Anne Fulda reçoit Thierry Lentz pour son livre «Sur les bords de la Seine» dans #HDLivres
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00:00 - Bienvenue à l'heure des livres, Thierry Lentz.
00:01 - Bonjour.
00:02 - On ne vous présente plus.
00:03 Vous êtes associé à Napoléon parce que vous êtes directeur général de la
00:07 Fondation Napoléon. Vous êtes aussi professeur associé à l'Institut
00:10 catholique de Vendée.
00:12 Et s'il est bien un spécialiste du Premier et du Second Empire, c'est
00:15 vous. Vous avez écrit quelques 40 livres.
00:17 Et là, vous venez de publier un dernier qui s'appelle "Sur les bords de la
00:21 Seine. Histoire et secret du tombeau de Napoléon".
00:24 Et c'est paru chez Perrin.
00:25 Et c'est passionnant parce que, effectivement, c'est
00:29 une histoire absolument épique.
00:31 Ce titre poétique a été choisi "Sur les bords de la Seine".
00:34 - C'est le testament de Napoléon.
00:36 - C'est le testament de Napoléon.
00:37 Il voulait spécialement les bords de la Seine ou il voulait surtout la France ?
00:40 - Oui, alors voilà, on a interprété les bords de la Seine, mais de façon
00:43 extrêmement réduite, alors qu'en fait, il a, dans une conversation
00:46 postérieure, parlé de la cathédrale d'Ajaccio,
00:49 parlé du Nil entre Sceaux et Rhône, etc.
00:53 Mais bon, les bords de la Seine étaient
00:57 là, assez loin de Saint-Hélène pour qu'on les voit de façon très large.
01:02 - Oui, parce que rappelons-le, il est mort à Saint-Hélène.
01:05 Et alors, déjà, le transfert des cendres de Napoléon, ça n'ira pas de soi,
01:10 loin de là, parce qu'il faudra une loi qui sera adoptée des années après,
01:15 sous Louis-Philippe.
01:17 - Oui, c'est ça.
01:18 - Pour que ça se fasse.
01:19 - Louis-Philippe, alors d'abord, les Bourbons n'ont pas voulu faire revenir le corps de Napoléon.
01:23 Et Louis-Philippe s'est longtemps hésité.
01:26 Et puis, finalement, on dit que c'est pour faire plaisir à Adolphe III
01:29 que le jour de la Saint-Philippe, il lui a accordé le retour des cendres de Napoléon.
01:34 Alors, une fois que Louis-Philippe avait dit ça, c'était pas facile
01:36 parce qu'il fallait aller à Saint-Hélène, 9000 kilomètres.
01:40 Il fallait ramener les cendres, puis il fallait les inhumer quelque part.
01:43 Et c'est là que commence l'aventure de ce tombeau.
01:47 - Alors là, nous sommes en 1840, c'est-à-dire qu'en fait,
01:50 ce qui se passe, c'est que Napoléon fait peur, même mort.
01:52 - Oui, bien sûr.
01:55 Louis-Philippe pensait qu'en donnant satisfaction aux bonapartistes et aux libéraux,
02:00 il se débarrasserait du fantôme de Napoléon.
02:02 En réalité, il l'a fait entrer dans la pièce.
02:04 Ça a été un mauvais calcul parce que le retour des cendres a été un événement
02:08 extraordinairement populaire.
02:11 Louis-Napoléon Bonaparte en a profité pour faire son deuxième coup d'état
02:14 pendant que le bateau allait chercher les cendres de son oncle.
02:18 Et donc, en fait, le bonapartisme a été complètement revigoré.
02:22 Louis-Philippe a cru jouer finement et en fait, il s'est trompé.
02:25 - Alors, vous racontez finalement pourquoi ce choix des invalides,
02:30 qui n'allaient pas de soi ?
02:32 - Oui, alors c'est... - Les cathédrales, d'ailleurs, comme vous le rappelez.
02:34 - Voilà, oui, les invalides, c'est la deuxième cathédrale à Paris,
02:38 puisque c'est le siège de l'évêché aux armées.
02:40 À cette époque, c'était encore l'église Saint-Louis,
02:43 qui est donc celle qui est sous le dôme, était encore une église,
02:47 proprement dite, pas encore une nécropole.
