Et vous pouvez compter sur les écologistes
10:02 qui sont les plus frontalement opposés à ces lobbies.
10:06 Nous ferons tout pour les faire reculer.
10:08 Et j'espère bien emporter encore des victoires.
10:10 Et on vous verra donc très souvent dans les prochains mois et semaines,
10:13 puisque vous allez conduire la liste écologiste à ces élections européennes.
10:15 Merci beaucoup Marie Toussaint.