Le "8h3O franceinfo" de Lauric Henneton
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00:00Bonjour, Laurie Quinton, on part aux Etats-Unis avec vous ce matin puisque c'est cette nuit
00:09que va avoir lieu le premier choc Kamala Harris-Donald Trump pour la présidentielle américaine du
00:145 novembre. 90 minutes de face à face, qui a le plus à perdre ?
00:18Les deux ont beaucoup à perdre. Ils ont plus à perdre qu'à gagner, ça c'est absolument
00:22certain, ils n'ont pas grand chose à gagner. Ils ont beaucoup à perdre l'un et l'autre,
00:26même peut-être un peu moins, parce que Trump, de toute façon, on lui passe un peu
00:29tout, donc il peut franchir des lignes rouges, ce n'est pas si grave que ça. Kamala Harris,
00:33elle est dans une phase de conquête et de reconnaissance. Les débats, ce n'est pas
00:39forcément son fort, quoi qu'on dise. Elle est bonne dans le rôle de procureure, c'est-à-dire
00:44dans les auditions des juges à la Cour suprême, elle peut être absolument redoutable. Là,
00:48c'est un autre exercice. Et donc, si elle fait un faux pas, ça peut la hanter, surtout
00:54s'il n'y a pas d'autre débat après. Donc, je pense que Kamala Harris a plus à perdre.
00:57Est-ce que c'est plus difficile pour Donald Trump d'affronter Kamala Harris plutôt que
01:01Joe Biden ? Joe Biden, il le connaissait, parce que ça
01:04faisait quand même quelques années, il s'était déjà affronté en débat et il savait qu'il
01:10était vulnérable. Et d'ailleurs, ça a été le cas. Il n'a pas été très, très bon,
01:14Donald Trump, au débat du 27 juin. C'est Biden qui a perdu.
01:19Qui était très mauvais. Il a perdu tout seul, en fait, sans que Trump
01:23le pousse dans les cordes ou quoi que ce soit. Trump a été égal à lui-même, c'est-à-dire
01:28très, très fantasque, mais il n'a pas eu besoin d'être particulièrement agressif
01:32comme ça avait été le cas. Et Biden s'est tiré une balle dans le pied tout seul. Donc
01:36là, Kamala Harris peut pédaler, s'en mêler, ne pas être très pertinente. Et Donald Trump
01:44peut gagner de ce point de vue-là parce que lui, de toute façon, s'il est à côté
01:49de la plaque, ce n'est pas très grave. Le fait qu'il affronte une femme quand il
01:53parle même de la psychologie de Donald Trump, est-ce que ça change quelque chose pour lui?
01:56C'est risqué. C'est risqué parce qu'il a une sorte de rapport assez compliqué avec
02:03les femmes, surtout avec les femmes qui réussissent. Il a une sorte de complexe et il peut être
02:08particulièrement agressif. Ce sera désamorcé. On y reviendra probablement avec cette histoire
02:13de micro fermé où ils ne pourront pas se taper dessus. Donc, ça permettra peut-être
02:19de maîtriser un petit peu plus l'animal, mais il risque, et ça peut lui faire perdre
02:24des points, d'être agressif, grossier et ce genre de sorties. Cela dit, on l'a déjà
02:31vu à l'œuvre depuis 2015, il n'arrête pas d'être grossier, vulgaire, de passer
02:36des lignes rouges. Et pourtant, il est toujours là. Et comme dirait Elton John, il est toujours
02:42debout.
02:43Parlons-en maintenant, d'ailleurs, justement de cette règle, parce que c'est très normé
02:46ce genre de débat, comme en France, d'ailleurs. Le micro fermé pendant que l'autre parle,
02:52c'est une règle qui a été instaurée. Les démocrates, pourtant, ont demandé à
02:55ce qu'il soit ouvert. Les Républicains ont refusé.
