Richard Boutin haïssait sa mère et détestait les femmes. Il était dévoré par son obsession au point d'être quasiment illuminé. C'est le visage de cet homme qui va se dessiner à la fin des années 80 derrière les meurtres de trois femmes dans la même ville de Pau. Un homme peut-être désaxé mais suffisamment retors et ingénieux pour agir sans bruit. Et ne laisser derrière lui ni trace, ni empreinte.
Retrouvez tous les jours en podcast le décryptage d'un faits divers, d'un crime ou d'une énigme judiciaire par Jean-Alphonse Richard, entouré de spécialistes, et de témoins d'affaires criminelles.
Regardez L'heure du Crime avec Jean-Alphonse Richard du 21 juin 2024.
Retrouvez tous les jours en podcast le décryptage d'un faits divers, d'un crime ou d'une énigme judiciaire par Jean-Alphonse Richard, entouré de spécialistes, et de témoins d'affaires criminelles.
Regardez L'heure du Crime avec Jean-Alphonse Richard du 21 juin 2024.
Category
🗞
NewsTranscription
00:0014h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL, Jean-Alphonse Richard.
00:07Horrible découverte, mardi, dans un appartement du quartier de Lousse-des-Bois, à Pau, une
00:11jeune mère de famille et sa fille de 7 ans retrouvées égorgées.
00:14Le tueur serait resté deux jours près des corps.
00:17Bonjour à Richard Boutin, haïssé sa mère et détesté les femmes.
00:24Il était dévoré par son obsession au point d'être quasiment illuminé.
00:28A la fin des années 80, ce cuisinier va apparaître, derrière les meurtres de trois
00:32femmes dans la même ville de Pau.
00:35Un désaccès, mais suffisamment ingénieux pour ne laisser derrière lui ni trace, ni
00:40empreinte.
00:41C'est grâce à un concours de circonstances que les enquêteurs vont finir par croiser
00:45sa route.
00:46Ils vont alors découvrir le parcours sinueux et caché de ce personnage imprévisible.
00:51Des aveux formulés, et le plus souvent rétractés, des remords inexistants, un regard tout aussi
00:57fixe que glacial.
00:58Il faudra qu'il arrive presque en bout de course pour que cet homme révèle un ultime
01:04secret.
01:05Un meurtre qu'on avait oublié et qui pourrait peut-être tout expliquer.
01:09Sans son arrestation, il aurait continué encore et encore à tuer.
01:13Comment ce cuisinier s'est-il transformé en tueur en série de proximité ?
01:18Question posée aujourd'hui à nos invités.
01:20Richard Boutin, le cuisinier du diable.
01:24Arrête de nous faire peur, ça fait deux jours que je n'ai pas de nouvelles.
01:28Appelle-moi ou j'alerte la police.
01:30L'enquête de l'heure du crime, la seule émission radio 100% fait divers.
01:33A tout de suite sur RTL.
01:48Dans l'heure du crime aujourd'hui, l'affaire Richard Boutin, le nom de ce jeune cuisinier
01:52qui travaillait à Pau, va mettre du temps à apparaître derrière une série de meurtres
01:56de femmes.
01:57À l'hiver 1987, un double crime particulièrement atroce va susciter une vive émotion dans
02:05toute la ville.
02:06Mardi 10 mars 1987, aux alentours de 10h du matin, Françoise est intriguée par le
02:13silence de Daniel Burget, sa voisine et amie.
02:17Les deux femmes habitent respectivement au huitième et neuvième étage de la tour qui
02:22trône dans le quartier modeste de Lousse-des-Bois, à Pau.
02:26Il y a trois jours, Daniel était pourtant bien présente.
02:30Samedi, elle a invité tous ses voisins à venir chez elle le dimanche après-midi.
02:35Elle fêtait les sept ans de sa fille aînée, Samantha.
02:38Elle a promis qu'il y aurait un gâteau.
02:41Les voisins se sont présentés dimanche comme prévu, mais il n'y avait personne à l'appartement.
02:45Ni la mère, ni les deux petites filles, Samantha et Andora, ni encore les deux chiens de la
02:51famille.
02:52Sans doute, Daniel avait-elle changé d'avis.
02:54Lundi, un voisin est revenu aux nouvelles, sans succès.
02:58Tout comme Françoise, qui vient normalement chercher Samantha pour la conduire à l'école.
03:03Ce mardi, Françoise insiste.
03:05Elle sonne à la porte, elle a l'impression que quelqu'un l'observe.
03:09Elle croit distinguer un doigt qui obstrue l'œilleton.
03:13Françoise n'est pas rassurée.
03:15Elle lit son mot sous la porte.
03:17« Ça fait deux jours que je vous cherche, arrête de nous faire peur, appelle-moi, sinon
03:22j'alerte la police », écrit-elle.
03:23Policiers, appelés dans la soirée, ils entrent, mais ne font que quelques pas.
03:28Daniel Burget, 27 ans, gît nu, dans une mare de sang sur son lit.
03:33Sa fille Samantha, le pyjama ensanglanté, repose sur son lit, dans la deuxième chambre.
03:38La petite Andora, 9 mois, pleure dans son lit, mais elle est saine et sauve.
03:44Elle a été épargnée.
03:45Les deux chiens de la famille sont calmes, dans leur coin.
03:50Les légistes des nombreux coups de couteau portés dans le dos ont s'est acharné sur
03:55la mère.
03:56Elle a longtemps agonisé, tout comme sa fille, dont les poignets ont été tailladés, sans
04:00doute, avec l'aide d'un rasoir.
04:02Les décès remontent à la nuit de samedi à dimanche.
04:06La dernière fois que Daniel Burget a été vu en vie, c'était effectivement samedi,
04:11vers 19h.
04:12Son voisin l'a aidé à installer un petit canapé, qu'elle venait tout juste d'acheter.
04:16Elle a ensuite pris un café, chez un autre voisin, avant de rentrer chez elle.
04:20Daniel a alors fait savoir qu'elle voulait se coucher tôt.
04:23À qui a-t-elle ouvert sa porte un peu plus tard ? Sûrement à une connaissance, car
04:28il n'y a aucune effraction, aucun vol constaté.
04:31La mise en scène des corps est glaciale.
04:33Le meurtrier, détail affolant, est sûrement resté enfermé plus d'une journée dans l'appartement
04:40auprès des deux cadavres.
04:42La toute petite Andora a eu à manger, on ne l'a pas entendu pleurer.
04:46Tout comme les chiens de l'appartement, ils sont restés tranquilles.
04:50Dimanche 15 mars, cinq jours après la découverte des crimes.
04:54Daniel Mekes, ancien compagnon de Daniel Burget et papa de Samantha, fait le voyage depuis
05:01l'Alsace jusqu'à Pau.
