Faut-il se jeter dans le grand bain ? La question qui par Maä Mazaurette

  • l’année dernière
En cette journée spéciale océans, nous nous demandons si la nage en eau libre peut sauver un homme. Et surtout, quelles sensations hors du commun trouvent dans les profondeurs de l'océan les passionnés de natation, qui choisissent d'en faire un véritable mode de vie ? Notre invité répond !

Retrouvez "La question qui" de Maïa Mazaurette sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/burne-out

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Amusant
Transcription
00:00 Faut-il se jeter dans le grand bain ? Pour le dire autrement, faut-il prendre le risque
00:10 de se confronter à des situations dangereuses et nouvelles ? Je vous fais une réponse d'économiste,
00:16 c'est une question de ratio risque/bénéfice.
00:17 Les risques, si on se jette soi-même dans le grand bain, ils sont très limités, on
00:21 saute parce qu'on sait nager et même si on saute pour pécho le maître nageur, on
00:24 reste en relative sécurité.
00:26 J'enchaîne donc sur les bénéfices, quel est l'intérêt de se jeter dans le grand
00:30 bain alors qu'on pourrait tranquillement glandouiller au jacuzzi ? Comme le fait remarquer
00:34 notre réalisatrice Josepha, il y a pas mal de grands bains dans lesquels on se jette
00:37 par ennui, on termine un marathon et puis on commence à rêver d'ultra-marathons,
00:40 de Spartaclons, de marathons des glaces, des sables de l'Everest et pourquoi pas la
00:44 course self-transcendant 5000 km de long.
00:47 Rien que prononcer cette phrase m'épuise complètement.
00:49 A côté des défis qu'on s'impose pour le fun, il y a les défis qu'on affronte
00:52 par nécessité et notamment pour grandir.
00:55 L'actualité nous l'a rappelé pendant le Covid, les enfants ont besoin pour se construire
00:58 d'appréhender certaines formes de risques.
01:00 La peur, l'inconnu, la désorientation, la rencontre avec l'autre, sous peine de
01:04 devenir ce qu'on appelle des enfants de l'intérieur.
01:06 Bon spoiler, on est mal barrés.
01:07 Dès 2007, une étude anglaise a démontré que les enfants sont de moins en moins libres.
01:11 Il y a un siècle, un marmotte de 8 ans avait le droit de marcher seul pendant 9 km.
01:15 En 2007, c'était 300 m.
01:18 Font-ils encore le tour du pâté de maison aujourd'hui ? Je ne sais pas.
01:21 Mais ça pose une question importante.
01:22 Le risque le plus grand est-il de sauter dans le grand bain ou de stagner dans le pédiluve
01:27 ou même de rester aux vestiaires ? Pour le dire autrement, se protège-t-on mieux en
01:31 évitant le risque ou en se confrontant au risque ? En 1929, le physiologiste américain
01:36 Walter Bradford Cannon aurait répondu qu'il s'agit précisément des deux grandes réponses
01:40 animales au danger, le combat et la fuite.
01:42 La question de savoir s'il faut se jeter dans le grand bain ne renvoie donc pas seulement
01:46 à notre personnalité ou à l'organisation de la société, elle renvoie à notre nature
01:50 humaine, à notre nature animale et, je le tente, à notre nature transcendantale.
01:54 Se jeter dans le grand bain, c'est décoller les pieds du sol pour vérifier si on flotte.
01:58 Il n'est pas impossible que dans cette expérience, il y ait un chouet de spiritualité qui traîne.
02:02 Et Maya, aujourd'hui pour t'apprendre à nager encore plus profond, tu reçois Steve
02:06 Stevenard.
02:07 Bonjour Steve Stevenard.
02:08 Pardon Steve.
02:09 Bonjour, merci pour votre invitation.
02:12 Vous avez 46 ans, on vous surnomme l'homme fox, qui est quand même vraiment le pseudo
02:17 le plus cool du monde, je pense qu'on peut le dire.
02:18 Vous avez publié en mars dernier, Steve le phoque avec David Michel aux éditions Michel
02:23 Lafon, nager dans l'océan pour vous, ça a d'abord été une thérapie ?
02:25 Oui, c'était vraiment pour moi un appel de la mer dans une situation auquel j'étais
02:31 confronté, difficile, une séparation douloureuse, des problèmes financiers.