02:58Alors, les Républicains ont refusé, disons qu'ils ont voulu reconduire la règle qui
03:03avait été celle du premier débat, du genre, on ne va pas changer la règle juste pour
03:07plaire à Madame Harris. Kamala Harris et son équipe voulaient, au contraire, créer
03:12une possibilité de chaos, parce qu'ils connaissaient bien Donald Trump à l'œuvre
03:17en débat. Ils savaient à quel point ça pouvait être chaotique, à quel point il
03:21peut être agressif. Et surtout, ils voulaient que Kamala Harris puisse avoir la possibilité
03:28de lui renvoyer quelque chose alors que ça n'était pas à son tour de parler. Par exemple,
03:33avec Mike Pence au débat pour la vice-présidence il y a quatre ans, elle parle, il l'interrompt,
03:39il le coupe en lui disant « je suis en train de parler ». Alors ça, c'est le seul point
03:45que l'on retient de ce débat, c'est ça, quand elle l'a mouché. Donald Trump a été
03:50un peu traumatisé par cette ligne-là et en gros, la doctrine, c'est « je ne veux
03:55pas de micro ouvert parce que je ne veux pas qu'elle me fasse ce qu'elle a fait à Mike
03:59Pence ». Ils n'ont pas le droit non plus d'avoir des notes avec eux. Rien du tout.
04:02Ça demande une énorme préparation. On sait comment ils se préparent l'un et l'autre.
04:05On le sait, c'est très documenté. Kamala Harris est très bien préparée. Ça ne veut pas dire
04:10qu'elle va faire un très bon débat, mais en tout cas, elle est préparée de manière extrêmement
04:13professionnelle par une personne qui s'appelle Karen Dunn, qui a préparé tout le monde depuis
04:17Obama, Hillary Clinton, donc c'est vraiment une ultra pro. Donald Trump, c'est un petit peu plus
04:23à la Trump. Il dit lui-même qu'il ne fait pas de préparation au débat. Son équipe dit qu'il ne
04:31fait pas de préparation au débat. Il est trop bon pour ça. Donc, il a quelques petits rappels de
04:36politique, de doctrine, etc. Mais bon, on sait aussi, et c'est la grande crainte des stratèges
04:40républicains, qu'il est complètement hors cadre et il est incapable de se tenir à des points
04:46politiques. Et c'est un petit peu ce qui peut le perdre. Il peut aussi balancer des fake news à
04:51foison. C'est ce qui s'est passé d'ailleurs lors du dernier débat en juin. CNN, dans sa cellule de
04:58fact-checking, a dénombré plus de 30 fake news. Mais après coup, et c'est un petit peu le problème,
05:04et sur France Info, vous êtes confronté aussi à cette question méthodologique. Est-ce qu'on doit
05:09confronter les invités en direct immédiatement ou après coup ? La plupart des médias ne peuvent
05:19pas se permettre de faire en temps réel. Et c'est un des problèmes qui se posent quand on a Donald
05:25Trump en face de soi, en interview ou en débat, c'est que ceux qui seraient beaucoup plus efficaces
05:29et de faire en réel, ils ment ou c'est inexact. Mais le problème, c'est quand on fait en différé,
05:35ça n'a plus aucun poids. Est-ce qu'ils se connaissent les deux ? Est-ce qu'on sait qu'ils ne se sont
05:38jamais affrontés dans les médias ? Mais est-ce qu'ils se sont déjà rencontrés ? Alors, est-ce qu'ils
05:43se sont déjà rencontrés ? Je ne pense pas. En revanche, il y a un point qui est important, qui
05:48est sorti dans la presse américaine au mois d'août, c'est que Donald Trump, en 2011 et en 2013, a donné
05:54de l'argent à des campagnes de Kamala Harris. Et donc, si j'étais Kamala Harris ou si j'étais un
05:59conseiller de Kamala Harris, je lui conseillerais d'y faire allusion en remerciant un peu tard
06:05Donald Trump de lui avoir donné de l'argent. C'est important parce qu'il l'appelle « camarade
06:10Kamala », c'est-à-dire que maintenant, c'est une dangereuse bolchévique. Mais elle était
06:15suffisamment fréquentable pour qu'il lui donne 6 000 dollars en cumulé, il y a quelques années
06:22quand même. On va voir si elle suit vos conseils en tout cas ce soir, peut-être qu'elle écoute France
06:26Info. En tout cas, il faut parler de Kamala Harris. Oui, parce qu'il faut le dire, il faut rappeler ce
06:30qui s'est passé cet été. Vu l'état de santé du président Biden, il a dû laisser sa place à sa
06:38vice-présidente Kamala Harris, c'était en juillet dernier. C'était le meilleur choix à faire, la
06:43choisir elle ? Il n'y avait pas beaucoup de choix en fait. C'est-à-dire qu'institutionnellement, il
06:49n'était pas obligé. S'il a un pépin de santé qui le met en incapacité de gouverner, là la
06:55constitution est très claire, ça bascule directement sur la vice-présidente. Elle ne sert
06:59qu'à ça en réalité. La vice-présidente ne sert qu'à remplacer en cas de pépin de santé ou autre.
