• il y a 3 mois
Jeudi 12 septembre 2024, ART & MARCHÉ reçoit Christophe Person (Galeriste et expert en art contemporain africain) , Yves-Bernard Debie (Directeur, Parcours des mondes) , Cedric Destailleur (Directeur, Galerie Vallois) et Émilie Jolly (Directrice du département d’Art Africain et Océanien, Bonhams Cornette de Saint Cyr)

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Transcription
00:00Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans Art et Marché, votre émission hebdomadaire
00:12consacrée au marché de l'art.
00:14Pour cette première partie de l'émission, nous nous sommes rendus à Parcours des Mondes,
00:18le salon international consacré aux arts d'Afrique, d'Océanie, des Amériques, d'Asie
00:22et d'Archéologie.
00:23Ce salon ouvre ses portes cette semaine et cette fois-ci confronte ses oeuvres anciennes
00:27à des oeuvres d'art plus contemporaines.
00:30Ensuite, nous recevons Émilie Joly, directrice du département d'art africain et océanien,
00:36un département qui vient d'ouvrir ses portes au sein de la maison de vente aux enchères
00:40Bonhams-Cornet de Saint-Cyr.
00:41Elle nous donnera quelques conseils pour commencer sa collection.
00:45Restez avec nous tout de suite, c'est Art et Marché.
00:49Nous nous sommes rendus à la 23ème édition du salon Parcours des Mondes, le salon international
00:56consacré aux arts d'Afrique, d'Océanie, des Amériques, d'Asie et d'Archéologie.
01:01Cette année, l'édition est particulièrement conçue en dialogue avec l'art contemporain.
01:07De plus en plus de collectionneurs font ce parallèle entre l'art contemporain, souvent
01:23africain, et leur collection d'arts premiers.
01:25C'est une espèce de logique qui nous a conduit à avoir de plus en plus d'arts contemporains
01:31au parcours des mondes.
01:32Il faut bien voir le travail des marchands.
01:34Vous avez des marchands qui, de plus en plus, ont travaillé cette confrontation.
01:38Ça remonte par capillarité jusqu'aux collectionneurs, mais regardez les ventes publiques par exemple.
01:47Regardez Christie's, très souvent ils confrontent de l'art premier et de l'art contemporain
01:53ou de l'art moderne d'ailleurs.
01:54Donc vous avez ce travail des marchands qui va dans ce sens aussi.
01:56J'aime à vous dire que ce n'est que le goût des collectionneurs qui évolue, mais
02:00il y a vraiment un véritable travail du marché.
02:02Si on prend l'art contemporain africain, par exemple, il est de plus en plus et de
02:08mieux en mieux représenté, tout simplement.
02:10Pourquoi est-ce que tel et tel type d'art est en quelque sorte à la mode ? C'est parce
02:16qu'il est très bien travaillé et très bien présenté par des galeries.
02:19Je crois que l'art contemporain, pour ce qui est de l'art contemporain africain,
02:22est vraiment de mieux en mieux travaillé.
02:34Nous, dans le cadre de la galerie d'art contemporain moderne et africain, notre volonté aussi
02:39c'est d'essayer d'établir des liens entre les collectionneurs d'art classique africain,
02:43d'art primitif et aussi les collectionneurs d'art contemporain et d'essayer de se rendre
02:48compte qu'il y a eu toute une création qui est un petit peu le chaînon manquant
02:51auquel on n'a pas pensé au cours de ces dernières années.
02:54C'était la raison pour laquelle on a voulu présenter cet artiste à Maiviré-de-Lau.
02:58Là, ce qu'on va essayer de proposer, c'est de montrer qu'en Afrique, il y a aussi un
03:03art qui peut être considéré comme un art moderne, qui puisse peut-être ses inspirations
03:08dans les mêmes sources, mais avec une représentation qui est radicalement différente, comme on
03:11le voit ici sur le stand.
03:12Ça a toujours été notre focus, on va dire, notre spécificité, de représenter pendant
03:20le parcours des mondes des artistes contemporains, et généralement c'est des artistes contemporains
03:24béninois.
03:25Et cette année, exception à la règle, nous présentons des artistes cubains, parce qu'en
03:31fait ça leur fait un peu comme une bulle d'oxygène en fait, c'est-à-dire qu'ils
03:35voient beaucoup les arts africains anciens, les arts océaniens anciens, et quand ils
03:39viennent ici, ça montre déjà la continuité de la création artistique dans ces pays-là,
03:45dans ces régions-là.
