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Écoutez l'interview du magistrat, procureur de la République financier.
Regardez L'invité de RTL du 13 septembre 2023 avec Amandine Bégot.

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00:02 RTL matin
00:06 RTL il est 7h44, excellente journée à vous tous qui nous écoutez.
00:10 Amandine Bégaud vous recevez ce matin le magistrat Jean-François Bonnert.
00:13 Jean-François Bonnert, je le disais vous dirigez le parquet national financier, le PNF qui a donc obtenu il y a quelques semaines le renvoi de Nicolas Sarkozy
00:20 devant le tribunal correctionnel dans l'affaire des soupçons de financement libyens de sa campagne présidentielle de 2007. Un procès
00:27 qui aura lieu en 2025.
00:29 L'ancien président va comparaître pendant trois mois pour corruption passive, association de malfaiteurs, financement illégal de campagne
00:36 et recel de détournement de fonds publics libyens.
00:39 A ses côtés sur le banc des prévenus douze autres personnes parmi lesquelles trois anciens ministres.
00:44 Trois mois de procès c'est long, pourquoi c'est si long ?
00:47 Déjà parce que l'affaire en elle-même est une affaire d'envergure, on l'a compris, les enjeux
00:53 notamment pour notre démocratie sont immenses. Il s'agit quand même de soupçons autour d'une élection présidentielle.
01:00 On connaît le poids de l'élection présidentielle lors de la
01:04 constitution de la cinquième république et du fonctionnement de nos institutions.
01:08 C'est un procès qui sort de l'ordinaire, ce sera une nuance extraordinaire
01:14 à laquelle nous avons quand même le défi de donner un fonctionnement ordinaire et donner une image ordinaire de la justice.
01:23 Alors le nombre de prévenus, vous l'avez rappelé, ils sont treize. Il y a sept chefs d'accusation
01:28 dont la corruption,
01:31 mais des sous dossiers en fait en nombre puisqu'il s'agit entre autres bien sûr
01:37 du financement de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy.
01:40 Mais il y a également d'autres aspects de ce dossier qui ont été révélés, notamment des faits de corruption d'agents publics étrangers,
01:48 des faits qui concernent plusieurs personnalités politiques, Brice Hortefeux
01:54 et d'autres personnalités autour de Nicolas Sarkozy, qui ont contribué de manière
02:01 personnelle à la fois à ces atteintes au financement
02:07 de la campagne, mais également à d'autres infractions qu'il va falloir traiter dans l'intégralité.
02:13 Et bien sûr donner la parole à l'ensemble des défenseurs qui vont être plusieurs dizaines.
02:18 Ces trois anciens ministres c'est effectivement Brice Hortefeux, Eric Werthe et Claude Guéant.
02:22 Nicolas Sarkozy, qui on le précise, rejette en bloc ses accusations,
02:27 dénonce un harcèlement tout azimut. C'est du harcèlement ça Jean-François Bonnert ?
02:32 Madame Bégaud, c'est un élément de langage que j'entends maintenant
02:35 depuis que j'ai pris mes fonctions. Nous l'avons notamment et abondamment entendu
02:40 lors du procès dit "bismuth", l'affaire des écoutes téléphoniques.
02:44 On l'a également entendu lors du procès "Big Malion", qui arrive en appel le mois prochain ou dans deux mois à la cour d'appel.
02:51 Je dirais qu'en matière économique et financière, dès lors que vous
02:56 vous attaquez à des personnalités de cet ordre là, on vient bien sûr vous renvoyer la balle,
03:02 si je puis dire, sans métaphore particulière.
03:05 Et pour être très clair, et je vais employer une expression un peu triviale,
03:09 votre objectif c'est pas de vous payer Nicolas Sarkozy ?
03:11 Absolument pas.
03:12 Il est hors de question,
03:14 hors de question, et ça je le dis
03:16 solennellement à l'attention de vos auditeurs, il est hors de question
03:20 qu'une autorité judiciaire, quelle qu'elle soit, et en particulier le parquet national financier,
03:26 que nous, entre guillemets, payons telle ou telle personnalité.
03:30 Nous sommes là pour contribuer à rendre la justice et notre boussole,
03:36 notre boussole, c'est la règle de droit, c'est l'application du droit. Point à la ligne.
03:40 C'est pas la première fois que le parquet national financier est critiqué.
03:44 On se souvient de François Fillon qui avait dénoncé pendant la campagne de 2017 un cabinet noir.
03:49 Comment vivez-vous ces critiques, ces attaques ?
03:51 Nous les vivons d'autant plus mal, mais nous nous y attendons et nous nous y préparons,
03:56 mais nous la vivons d'autant plus mal qu'elle est infondée,
04:00 et que
04:02 quelque part on sait bien que quand on se lance dans des procès comme ceux-là,
04:06 la grande stratégie de défense, c'est évidemment pour la défense d'attaquer l'accusateur.
04:14 Et c'est précisément ce qui se produit là, ce qui s'était déjà produit
04:18 lors du procès Bismuth, où on a fait d'abord le procès du PNF,
04:23 évidemment pour éclipser le procès du principal prévenu.
04:27 Donc ces attaques sont d'autant plus injustifiées que nous nous attachons à faire un travail de vérité,
04:34 de rechercher la vérité judiciaire.
04:36 Et je dirais que quand on voit, j'ai regardé ces derniers jours,
04:42 le nombre de magistrats qui se sont penchés sur les différentes affaires qui concernent notamment
04:47 monsieur Nicolas Sarkozy, et bien on en arrive à près d'une centaine
04:52 de procureurs, de juges, de juges d'instruction, de magistrats d'appel, de magistrats de la chambre criminelle de la cour de cassation.