07:04Pour la situation actuelle, c'est un peu plus compliqué. Ils auraient pu, mais ils n'avaient pas
07:09le temps, faire une primaire ou réunir le parti démocrate en conclave et faire sortir une fumée
07:16blanche parce qu'ils ont choisi tel ou tel candidat. Mais ça aurait été un désaveu pour Kamala Harris
07:21qui avait été choisie parce que Joe Biden s'était engagé à prendre une femme noire. Et donc là,
07:27c'était un petit peu dire bon, la femme noire c'était bien en 2020, mais là en 2024, c'est
07:31plus bien. Donc comme c'est un peu le noyau de la base du parti démocrate, l'électorat
07:38femme noire, c'était absolument impossible. Et puis il y avait le risque aussi que le parti
07:42explose, divise. Ce qui n'est pas le cas pour l'instant. En tout cas, le parti reste relativement
07:47uni derrière elle. Oui, et c'est quelque chose qui est assez surprenant parce qu'il y a un
07:53potentiel comme dans tous les grands partis. Ces grands partis, comme en France, sont des grandes
07:57coalitions avec des gens qui se détestent plus ou moins cordialement, mais qui sont obligés de
08:01s'entendre à cause du système électoral. Ils sont obligés de vivre ensemble et de s'entendre.
08:06Ce n'est pas toujours le cas. Contre des Républicains qui, eux, sont très divisés et qui ont passé l'année
08:112023 à se déchirer en public au Congrès, donnant un spectacle absolument abject aux citoyens
08:17américains qui détestent déjà la politique, les démocrates ont été extrêmement disciplinés. Et
08:22ils le restent. Ils sont restés disciplinés, peut-être trop d'ailleurs, derrière Joe Biden pendant très
08:27longtemps, jusqu'au moment où ça commençait à se voir. Et ensuite, ils se sont tous rangés comme
08:32un seul homme en 24 heures, Barack Obama un petit peu moins, derrière Kamala Harris. Et ils ont donné
08:39l'image d'un parti en ordre de bataille. Et c'était justement un problème, un écueil à éviter.
08:45C'était cette espèce de cataphonie.
08:48Barack Obama, comme Michelle Obama, qui était présent lors de la Convention démocrate.
08:54« Yes, she can », c'est ce qu'il a dit devant les sympathisants, devant les militants.
08:58Harris n'a jamais vraiment percé en tant que vice-présidente. Là, elle vous surprend depuis le retrait de Joe Biden ou pas ?
09:07En fait, c'est plutôt une question de psychologie de l'électorat. On a un électorat démocrate qui était
09:14assez désespéré, qui était plus ou moins résigné à une victoire de Trump parce que Biden, quoi qu'il
09:20fasse, quoi qu'il dise, les sondages ne bougeaient pas, la perception ne bougeait pas et Trump restait
09:25devant malgré tout, ce qui est assez surprenant. Donc, le fait qu'il s'en aille et que quelqu'un
09:32d'autre, et ce quelqu'un d'autre est Kamala Harris, soit à sa place, ça fait une espèce de déclic qui
09:38a déclenché cette vague d'enthousiasme, de joie, etc. Elle a fait des choix qui sont bons. Elle a fait
09:45des choix dont on verra plus tard son colistier s'ils sont payants ou pas. J'étais un petit peu
09:51sceptique au début, puis finalement, à l'usage, je me rends compte qu'il est tout à fait
09:56compétent et surtout qu'il projette des images qui sont complémentaires de celles de Kamala Harris.
10:00Kamala Harris, c'est San Francisco, c'est l'élite démocrate, ce que les gens détestent absolument.
10:04Et puis lui, c'est le cœur du pays.
10:06Kamala Harris, c'est le cœur du pays, puis c'est le voisin, c'est le mec sympa, qui désamorce un petit peu
10:12cette vision Fox News des démocrates, qui ont d'affreux...
