L'Invité du 13h (13h - 9 Septembre 2024 - Marie LÉCUYER et Olivier RICHEFOU)
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00:00Les premiers ministres changent, pas les défis auxquels la France est confrontée.
00:03Par exemple, le vieillissement de sa population, les françaises et français âgés de 75
00:08à 84 ans seront 6.100.000 en 2030 contre 4.100.000 en 2020, les plus de 65 ans, plus
00:17nombreux que les moins de 15 ans ! Les générations issues du baby-boom ont vécu plus longtemps
00:21et une partie d'entre elles sont en train de devenir dépendantes, ce qui pose de très
00:25nombreuses questions financières, notamment on ne compte plus les EHPAD en situation de
00:29déficit alors que les EHPAD tiennent à partir de demain leurs assises nationales.
00:34Et nous en parlons avec nos deux invités.
00:36Olivier Richefou, bonjour.
00:37Bonjour.
00:38Vous êtes le président UDI, c'est-à-dire centriste, du département de Mayenne, merci
00:42d'être avec nous.
00:43Nous sommes également en ligne avec Marie Lécuyer, bonjour.
00:46Bonjour.
00:47Vous êtes directrice d'EHPAD public dans le département du Morbihan, vous êtes également
00:51la présidente régionale de la Fédération nationale des associations de directeurs d'établissements
00:56et services pour personnes âgées.
00:59C'est important pour tous les deux, les questions, les témoignages des auditeurs et des auditrices
01:03de France Inter, ils sont déjà très nombreux ces appels, vous pouvez être encore plus
01:07nombreux, 0145 24 7000, vous passez également via l'application France Inter, nous sommes
01:13en ligne avec Virginie.
01:14Bonjour Virginie.
01:15Bonjour.
01:16Bonjour Virginie, vous êtes en ligne de Montpellier, merci de nous avoir appelé, je crois que
01:24vous avez peu de temps parce que vous êtes aide-soignante en EHPAD et vous travaillez
01:26aujourd'hui.
01:27C'est ça, tout à fait.
01:29Nous vous écoutons.
01:30Je suis aide-soignante en EHPAD depuis 26 ans, dans la même EHPAD, donc depuis 26 ans
01:37je vois la dégradation qui s'opère dans nos EHPAD, donc je voulais dire, les charges
01:43de travail que nous avons sont de plus en plus difficiles, c'est-à-dire avec une charge
01:48de travail énorme, avec une prise en charge des personnes qu'on ne peut pas faire correctement
01:53parce qu'on nous en demande toujours plus, et puis une peu de reconnaissance pour le
01:58métier d'aide-soignante, autant gouvernementale que dans nos EHPAD, avec un salaire qui n'est
02:05pas à la hauteur du travail qu'on effectue tout au long de la journée.
02:09Voilà.
02:10Je peux vous demander à combien s'élève votre salaire Virginie ?
02:12Alors moi je suis à 80% parce que je ne peux plus tenir les cadences de plein temps, parce
02:18que j'arrive vers la cinquantaine, donc là pour le moment j'ai un salaire de 2680
02:27euros net par mois.
02:28Après 26 ans de carrière, c'est ça ?
02:31Tout à fait, oui.
02:32J'ai 26 ans d'ancienneté dans le même établissement.
02:36Merci pour ce témoignage Virginie que je soumets à Marie Lécuyer, des conditions de travail
02:43qui se dégradent, est-ce que malgré la bonne volonté des directeurs, directrices d'établissements
02:47que vous représentez Marie Lécuyer, c'est la pente sur laquelle on est depuis quelques
02:50années ?
02:51Oui tout à fait et malgré aussi la bonne volonté du personnel que je voudrais souligner
02:56et qui a été relevé par cette soignante, aujourd'hui on a urgemment besoin d'une réforme
03:01et d'une réforme ambitieuse avec des moyens financiers parce que vous l'avez rappelé,
03:06beaucoup et la majorité des établissements sont en déficit et des déficits qui s'aggravent
03:11et parce qu'il faut plus de personnel, plus de personnel au lit des résidents, dans l'accompagnement
03:16quotidien des résidents et aussi plus de personnel pour justement combler cet absentéisme
03:23et cet épuisement des professionnels qui sont déjà en place, qui tiennent le système
03:28à bout de bras mais qui vont finir par craquer.
03:30Olivier Richefou, le problème principal c'est qu'on n'arrive pas à recruter, à trouver
03:34du personnel ou bien que les établissements n'ont pas d'argent tout simplement pour cela ?
03:38J'allais dire les deux mots capitaine, on est dans une situation où le mur démographique
03:44arrive.
03:45On sait qu'à partir de 2030, vous avez rappelé les chiffres, le besoin va être colossal
03:50et on a besoin d'avoir des établissements à la hauteur de l'attente de notre population.
03:55C'est-à-dire que la situation est déjà très difficile, ce que nous décrit Virginie,
03:59ça va être encore plus grave dans les années qui viennent ?
04:01Si on ne fait rien, ça sera encore plus grave et donc il est important de réformer et de
04:06mettre à niveau notre organisation pour accompagner le grand âge en donnant plus de moyens aux
04:13EHPAD.