02:36 J'ai reçu une petite voix, j'ai écouté notre petite voix intérieure et je suis allé
02:41 vraiment un jour particulier dans l'océan et ça a changé beaucoup de choses pour moi,
02:46 ça a été beaucoup plus clair en fait.
02:49 Et je me suis accroché, ce message qui est arrivé ce jour-là c'est "c'est quoi ton
02:53 rêve ? Qu'est-ce que tu aimerais bien faire ? Une dernière chose sur cette planète parce
02:56 que quand on est vraiment au plus bas du plus bas, aujourd'hui j'ai du recul pour en parler
03:00 mais j'étais vraiment pas très bien.
03:02 Et ce message qui arrive c'est que mon rêve ça avait toujours été de traverser la Manche
03:06 et en fait c'est devenu une évidence.
03:08 Mais n'étant pas nageur, il fallait que j'apprenne donc je suis parti réellement d'une feuille
03:12 blanche.
03:13 Et cette connexion à l'océan maintenant elle m'a pu quitter, c'est viscéral, j'ai
03:17 un besoin quotidien d'être dans l'océan.
03:19 Il y a un côté rassurant, moi je compare ça un peu au liquide amnétique de la maman,
03:24 on a passé neuf mois dans ce liquide et moi il y a un côté où je me sens tellement bien
03:28 ou loin de tout.
03:29 Il paraît même que vous arrivez à dormir dans l'eau.
03:32 Oui, j'arrive à dormir dans l'eau comme vous vous dormez dans votre lit.
03:37 Alors je l'expérimente pour récupérer très rapidement entre deux grandes traversées
03:40 et c'est vraiment une nuit complète dans des eaux thermales en Italie, des eaux à 37
03:45 degrés, quasiment identiques à celles du corps.
03:48 Par contre c'est révolutionnaire parce qu'on n'a pas le poids du corps pendant neuf heures
03:53 et musculairement parlant, le lendemain quand on se réveille on a effacé un mois d'entraînement
03:57 et de course.
03:58 Donc moi je l'expérimente pour mon sport mais pour monsieur et madame tout le monde,
04:02 ça peut aider vraiment beaucoup beaucoup de monde qui ont des problèmes de dos.
04:05 En fait c'est comme un astronaute qui a un apesanteur, finalement on a toujours le poids
04:09 du corps en permanence même quand on dort et le fait de dormir comme ça une nuit complète
04:14 c'est vraiment vraiment récupérateur.
04:15 Alors je voudrais revenir sur votre dernière grande performance, vous avez nagé sans pause
04:20 en juin dernier pendant 51 heures, un aller-retour et encore un aller entre Los Angeles et l'île
04:25 de Santa Catalina.
04:26 C'était quoi le pire ? C'est 51 heures de nage ou pour vous juste prendre le métro
04:30 pour venir nous rejoindre ?
04:31 Oui 51 heures c'est un long voyage.
04:34 51 heures par exemple c'est des nuits à nager ?
04:38 Oui c'est deux nuits complètes plus la moitié d'une.
04:40 Je suis parti un mardi à 20h30 et j'ai terminé un vendredi à 1h du matin.
04:46 La nuit c'est très particulier parce qu'on redevient une proie, on n'a rien à faire
04:52 la nuit.
04:53 Tous vos sens sont en éveil, il y a des alertes naturelles, l'instinct de survie qui arrive
04:59 et l'information qui arrive qui te dit remonte sur le bateau il y a danger.
05:02 Sauf que moi je dois continuer mon défi, je dois switcher cette alerte qui est naturelle.
05:07 Donc la méditation m'aide beaucoup par rapport à ça.
05:10 Vous méditez en nageant ?
05:12 En nageant, avant ma traversée j'annonce mon intention aussi aux habitants parce que
05:17 je ne suis pas chez moi.
05:18 Je leur explique ce que je vais faire.
05:20 Les habitants c'est toute la faune marine, les méduses, les phaukes, les baleines, les
05:26 dauphins.
05:27 Aujourd'hui on met vraiment l'accent sur la performance sportive mais pour vous parler
05:31 honnêtement ce qui m'anime dans tout ça c'est ces interactions avec les dauphins,
05:37 avec la faune marine mais notamment les dauphins parce que c'est des protecteurs, ils arrivent
05:41 dans des moments très importants, des moments charnières de traversée, après 30h, 40h
05:45 de nage.