10:14Fox News, c'est la chaîne conservatrice de la droite américaine.
10:18Qui est très trumpiste et qui a tendance à caricaturer les démocrates comme de dangereux radicaux.
10:22Mais quand on voit Kamala Harris, on ne voit pas vraiment un dangereux radical.
10:25Mais Kamala, femme noire, est-ce qu'elle joue cette carte-là, à la fois de la femme et de la candidate noire,
10:33à la carte raciale ?
10:34Alors, elle est noire et indienne, c'est-à-dire qu'elle a deux identités un peu complémentaires.
10:39Elle n'en joue pas et elle a refusé, dans l'interview à CNN, de jouer cette carte-là.
10:45Elle a dit, je laisse ça, en gros, à Trump.
10:47Parce que ce serait un petit peu trop facile, téléphoner, et ça donnerait des munitions à Trump également.
10:56En gros, l'idée, c'est de dire, nous sommes tous américains, que nous soyons blancs, noirs ou autres,
11:01nous sommes tous américains, je serai la présidente de tous les américains de la classe moyenne.
11:04Moi, ce qui m'intéresse, c'est la classe moyenne et ce n'est pas les blancs, les noirs, etc.
11:07Evidemment, on ne peut pas y échapper.
11:11Donc, elle n'a pas besoin d'insister beaucoup là-dessus.
11:14Le côté femme, elle insiste dessus, en fait, à travers l'avortement.
11:18J'ai relevé tout à l'heure que vous disiez que Barack Obama n'avait pas été parmi les premiers à la soutenir.
11:24Ça vous a surpris, ça veut dire quoi ?
11:26Oui, parce qu'en fait, c'était public. Il a mis un certain temps à s'exprimer publiquement,
11:30mais on a appris après qu'il l'avait contacté en privé.
11:33Il n'y avait pas d'hésitation de sa part ?
11:35Il ne semble pas, en tout cas.
11:37Sur l'avortement, justement, c'est intéressant ce que vous disiez à l'instant.
11:40Vous dites, elle parle de son statut de femme à travers l'avortement
11:44parce qu'en face, Donald Trump, lui, il n'est pas ouvertement contre l'avortement, mais il en joue.
11:52Voilà, il ne donne pas totalement son avis, mais il est favorable au remboursement d'une fille.
11:57Il est pro-enfant, pro-natalité.
12:04Sur le profil quand même de Kamala Harris, le New York Times dit qu'elle se présente comme une démocrate générique.
12:13Ça veut dire quoi, une démocrate générique, en fait, sur le plan des idées ?
12:18C'est-à-dire qu'elle ne veut froisser personne.
12:19Elle s'est recentrée sur un certain nombre de dossiers et un des points sur lesquels elle doit rassurer les Américains...
12:26Alors, ce n'était pas trop le moment et l'endroit au moment de la convention.
12:31Ce n'était pas trop le moment et l'endroit au moment de l'interview pour CNN il y a quelques jours.
12:35Là, le débat, il va falloir qu'elle réponde à des questions qui sont des questions jamais complaisantes.
12:42Et donc, il va falloir qu'elle se justifie sur ces changements de pieds.
12:46Sur CNN, elle a un peu évacué la question parce qu'elle est extrêmement prudente.
12:50Elle n'a pas de mesures concrètes, en fait, c'est ça ?
12:51Elle a quelques mesures.
12:53Alors, il ne vaut mieux pas forcément qu'elle soit trop détaillée parce que quand on rentre dans les détails,
12:57on se rend compte que ces mesures ne sont pas forcément les plus à même de relancer l'économie.
13:03Par exemple, elle veut donner de l'argent au primo-accédant.
13:06Et on s'est rendu compte, les économistes ont dit que oui,
13:08mais enfin, le problème, c'est que faire ça, ça va renforcer, ça va faire remonter les prix.
13:13Il faudrait juste construire plus pour favoriser plutôt l'offre que la demande.
13:18Laurie Quentin, spécialiste des Etats-Unis, vous êtes avec nous jusqu'à 9h sur France Info.
13:22On laisse passer le fil info.
13:23On vous retrouve juste après 8h46.
13:25Maureen Smignard.