02:49 Et on a donc décidé de mettre Napoléon à cet endroit
02:53 parce que Saint-Denis, c'était quand même plutôt les Bourbons.
02:56 On avait proposé, en haut de l'Arc de Triomphe, sous la colonne Vendôme,
03:00 à l'église de la Madeleine.
03:02 Et finalement, c'est Louis-Philippe qui a tranché,
03:04 qui a choisi les invalides parce que Napoléon avait un lien avec les invalides.
03:07 Non pas parce qu'il avait fourni beaucoup d'invalides
03:10 à mettre à l'abri après ces guerres, mais parce qu'il s'était beaucoup occupé
03:13 de l'institution. Il avait fait restaurer le dôme, etc.
03:16 Donc, on a dit, allez, Saint-Louis des invalides.
03:19 Bon, alors une fois le choix fait, après, il y a le choix de qui va faire
03:23 ce monument, ce tombeau.
03:25 Et là aussi, c'est toute une histoire.
03:27 Il y a un appel d'offres et finalement, c'est un dénommé Louis Visconti
03:31 qui l'emporte.
03:32 Et là aussi, ça va durer 20 ans.
03:35 Alors, le chantier, proprement dit, 10 ans.
03:38 Il est fini en 1853.
03:40 D'ailleurs, Visconti voit la fin du tombeau et meurt.
03:44 Et puis, Napoléon n'est toujours pas dans son tombeau.
03:47 Il va falloir attendre jusqu'en 1861 parce que Napoléon III a eu des espèces
03:52 de remords. Il détestait l'endroit et il détestait le fait que ce soit une crypte.
03:57 Il comparait ça à un aquarium en disant, il a dit à la reine Victoria,
04:00 regardez, il ne manque plus que de mettre de l'eau là dedans.
04:02 Puis, finalement, en 61, tout le monde ayant, comment dire,
04:07 insisté auprès de lui, a été obligé d'enterrer un de ses oncles
04:10 aux invalides parce qu'il lui avait promis, donc un frère de Napoléon.
04:13 Et donc, il a finalement cédé.
04:16 Et ça a été une cérémonie d'une discrétion absolue, comme si
04:19 il avait l'air de dire bon, allez, on fait encore une petite cérémonie
04:23 pour mon oncle, puis après, on n'en parle plus.
04:25 Alors, dernière question, ce qui est intéressant,
04:28 c'est que ce tombeau fascine toujours, notamment des chefs d'État étrangers.
04:32 Vous le racontez, il y a eu des visites parfois glorieuses, parfois moins,
04:35 puisque Hitler, par exemple, a visité le tombeau.
04:38 Pourquoi en France, la légende napoléonienne est moins célébrée,
04:42 finalement, sauf par Macron, peut être d'ailleurs ?
04:44 Oui, voilà, c'est d'ailleurs...
04:45 Emmanuel Macron est le premier président de la République en fonction
04:50 à être allé au tombeau de Napoléon.
04:52 Il faut quand même le savoir.
04:53 Jamais aucun de ses prédécesseurs n'y est allé, pas même le général de Gaulle.
04:57 Alors, pour d'autres raisons, mais voilà.
05:00 Donc, c'est un lieu d'abord qui fascine les visiteurs.
05:03 1 million, 1 million 200 000 visiteurs par an, beaucoup d'étrangers.
05:06 Et pour les chefs d'État étrangers, c'est un lieu un petit peu
05:10 où on peut être, enfin, toute chose égale par ailleurs.
05:12 On peut être un peu face à face à Napoléon.
05:14 Alors, ça fatigue toujours un peu les ministres français
05:18 qui doivent les accompagner parce qu'eux ne ressentent pas
05:21 que la France est aussi un peu là.
05:24 Donc, on en voit parfois le ministre du Commerce,
05:26 enfin, celui qui n'a rien à faire dans la journée.
05:28 Et on a des tas de demandes récemment.
05:31 Le président des Emirats arabes unis a demandé
05:33 une étape au tombeau de Napoléon.
05:36 Comme quoi, Napoléon fascine toujours.
05:38 En tout cas, vraiment, je vous conseille sur les bords de la Seine,
05:41 l'histoire et secret du tombeau de Napoléon.
05:43 C'est passionnant.
05:44 Merci beaucoup Thierry Lannes. C'est c'est par Ruch et Perrin.
05:46 Merci.
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