Des pistes afin de consommer mieux tout en maintenant son niveau de vie, notamment celle de l'économie circulaire, favorisée par la tendance de plus en plus fréquente à réparer et par l'explosion du marché de l'occasion. Enrique Martinez, directeur général du groupe Fnac-Darty est l'invité d'Amandine Bégot.
Regardez L'invité de RTL du 02 avril 2024 avec Amandine Bégot.
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00:06 Il est 7h45, Amandine vous recevez ce matin un patron pas comme les autres, un
00:11 commerçant qui nous dit qu'il faut moins consommer. Votre invité, le directeur général du groupe Fnac d'Arti, Enrique Martinez.
00:16 Enrique Martinez, vous publiez en effet ce livre "Et si on consommait mieux ?"
00:19 Il sort aujourd'hui, c'est aux éditions de l'Observatoire, un plaidoyer je le disais, pour une consommation plus durable, plus protectrice pour notre planète.
00:27 Et c'est étonnant parce que votre job, c'est de vendre toujours plus de produits, non ?
00:33 C'est pas étonnant si vous connaissez la nature de notre groupe.
00:36 Évidemment on est commerçant, on est assumé, parce qu'avec ça on facilite la vie de nos clients, mais on fait pas qu'est ça.
00:43 Ça vous surprend pas si on dit que chaque année on répare deux millions et demi de produits.
00:47 Premier réparateur de France d'Arti.
00:49 Premier réparateur de France, un des plus consistants dans notre métier au niveau mondial.
00:54 Et on veut pas s'arrêter là, on veut aider aux consommateurs à consommer mieux, pas consommer moins, c'est mieux.
01:00 Ça veut dire vivre sa vie pleinement, mais réduire la consommation d'énergie, d'eau, et des productions de carbone grâce à des consommations plus engagées et responsables.
01:10 Le problème c'est que si on achète moins de micro-ondes, de frigos, ou de livres, si je prends l'exemple de Fnac ou d'appareils photo, de choses comme ça, vous gagnez moins.
01:22 On voit bien qu'aujourd'hui tout le monde a pris conscience qu'on y va dans un mur.
01:28 On est en train d'épuiser les ressources de la planète, on est en train de vivre dans un monde pour lequel on est pas capable d'intégrer les effets négatifs de notre rythme de vie.
01:40 Donc il faut bien voir qu'il faut changer.
01:42 Changer ça signifie pas retourner en arrière, c'est trouver différemment pour évoluer dans la vie.
01:47 C'est entre surconsommation et déconsommation.
01:49 Entre le radicalisme, moi j'ai choisi ces voies intermédiaires, il faut vivre pleinement, mais il faut faire des vrais efforts individuels et collectifs pour réduire l'impact de nos activités humaines dans la planète.
02:01 Sauf que vous Fnac d'Arti, je le disais, 40 millions de clients dans le monde c'est beaucoup, mais vous n'allez pas pouvoir faire ça tout seul.
02:06 Il faut, et c'est l'appel que vous lancez, que ce soit l'ensemble des enseignes, l'ensemble des commerçants, mais aussi des industriels qui se lancent là-dedans.
02:14 Complètement. Et ça c'est le point de la vérité.
02:19 Il faut qu'on trouve un modèle économique viable, durable pour accompagner cette transition.
02:24 Parce que je pense que personne ne veut avoir un déclassement social, personne ne veut avoir des personnes avec de grosses difficultés économiques.
02:30 Il faut accompagner cette transition, il faut trouver des métiers de futur, il faut orienter les consommations vers quelque chose de plus virtueux.
02:37 Mais il faut trouver un modèle économique pour les soutenir, parce que moi j'ai bien aimé le monde de l'entreprise, évidemment.
02:41 Et il faut gagner de l'argent à l'arrivée.
02:43 Il faut surtout soutenir cette économie sociale qui va faire la transition.
02:47 Parce que ce qu'aujourd'hui on voit, c'est que la transition écologique doit être faite par des grands acteurs comme nous.