13:26La Caisse nationale de l'assurance maladie veut diminuer de 2% les arrêts de travail l'année prochaine.
13:31Le directeur de l'ACNAM le dit sur France Info.
13:34Il affirme que cela représente 300 millions d'euros.
13:37Les dépenses d'indemnisation des personnes en arrêt de travail sont de nouveau en forte hausse au premier semestre.
13:43Le budget de l'État 2024 n'est pas encore bouclé.
13:46Hier, le ministre de l'Économie, démissionnaire Bruno Le Maire,
13:49affirmait qu'il était possible de tenir l'objectif de 3% de déficit en 2027.
13:54C'est faux, répond ce matin le rapporteur général du budget.
13:58Le député Lyot met en cause la situation politique actuelle.
14:02Une frappe israélienne dans une zone humanitaire.
14:05140 morts, 60 blessés à Ragnounès la nuit dernière selon la Défense civile de Gaza.
14:10L'État hébreu affirme avoir ciblé des cadres du Hamas présents dans la zone.
14:14L'organisation islamiste nie la présence de ces combattants sur place.
14:18Après deux défaites de suite, les Bleus signent une victoire contre la Belgique hier soir.
14:232-0 pour ce match de Ligue des Nations.
14:25Prochain rassemblement de l'équipe de France dans moins d'un mois pour jouer contre Israël et de nouveau contre la Belgique.
14:31France Info
14:35Le 8-30 France Info, Jérôme Chapuis, Saliha Braklia
14:40Héloïc Hampton, spécialiste des Etats-Unis, maître de conférence à l'université Paris-Saclay,
14:45à quelques heures de ce tout premier débat Harris-Trump.
14:48On va parler de Donald Trump parce que, on le disait, les rorantaines,
14:52c'est quasiment jamais arrivé, c'est arrivé à la fin du 19ème qu'un président se représente 4 ans après.
14:58On est dans une situation assez inédite.
14:59Son bilan, son bilan 2016-2020, est-ce qu'il pèse dans les débats actuels ?
15:06Ça dépend à qui on parle et ça dépend de la mémoire des électeurs.
15:12On a remarqué qu'il y avait une certaine amnésie des électeurs et des sondés quant au bilan de Donald Trump.
15:18C'est-à-dire qu'il était impopulaire quand il n'a quand même pas été réélu.
15:21Il avait une cote de popularité qui n'était vraiment pas reluisante et qui était insuffisante pour qu'il soit réélu.
15:29Qu'est-ce que lui reprochaient les Américains ?
15:30Déjà, il lui reprochait sa personnalité.
15:33Et puis, le problème de l'évaluation de la présidence de Trump,
15:36c'est qu'on a ce qu'on pourrait appeler l'éléphant dans la pièce en anglais, c'est-à-dire le Covid.
15:41Il y a eu quand même pratiquement un an de campagne en 2024, entre mars et novembre,
15:49où il y a eu le Covid qui était la seule info.
15:52Plus Jean-Journaliste.
15:53En 2020, oui.
15:54En 2020, pardon, oui.
15:56Et donc ça, aujourd'hui, ça ne pèse pas du tout.
15:58C'est oublié, les Américains.
16:00Ce qui a complètement changé la donne, c'est la période post-Covid et l'inflation,
16:06qui a complètement changé la perception du quotidien des Américains.
16:10Et donc, il revoit les années Trump, finalement, comme une illusion rétrospective.
16:15C'est-à-dire qu'on a tendance à gommer un peu les aspects négatifs.
16:18Et sous Trump, je vivais mieux.
16:20Économiquement, effectivement.
16:22Économiquement, on avait plus les moyens, la vie était moins chère que sous Biden.
16:26Comme si c'était grâce à Trump et à cause de Biden.
16:28Mais dans le mécanisme des électeurs, c'est ça qui pèse.
16:33Les années Trump étaient des années plutôt prospères.
16:36Les années Biden sont des années de vie chère.
16:38Les régressions en matière d'écologie, par exemple, ça, pareil, on oublie.
16:43On se rappelle que Donald Trump s'est retiré des accords de Paris.
16:46Ce n'est pas du tout quelque chose qui pèse.
16:48L'écologie, ça ne compte pas ?
16:49Pour les électeurs, pas du tout.
