Modernisation des filières agricoles
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00:00Selon vous, l'agriculture française est en train de vivre une seconde révolution,
00:13mais on n'est pas prêt à conserver et à devenir plus productif demain ?
00:18On n'est pas en train de vivre une seconde révolution, on a besoin de faire une seconde
00:22révolution.
00:23La première on l'a faite, elle a réussi, elle a permis à des régions comme la Bretagne
00:29mais aussi toutes les filières animales d'être ce que c'est aujourd'hui.
00:32On a été le premier producteur européen, on a été le deuxième exportateur mondial,
00:37aujourd'hui on n'est plus le premier au niveau européen et on est rendu le cinquième
00:40exportateur mondial.
00:41Donc notre révolution elle a marché, mais aujourd'hui on est plutôt sur la pente descendante.
00:45Donc il faut qu'on fasse la deuxième révolution, on l'a entamée, mais il va falloir aller
00:49beaucoup plus vite.
00:50Alors qu'est-ce que vous entendez par deuxième révolution ? Quel modèle vous voyez demain
00:53?
00:54La deuxième révolution c'est déjà, ça passe sur la modernisation de nos filières
00:58animales.
00:59Aujourd'hui on constate avec d'autres pays qui sont en plein développement que nous
01:03prenons du retard dans la modernisation aussi bien des fermes, le type, les modèles des
01:08fermes, la taille des fermes, que dans nos outils industriels, nos abattoirs.
01:12Ça fait à peu près dix ans qu'il n'y a pas eu de gros investissements significatifs,
01:15par exemple dans les filières animales, dans les abattoirs.
01:17Le dernier c'était en 2008, c'était d'ailleurs nous qui l'avions fait avec un abattoir qui
01:22s'appelle Bauché.
01:23Mais vous voyez c'est en 2008, depuis, qu'est-ce qui a été fait pour vraiment investir massivement
01:28et aller chercher la performance.
01:29C'est ça le constat aujourd'hui et c'est pour ça qu'il faut une deuxième révolution.
01:34Aujourd'hui vous estimez la perte de compétitivité de la filière française ou du moins de la
01:38filière que vous pouvez, sur laquelle vous pouvez intervenir, à combien par rapport
01:42à des pays comme l'Allemagne ou du nord de l'Europe ?
01:44Alors l'Allemagne est le bon exemple parce que c'est, je pense, le pays qui a fait lui
01:49des choix très importants pour développer son agriculture aujourd'hui, ce qui nous
01:52a dépassés.
01:53On considère aujourd'hui qu'on a perdu 10% de productivité par rapport à l'Allemagne
01:57du fait du social, de la contrainte environnementale et puis de tout ce qui est aussi fiscal puisqu'aujourd'hui
02:05on sait qu'en France on a une charge fiscale qui est déraisonnable par rapport à d'autres
02:09pays.
02:10Et l'agriculteur dans tout ça, comment il s'y retrouve ? Vous vous passez un message,
02:13vous avez un objectif de rentabilité au niveau de votre société, comment vous illustrez
02:19vous votre perte de compétitivité et comment l'agriculteur lui pourra gagner également
02:23de la compétitivité ?
02:25La première révolution, on l'a faite avec les agriculteurs.
02:27Eux aussi, ils ont grandi, ils ont fait des fermes, etc.
02:30Et aujourd'hui, ils ont pu se développer parce qu'on a monté des filières, on a
02:34racheté les oeufs, on a racheté le porc, on l'a transformé, on l'a vendu.
02:37Et ça a été financé par des banques parce que justement il y avait des débouchés,
02:41il y avait des entreprises qui pouvaient valoriser les produits.
02:42Donc aujourd'hui, le fait de faire une révolution, de retrouver cette performance aussi dans
02:47l'agroalimentaire, ça va nous permettre de continuer à travailler avec les agriculteurs,
02:52de faire des contrats, de nous engager avec eux, de leur prendre leurs produits et à
02:55eux aussi de pouvoir avoir les moyens de faire les investissements qu'ils ont besoin.