05:46 Déjà je ne les vois pas, je les entends.
05:48 Les sons qui sont émis par les dauphins c'est assez incroyable parce que vous êtes sur
05:51 la même fréquence vibratoire et ça vous réinitialise l'organisme.
05:54 Vous êtes une nouvelle personne après leur contact.
05:57 C'est une expérience mystique que vous décrivez.
05:59 Alors ça peut paraître un peu irrationnel pour beaucoup de personnes mais c'est pourtant
06:01 la réalité.
06:02 Ils vous accompagnent les dauphins après ?
06:03 Oui, alors là j'en ai eu une centaine par exemple pendant les 51h mais j'ai réitéré
06:08 cette expérience dans différentes mers, différents endroits du globe et à chaque fois il y a
06:13 ces interactions et c'est ça que je vais chercher parce que c'est extraordinaire
06:16 quand vous avez une maman dauphin avec un petit qui est à côté de vous et on échange
06:21 un regard qui dure une fraction de seconde mais ce regard il change votre vie.
06:24 En se jetant dans le grand bain vous trouvez de la sagesse ?
06:27 Oui, j'ai beaucoup de mal à revenir sur Terre par contre.
06:32 Mais bien sûr, j'ai trouvé un équilibre et on oublie tout.
06:36 La mer, l'océan, ça soigne tous les maux.
06:38 On a l'impression que vous parlez de Dieu quasiment.
06:43 Alors je crois beaucoup aux énergies de l'univers mais on est tous interconnectés
06:49 à tout et c'est ça qu'il faut comprendre aujourd'hui.
06:52 C'est qu'un incendie en Australie va avoir une incidence ici à Paris et voilà, tout
06:58 est connecté à tout.
06:59 Et plus on passe de temps dans l'océan, plus on comprend beaucoup plus de choses aussi.
07:02 Moi personnellement, j'obtiens beaucoup de réponses à des questions que l'on se
07:05 pose aussi sur notre existence.
07:06 Vous avez le temps de penser quoi ?
07:07 51 heures oui.
07:08 Mais alors ça passe relativement vite parce que j'ai des classeurs, c'est comme une
07:13 bibliothèque donc je vais travailler un peu sur un projet artistique.
07:17 Pendant une heure, entre deux, je vais ravitailler.
07:18 Et vous mangez ?
07:19 Oui, alors vous savez, je ne suis pas tout seul.
07:23 Je nage tout seul certes mais on n'applaudit pas d'une main.
07:26 Mais avant tout, ces exploits, la réussite d'une équipe, il y a 17 personnes qui sont
07:31 à bord du bateau, qui ont un rôle très important dans leur domaine et c'est cette conjugaison
07:34 de chacun qui fait qu'on arrive à écrire ces histoires.
07:36 Mais non, c'est magique ce que je vis aujourd'hui.
07:39 Je le souhaite à tout le monde parce que c'est extraordinaire ces interactions avec
07:43 ces animaux.
07:44 François Sarrano, ça vous évoque quoi ce que nous raconte Steve Stevenhart quand vous
07:47 l'écoutez ?
07:48 Je suis époustouflé.
07:51 C'est extraordinaire.
07:52 Mais ce qui me vient à l'esprit c'est qu'avec les animaux sauvages, on ne triche pas.
07:58 Les rencontres qu'ils vous offrent sont authentiques.
08:01 On ne peut pas les acheter.
08:03 Et c'est ça qui est bouleversant.
08:05 Tout ça est offert par l'autre, le différent.
08:09 C'est incroyable, c'est ce que Bartabas nous disait la semaine dernière à propos
08:13 de ses chevaux.
08:14 Il a prétendu exactement le même discours.
08:16 Exactement, on ne triche pas et du coup, si j'ai bien compris, on se jette à l'eau.
08:20 Merci beaucoup Steve Stipna.
08:21 Merci à vous.
08:22 Je profite de votre passage pour recommander votre association, la Stop Plastic Pollution.
08:27 Votre livre, Steve Le Foch, publié cette année aux éditions Michel Laffont et on
08:31 vous retrouve ce soir à 21h10 sur France 2 dans l'émission Les Super-Pouvoirs de
08:35 l'Océan.
08:36 Merci infiniment.
08:37 *musique*

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