05:02Il est entendu par la police, mais rapidement mis hors de cause.
05:06Il dit être sous le choc après avoir vu à la morgue deux corps abîmés et défigurés.
05:11Dans le journal Sud-Ouest, il s'interroge.
05:14« Comment se fait-il que personne n'ait rien entendu ? C'est bizarre ! » dit-il.
05:18Des témoins sont interrogés, certains placés en garde à vue.
05:21Parmi eux, un cuisinier antillais, Richard Boutin, 25 ans.
05:25Il a été aperçu dans l'immeuble.
05:27Il connaissait Daniel Burget, c'est lui qui devait l'aider à préparer le gâteau d'anniversaire
05:32de Samantha.
05:34Samedi soir, il dit être resté jusqu'à 23h chez elle, puis il est rentré, il est
05:38relâché.
05:39Faute d'indice, faute de preuves.
05:41Et on va voir que Richard Boutin, évidemment, va revenir dans le champ de vision des enquêteurs.
05:47Presque un an, jour pour jour, il va apparaître, subitement, comme le suspect numéro un de
05:52cette épouvantable double meurtre.
05:54Il va falloir pour cela un concours de circonstances pour l'attraper et quelque confidence de
05:59l'individu.
06:00Ce sera dans la suite de l'ordre du crime.
06:02On va découvrir, peu à peu, le portrait de cet étrange et très inquiétant personnage.
06:08Pour l'instant, il nous faut revenir dans le quartier de Luz des Bois, à Pau, avec
06:13cette scène de crime des plus glaçantes.
06:16Bonjour, Maître Thierry Sagardoïto.
06:18Bonjour, Jean-Alphonse.
06:20Merci infiniment d'être avec nous aujourd'hui dans l'heure du crime.
06:23Vous êtes avocat au barreau de Pau, dans cette ville où s'est passé cet épouvantable
06:27drame.
06:28Aujourd'hui, vous êtes auteur du livre « Affaires classées en Béarnes et Pays Basques » publié
06:32aux éditions Sud-Ouest, dans lequel vous consacrez un chapitre complet à cette histoire.
06:37Un chapitre que, évidemment, j'ai lu avec assiduité.
06:40Thierry Sagardoïto, il y a cette scène de crime, elle est vraiment des plus glaçantes
06:46parce que, dans ce mode opératoire, il y a certes de la cruauté, mais il y a aussi
06:51une énorme dose de sadisme.
06:54Les deux corps, la maman et sa fillette, sont égorgés.
07:00Le meurtrier, avant de partir, n'a visiblement pas cherché à effacer les traces du crime.
07:09Il n'a pas cherché à simuler un éventuel accident, etc.
07:12Mais pire, comme vous l'avez très justement rappelé, il a laissé la vie sauve aux deux
07:16chiens et à la petite Andora, qui est découverte dans la salle de bain.
07:21Pourquoi l'a-t-il épargnée ? A-t-il éventuellement été surpris ? Ne l'a-t-il peut-être pas
07:27vue au moment où il a commis son forfait ? Les enquêteurs sont sur ces interrogations
07:31à ce stade-là de l'enquête.
07:32D'accord.
07:33Maître, je vous dis juste, il faut éloigner un petit peu votre bouche du micro parce que
07:37ça a tendance à faire du bruit.
07:39J'ai encore une question pour vous.
07:41Est-ce qu'on sait pourquoi il a épargné la petite Andora, cet homme dont on ne connaît
07:46rien à ce moment-là ?
07:48Les enquêteurs pensent dans un premier temps à la piste d'un familier puisque, comme
07:53vous le savez et comme vous l'avez rappelé, il n'y a pas à ce moment-là de défraction.
07:57Et pire, on pense même que le meurtrier est resté un voire deux jours sur la scène de
08:03crime et que c'est au moment où il voit le petit billet glissé par la voisine sous
08:07la porte qu'il prend peur et qu'il s'en va.
08:10Les enquêteurs pensent dans un premier temps à l'hypothèse sur laquelle la fillette
08:15était dans la salle de bain au moment où l'assassin est entré dans l'appartement et
08:20que peut-être, effectivement, au moment de la dispute, probablement avec la maman et
08:26du double meurtre, l'enfant peut-être dormait ou en tout cas ne s'est pas manifesté.
08:30C'est probablement ce qui explique qu'il lui est laissé la vie sauve parce qu'il
08:33n'avait aucune pitié à l'égard de la sœur de cet homme.
08:36Oui, on s'aperçoit qu'effectivement cet homme n'a pas de pitié, vous faites bien
08:39de le souligner.
08:40Mais ce qui est vraiment glaçant, c'est un maître Thierry Sagardoïto, le fait qu'on
08:44n'imagine que cet homme soit resté près des cadavres, qu'est-ce qu'il a fait ?
08:48On se pose des questions et les policiers à l'époque se demandent, mais on a affaire
08:51vraiment à un psychopathe, ce n'est pas possible autrement, c'est absolument effrayant.
08:56Bonjour Maître Yves Darmendraï.
08:57Bonjour Monsieur Richard.
08:59Merci infiniment d'être également avec vous au Téléphone de l'heure du crime.
09:04Maître Yves Darmendraï, vous êtes avocat honoraire, comme on dit avocat à la retraite,
09:09vous êtes ancien bâtonnier de peau et vous avez été dans cette affaire l'avocat de
09:14Richard Boutin, dont on va reparler beaucoup plus longuement au fil de cette heure du crime.
09:18Bien évidemment, c'est notre fil rouge, on va le suivre de A à Z, ce garçon pour
09:23le moins inquiétant.
09:24Maître Darmendraï, Daniel Burget, à ce moment-là c'est la maman, la victime, elle a été
09:31égorgée avec sa fille, elle élève seule ses filles, elle a 27 ans, alors elle a quelques
09:36aventures, évidemment c'est une jeune femme, il n'y a pas de soucis.
09:39Mais c'est une maman très sérieuse, elle s'occupe bien de ses enfants.
09:43Oui, elle est dépeinte comme étant une jeune femme méritante, célibataire, qui élève
09:51donc ses deux enfants et notamment s'occupe parfaitement bien de son dernier bébé qui
09:57a neuf mois à l'époque des faits.
10:00Elle a en tout cas une très bonne réputation avec tout l'entourage des voisins qui l'aiment
10:05bien, qui la surveille aussi un peu pour voir s'il n'a pas besoin de rien, etc.
10:11Les enquêteurs pensent tout de suite que le tueur connaissait victime parce qu'il n'y
10:16a pas d'effraction et puis qu'il est resté dans l'appartement, on a l'impression que
10:21c'est presque un familier.