02:52 Et j'invite tous mes collègues de toutes les industries à s'engager aussi sur cette voie-là.
02:56 On ne peut pas laisser ça à quelqu'un qui n'est pas engagé et qui va probablement prendre des mauvaises décisions, des localisations de la production, des localisations des services,
03:05 qui vont probablement avoir une jolie copie des bilans carbone des sociétés en France, mais qui à la réalité dans la planète, ce n'est pas du tout bon.
03:12 Les entreprises, dites-vous, doivent s'adapter, c'est-à-dire évoluer.
03:16 Vous citez des exemples comme Decathlon ou encore Ikea.
03:19 Decathlon par exemple qui propose, je crois de mémoire que c'est en Belgique, une espèce d'abonnement.
03:25 On n'est pas propriétaire des équipements sportifs.
03:28 C'est un peu comme un abonnement pour une plateforme du genre Netflix où on paye chaque mois.
03:33 Et on peut louer gratuitement des équipements sportifs selon nos besoins.
03:38 C'est ça le modèle d'entreprise vers lequel il faut aller ?
03:41 Oui, ça et par exemple les produits réconditionnés.
03:43 Aujourd'hui, on assiste tous à cette explosion des ventes et achats des produits réconditionnés.
03:48 Plus de la moitié des Français sont déclarés d'avoir déjà fait.
03:51 Donc c'est notre responsabilité de rendre ça possible.
03:54 Si vous n'avez pas besoin d'un produit, c'est inutile de le garder dans un placard.
03:58 Il faut lui donner une deuxième vie.
03:59 De la même manière que si vous avez besoin d'un produit tout le jour, l'obligation d'un commerçant comme nous, c'est de le rendre viable et durable le plus longtemps possible.
04:06 Donc il faut à chaque fois, chaque industrie, trouver sa voie pour réduire l'impact négatif de nos activités dans la planète.
04:15 Le risque, ce n'est pas que les prix augmentent si vous vendez moins, si les industriels vendent moins.
04:19 C'est tentant d'augmenter les prix pour rester à l'équilibre ?
04:22 Forcément, et c'est juste ce qu'il ne faut pas.
04:24 Il faut qu'on trouve un système, un modèle qui permet d'intégrer tout le monde.
04:28 L'écologie, ça ne peut pas être une source de déclassement.
04:32 Ce n'est pas que les riches qui peuvent se payer les produits durables.
04:35 Il faut qu'on trouve une solution économique.
04:37 Par exemple, l'allocation, la révente des produits réconditionnés.
04:40 La réparation, c'est typiquement quelque chose qui peut rendre des pouvoirs d'achat aux consommateurs qui n'ont pas besoin d'acheter à nouveau un produit,
04:47 si ce produit a encore une histoire de vie en bonne qualité.
04:51 Donc ça, ça permettra aussi d'intégrer tous les mondes sous cette transition, et pas simplement quelques-uns.
04:56 Consommer mieux, ce n'est pas forcément consommer plus cher ?
04:59 Ça, c'est grave.
05:00 Si c'est consommer plus cher, ça va concerner très peu de monde.
05:03 Aujourd'hui, on est sur un impasse des pouvoirs d'achat aussi, donc il faut qu'on réponde à ça.
05:08 Sinon, c'est trop facile de dire "ça, ce n'est pas pour moi parce que je n'ai pas les moyens, donc je ne suis pas concerné, je ne m'engage pas".
05:14 Il faut qu'on sorte de cette logique un peu manichéiste.
05:17 Il faut vraiment trouver une solution qui concerne à tous les citoyens.
05:21 Ça ne peut pas se faire, on le disait, sans les autres enseignes.
05:23 Ça ne peut pas se faire, non plus, sans les industriels, pas sans les pouvoirs publics.
05:27 Et vous formulez, Enrique Martinez, un certain nombre de propositions, notamment pour faire face à la concurrence des géants de la surconsommation.
05:33 Je pense à Amazon, Alibaba, Shihin ou encore Temu.
05:36 Il faut les contraindre, dites-vous, à respecter les mêmes règles que les enseignes classiques.