03:46Et c'est toujours très bien reçu, il y a toujours une vraie curiosité, et il y a
03:49des collectionneurs d'arts africains ou océaniens anciens qui justement découvrent
03:55la scène contemporaine, et qui très souvent acquièrent des œuvres à cette occasion.
04:00C'était notre reportage consacré à Parcours des Mondes, et tout de suite, c'est l'interview
04:04de la semaine.
04:09La maison de vente aux enchères Bonhams-Cornet de Saint-Cyr vient d'ouvrir un département
04:14d'art africain et océanien à Bruxelles, et profite de Parcours des Mondes pour exposer
04:19à Paris les œuvres constituant cette première vente qui, elle, aura lieu en décembre.
04:24Émilie Jolie, fraîchement nommée directrice de ce département, est avec nous, merci beaucoup.
04:29Merci Sybille.
04:30Alors, première question, donc ce département, ça fait un mois qu'il a été inauguré,
04:37pourquoi avoir ouvert ce département, pourquoi Bonhams a fait le choix d'ouvrir ce département
04:41maintenant ?
04:42Alors, Bonhams, ce qu'il faut savoir, c'est que c'est vraiment un réseau global de
04:46maisons de vente aux enchères, un peu partout, internationalement, et c'est également la
04:52maison de vente aux enchères qui a la plus grande diversité de départements ou de catégories
04:57de collections.
04:58Et donc, dans ce cadre de diversification, ils ont pensé bon d'ouvrir un département
05:04d'art d'Afrique et d'Océanie en Europe, parce qu'il y en avait déjà un aux Etats-Unis,
05:10donc voilà.
05:11Mais c'était pour profiter d'une conjoncture, ou alors vous aviez des objets que vous avez
05:15réussi à rassembler et qui étaient particulièrement intéressants, donc vous avez dit que vous
05:18pouviez lancer un département ?
05:19Alors, je pense que l'Europe, c'est intéressant pour les arts d'Afrique et d'Océanie, parce
05:23que ça a été et ça reste toujours la place centrale du marché, c'est-à-dire que c'est
05:29là qu'il y a la plus grande concentration de collectionneurs, d'acteurs tels que les
05:34marchands, les intermédiaires, les maisons de vente, les institutions.
05:37Et donc, comme il y a une grande concentration d'objets, disons, en Europe, ça fait tout
05:43à fait sens de développer un département ici.
05:46Et là, vous l'avez développé à Bruxelles, est-ce que par rapport à Paris, Bruxelles
05:51est vraiment une place de choix, ou Paris c'est à peu près la même chose ? C'est
05:56vrai que Parcours des Monts est à Paris ?
05:57Oui.
05:58Et c'est vraiment connu aussi comme étant une institution et la place peut-être traditionnelle
06:04de ces arts ?
06:05Oui, tout à fait.
06:06Donc Bruxelles est aussi une place importante, il y a aussi une grande concentration de
06:09marchands et de collectionneurs, mais pour être tout à fait honnête, Paris reste la
06:14capitale, si on peut dire, des arts primitifs.
06:17C'est Paris qui accueille, comme vous l'avez dit, la plus grande foire internationale dans
06:22le milieu.
06:23C'est souvent aussi à Paris qu'il y a les grandes ventes.
06:26Mais Bruxelles reste un choix stratégique, de par le fait qu'il y a tous ces collectionneurs,
06:31mais aussi il y a tellement d'acteurs à Paris, c'est intéressant de peut-être faire ça
06:36à côté.
06:37Bruxelles, ce n'est pas très loin non plus.
06:38Et puis ensuite, c'est ça aussi la qualité entre guillemets du réseau Bonhams, c'est
06:45étant donné qu'il y a des salles de vente un peu partout, notamment à Londres, à New
06:49York, à L.A., à Paris, si maintenant on se retrouve face à une collection qui fait
06:54beaucoup plus sens de vendre, que ce soit à Paris ou à Londres, on aura l'opportunité
06:59de le faire.
07:00Même chose pour exposer les objets d'ailleurs.