10:22Oui, les policiers ont été assez vite convaincus qu'elle connaissait son agresseur et bien
10:30sûr ce qui a été une énigme, c'est le fait qu'après le meurtre, manifestement,
10:37quelqu'un est resté dans l'appartement parce qu'apparemment on avait à donner
10:42à manger au bébé, peut-être également avait-on donné à manger au chien pour qu'il
10:48n'aboite pas.
10:49En tout cas, quelqu'un a été soit revenu sur place, ce qui est assez rare en matière
10:54de crimes et surtout de crimes de cette nature extrêmement violente où on laisse des traces,
10:59les gens ne reviennent pas sur place, donc manifestement, l'agresseur était resté
11:03sur place.
11:04Effectivement, et ça c'est troublant, on insiste sur ce point, mais c'est vraiment
11:07le point le plus troublant encore, une question pour vous Maître Yves d'Armendray, un mot
11:11sur Richard Boutin, garde à vue à ce moment-là, garde à vue fugitive, il a 25 ans, il vit
11:15à peau.
11:16Oui, il est jeune, il est cuisinier, va d'établissement en établissement, il ne peut pas particulièrement
11:23parler de lui, il a une vie relativement calme apparemment tout au moins.
11:29Donc de ce point de vue-là, si vous voulez, rien ne peut alerter les autorités d'éventuels
11:34problèmes de comportement, il a été relâché au bout de 48 heures, si mes souvenirs sont
11:39exacts, de garde à vue, car il n'y avait aucune preuve contre lui, on n'avait rien
11:44à retrouver qui puisse confirmer qu'il pouvait être l'auteur de ces faits.
11:50Un simple témoin oublié qui va devenir le suspect numéro 1 du double meurtre.
11:55Richard Boutin, le cuisinier du diable, je ne sais pas ce qui m'a pris, j'ai pris un
11:59couteau de cuisine et j'ai donné plusieurs coups, Daniel ne bougeait plus, après, j'ai
12:04frappé la petite.
12:05L'enquête de l'heure du crime, on se retrouve dans un instant sur RTL.
12:0814h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL.
12:12Jean-Alphonse Richard.
12:1414h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL.
12:19L'heure du crime consacrée à l'affaire Richard Boutin.
12:23En mars 87, à Pau, ce cuisinier a été brièvement placé en garde à vue dans un double meurtre
12:29au couteau, celui d'une maman et de sa fille de 7 ans.
12:32Un an plus tard, il va apparaître comme le suspect numéro 1.
12:37Mardi 1er mars 1988, Mireille M, 25 ans, employée à la gare de Pau, se présente au commissariat.
12:44Elle dit avoir été agressée chez elle à Bizanos autour de 10h20.
12:48Elle était seule dans son appartement où elle vit avec son fiancé.
12:52Quelqu'un a frappé, elle n'a pas ouvert.
12:5420 minutes plus tard, le visiteur est revenu, cette fois, il l'a appelé par son prénom.
13:00« Je me suis dit que c'était un copain et j'ai ouvert », dit-elle.
13:04L'individu, un couteau à la ceinture, a fait feu sur elle avec un pistolet à grenaille.
13:09Il l'a touchée à l'oreille.
13:11Elle a alors été entraînée dans la chambre où elle a été violée sous la menace.
13:15« Je voulais m'en sortir coûte que coûte, j'avais peur qu'il me tue.
13:18C'est pour cela que je lui ai fait des tas de promesses », va-t-elle indiquer au journal
13:23La République des Pyrénées.
13:25La victime a reconnu son violeur, un certain Richard Boutin, cuisinier qui se fait appeler
13:31Bob.
13:32Elle l'a connu il y a trois ans, quand elle était caissière au buffet de la gare.
13:35Il faisait son service militaire au 1er Régiment de Hussars Parachutistes de Tarbes.
13:41Au policier, la jeune femme indique que Boutin avait envie de discuter.
13:46Il lui a parlé du double meurtre du quartier de Lousse-des-Bois.
13:50Il lui a dit qu'il connaissait très bien les victimes et il lui a laissé comprendre
13:55que le meurtrier, c'était lui.
13:57Mercredi 2 mars, Richard Boutin est interpellé près de Pau.
14:01Dans un village de la vallée de Losso, où il est cuisinier dans un chalet de vacances
14:06des personnels des PTT.
14:08On garde à vue.
14:09Il est interrogé tout d'abord sur le viol de Mireille M.
14:12Il reconnaît les faits.
14:13Il se souvient de la jeune femme, il l'avait parfois recroisé par hasard en ville, il
14:19a trouvé son adresse dans l'annuaire.
14:21Boutin décrit le viol avec un grand détachement, il évoque des pulsions.
14:26Il est ensuite questionné sur le double meurtre de la tour de Lousse-des-Bois.
14:30Il tergiverse, puis passe aux aveux.
14:33Il raconte que le samedi 7 mars 87, il a passé la soirée chez Daniel Burget, avec
14:38ses filles.
14:39Il était dans le canapé, il a fait des avances à la mère de famille, elle l'a repoussé.
14:44La colère est montée, je ne sais pas ce qui m'a pris, j'ai pris un couteau de cuisine
14:49et j'en ai donné plusieurs coups à l'aveugle sur Daniel, assise à ma droite sur le canapé.
14:54Comme elle ne bougeait plus, je l'ai transportée jusqu'à son lit, je me suis approchée du
14:58lit de Samantha, je l'ai baillonnée et je l'ai frappée.
15:02Boutin ne détaille pas les sévices, il est inculpé.
15:06Une semaine plus tard, il se rétracte, il dit avoir raconté ce que les policiers voulaient
15:10bien entendre.
15:11Quelques mois après son arrestation, Richard Boutin comparaît une première fois devoir
15:17le tribunal correctionnel de Pau, poursuivi par 4 jeunes femmes qui l'avaient harcelé
15:22pendant des semaines.
15:23Il se faisait passer pour un médecin des services sociaux, il les interrogeait sur
15:27leur vie intime, leur sexualité.
15:29Il n'hésitait pas non plus à appeler de jeunes adolescentes.
15:33En se faisant passer pour un parent, il les mettait mal à l'aise avec des conversations
15:38obscènes.
15:39Samantha, la fille de Daniel Burger, qui l'a fini par tuer, fait partie de ses cibles.
15:46Boutin évoque de vilaines plaisanteries.
15:49Il va écoper 6 mois de prison pour ses harcèlements téléphoniques, mais c'est rien évidemment
15:55par rapport à ce qu'il risque devant les assises.
15:58Il va être jugé pour un double meurtre et pour le viol de Mireille M.
16:02On va voir évidemment ce que va donner par la suite ce procès.