05:40 Ce débat, j'ai l'impression qu'on l'entend depuis des années et des années.
05:44 Je pense que tout le monde qui est dans l'économie voit bien que les acteurs de l'économie locale,
05:50 on voit qu'il y a des règles qui nous concernent et pour lesquelles on s'est habitués.
05:54 Et c'est quand même hallucinant, je vais y remettre ces mots,
05:57 de voir comme d'autres acteurs qui ne sont pas engagés au territoire national,
06:00 ils permettent d'accéder à nos consommateurs sans respecter aucun de ces règles.
06:04 Amazon, par exemple, utilise nos routes mais ne participe pas au financement des routes.
06:07 Par exemple, les acteurs des plateformes chinoises qui vendent des produits qui ne sont pas homologués pour la vente en Europe.
06:11 Et on accepte tout sous prétexte que c'est moderne, c'est beau, c'est joli, ça fait jouer dans nos applications.
06:16 Qu'est-ce qu'il faut faire concrètement ?
06:18 Je pense qu'il faut d'abord, les cris d'alerte, c'est libre, ça sert à ça aussi.
06:22 Ça appelle à tout le monde à sa responsabilité.
06:24 Je pense que quand on veut, on peut.
06:26 Je ne peux pas accepter que ni l'Europe ni nos pays sont impuissants pour prendre, mettre les règles à jeu.
06:32 Moi, je ne suis pas particulièrement dans une logique protectionniste.
06:36 Mais il faut respecter les règles parce que sinon, qu'est-ce qui se passe ?
06:39 C'est que les acteurs qui veulent s'engager, ils sont désavantagés économiquement avec les autres,
06:44 ils ne vont pouvoir pas les faire.
06:46 Donc simplement, celles qui sont dans les voies de la transition,
06:49 ils ne sauront pas les moyens d'investir sous la transition écologique.
06:52 Donc ces économies un peu moins concernées, ils vont prendre la main,
06:55 ils vont occuper tous les terrains.
06:57 Donc les mêmes règles pour eux que pour ceux qui sont sur le territoire.
07:00 Quand on vous écoute, Enrique Martinez,
07:02 je pense que les auditeurs se disent peut-être la même chose,
07:05 on a envie de vous croire.
07:06 On se dit, oui, cette troisième voie, elle est possible.
07:09 Mais on peut se demander aussi si c'est vraiment sincère.
07:11 Est-ce que ce n'est pas juste de la com', du "greenwashing" comme on dit ?
07:15 Ou est-ce que c'est vraiment une occasion à saisir et un vrai projet ?
07:19 Je déteste ce mouvement "greenwashing" parce qu'il faut être très sincère.
07:24 Moi, je dirige un groupe avec 25 000 personnes.
07:26 Ils ne me permettront pas d'être hypocrite.
07:28 Si ce que j'ai écrit dans ces livres, ce que j'ai dit aujourd'hui,
07:32 avec vous ce matin, ce n'est pas correspondant à ce que j'ai dit chaque jour
07:35 et l'action que mène avec mes équipes, ce ne serait pas possible.
07:38 Et nous avons des millions de clients qui savent,
07:41 qui nous aideront dans cette logique.
07:43 Donc ces livres, pour moi, c'est l'opportunité de rendre public
07:47 et d'en donner beaucoup plus de puissance à ces postures collectives et aussi individuelles.
07:53 Et pour avoir engagé d'autres.
07:55 Parce que ce mouvement doit concerner l'ensemble de l'économie pour le rendre possible.
07:59 J'y crois à une transition écologique, j'y crois à une troisième voie, vous l'avez dit,
08:03 qui nous évite les radicalismes et qui nous amène sur une réduction solide
08:09 des effets nocifs dans la planète et dans la transition écologique.
08:13 Et ça s'appelle "Et si on consommait mieux ?"
08:15 C'est publié aux éditions de l'Observatoire.
08:17 J'en profite pour dire que la FNAC fait cette année ses 70 ans,
08:20 et Darty ses 50 ans.
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