• il y a 7 mois
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Chaque matin dans son édito, Vincent Trémolet de Villers revient sur l'actualité politique du jour. Ce vendredi, il s'intéresse à l'entretien d'Emmanuel Macron au magazine The Economist sur sa vision de l'Europe.
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Transcription
00:00Place à l'édito politique sur Europe 1 avec Le Figaro, bonjour Vincent Trémolet de Villers.
00:05Bonjour Dimitri, bonjour Anissa, bonjour à tous.
00:07Vous revenez Vincent ce matin sur l'entretien fleuve accordé par Emmanuel Macron à l'hebdomadaire britannique The Economist.
00:13Le président y livre Vincent sa vision de l'Europe et de la situation géopolitique.
00:18Oui et je voudrais d'abord m'excuser auprès des auditeurs, ce matin je vais encore parler d'Emmanuel Macron.
00:24Mais dans notre métier c'est l'actualité qui commande et comme le président parle tout le temps,
00:28nous sommes contraints de parler très souvent du président.
00:31Vous noterez que François Hollande lui-même, dont Emmanuel Macron moquait la présidence bavarde,
00:36trouve que son successeur parle beaucoup trop.
00:38Cette fois donc, il s'agit d'une interview titrée sur l'Europe menacée de mort.
00:43Il y a cinq ans dans le même journal, The Economist,
00:45Emmanuel Macron avait diagnostiqué la mort cérébrale de l'OTAN, OTAN qui aujourd'hui se porte beaucoup mieux.
00:51Dans cette interview, on retrouve le goût du chef de l'État pour les références de classe terminale.
00:56Ici, c'est l'Europe qui serait prise entre Eros et Thanatos, le désir de vivre et l'attraction de la mort.
01:02Il y disserte encore sur l'arme nucléaire au point de devenir anxiogène.
01:06En 2017, Macron était l'optimisme et Le Pen le catastrophisme, c'est en train de devenir le contraire.
01:12Mais surtout, on y voit une nouvelle preuve de ce qui fait le génie propre d'Emmanuel Macron, le déguisement sémantique.
01:19Le déguisement sémantique, cela consiste à habiller vos idées de mots qui disent à peu près le contraire de ce que vous pensez.
01:25On en a un exemple éloquent pour la fin de vie, puisque le président recouvre les mots d'euthanasie et du suicide assisté qu'il se refuse à prononcer,
01:31des beaux costumes du progrès et de la fraternité.
01:35Mais on le voit surtout sur l'Europe, où le champ lexical utilisé est celui du souverainisme, pour un projet qui dit exactement le contraire.
01:42Le contraire du souverainisme, Vincent, ça veut dire qu'Emmanuel Macron est fédéraliste.
01:46C'est une évidence, mais il se refuse à le dire. C'est pourtant une vision qui est tout à fait légitime.
01:51Mais celui qui la promet le plus préfère ne pas dire le mot.
01:54Emmanuel Macron a en quelque sorte le fédéralisme honteux.
01:58Ses discours font résonner les mots souveraineté, indépendance, puissance, mots attachés à l'éthanation,
02:03mais qui sont dans sa bouche destinés à une idée qui n'est rien d'autre que l'idée contemporaine, technocratique du vieux rêve impérial,
02:09c'est-à-dire les Etats-Unis d'Europe.
02:11Cela nous mène à des contradictions sidérantes, un peu comme si on demandait à Chedjipiti de nous faire un manifeste fédéraliste, mais avec les mots de Philippe Seguin.
02:19Dans cette interview, Vincent, Emmanuel Macron accuse les nationalistes de mentir eux aussi sur les mots et d'être en fait des brexiteurs cachés.
02:26Oui, c'est assez habile pour réveiller le souvenir d'une Marine Le Pen qui, il y a longtemps, voulait sortir de l'euro et a fêté le Brexit au Champagne.
02:34Mais dans ce passage sur la victoire possible du RN, je me suis arrêté sur une phrase bizarre.
02:39Il faut se battre, dit le chef de l'État, il faut relire Marc Bloch.
02:44J'ai relu récemment Marc Bloch.
02:48On y trouve une critique sévère du gouvernement des experts, un tableau accablant d'une bureaucratie qui se réfugie dans les procédures pour ne prendre aucun risque et endosser aucune responsabilité.
02:59On y trouve un pays désarmé moralement et culturellement pour affronter la menace qui s'approche, c'est-à-dire l'Allemagne nazie.
03:05C'est un livre admirable, c'est un livre éclairant sur les raisons du déclin d'un pays,
03:10mais ce n'est en aucun cas une critique du nationalisme qu'il faudrait combattre en européen, comme aime à dire le président.
03:18Enfin, ce qui est frappant dans cette interview, c'est que l'Europe est présentée comme le moyen de dépasser toutes nos faiblesses.
03:24Comme si en reproduisant à l'échelle d'un continent ce qui ne marche pas chez nous, c'est-à-dire la dette, la dépense publique, la pression fiscale, on allait enrayer notre déclin.
03:33Encore une fois, la sémantique est trompeuse, l'Europe puissante, c'est le déguisement que l'on veut faire porter à la France impuissante.
03:41Relire Marc Bloch, donc, votre conseil pour le week-end, Vincent Trébolet de Villers.
03:46150 pages, ça vous prendra 3 heures.
03:49Merci beaucoup Vincent.

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