16:06Maître Thierry Sagardoito, vous êtes avec nous dans cette heure du crime et vous nous
16:09aidez à mieux comprendre cette histoire.
16:11Vous êtes avocat à Pau, auteur du livre Affaire classée en Béarnes et Pays Basques,
16:16publié aux éditions Sud-Ouest.
16:17Vous avez rédigé un long chapitre sur cette affaire.
16:25C'est un viol qui fait plonger Richard Boutin, on l'a bien compris, il a laissé sauve sa
16:33victime, mais il n'était pas très loin de la tuer cette femme.
16:38Je pense que Mireille a eu un véritable instinct de survie en se laissant faire, en lui parlant
16:47calmement et surtout en obtempérant.
16:50Elle comprend très vite, instinctivement, c'est son instinct de survie, que c'est à
16:54ce prix qu'il pourra lui laisser la vie sauve.
16:58Et surtout, il y a cette funeste confidence qui est à la fois la marque de sa détermination
17:05et aussi la force du chantage qu'il exerce sur elle.
17:08Si tu ne te soumets pas, attention à ce qui t'arrivera parce que le crime de Lousse-Desbois,
17:13présent dans toutes les mémoires, c'est moi.
17:15Et ça, c'est étonnant, quel est cet homme qu'ils ont en face d'eux, les enquêteurs,
17:20parce qu'il parle sans parler et puis il va se rétracter, mais ça c'est un grand classique
17:23en matière criminelle, Maître Sagardoïto.
17:25Alors, à l'époque, il a fait son service militaire au sein du 1er Régiment des Hussars
17:32Parachutistes de Tarbes, il navigue dans la région paloise, il est cuisinier comme vous
17:38l'avez rappelé, tantôt il est au chômage, tantôt il travaille.
17:43Bref, c'est un garçon très instable, il n'a pas d'attache familiale en Béarnes et
17:49il a visiblement noué une relation affective avec Daniel, la maman de Samantha qui, par
17:54la suite, le paiera de sa vie.
17:56Oui, c'est ça.
17:57C'est un curieux personnage qu'il est en train de dessiner, il y a ce portrait en filigrane
18:02qui apparaît et effectivement, on se demande ce qu'il a dans la tête cet homme.
18:06Maître Yves Darmendra, vous êtes avec nous également dans l'heure du crime, vous êtes
18:11en avocat, vous avez été l'avocat de Richard Boutin, donc vous le connaissez mieux peut-être
18:16que nous tous, cet homme évidemment.
18:18C'est un violeur et un harceleur sexuel, ça il a été condamné en correctionnel
18:23pour ça.
18:24Effectivement, il contacte même des adolescentes.
18:27Qu'est-ce qu'il raconte là-dessus, sur ces espèces d'obsessions ?
18:29Il ne dit rien, il ne dit rien, il dit qu'il a des pulsions et puis c'est tout.
18:36Non, non, il n'exprime même pas de regrets, il était incapable d'expliquer quoi que ce
18:40soit ou il ne voulait pas.
18:42Maître Sagardoïto, un mot là-dessus, on entend ce que dit votre confrère Yves Darmendra,
18:51le fait qu'il s'en soit pris au téléphone à Samantha et que Samantha elle soit devenue
18:55sa victime par la suite, est-ce qu'il l'avait ciblée cette adolescente ?
19:01Visiblement, il la connaissait mais Samantha n'est pas une adolescente à ce moment-là,
19:07c'est une enfant, elle a 7 ans.
19:08C'est vous dire qu'il fait ses manœuvres téléphoniques au préjudice de jeunes fillettes,
19:14de jeunes enfants, il n'est même pas sur des adolescentes.
19:16Et surtout, il y a en filigrane la commission d'actes sur de jeunes sujets, de jeunes enfants,
19:25avec sans doute une volonté perverse de s'approprier des renseignements très intimes pour ensuite
19:32satisfaire on ne sait quel fantasme.
19:34Oui, c'est ça, et peut-être pour aller visiter les uns, les autres, aller voir des
19:37maisons.
19:38En tout cas, il est à la recherche, il est curieux, il s'intéresse effectivement à
19:41la vie privée de toutes ces jeunes femmes et puis même de ses enfants.
19:45Vous l'avez dit, Maître Yves Darmendrail, le double meurtre du quartier de Luz des Bois
19:51à Pau, votre client, Richard Boutin, lui décrit sans hésitation les faits.
19:56Oui, oui, et quand on lui pose la question, enfin les policiers, les enquêteurs, quand
20:03ils lui posent la question, mais pourquoi, alors que vous la connaissiez, que vous disiez
20:07que vous vous occupiez d'elle, vous lui rendiez service quand elle avait besoin qu'on promène
20:11ses enfants pendant qu'elle faisait autre chose, il répond, je ne sais pas, je me suis
20:17levé, j'ai pris un couteau et je lui ai donné les coups de couteau.
20:20Est-ce qu'on l'a raté, finalement cet homme, parce qu'il a été relâché après
20:24vraiment sa toute première garde à vue ?
20:25Oui, en fait, on est passé à côté, mais moi ce n'est pas un reproche que je fais
20:31à la police, c'est toujours difficile, il s'était suffisamment bien débrouillé
20:37en tout cas, si j'ose dire, lors du premier crime, celui de Daniel et de Samantha, qu'il
20:45n'avait pas laissé de traces pouvant qu'on fasse un rapprochement entre lui, entre sa
20:50personne et les traces qui avaient pu être trouvées sur place.
20:54Maître Thierry Sagardoito, c'est vrai que c'est peut-être un psychopathe, mais il
20:59ne laisse pas de traces, le premier crime, on ne trouve pas grand-chose.
21:02Il ne laisse pas de traces et surtout, il prend soin de faire en sorte que la fillette
21:12ne hurle pas puisqu'il va la baïonner.
21:15Il faut s'imaginer que Samantha est terrifiée de voir sa maman qui est en larmes, qui supplie
21:21son meurtrier de lui laisser la vie sauve et lui, comme dans une espèce de jouissance
21:25de toute puissance, continue son œuvre et pour faire en sorte que Samantha ne hurle
21:30pas, il va la baïonner et il va ensuite lui taillader les poignets à l'aide d'un rasoir
21:35et s'acharner sur elle dans des conditions qui sont épouvantables.
21:39Donc, à cet instant, Boutin est dans la toute-puissance, dans la surpuissance.
21:43Maître Yves Darmendra, c'est très intéressant ce que dit Maître Sagardoito, votre client
21:48est extrêmement détaché, il est très froid dans toutes ses explications.
21:53Absolument, il est très détaché, il est très mutique, il faut vraiment lui tirer
21:59les paroles pour qu'il finisse par dire quelque chose.