07:01Et là, c'est vrai qu'on parle de Parcours des Mondes, et vous présentez les œuvres
07:06d'art pour une future vente en ce moment même, c'est pour attirer quel type de collectionneurs ?
07:10Est-ce qu'il y a des particularités liées à Parcours des Mondes et à Paris ?
07:15Je crois que c'est juste la plus grande concentration annuelle des collectionneurs.
07:20Les collectionneurs américains, par exemple, viennent en général à Parcours des Mondes.
07:23Et donc, c'est une opportunité un peu unique pour montrer des objets.
07:27Maintenant, ce n'est pas toute la vente qu'on va pouvoir montrer, parce que, comme
07:31vous avez dit, on a lancé le département il y a un mois, donc c'est encore assez
07:34frais.
07:35On parle d'une sélection d'objets, on va montrer une trentaine d'objets.
07:38On est toujours en train de chercher des pièces et sourcer des lots.
07:44Mais c'était à la fois un argument pour avoir des objets, et puis aussi pour lancer
07:50le département, entre guillemets, en grand pont.
07:53Et justement, pour cette première vente, qu'est-ce que vous allez présenter dans
07:56ces 30 objets dont vous parliez ?
07:58Qu'est-ce qu'il y a comme figure de proue ?
08:01Est-ce qu'il y a quelque chose de particulièrement notable ?
08:03Alors oui, il y a un moko, donc c'est une statue d'homme lézard de l'île de Pâques.
08:09Ça, c'est vraiment, on parlait du marché un peu plus tôt, c'est vraiment le type
08:13d'objet que recherche tout collectionneur, dans le sens où ça va rassembler différents
08:18critères, qui sont l'authenticité, heureusement, mais un objet qui est rarissime, parce que
08:26tout ce qui est objet de Polynésie, ce n'est pas des objets qu'on retrouve facilement
08:30sur le marché.
08:31Les hommes lézards de l'île de Pâques, on en connaît une cinquantaine, en fait,
08:35donc c'est encore plus rare.
08:37Et puis surtout, on fête cette année le centenaire du manifeste du surréalisme d'André Breton,
08:42et c'est un objet qui est appartenu à André Breton, donc une provenance qui est fantastique.
08:47Et donc ça, c'est vraiment, je dirais, à la fois les qualités esthétiques, l'authenticité,
08:53et puis une provenance, donc un objet avec une histoire, ça c'est vraiment les ingrédients
08:58qui font qu'un objet a de la valeur sur le marché actuel, ou en tout cas ce que les
09:02collectionneurs recherchent.
09:03Et là, vous, il y a quand même pas mal d'objets venant d'Océanie, est-ce que c'est un chemin
09:10qui est porteur ? C'est vrai qu'on a encore vu beaucoup de très grandes ventes d'arts
09:14provenant d'Afrique.
09:16Qu'est-ce que vous pouvez dire sur le développement maintenant de l'art océanique ?
09:19Alors, je crois que l'art d'Océanie était tout aussi apprécié, même déjà au début
09:24du XXe, ne fût-ce que par les artistes comme Breton, Picasso, Braque, Derain, pour ne citer
09:31que ceux-là.
09:32Mais c'est clair que les prix les plus forts en général sont réalisés par des pièces
09:36issues de l'Afrique.
09:37Maintenant, quand on voit lors d'une dernière grande vente qui a eu lieu récemment, la
09:42collection Barbier-Moller, qui est vraiment une collection très importante, il y a différents
09:48objets.
09:49Tous les objets qui ont été préemptés étaient des objets d'Océanie.
09:51Donc, il y a peut-être une tendance dans le marché, mais l'Afrique continue à réaliser
09:57des prix très forts.
09:58Est-ce qu'il y a des œuvres qui pourraient intéresser des jeunes collectionneurs ? C'est
10:02vrai que je pense souvent à eux en me disant qu'est-ce qui pourrait les intéresser et
10:06aussi quels conseils vous pourriez donner pour qu'ils aient un regard peut-être avisé
10:10et formé pour analyser les œuvres qui sont en phase 2 ?
10:15Alors d'abord, je dirais de discuter avec des acteurs du marché.
10:20Il faut savoir qu'on a la chance d'être dans un milieu où les gens sont tous vraiment
10:23passionnés.
10:24Ils ont un intérêt qui est réel pour les objets, leur contexte, leur histoire.
