• il y a 11 mois
Anne Fulda reçoit Joachim Roncin pour son livre  «Une histoire folle. Comment j’ai créé JE SUIS CHARLIE et le voyage en absurdie qui a suivi» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 Bienvenue à l'heure des livres, Joachim Rossin.
00:02 Vous êtes directeur du design Paris 2024
00:06 et vous venez de publier votre premier livre,
00:08 qui s'appelle "Une histoire folle.
00:10 Comment j'ai créé "Je suis Charlie"
00:11 et le voyage en absurdit qui a suivi."
00:13 C'est le sous-titre.
00:14 C'est un livre qui est paru chez Grasset.
00:17 Vous le dites dès le début,
00:18 c'est la première fois que vous écrivez un livre,
00:20 la première fois que vous écrivez tout court.
00:22 Vous écrivez "Je n'ai jamais rien écrit" le 7 janvier,
00:26 à la suite des attentats de Charlie Hebdo.
00:28 J'ai écrit trois mots sur Twitter,
00:30 trois mots qui allaient faire le tour du monde,
00:32 devenir un symbole, un slogan, un sujet de conversation,
00:34 trois mots qui allaient me suivre longtemps
00:36 sans que je puisse y faire quoi que ce soit.
00:38 Ces trois mots, c'est "Je suis Charlie".
00:40 Et ils vous ont happé et dépassé.
00:43 C'est pour ça que vous avez voulu écrire un livre,
00:46 pour faire un arrêt sur image ?
00:47 Oui, je pense que ça a été un moment très important dans ma vie,
00:52 peut-être un des plus importants.
00:55 Ça a été un moment important pour les Français,
00:59 pas tant ce slogan, mais les attentats de Charlie Hebdo.
01:03 Et après, tous les Français se sont retrouvés derrière ce slogan.
01:07 Moi, je n'ai pas créé un slogan, j'ai écrit trois mots.
01:11 Après, les gens en ont fait un slogan.
01:13 Et puis, neuf ans ont passé,
01:14 parce que ça fait maintenant neuf ans, mine de rien.
01:17 Et moi, j'ai beaucoup ruminé toute cette histoire,
01:19 parce qu'il y a eu beaucoup de faits qui sont arrivés
01:23 suite à la publication de ces trois mots,
01:26 que ce soit une surmédiatisation
01:31 pas forcément voulue d'un slogan que j'ai créé.
01:36 Et après, il a fallu que je m'en explique.
01:39 Et à certains moments,
01:41 je n'étais pas tout à fait honnête
01:43 sur le sens premier de ce slogan.
01:46 A savoir que, bien évidemment, je suis ravi qu'il soit là
01:49 pour défendre la liberté d'expression et la liberté de la presse.
01:52 Mais quand je l'ai écrit, ce n'était pas forcément ça que je voulais dire.
01:55 Donc, voilà, je voulais faire une sorte de point,
01:58 un arrêt sur image, comme vous dites, sur ce moment de ma vie.
02:02 Parce que cet attentat,
02:04 lorsqu'on apprend, cet attentat à Charlie Hebdo,
02:06 la mort des journalistes,
02:08 il y a des souvenirs douloureux qui remontent pour vous.
02:10 Ça fait écho avec, notamment, la mort de votre grand frère,
02:14 ce que vous expliquez,
02:16 que vous avez apprise lorsque vous aviez 15 ans.
02:17 Oui.
02:19 -Tout se mêle un petit peu. -Oui, tout se mêle un petit peu.
02:21 C'est le sens aussi de ce livre.
02:23 Et c'est le sens de ces trois mots, finalement.
02:25 C'est un message qui était extrêmement personnel,
02:29 parce que c'était pour moi, Charlie Hebdo,
02:32 une forme de nostalgie d'époque, de mon enfance,
02:36 une période de ma vie où chaque élément...
02:40 Mais pour tout le monde, en fait.
02:42 Chaque élément sont des marqueurs, comme ça,
02:45 même indicibles, qu'on ne se rend pas compte.