22:02C'est également le souvenir que j'ai en tant que rapport personnel d'avocat à un client.
22:09On ne peut rien en tirer.
22:11Il refuse de parler, il dit « mais je ne me souviens pas, je ne sais pas, je ne peux
22:16pas expliquer tout ça ».
22:19Trois ans après le double meurtre, le suspect va comparaitre aux assises.
22:22Richard Boutin, le cuisinier du diable.
22:25Au procès, il avait un regard très noir, fixe, il donnait l'impression de regarder
22:29derrière vous.
22:30L'enquête de l'heure du crime, il risque déjà la perpétuité, mais s'il y avait
22:34d'autres victimes, un tueur en série, pourquoi pas ?
22:38A suivre dans un court instant sur RTL.
22:48Jean-Alphonse Richard, jusqu'à 15h30 sur RTL.
22:51En septembre 1987, on va retrouver également une femme décédée dans un appartement d'une
22:59cité paloise.
23:00On remarque qu'elle a des traces, en tout cas au niveau du cou, pour la considérer
23:05à l'époque qu'il s'agissait d'un suicide.
23:07Retour, aujourd'hui, dans l'heure du crime, sur l'affaire Richard Boutin.
23:12Ce cuisinier de peau, agresseur sexuel, est accusé d'avoir poignardé à mort une mère
23:17et sa fille de 7 ans, ainsi que d'avoir violé une jeune femme.
23:20Trois ans après les faits, il est jugé.
23:22Mardi 2 octobre 1990, Richard Boutin, 28 ans, est devant la cour d'assises des Pyrénées
23:29Atlantiques à Pau.
23:30Il n'a plus rien à voir avec le jeune homme mince interpellé trois ans plus tôt.
23:35Sa silhouette s'est épaissie, il a le crâne rasé.
23:38Et tout le monde remarque son regard noir, inquiétant, obsédant, au point de mettre
23:43mal à l'aise l'assistance.
23:45C'était un regard très noir, fixe, mais qui donnait aussi parfois l'impression de
23:49regarder derrière vous, se souvient dans Sud-Ouest, maître Yves Darmendrail, l'un
23:54de ses avocats.
23:55Richard Boutin reconnaît le viol de l'ancienne serveuse de la gare Mireille M.
24:00A propos du double meurtre de Daniel Burget et de la petite Samantha, 7 ans, il se referme,
24:06ne répond plus aux questions, se mûre dans le silence.
24:09On s'interroge sur ses motivations, ce déclic qui a conduit au carnage.
24:14Certains témoins y voient un acte de sorcellerie, un rite vaudou qui fascinerait le jeune Guadeloupéen.
24:20Et si ce double meurtre sauvage était en réalité un sacrifice rituel ? interroge
24:25l'avocat général, sans obtenir de réponse de l'accusé.
24:29Les experts psychiatres parlent d'un homme qui a tué car il ne supportait pas qu'une
24:34femme refuse ses avances.
24:35La petite Samantha aurait été éliminée car elle criait.
24:39La plus petite, Andora, aurait eu la vie sauve car elle dormait tranquillement.
24:44Après 4 jours d'audience, Richard Boutin est condamné à la perpétuité, à sortie
24:49d'une peine de sûreté de 22 ans.
24:51Et dans cette heure du crime, on retrouve l'un de nos invités, c'est Maître Yves
24:57Darmendrail, avocat, avocat à peau, vous avez été Maître Yves Darmendrail, l'avocat
25:03de Richard Boutin.
25:04Alors il est à cette audience et c'est étonnant ce que vous racontez, notamment
25:09sur son regard, il fait peur, il effraie, il glace tout le monde à ce procès, Richard
25:15Boutin.
25:16C'était quelqu'un d'extrêmement impressionnant, je ne sais pas si je peux vous raconter cet
25:21épisode, mais je me souviens lors du procès d'Assise, à l'époque il n'y avait pas
25:27encore toutes ces vitres par lesquelles on protège à la fois les accusés et le public
25:32quelquefois.
25:33Les salles d'Assise étaient complètement dépourvues de protection, quelle qu'elle
25:37soit.
25:39On s'assigne aux avocats juste derrière les criminels et devant, il y avait souvent
25:44des journalistes, je me rappelle d'une jeune journaliste qui était assise juste en face
25:50de lui, il l'a regardée elle-même, c'est du moins ce que j'ai appris par la suite,
25:54je ne sais pas si c'était insistant ou pas, mais elle avait tellement peur qu'elle
25:58avait été obligée de se déplacer.
25:59Il était effectivement très impressionnant.
26:02Effectivement, c'est assez glaçant, tous les témoins, tous les gens qui étaient à
26:05ce procès, ils vont remarquer cette attitude qui glace, qui transperce les gens comme
26:12ça.
26:13Maître Darmendraï, encore une question, finalement, il ne parle pas beaucoup à ce
26:17procès parce qu'il va se refermer comme une huître à propos du double crime, le
26:22viol, il l'admet, il peut le raconter, le reste, il est bloqué, il n'y a pas moyen
26:27de lui sortir en mots, finalement, on ne sait pas beaucoup plus de lui, sur lui et de ses
26:32motivations.
26:33Alors, non, c'est ce qu'on a essayé de péder parce que quand il est au procès,
26:39effectivement, il ne répond à rien, il ne dit rien, il dit ce n'est pas moi, ce n'est
26:43pas moi.
26:44Aux assises, toutes les affaires étaient mêlées, on a bien vu qu'il était capable
26:50de tout à ce moment-là, il était sous cet effet d'une pulsion, alors réfléchit,
26:56il réfléchit, il y a un, en tout cas, sous l'emprise d'une pulsion, il était capable
27:00de tout.
27:01M. Thierry Sagardoïto, vous êtes avocat à Pau également et auteur du livre, je le
27:05répète, Affaire classée en Béarnes et Pays Basques, publié aux éditions Sud-Ouest,
27:09il y a un chapitre sur cette affaire dans ce livre que je conseille à la lecture puisque
27:13effectivement, ça permet d'avoir une idée sur le personnage.
27:17Alors, ce personnage, il est bien difficile à cerner et finalement, à ce procès où
27:21il a arrêté de parler à un moment donné, où il ne s'exprime un petit peu que par
27:25regard interposé, eh bien, on est obligé de faire un portrait en creux de l'accusé
27:30et ce portrait, il est contrasté parce qu'il y a des gens qui disent, ce n'était pas
27:33un mauvais garçon finalement.