16:50La politique étrangère, au grand dam des spécialistes de politique étrangère,
16:53c'est quelque chose de très, très anecdotique pour les électeurs.
16:57C'est l'économie, c'est le frigo et c'est le compte en manque.
17:01Mais il y a l'immigration quand même.
17:02Parce que l'immigration, ça fait partie de la promesse de Donald Trump.
17:05La maîtrise de l'immigration.
17:06Il avait promis un mur à la frontière mexicaine.
17:08Mur qu'il n'a jamais fini.
17:10Qu'il n'a jamais vraiment commencé.
17:12Et ça m'amène à un point qui est peut-être...
17:15En fait, il avait été commencé avant.
17:16Il avait été commencé par Bill Clinton, qui n'est pas exactement un républicain.
17:20Il a été poursuivi par George Bush.
17:21Et donc, Trump voulait systématiser un petit peu plus.
17:25Mais, et c'est là qu'il faut sortir un petit peu du tout présidentiel,
17:29Trump, même réélu en novembre, ne pourrait toujours pas construire son mur
17:33s'il a une chambre démocrate face à lui.
17:36En 2018, les midterms avaient donné une majorité aux démocrates.
17:40Et Nancy Pelosi ne lui avait pas donné un pesso pour qu'il construise son mur.
17:44Laurie Quinton, vous parliez de l'amnésie.
17:46Ça s'est passé il y a à peine quatre ans.
17:49L'attaque du Capitole par les partisans de Donald Trump.
17:51Tout ça aussi s'est complètement oublié ?
17:52Ça a été relativisé.
17:53C'est-à-dire que pour un certain nombre d'Américains,
17:56essentiellement des démocrates, mais également un certain nombre de républicains,
17:59c'est une énième ligne rouge, peut-être la plus grave,
18:02qui fait que ça n'est pas possible pour eux de voter Donald Trump.
18:06Y compris pour un certain nombre de républicains.
18:08C'est ça qui va peser énormément dans la balance.
18:11Combien de ces républicains ne peuvent pas se résoudre,
18:13comme Dick Cheney, l'ancien vice-président,
18:15à voter pour leur parti parce que Trump.
18:18Et donc ils vont voter pour la candidate démocrate,
18:20non pas parce qu'ils sont démocrates.
18:22Un certain nombre d'intervenants l'ont dit à la convention des démocrates à Chicago,
18:27des républicains ont dit on fait ça par patriotisme.
18:29C'est pour ça qu'on ne peut pas dire qu'il y a deux Amériques qui se font face.
18:32Non, c'est beaucoup plus compliqué.
18:33En réalité, il y a des lignes de fracture au niveau de l'éducation, du mariage, etc.
18:38qui renvoient un certain nombre de catégories,
18:41d'osados par exemple, sur les républicains.
18:46Les républicains, il y en a qui sont tout à fait fans de Trump,
18:51mais à la vie, à la mort.
18:52Bon, ceux-là, de toute façon, ne bougeront pas.
18:54Il y en a qui n'aiment pas Trump, qui aimeraient qu'il tweete un peu moins,
18:57mais qui voteront pour lui quand même parce qu'ils sont d'accord
19:00sur un certain nombre de propositions, sécurité, économie, immigration.
19:04Donc voilà, ils peuvent vivre avec.
19:06Il y en a un certain nombre qui ne savent toujours pas.
19:11Mais il y a ce mystère quand même.
19:12Il y en a d'autres qui vont voter démocrate.
19:14Oui, parce qu'il y a ce mystère des Américains conservateurs,
19:17notamment sur les mœurs, et qui votent sans hésiter
19:23pour un personnage qui ne correspond pas, sur le plan personnel en tout cas,
19:28à leur valeur.
19:29Comment vous l'expliquez, ça ?
19:30Alors, un des grands mystères en 2016,
19:35c'était pourquoi est-ce que les évangéliques, en particulier,
19:38votent à 80% pour Donald Trump ?
19:40Ils votent à 80% pour le républicain, plus ou moins.
19:43Et ils ont voté pour Donald Trump, qui est un petit peu l'antithèse
19:46de l'idéal évangélique, parce que c'est une dialectique
19:50de la fin des moyens.
19:51C'est-à-dire qu'il peut leur avoir, et il l'aura eu,
19:54des juges fédéraux qui sont dans leur ligne,
19:56et des juges à la Cour suprême qui sont dans leur ligne.