02:48 Et tout d'un coup, quand cette chose-là est atteinte,
02:51 on se dit que cette chose-là m'a éduqué d'une certaine façon,
02:54 non pas que j'étais le lecteur de Charlie Hebdo,
02:56 mais elle faisait partie du paysage...
02:58 -De votre père. -De mon père, des années 80.
03:02 Et également, ça m'a fait ressortir quelque chose d'assez terrible,
03:07 qui était, bien évidemment, la mort de mon frère,
03:09 quand j'ai appris aussi la mort de toutes ces figures
03:11 qui constituaient ce journal.
03:14 Vous le dites, ces trois mots sont devenus très vite un slogan.
03:17 Vous le retrouvez
03:19 lors de la grande manifestation en place de la République.
03:23 Il se retrouve dans le monde entier, repris dans le monde entier.
03:26 Et en fait, ça, c'est pas que...
03:29 Vous le souhaitiez pas, en fait.
03:30 Vous l'avez pas vécu, envisagé comme un slogan politique.
03:35 -Ah non, complètement. Pas du tout.
03:36 C'était à aucun moment... -Un signe de compassion.
03:39 -Oui. -D'émotion.
03:40 -Exactement. Il y a de la compassion,
03:42 il y a de l'émotion, il y a un témoignage
03:44 auprès des familles des victimes, des victimes, des survivants.
03:48 Et à aucun moment, ce slogan était politique.
03:50 C'est devenu un slogan politique
03:53 parce qu'il affirmait quelque chose,
03:54 une certaine liberté de pensée, etc.
03:57 Il y avait également derrière pas mal de détracteurs
04:00 face à ce slogan.
04:01 Donc oui, j'ai vécu tout ça.
04:03 J'ai vécu tout ça dans mon oeil de créateur,
04:06 mais en même temps, à partir du moment où j'ai appuyé
04:08 sur la touche "entrée", quand je l'ai posté,
04:10 non pas que je voulais que ce slogan devienne viral du tout,
04:13 c'est juste que je m'exprimais à un moment donné.
04:15 C'est devenu viral malgré moi.
04:17 Eh bien, ce slogan a eu une portée politique
04:21 au-delà de ce que je pouvais imaginer,
04:23 parce que je vous invite à essayer d'imaginer
04:26 un tout petit peu ce que ça fait que, tout d'un coup,
04:29 voir quelque chose qu'on a écrit devant son ordinateur,
04:34 faire une image, parce que c'est ça, mon travail,
04:35 je crée des images, et j'ai fait cette image,
04:38 et tout d'un coup, le monde entier se l'est appropriée
04:41 et l'a portée au FA.
04:42 Dernière question.
04:44 Qu'est-ce qui vous a le plus marqué, finalement ?
04:46 C'est la vague médiatique,
04:48 la traie que vous-même avez suscitée,
04:51 la puissance inimaginable des réseaux sociaux
04:54 ou, finalement, l'utilisation, la récupération politique ?
04:57 C'est un peu tout ça.
04:58 C'est effectivement la récupération politique
05:02 qui m'a le plus touché, je pense,
05:05 et pas forcément dans le bon sens,
05:08 mais ce qui m'a aussi, bien évidemment, fait plaisir,
05:13 c'est que les gens se sont retrouvés derrière.
05:15 Alors, d'aucuns pourraient parler de fierté,
05:18 mais moi, je me suis toujours refusé à ce terme de fierté,
05:21 parce que c'est quand même un slogan
05:22 qui a des bases qui sont assez terribles.
05:25 Donc, oui, bien sûr, c'est, je pense, avant tout,
05:28 le plaisir de voir que ce slogan, finalement,
05:32 a plu au plus grand nombre
05:33 et que les gens ont pu se l'approprier,
05:35 mais en même temps, c'est tellement un slogan facile
05:38 et malléable, etc.,
05:39 que tout le monde y a mis un peu ce qu'il voulait derrière.
05:42 Alors, ça s'appelle "Une histoire folle".
05:45 Comment j'ai créé "Je suis Charlie" et "Le voyage en absurdie".
05:47 Qui a suivi ? C'est un livre qui est paru chez Grasset.
05:50 Merci beaucoup, Joachim Ronson.
05:51 Avec grand plaisir. Merci à vous.

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