• il y a 11 mois
Anne Fulda reçoit Claire Deya pour son livre «Un monde à refaire» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 Bienvenue à l'heure des livres Claire Déillat. Alors vous êtes scénariste et ce livre est votre premier roman, votre premier livre.
00:08 Ça s'appelle "Un monde à refaire". C'est paru aux éditions de l'Observatoire et c'est un très joli livre, un roman qui est très prenant, qui est écrit d'une jolie écriture subtile.
00:20 Et puis c'est un livre qui a été sélectionné dans la sélection finale du Grand Prix RTL Lire Magazine. Ce qui est assez intéressant et nouveau, c'est que l'action se déroula hier à l'été 45.
00:36 Et c'est vrai que cette période de la fin de la guerre, c'est une période qu'on étudie assez peu souvent, dont on parle assez peu finalement.
00:43 C'est un entre-deux intéressant d'un point de vue historique et d'un point de vue d'histoire personnelle. Pourquoi vous avez décidé de vous intéresser à cette époque-là ?
00:52 Précisément pour ça, Anne Filda. On parle beaucoup de la guerre, il y a eu énormément de récits de guerre, de romans sur la guerre. Il y a une école de guerre, on étudie l'art de la guerre.
01:02 Et en fait, il ne s'agit pas de gagner la guerre seulement, il s'agit de gagner la paix. Et ce moment de la libération, en fait, il est particulièrement exaltant. C'est là que tout recommence.
01:12 Alors moi, mon roman se situe juste avant la capitulation des Allemands, c'est-à-dire au moment où l'espoir renaît.
01:18 Et pour certains, en fait, il y a encore du travail à faire. Et il y a encore du travail assez dur à faire. On dit que l'art est un sale boulot et qu'il faut bien que quelqu'un le fasse.
01:27 Mais en fait, le déménage, dont je parle dans le livre, c'est encore plus un sale boulot et peu l'on fait. Mais voilà, mon idée, c'était de m'intéresser à comment gagner la paix.
01:38 Oui, alors vous vous intéressez effectivement à cette spécificité. Alors le héros, enfin l'un des héros, mais enfin quand même, Vincent est à la recherche de son amour, de la femme de sa vie,
01:50 qui aurait travaillé près d'hier au château des Guières. Et pour se rapprocher d'elle, il décide de devenir démineur. Et ça aussi, c'est vrai que c'est quelque chose qu'on a oublié dans l'histoire.
02:02 C'est que les plages du sud ont été complètement envahies de mines et qu'il a fallu des démineurs pour enlever ces mines. Et ce qui est intéressant, c'est le profil sociologique, d'ailleurs, de ces démineurs. Il y a un peu de tout.
02:16 Absolument. En fait, on a souvent dit que pendant la première guerre mondiale, ce qui avait d'inédit, c'était l'expérience des tranchées où toutes les classes sociales étaient rassemblées.
02:23 Eh bien, en fait, il y a eu des groupes de déminage qui se sont intéressés aux plages de Normandie et aux plages de la Méditerranée. Et là, non seulement il y avait tous les groupes sociaux représentés,
02:35 c'est-à-dire qu'il y avait des ingénieurs des mines, des anciens résistants qui pensaient que déminer, c'était encore résister, mais il y avait aussi des hommes perdus, des hommes blessés, des hommes qui avaient faim.
02:44 Et des anciens prisonniers allemands.
02:46 Et d'anciens prisonniers allemands.
02:47 Enfin, des prisonniers allemands.
02:48 Absolument. Et ça, c'est la chose complètement folle, en fait, quand je me suis intéressée à ce sujet que j'ai découverte. C'est que les Français ont été obligés de travailler main dans la main avec les hommes qu'ils détestaient le plus,
03:02 c'est-à-dire les anciens soldats allemands qui avaient occupé la France. Et ça, l'expérience, elle est totalement inédite. Elle est totalement incroyable. Si on vous demandait demain, vous, de travailler avec votre pire ennemi,
03:12 je pense que les relations seraient assez électriques et incandescentes, en fait. Et là, non seulement ils doivent travailler ensemble pour déminer, mais Vincent, à titre personnel, sait que l'un de ces hommes qui démine détient un secret qui pourra lui faire retrouver la femme de sa vie.
03:27 Et donc, il détient... Enfin, voilà, il est tenu par ça.
03:32 Alors, ce qui est intéressant, c'est qu'à côté de Vincent, il y a d'autres histoires que vous évoquez, notamment des histoires de personnes qui reviennent, qui reviennent... L'un qui a été résistant du maquis, l'autre qui revient des camps, parce que ces périodes de guerre, c'est aussi ça.
03:49 On est exilé, on revient, enfin, plus ou moins contre son gré. C'est ça qui vous a plu aussi dans cette période ?
03:58 Alors...
03:59 Ce retour difficile, en fait.
04:01 C'est ça. Ce qui me plaisait, c'est que j'ai toujours, je pense, aimé ces moments où tout le monde a envie de revivre, d'être joyeux, d'être heureux, d'être amoureux. Et puis, pour d'autres, c'est plus difficile, en fait.
04:14 Et c'est vrai qu'en fait, c'est pas tellement que j'ai choisi, mais c'est que ça m'a été un peu donné, parce qu'en fait, il y a une femme, un jour, qui m'a parlé, que je ne connaissais pas très bien, qui n'était pas de ma famille, qui n'avait jamais parlé à sa famille, et qui m'a dit, alors qu'elle était assez âgée, elle avait un matricule, et elle m'a raconté, alors qu'elle n'avait jamais parlé auparavant, elle m'a raconté comment s'était passé son retour des camps.
04:38 Et en fait, quand elle est arrivée au Lutetia, on lui a dit, voilà, on lui a donné un peu d'argent, on lui a dit "Tenez, et ne faites pas d'histoire." Et cette phrase, elle m'a marquée, moi aussi, au fer rouge. "Ne faites pas d'histoire." À quelqu'un qui revient des camps. Toute sa famille avait été exterminée, excepté sa mère, qu'elle avait sauvée. Voilà, "Ne faites pas d'histoire." Et je me suis dit, bah, c'est ce qu'on va voir, en fait.
04:57 Et voilà, je trouvais que sa vie, c'était important de voir, il y a certains qui ont traité de ce qui s'était passé dans les camps, moi je ne me sens pas habitée à le faire, mais en revanche, ce qui s'est passé après, ça me paraissait fondamental, la façon dont elle a été reçue.
05:13 Et donc vous avez écrit une très jolie histoire, qui s'appelle donc "Avant d'un refaire", c'est paru aux éditions de l'Observatoire, merci beaucoup, Claire Déhiat.
05:20 Merci beaucoup, Anne Filda.
05:22 [Musique]
05:26 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]

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