19:59Le but ultime, c'était de retoquer l'arrêt de la Cour suprême de 1973
20:05sur l'avortement, Roe v. Wade.
20:07Ça a été le cas en 2022, après Trump.
20:09Mais de ce point de vue-là, pour eux, c'est une victoire de Trump.
20:13C'est grâce à Trump que c'est arrivé.
20:14Trump est un petit peu...
20:16C'est pour ça qu'il lui passe un certain nombre de choses.
20:18Laurie Kenton, il y a des personnalités qui s'engagent
20:21dans cette campagne, d'une manière ou d'une autre.
20:23C'est le cas, par exemple, d'Elon Musk, le patron de Tesla,
20:26le patron du réseau social X, aussi.
20:28Il y a aussi des chanteuses, comme Taylor Swift.
20:31Elle n'a pas encore pris partie, mais il y a ses fans,
20:34les Swifties, qui se mêlent de cette campagne présidentielle.
20:37Est-ce que ces personnalités-là font bouger une ligne,
20:40elles font bouger les choses dans cette élection ?
20:43Tous les ans, tous les quatre ans plutôt,
20:45on a le tout Hollywood qui se mobilise pour les démocrates
20:49et très peu pour Kamala, très peu pour les républicains.
20:54Leur fonction principale, c'est de lever des fonds.
20:57C'est nécessaire, mais pas suffisant.
20:59Donc, globalement, ça n'a pas un impact sur les électeurs,
21:02sur la décision des électeurs.
21:04Les électeurs ne se disent pas
21:05« Oh, George Clooney a dit qu'il fallait voter,
21:07Bruce Springsteen a dit qu'il fallait voter,
21:09donc je vais voter ».
21:10Donc, on peut se poser la question de savoir
21:12si quelqu'un d'autre, quelqu'un comme Taylor Swift,
21:14peut avoir cet impact-là.
21:16Taylor Swift sort un petit peu du cadre,
21:19au niveau de l'industrie musicale,
21:21elle est superlative lorsqu'elle vend, etc.
21:24Et puis, on a vu deux choses.
21:26Quand elle dit qu'il faut s'inscrire sur les listes électorales,
21:29le site explose.
21:30Oui, c'est massif après.
21:31Et autre chose, on a vu les médias républicains
21:34devenir complètement fous en janvier et février
21:38parce qu'elle aurait pu s'engager.
21:41Et donc, ils lui ont dit
21:42« Non, non, non, il faut continuer à chanter,
21:43surtout pas de politique ».
21:45Et donc, quand on voit la peur qu'elle peut générer,
21:47elle et pas d'autres,
21:49c'est là qu'on mesure que son impact à elle
21:51peut être, mais pas forcément.
21:53C'est juste elle ou alors par exemple Elon Musk,
21:55quand il accompagne Donald Trump,
21:59quand ils disent tous les deux
22:01qu'ils peuvent même travailler ensemble
22:02au sein de l'administration américaine,
22:04pareil, ça fait bouger des voix ou pas ?
22:06Alors Elon Musk, c'est différent
22:09et ça peut être à deux niveaux.
22:10C'est-à-dire qu'il contrôle un réseau social,
22:12donc il contrôle ce que les gens voient et ne voient pas.
22:14Donc là, c'est quelque chose que Taylor Swift
22:15ne peut pas faire, par définition.
22:17Mais Elon Musk est aussi un de ces entrepreneurs
22:20un petit peu vrais mecs
22:22qui plaît beaucoup à un électorat
22:25à la fois blanc, hispanique et noir
22:27de jeunes hommes entre 18 et 25 ans
22:30qui votent peu et qui pourraient se mobiliser
22:33pour Trump parce qu'ils aiment bien
22:34le côté bad boy de Trump et d'Elon Musk.
22:39Et donc là-dessus, il y a une espèce de connivence
22:41qui fait que Trump les courtise beaucoup
22:44ces jeunes hommes.
22:45Laurie Kenton, on se pose forcément la question
22:47ici en Europe des conséquences de cette élection
22:49très importante le 5 novembre chez nous.
22:51Que ce soit Harris ou Trump,
22:53cette élection, elle aura des conséquences
22:55sur la scène internationale.