02:59On a des exploitations aujourd'hui qui sont vieillissantes, on a besoin de réinvestir
03:04dans les poulaillers, dans les porcheries par rapport à beaucoup de modèles notamment
03:08du nord de l'Europe qui sont en train d'avancer, à ne pas accélérer.
03:11Donc ce qu'on va pouvoir faire avec les agriculteurs en les performant, en leur achetant leurs
03:15produits, ça doit leur permettre aussi d'arriver à prendre une taille qui économiquement
03:20sera viable.
03:22Au niveau du groupe Glon, quel est le revenu net de l'année 2012 et est-ce qu'il est
03:29suffisant pour pouvoir réinvestir dans des nouvelles unités de transformation ou unités
03:33industrielles ?
03:34Les résultats de 2012 de Glon, ils ont été positifs, on a toujours réussi à être positif
03:42dans notre exploitation.
03:43On a gagné 10 millions d'euros en net, mais sur un chiffre d'affaires d'un milliard
03:47C'est pas suffisant pour pouvoir continuer à investir, à moderniser nos outils et à
03:53rattraper le retard qu'on a pris vis-à-vis de certains pays qui continuent à investir
03:57très lourdement depuis ces dix dernières années où nous on n'a pas fait grand chose
04:01globalement si on prend les filières animales.
04:03Donc voilà, un résultat qui est positif mais c'est pas satisfaisant du tout et c'est
04:07pas à la hauteur de tout ce que l'on doit réinvestir pour demain.
04:10Les 3 ou 4 recommandations que vous auriez à faire à Jean-Marc Ayrault si vous le croisez
04:16à l'occasion de l'inauguration du SPAS en termes de législation ?
04:20Je vais le voir, je ne sais pas si je le croiserai, mais première chose, pas d'impôt en plus,
04:25on est déjà surchargé, donc l'éco-tax, c'est pas l'éco qu'on critique, c'est la
04:28taxe en plus.
04:29Nous n'avons pas les moyens de payer l'éco-tax, aujourd'hui l'éco-tax c'est 5 millions pour
04:35Glon, quand à côté le crédit d'impôt compétitivité, ça va représenter 2 millions et demi à
04:393 millions, donc on nous a repris la totalité, voire plus, donc nous n'avons pas les moyens
04:43de payer l'éco-tax.
04:44Deuxième chose vis-à-vis de l'État, c'est qu'au niveau de tout ce qui est réglementaire,
04:49il faut que derrière, il soit plutôt dans le sens de l'agriculture, c'est-à-dire qu'il
04:54nous aide à être efficace.
04:55On a des délais d'instruction de dossier de 3-4 ans, quand dans certains pays à l'étranger
04:59ils sont à 5-6 mois.
05:00Il faut qu'on ait une administration qui a envie de gagner avec nous et qui tire dans
05:04le bon sens.
05:05Une troisième chose que je dirais au gouvernement, c'est qu'il faut qu'il y ait un lobbying
05:10efficace.
05:11Aujourd'hui, ça fait plusieurs années qu'on se bat et qu'on leur dit que nous avons une
05:15distorsion de concurrence avec l'Allemagne sur le social et sur la TVA qui est énorme
05:19pour un outil comme notre abattoir qui fait 150 millions d'euros, qui gagne 1 million
05:22et demi, c'est 3 millions d'écarts avec l'Allemagne si on était dans les conditions
05:25d'Allemagne.
05:26Ce n'est pas tolérable, aujourd'hui il faut qu'il y ait un lobbying pour que ça cesse
05:30cette discrimination et ce dumping social que l'on subit.
05:35On en a parlé, ça fait des années qu'on en parle, c'est aujourd'hui, dans ce que vous
05:39pouvez constater en Bretagne, qu'on constate les effets.
05:41Quand les usines ferment, c'est des milliers d'emplois et c'est maintenant qu'on voit les
05:44effets de cette distorsion qui était très importante.
05:47Et puis la dernière chose, il faut qu'ils puissent favoriser aussi le produit en France.
05:52On a demandé depuis longtemps qu'il y ait un étiquetage des produits français dans
05:56les produits élaborés, notamment des viandes.
05:58C'est indispensable, le consommateur choisira et je suis sûr qu'il fera le bon choix pour
06:03des productions locales.