27:35C'est ça, certains témoins disent que c'est un séducteur, un charmeur qui adore
27:44séduire, créer des petites histoires sans lendemain, d'autres décrivent un accusé
27:50beaucoup plus effrayant, fasciné par la magie de la sorcellerie d'Erythe Vaudou et c'est
27:56à ce moment-là que l'avocat général de l'époque, Jean-Michel Durand, qui est procureur
28:00de la République de Pau, s'empare de l'argument et dit, et si ce double meurtre était un
28:04sacrifice rituel ? Et là, ça glace l'assistance parce que ça en aurait tout l'air, le geste
28:12pulsionnel, sexiste, etc. apparaît assez peu et soudain se dresse l'hypothèse d'un geste
28:20sanglant mu par de vieilles croyances, etc.
28:24Mais de toute façon, comme l'a dit Jean-Yves Darmandraï, l'accusé est aiseux.
28:29Il faut rappeler aussi, et ça c'est vraiment quelque chose qui fait contraste aujourd'hui,
28:32la garde à vue en 88 se fait sans avocat.
28:35Vous savez pertinemment que les accusés qui venaient à reconnaître les faits dans un
28:40premier temps, se rétractaient ensuite en disant, mais j'ai raconté que des bêtises
28:43parce que je n'avais pas d'avocat, on m'a tabassé, on m'a menacé, etc.
28:46On m'a forcé, c'est une garde à vue d'un autre temps, nous sommes au tout début, à
28:51la fin des années 80 et à l'époque, il n'y a pas d'avocat en garde à vue, donc
28:54il y a un doute, il n'y a pas d'enregistrement vidéo des gardes à vue, donc il y a toujours
28:58un doute sur les conditions dans lesquelles les aveux ont été donnés.
29:02Reste tout de même qu'il ne les a pas rétractés devant le juge d'instruction, il va les rétracter
29:06plusieurs mois plus tard, ce qui donne tout de même l'impression qu'on est dans la vérité,
29:11hélas.
29:12Après deux ans de prison, l'aveu de notre meurtre.
29:16Richard Boutin, le cuisinier du diable, c'est un monstre froid et sanguinaire, une parfaite
29:23machine à tuer.
29:24L'enquête de l'or du crime, on se retrouve dans un instant sur RTL.
29:38Au programme aujourd'hui de l'or du crime, l'affaire Richard Boutin, en 1990, cet ancien
29:42cuisinier de peau a été condamné à perpétuité pour un viol et un double meurtre, une mère
29:47et sa fille de 7 ans.
29:49Deux ans plus tard, en prison, il avoue un nouveau meurtre.
29:53Vendredi 18 décembre 1992, Jean-Pierre Nahon, un habitant de Pau, reçoit chez lui une lettre
30:00signée de Richard Boutin, adressée depuis la centrale de l'Anmesan.
30:04« Vous n'avez plus à chercher le meurtrier de votre mère, c'est moi », écrit le détenu.
30:09Cinq ans plus tôt, 21 septembre 87, Odette Nahon, retraitée, 63 ans, avait été découverte
30:17sans vie dans son appartement.
30:19L'enquête avait conclu à un suicide.
30:20Son fils n'avait jamais cru à cette hypothèse.
30:23Richard Boutin est entendu.
30:24Il raconte qu'il s'était lié d'amitié avec la retraitée, avec lui elle était en
30:28confiance.
30:29Un matin, il l'a attaqué.
30:30Il l'a étouffé avec un bouchoir imbibé de formol, l'a poignardé et lui a infligé
30:35d'horribles sévices sexuels.
30:37Un crime maquillé en suicide.
30:39Après avoir tué Odette, comme il l'avait fait six mois plus tôt, quand il a tué Daniel
30:44et sa fille, Boutin est rentré tranquillement chez lui.
30:49Interrogé par le juge d'instruction, Richard Boutin révèle qu'il est né d'un inceste.
30:55Il est sa mère.
30:56Odette Nahon aurait payé de son sang cette détestation à travers la retraitée.
31:02C'est sa mère qu'il voulait tuer.
31:0419 juin 95, l'ancien cuisinier est de retour aux assises pour ce crime oublié.
31:09Jean-Pierre Nahon, fils de la victime, décrit l'accusé comme un monstre froid, sanguinaire,
31:15une parfaite machine à tuer.
31:17Les experts le déclarent incurable, apte à récidiver.
31:21Une deuxième fois, il est condamné à la perpétuité.
31:24Et là c'est le déclic, parce qu'on se dit que finalement il y a une explication
31:30à tous ces crimes.
31:31Il détestait sa mère et il détestait les femmes cet homme.
31:34Il livre lui-même la clé peut-être de ses gestes.
31:37C'est quand même très étonnant.
31:38Maître Yves d'Armendraye, on vous retrouve dans cette heure du crime.
31:41Vous êtes avocat et vous avez défendu dans cette affaire Richard Boutin.
31:45Pourquoi est-ce qu'il avoue le crime d'Odette Nahon alors qu'après tout il n'était
31:50pas du tout suspecté cet homme ?
31:51Vous posez une bonne question, mais à laquelle je ne peux pas répondre.
31:57Vous savez, les personnalités des criminels sont tellement inexplicables et compliquées.
32:04C'était une personnalité extrêmement complexe et dépravée que celle de Richard Boutin.
32:10Une personnalité complexe, dépravée, mais effectivement on ne sait toujours pas ce
32:16qui a pu se passer.
32:17Même là, si avec cet aveu, ça change la donne.
32:20Maître Thierry Sagardoito, avocat et auteur du livre Affaire classée en BRN et Pays Basque,
32:25publié aux éditions Sud-Ouest.
32:27Vous connaissez bien ces affaires, vous connaissez bien cette affaire, vous connaissez bien la
32:32mécanique judiciaire.
32:33Il est rare que quelqu'un comme ça, en prison, quelques années plus tard, après avoir longuement
32:39réfléchi, donne la clé d'un crime.
32:42Ce n'est pas fréquent quand même.
32:43C'est même absolument exceptionnel dans les archives judiciaires parce que lorsque
32:50le procureur de peau est informé par les policiers de cette correspondance, il fait
32:55sortir le dossier.
32:56Il n'était pas à l'époque en poste quand Boutin a commis ces forfaits.
33:00Il fait sortir le dossier et là, stupéfaction, la police était passée complètement à côté
33:05puisque Odette Nahon avait été présentée comme suicidée.
33:08Dans les conditions où elle avait été découverte, je crois que l'enquête avait été sensiblement
33:14bâclée.
33:15On recommence à zéro et on se pose une question.
33:18Quel est le mobile de cet aveu ? Un aveu utilitaire ? Est-ce qu'il s'agit pour lui éventuellement
33:23de récolter des remises de peine ? Est-ce qu'il s'agit pour lui de faire un marché
33:28avec les juges ? Pas du tout.
33:29En fait, Boutin est déjà malade.
33:31Il est malade d'une infection longue durée qui va faire que deux ans après son procès,
33:36il décèdera.