10:30Et souvent, c'est des gens qui aiment bien partager et donc il faut profiter de cette
10:33richesse et donc échanger que ce soit avec d'autres amateurs, des marchands, des spécialistes
10:38dans les maisons de vente.
10:39Il y a aussi pas mal en Europe de musées avec des collections fabuleuses et donc aller
10:45voir les objets dans les musées, aller aux expositions thématiques et consulter tous
10:51les ouvrages de référence qu'il y a sur le sujet et puis surtout aller dans les maisons
10:57de vente aux enchères.
10:58Pourquoi je dis ça ? C'est parce qu'il y a une variété d'objets qui est très
11:02diverse.
11:03Il y a des objets aussi souvent à des prix très différents.
11:07En tout cas, c'est notre ambition chez Bonhame, c'est vraiment de présenter des
11:10objets qui ont des prix plus accessibles mais toujours de qualité avec des objets
11:15comme le Moko de Breton dont on a parlé qui a une estimation basse plus importante mais
11:21parce qu'elle reflète l'importance de la pièce en tant que telle.
11:23Là, vous allez voir des objets avec toutes sortes de prix et de différentes zones géographiques
11:30et souvent vous allez avoir l'opportunité de manipuler les objets, ce qui est extrêmement
11:33important dans le milieu et vous ne pouvez pas toujours faire ça.
11:37Pourquoi est-ce que vous conseilleriez de manipuler les objets ?
11:40Parce qu'on a un rapport sensible, il faut les prendre en main, voir quel bois c'est,
11:48l'odeur que ça a et donc c'est important de pouvoir avoir les objets en main pour vraiment
11:53se rendre compte de la patine, de la qualité.
11:56Donc ça, c'est une opportunité qu'on a en maison de vente et puis ça nous donne
11:59aussi l'opportunité d'avoir une idée des prix que réalisent les objets.
12:05C'est des prix qui sont plus visibles que les prix qui sont en galerie.
12:08On n'a pas toujours le courage de demander à un marchand quel est le prix d'une pièce
12:13et puis le prix affiché n'est pas toujours non plus le prix vendu.
12:15Donc, il y a cette espèce de transparence qui permet de suivre le marché et puis aussi
12:22de se créer un œil justement en voyant beaucoup d'objets.
12:25Là, je sais que dans votre vente, si je prends les fourchettes basse, c'était de 5 000 à
12:3180 000 à peu près ?
12:33Alors, ça dépend parce que ça, c'était probablement les pièces qu'on amène ici
12:37qui sont un peu des pièces plus importantes, mais il y a moyen de trouver aussi des objets
12:43pour, je dirais, le minimum, c'est autour de 1 000 euros et puis après, il n'y a pas
12:49de limite.
12:50Et qu'est-ce que vous pourriez dire, justement, pour ces jeunes qui pourraient être un peu
12:54frileux à l'idée de se tourner vers des arts qui sont extra-européens parce que,
12:58justement, il y a eu tellement de choses dites sur les provenances, etc.
13:01Qu'est-ce que vous pourriez leur dire pour les rassurer ?
13:03C'est clair que la provenance est de plus en plus importante et maintenant, c'est à
13:09nous d'avoir cette rigueur et de, justement, quand on avance une provenance, de pouvoir
13:14la documenter et la prouver.
13:16Mais ce n'est pas pour autant qu'il faut être frileux.
13:18Je veux dire, toutes les maisons de vente aux enchères et les marchands font ce travail
13:22et je crois que c'est un travail qui, maintenant, est inévitable.
13:24Et donc, il ne faut pas que ça rende les gens frileux.
13:29C'est justement un monde qui s'ouvre aux jeunes collectionneurs, qui est tout à fait
13:34différent.
13:35C'est des objets qui ont servi dans un contexte rituel, donc qui n'avaient pas été faits
13:41avec un but purement esthétique et donc, il y a toute une histoire, toute une anthropologie,
13:45toute l'histoire de culture là-derrière qui sont extrêmement intéressantes.
13:49Merci beaucoup pour votre intervention, Émilie Joly.
13:52Je rappelle que vous êtes directrice du département d'art africain et océanien
13:55chez Bonhams Cornet de Saint-Cyr et quant à nous, on se retrouve la semaine prochaine
13:59pour un nouveau numéro d'Art et Marché.