22:57On pense notamment évidemment à l'Ukraine.
22:59En fait, c'est difficile de mesurer.
23:03On peut imaginer qu'il y aurait plus de continuité
23:06avec une présidence Harris.
23:08C'est-à-dire que les ruptures seraient moins fortes.
23:11Ça ne veut pas dire qu'on continuerait exactement
23:13la même chose qu'une présidence Biden.
23:16Mais on serait beaucoup plus dans le respect
23:19des alliés.
23:21Au moins dans la forme.
23:23Il y aurait un peu plus de diplomatie du côté Harris.
23:26Là où Trump, par exemple,
23:28dit dès aujourd'hui pendant la campagne
23:30que ce soit sur le conflit en Ukraine,
23:32je réglerai le sujet en 24 heures
23:35ou sur ce qui se passe à Gaza.
23:37J'appellerai Benjamin Netanyahou
23:39tout de suite pour une fin de guerre
23:41le 1er janvier 2025.
23:43Ça, c'est de la parlotte ou alors ça peut vraiment se faire ?
23:45Avec Trump, il faut toujours dissocier
23:47ce qu'il dit et ce qu'il fait.
23:48Il ne faut pas trop faire attention à ce qu'il dit.
23:50Il faut faire attention à ce qu'il fait.
23:52Là, on est en campagne.
23:53Il promet tout à tout le monde.
23:55Et puis, il faut qu'il projette une image
23:57de leader décisif face à des gens
23:59qui sont mous, indécis et inefficaces.
24:01Donc, évidemment, il va dire
24:03qu'il va changer tous les problèmes du monde
24:05en un claquement de doigts.
24:06C'est Donald Trump, après tout.
24:08Ses fans le voient comme une espèce de super-héros
24:10avec des super-pouvoirs.
24:11Donc, ça correspond à ce personnage.
24:12Il peut le dire.
24:13Est-ce qu'il va le faire ?
24:15Il peut essayer.
24:16Mais est-ce que ça va être ?
24:17Est-ce que Netanyahou va dire « oui, maître » ?
24:19Pas sûr.
24:20Mais les autres États regardent quand même.
24:21Et c'est le cas des Russes.
24:22On parle d'ingérence russe pendant ces élections.
24:24Il y a aussi Vladimir Poutine
24:26qui a donné son avis.
24:27Et lui, il soutient Kamala Harris.
24:28Il l'a dit avec un petit sourire.
24:29C'est du bluff.
24:31Je ne suis pas exactement dans la tête de Vladimir Poutine.
24:33J'ai été moi-même un petit peu surpris.
24:35En même temps, ça fait un petit peu
24:37billard à douze bandes, très KGB.
24:41Je ne pense pas que beaucoup d'Américains vont se dire
24:43« Ah, Vladimir Poutine a dit qu'il fallait voter Kamala Harris.
24:45Donc, je vais voter pour Kamala Harris.
24:47Ou je vais voter pour Donald Trump
24:48parce que je n'aime pas Vladimir Poutine. »
24:50Je ne sais pas trop quelle est la volonté derrière ça.
24:53Merci beaucoup, en tout cas, Laurie Quinton,
24:55de nous avoir éclairé ce matin.
24:57Avant ce débat de ce soir,
24:59on en parlera évidemment largement demain matin
25:01sur France Info.
25:02Je rappelle que vous êtes maître de conférence
25:03à l'université Paris-Saclay.
25:05Vous avez aussi signé la préface
25:07du livre Taylor Swift.
25:08On en parlait.
25:09Taylor Swift, histoire d'un phénomène
25:11de Caroline Sullivan
25:12qui vient de paraître aux éditions.
25:14Hors collection.
25:15Merci beaucoup.
25:16Je vous laisse en compagnie de Saliha Braklia.
25:18Le programme des informés dans cinq minutes.
25:20Eh bien, on revient en France
25:21puisqu'il en a parlé pendant sa nomination.
25:23Le nouveau Premier ministre,
25:24Michel Barnier, veut davantage réguler l'immigration.
25:27On tient comme Donald Trump.
25:28Comment compte-t-il s'y prendre ?
25:30Où va-t-il placer le curseur ?
25:31On en parle dans un instant avec Renaud Delis
25:33et ses informés.
25:34A tout de suite sur France Info.