33:37Et l'hypothèse a été avancée que c'est pour soulager sa conscience et peut-être
33:44d'une certaine manière ne pas laisser cette famille dans l'interrogation davantage qu'il
33:51a choisi de faire cet acte de repentance.
33:54Est-ce qu'il ne s'agissait pas aussi pour lui de vider les placards et peut-être de
33:59montrer qu'on était passé un peu à côté ? Comme finalement un ultime barreau d'honneur
34:04en disant aux policiers « vous êtes tellement mauvais que je vais même vous démontrer
34:07que vous êtes passé à côté de la vérité dans le crime absolument monstrueux de cette
34:11petite mamie ».
34:12Oui, effectivement, parce qu'il va dire aussi qu'on aurait pu l'arrêter, que c'était
34:16pour cela qu'il parlait.
34:17Ce n'est pas très clair.
34:18Mais Maître Yves d'Armendraye, qui a la décessation de sa mère, il va le dire devant
34:24le juge d'instruction, il va dire « moi je détestais ma mère, je suis l'enfant
34:28d'un inceste, je ne peux pas supporter cette situation, du coup j'ai détesté les femmes
34:33».
34:34Tout ça s'est enchaîné.
34:35Est-ce que c'est une clé pour comprendre Boutin ?
34:36Alors je ne sais pas si c'est la détestation de la femme, peut-être, mais en tout cas
34:43moi ce que j'ai toujours ressenti en y réfléchissant après, c'est l'explication que je maintiens
34:50pour moi-même.
34:51Je ne sais pas si elle est vraie, mais je pense qu'il ne supportait pas qu'une femme
34:56se moque de lui.
34:57Oui, ça, effectivement, ça a été avancé.
35:00Une femme se moque de lui, on l'a vu, notamment dans le double crime, elle s'est refusée
35:05à lui.
35:06Lorsque la jeune femme a été violée, elle a été gentille avec lui, donc ça s'est
35:11mieux passé, dirons-nous.
35:13Donc voilà, effectivement, ça revient dans l'attitude et dans le mode opératoire de
35:19Richard Boutin, maître Thierry Sagardoïto, il y a, juste un petit mot, il y a quelque
35:24chose de très étonnant, c'est ce rituel, lorsqu'il a tué ou lorsqu'il a violé,
35:29il rentre chez lui, il faut bien préciser qu'il a une petite amie, il a une compagne,
35:34il rentre chez lui, il se met à table.
35:35Alors, il faut savoir que la dame, Madame Odette Nahon, est en réalité la maman de
35:45Nathalie, sa nouvelle fiancée, la nouvelle fiancée de Boutin.
35:48Il faut se souvenir que Boutin, six mois plus tôt, a tué Danielle Burget, la maman
35:54de Samantha, et donc il revit une nouvelle aventure, cette fois-ci avec Nathalie.
35:58Il va croiser, à l'occasion d'un repas de famille, Odette, qui deviendra la future
36:03victime.
36:04Donc, quand il va sonner à l'appartement de cette vieille dame, elle lui ouvre, sans
36:09se méfier.
36:10Et puis, il s'invite, il engage la conversation.
36:12Qu'est-ce qui s'est passé ? On ne le saura pas, on ne sait pas ce qui s'est passé,
36:16est-ce qu'Odette a eu un mot malheureux ? Est-ce qu'elle s'est moquée, comme vous
36:20venez de le dire à l'instant ? Ou est-ce que, tout simplement, il a voulu, une nouvelle
36:23fois, tuer le proche ou l'approche, la mère de sa nouvelle compagne ? Là, personne ne
36:29saura.
36:30Ce qui tranche, quand même, c'est que cet homme a nié le meurtre de Danielle et Samantha
36:35tout au long du procès de 90.
36:37Et là, sur saut, il passe aux aveux, alors qu'on ne lui en demande pas tant.
36:41C'est paradoxal, quand même.
36:42Oui, c'est paradoxal et déroutant, on a du mal, effectivement, à le suivre.
36:46La prison se referme, il n'en sortira plus.
36:50Richard Boutin, le cuisinier du diable, j'avoue de crainte qu'un jour, on me retrouve.
36:56L'enquête de l'heure du crime, je vous retrouve tout de suite sur RTL.
37:09Dans l'heure du crime, aujourd'hui, la trajectoire de Richard Boutin, trois meurtres et un viol
37:13pour cet ancien cuisinier de peau, condamné à deux reprises à la perpétuité, 1990
37:17et 1995, il va s'éteindre en détention.
37:221995, quelques mois seulement après sa deuxième condamnation, aux Assises, pour le meurtre
37:28oublié d'Odette Nahon, Richard Boutin meurt de maladie à l'âge de 33 ans.
37:34Richard Boutin avait avoué son dernier crime, celui d'Odette, de crainte, disait-il, qu'un
37:43jour, on le retrouve.
37:44Peut-être, cet homme voulait-il disparaître en ayant livré ce secret, peut-être le seul
37:50secret qui le hantait.
37:51Condamné deux fois à la perpétuité pour des meurtres de femmes, Richard Boutin est
37:59mort à l'âge de 33 ans.
38:00Les psychiatres et les enquêteurs n'ont jamais pu savoir pourquoi il était devenu
38:04un tueur en série.
38:05Évidemment, les journaux, les radios, les télés se sont interrogés sur cet homme
38:10parce qu'effectivement, pourquoi est-il devenu un tueur en série ? Pourquoi a-t-il
38:13tué des femmes ? C'est une question qui n'est pas encore aujourd'hui tranchée.
38:20Maître Thierry Sagardorito, vous connaissez parfaitement cette affaire, vous êtes avocat
38:23au Barreau de Pau, vous l'avez enquêté sur cette affaire, vous avez trouvé de la
38:27documentation et ça figure dans un chapitre de votre ouvrage à faire classer en Berne
38:32et Pays Basque.
38:33Je le rappelle, publié aux éditions Sud-Ouest.
38:36Mobile numéro 1, c'est la détestation évidente des femmes.
38:43Il y a notamment cette histoire autour de sa mère qui est quand même importante parce
38:46qu'il tue Odette Nahon, c'est une retraitée, elle lui fait penser à sa mère, il va le
38:53dire.
38:54Il y a tout ça qui fait qu'il arrive à pétrir Richard Boutin.
38:59En un instant, lorsqu'il pénètre dans l'appartement de Madame Nahon, il est capable de virer du
39:07visage d'ange, du visage convivial qui fait qu'elle va lui ouvrir la porte, à celui
39:12de l'assassin.
39:13Il va l'étouffer, il va l'enduire de formol, il va la déshabiller, la frapper à l'aide
39:17d'une arme blanche et enfin il va l'empaler avec un balai qu'il enfonce dans son anus.