04:59 Si là vous allez chercher un gabinet noir, et bien va falloir se lever tôt.
05:04 - Une centaine, mais lui dit à l'arrivée peu de condamnations.
05:07 - Pour le moment on verra quand même qu'il a été condamné à deux reprises,
05:11 dans l'affaire Bismuth en première instance et en appel.
05:15 L'affaire n'est pas définitive puisqu'il se prouve en cassation.
05:19 Pour l'affaire Bigmalion, il a été condamné en première instance, l'affaire va être jugée en appel dans deux mois.
05:24 Donc il y a quand même un processus là qui est en cours.
05:27 Je crois qu'on peut se donner rendez-vous d'ici quelques mois,
05:30 et refaire le point, et on verra à ce moment là ce qu'il en est.
05:34 - Autre enquête, ce sont celles qui concernent les soupçons de financement illégal des campagnes électorales d'Emmanuel Macron,
05:38 ce qu'on a appelé l'affaire McKinsey.
05:40 Alors je rappelle pour nos auditeurs que le siège parisien de ce cabinet de consultants américain avait été
05:44 inquisitionné, le parti Renaissance également, c'était à la fin de l'année 2022, début 2023.
05:49 Où en est-on aujourd'hui ?
05:51 - Alors c'est une affaire qui est actuellement confiée, une enquête qui est confiée à des juges d'instruction,
05:57 plusieurs juges d'instruction.
05:59 C'est une affaire qui est complexe parce que il y a différents volets.
06:02 Il y a un volet fiscal, un volet effectivement qui peut concerner des formes de prise illégale d'intérêt.
06:09 - C'est-à-dire des consultants qui auraient travaillé sur la campagne en échange d'éventuels...
06:12 - Avec des pantouflages, des allers-retours.
06:15 Donc tout cela est évidemment, éminemment complexe.
06:17 C'est une enquête qui est en cours.
06:19 Je ne peux évidemment pas me prononcer...
06:21 - Mais est-ce que ça peut remonter jusqu'au président ?
06:23 - Les juges d'instruction font leur travail, là aussi, avec une seule boussole.
06:29 C'est la règle de droit et l'application du droit.
06:31 - Toutes ces affaires, M. Bonnert, elles peuvent paraître parfois assez éloignées de la vie, du quotidien,
06:36 de tous ceux qui nous écoutent.
06:38 En quoi la lutte contre la corruption est si importante ?
06:41 Qu'est-ce que ça change pour tous nos concitoyens ?
06:43 - Je dirais que la corrosion, si vous voulez, la corruption, ça rime effectivement pour moi avec corrosion.
06:50 Vous voyez, le terme est arrivé tout de suite.
06:52 C'est un agent corrosif, la corruption, puisqu'elle vient gangréner la confiance que nous pouvons avoir
07:00 et que nous devons avoir dans nos institutions, dans nos dirigeants.
07:04 Qu'il s'agisse de dirigeants d'entreprises, donc de responsables du secteur économique,
07:10 ou qu'il s'agisse, évidemment, de responsables du secteur politique, du décideur.
07:15 - Ça participe à la crise démocratique qu'on connaît ?
07:17 - Ça participe de la crise démocratique, puisque la corruption vient forcément saper la confiance
07:22 que tout citoyen doit pouvoir avoir dans ses dirigeants et dans l'État du pays dans lequel il vit.
07:31 - Le Parquet national financier mène aussi plusieurs enquêtes autour du comité d'organisation des IEA de Paris 2024,
07:37 enquête notamment pour des soupçons de prise illégale d'intérêt.
07:39 Quelle est l'ampleur de la fraude ? Ce sont des millions, des milliards ?
07:43 - Alors, je tiens tout de suite à remettre la balle au centre, si je puis dire,
07:49 dans la mesure où les thématiques sur lesquelles nous travaillons aujourd'hui
07:55 sont principalement des infractions formelles.
07:58 Là aussi, c'est des questions de favoritisme, c'est des questions de prise illégale d'intérêt.
08:03 En clair, et pour faire moins juridique, je dirais que c'est la façon dont certains contrats ont été distribués.
08:09 - Des petits arrangements entre amis ?
08:11 - Des arrangements, c'est du fonctionnement de l'entre-soi qu'on est en train de démêler.
08:17 Mais nous ne sommes pas en tout cas à ce stade, et je ne vois pas d'élément me conduire dans l'enquête
08:24 vers des faits gravissimes de corruption, de trafic d'influence.
08:27 - On peut imaginer des gardes à vue pendant les JO, ça ferait mauvais genre ?
08:30 - Non, nous avons travaillé très largement en amont.
08:33 Vous avez vu qu'il y a eu ces dernières semaines, ces derniers mois,
08:36 des perquisitions, aussi des gardes à vue qui ont été prises.
08:40 Notre objectif, c'est de permettre un déroulement serein
08:43 d'une activité qui va être un événement planétaire, une fête universelle.
08:49 Il ne nous appartient pas de venir déranger cet ordre-là,
08:53 c'est pour ça qu'on s'y est pris suffisamment tôt, qu'on travaille maintenant.
08:56 Vous aurez compris que les perquisitions qui sont intervenues,
08:59 elles le sont ou elles sont intervenues plus d'un an avant le démarrage des JO.
09:03 C'est bien le signe que nous prenons les choses très sérieusement sur le fond,
09:08 mais en respectant aussi ce bel événement auquel la France entière,
09:13 je dirais le monde d'ailleurs, se prépare, puisque ce sont les JO
09:17 qui vont venir égayer notre capitale.
09:20 - Pas de gardes à vue à attendre pendant ces JO. Merci beaucoup.
09:23 [SILENCE]

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