39:23Enfin, une mise en scène absolument sordide qui fait penser à une scène de viol et qui
39:27peut-être lui rappelle inconsciemment le viol dont sa propre mère aurait été victime
39:32avant sa naissance.
39:34Quoi qu'il en soit, il faut bien se mettre à la place de Jean-Pierre, le fils de cette
39:39petite mamie qui a été présentée comme suicidée lorsqu'il vient témoigner à la
39:43barre du second procès en 1995, il n'a aucun état d'âme pour lui.
39:48Ça a été un raté judiciaire et puis surtout, sa mère a été la victime d'un monstre
39:53de froid soninaire que d'ailleurs l'avocat général André Dagg, à l'époque, va stigmatiser
39:58en requérant une seconde fois la perpétuité en lui disant qu'en gros il n'appartient
40:02plus à la communauté des hommes depuis belle lurette.
40:04Exactement, le fils d'Odette Nahon, il est très troublé par ça et puis il est effaré
40:09par ce qui a pu se passer parce que lui n'avait jamais cru au suicide et effectivement on
40:12a raté cet homme qui a sans doute entre temps évidemment continué à sévir et qui a fait
40:17d'autres victimes.
40:19Un criminel incurable, maître Thierry Sagardorito, c'est ce que disent les psys, il est incurable.
40:26S'il sort, s'il met un pied dehors, il va récidiver, c'est ce qu'ils disent.
40:29Les experts vont même écrire la chose suivante, je cite, en tuant ou en violant ces victimes,
40:36ils réalisent des fantasmes sadiques et pervers, ce sont des actes fous commis par un homme
40:42qui ne les pas.
40:43C'est là toute l'ambiguïté et finalement tout le vertige de cet homme-là.
40:47Au travers de ces mises en scène, les experts sont convaincus qu'il est incurable et qu'il
40:53vaut mieux qu'il ne sorte pas de prison.
40:55Maître Yves Darmendra, vous avez été l'avocat de Richard Boutin dans toute cette affaire,
41:00il est aujourd'hui décédé, on l'a dit, Richard Boutin, il y a effectivement, on
41:05en parle avec Thierry Sagardorito, il y a beaucoup de secrets encore autour de cet homme.
41:12Ah oui, ça me paraît absolument certain.
41:15Ce qui me trouble beaucoup, c'est concernant le meurtre de la petite Samantha, le fait
41:22qu'on ait retrouvé des traces de coupure comme ayant été fait avec un rasoir, ça
41:28on ne l'a jamais retrouvé le rasoir, à l'époque on n'avait pas retrouvé le couteau
41:31non plus, mais qu'il ait possiblement fait ces entailles qui ne se justifient absolument
41:37pas, sinon pour commettre un acte de sadisme, mais en tout cas on y pense, donc il y a beaucoup
41:43de choses qui n'ont pas été dites, on ne sait pas tout, on ne saura jamais malheureusement.
41:48Thierry Sagardorito, s'il n'avait pas été arrêté, il serait parti pour une longue
41:54série de crimes sans doute, Richard Boutin ?
41:56C'est toute la question, d'abord s'il avait été neutralisé après le crime de
42:05mars 87, Odette Nahon serait sans doute partie de mort naturelle et certainement pas dans
42:12les conditions barbares que l'on sait, et par ailleurs la jeune femme qui a déposé
42:17la plainte en février 88 n'aurait pas gardé ce souvenir traumatique à vie, je pense
42:23à Mireille.
42:24Alors à partir de quand devient-on un meurtrier en série ? La question avait été posée
42:29à l'un des enquêteurs lors du second procès et il avait dit, je cite, si Boutin n'avait
42:35pas été arrêté en mars 88, combien d'autres meurtres auraient été commis ? Il disait,
42:39je cite, trois crimes de sang, ce n'est plus une répétition, c'est une série.
42:44Avaient-ils d'autres crimes non élucidés ? A partir du moment où on est passé à
42:48côté du meurtre d'Odette Nahon, peut-être en avaient-ils d'autres ? Peut-être prévoyait-il
42:53de le révéler plus tard, qui sait ? Boutin aura subi une perpétuité finalement plus
42:58courte que prévu, il est décédé 2-3 ans après le procès, mais il a emporté dans
43:03sa tombe beaucoup de secrets et sans doute innommables.
43:06Maître Yves Darmendraï, un mot là-dessus, est-ce qu'il aurait pu faire, selon vous,
43:10vous le connaissez bien Richard Boutin, vous l'avez connu à l'époque, est-ce qu'il aurait
43:14pu faire d'autres victimes ? C'est la grande question qu'on rencontre
43:18toujours dans les comportements criminels, je crains de devoir répondre par l'affirmative,
43:23oui je pense qu'il avait une personnalité tellement portée sur le mal finalement,
43:30on peut dire ça comme ça, qu'il aurait probablement recommencé, au moins, voulez-vous
43:35qu'on puisse penser qu'une telle personnalité ne soit pas dangereuse et susceptible de recommencer
43:41tant qu'il n'est pas arrêté ? On est obligé de répondre, oui, il va recommencer.
43:46Thierry Sagardoïto, je termine cette émission avec vous, alors évidemment Richard Boutin
43:50ce n'est pas le plus connu des tueurs en série en France, on est bien d'accord,
43:53mais c'est sûrement un des plus ordonnés, des plus glaçants et des plus intrigants.
43:59Oui, la médiatisation des affaires c'est quelque chose de très variable,
44:04ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre, nous sommes à la fin des années 80, c'est vrai
44:08qu'il y a eu un laps de temps de cinq années entre la commission du premier crime et la
44:12révélation du second, pour quelle raison ne figure-t-il pas dans l'album des tueurs en
44:18série ? Je n'en sais rien, en tout cas ici en Béarnes, en Pays Basque, c'est une affaire
44:22qui a fait résonance et qui a longtemps traumatisé notamment les habitants de cette
44:28cité populaire de Lousse-des-Bois. Je discutais il y a quelques mois avec un jeune homme qui à
44:32l'époque n'avait que 8-9 ans et qui se souvenait du moment où les cadavres ont été évacués par
44:36les secours et cette image il l'a encore en mémoire 35 ans après. C'est vous dire que
44:40pour les gens qui ont habité dans ce quartier, c'est un événement traumatique.
44:44Merci infiniment Maître Thierry Sagardoïto et Maître Yves d'Armendra et d'avoir été
44:50aujourd'hui les invités de l'heure du crime. Merci à l'équipe de l'émission, rédactrice en
44:54chef Justine Vignaud, préparation Marie Bossart, Marie-Lou Goyer, réalisation en direct de Jonathan Griveaux.