04:15Aujourd'hui, un taux d'encadrement, un taux de participation d'environ 0 aux 6 personnes
04:20pour un résident, c'est insuffisant parce que le profil des personnes en EHPAD a changé.
04:24Aujourd'hui, les personnes en EHPAD sont beaucoup plus dépendantes qu'elles ne l'étaient
04:28il y a 15 ou 20 ans.
04:29Quand ma grand-mère était en EHPAD, ce n'est plus la même chose qu'aujourd'hui où c'est
04:33ma maman qui est en EHPAD et donc il faut absolument renforcer les moyens, ce qui suppose
04:39de redéfinir le profil des établissements et de sans doute déployer aussi des moyens
04:44pour mieux accompagner à domicile parce que c'est le souhait des personnes âgées.
04:48Tout ça, c'est 10 milliards par an.
04:50On connaît le montant, maintenant, mettons-nous autour de la table et faisons cette grande
04:56loi que l'on attend avec impatience et mettons-nous d'accord sur les moyens financiers supplémentaires
05:00et ça passera par une revalorisation des métiers bien évidemment.
05:0410 milliards d'euros par an, c'est considérable, après on fait des choix, la politique ce
05:08sont des choix.
05:09Où est-ce qu'on peut les trouver Olivier Richelieu ?
05:11On ne les trouvera pas dans une seule poche, très vraisemblablement, et ce n'est pas l'État
05:15qui en fonction de sa situation pourra seul le faire, mais il devra y contribuer bien
05:20évidemment et ça sera le rôle des agences régionales de santé d'être doté de moyens
05:25supplémentaires.
05:26Et puis ça supposera aussi la participation de nouveaux systèmes de financement.
05:32Je pose le sujet, nous avons créé une journée de solidarité lorsqu'il y a eu cette grande
05:37crise il y a 20 ans, la question peut se poser, doit se poser, il faudra y répondre
05:42de dire pourquoi pas une deuxième journée de solidarité, il y a aussi des systèmes
05:46assurciels.
05:47Un jour férié où l'on travaillerait mais où l'on ne toucherait pas le fruit de son
05:50travail.
05:51J'ai dit n'importe quoi le jeudi de l'Ascension, il n'est plus férié, on travaille, l'indépendante
05:55côte, on travaille et l'argent est au bénéfice de la solidarité de nos plus âgés.
06:00Question de Victor qui nous appelle du Val-de-Marne, bonjour Victor.
06:04Oui bonjour monsieur, bonjour Jérôme Cadet, merci à vos invités.
06:08Je voulais simplement poser la question de la fausse bonne idée de la seconde journée
06:14de solidarité.
06:15On en parle à l'instant, pourquoi ça vous paraît être une fausse bonne idée Victor ?
06:18Écoutez, je pense que déjà même les auxiliaires de vie, tous les personnels travaillent beaucoup,
06:22y compris les dimanches et les jours fériés, sans compter, parce que ce sont essentiellement
06:27des femmes, le temps de travail à temps partiel imposé, avec des pauses qui n'ont
06:34pas lieu, ils ne peuvent même pas rentrer chez elles.
06:35Alors écoutez, je pense que là, il faut vraiment se mettre, comme dit le monsieur,
06:39autour de la table, moi je veux bien, mais alors recruter du personnel, mieux les payer,
06:43et quand j'entends que les maisons de retraite sont en déficit avec des groupes privés
06:49comme le groupe Corian, qui se fait vraiment de l'argent sur le dos, je dis bien sur
06:56le dos et sur le régime alimentaire, sur les souffrances des personnes âgées, je
06:59trouve ça totalement scandaleux.
07:01À un moment donné, chacun doit prendre ses responsabilités.
07:03Moi, en tant que citoyen, je vais prendre mes responsabilités en payant mes impôts,
07:07l'État doit prendre ses responsabilités, mais simplement il faut mettre à genoux
07:11ces gens qui pillent, qui pillent dans les caisses de l'État.
07:14Merci Victor pour ce témoignage, Olivier Richoud, je vous fais réagir.
07:18Il y a de l'argent dans les groupes privés, nous dit Victor.
07:21Oui, vous savez, un département comme le mien, il y a trois EHPAD privés pour 70 EHPAD
07:26publics, donc le sujet n'est pas seulement de mettre à contribution les groupes privés,
07:30il est de surveiller l'utilisation de l'argent public par les groupes privés et ça c'est
07:34naturel et merci à Victor Castaner de nous avoir alertés et des décisions ont été
07:39prises, il faut qu'elles soient suivies des faits.
07:40Dans son livre Enquête, qui avait dénoncé les mauvais traitements dans de très nombreux
07:45groupes privés.
07:46Sur son livre Les Faussoyeurs.
07:47Non, je crois qu'un des sujets complémentaires par rapport aux sources de financement, c'est
07:52aussi la question du système assurantiel.
07:54Nous nous sommes tous assurés pour un certain nombre de risques, le risque de dépendance
07:59c'est un risque comme un autre et il pourrait être judicieux de prévoir un système assurantiel
08:04permettant d'avoir un PQ ou en tout cas des revenus complémentaires quand on arrive à
08:08l'âge de la grande dépendance pour pouvoir faire face aussi aux coûts qui progresseront
08:12nécessairement.
08:13Donc ça veut dire mettre de l'argent beaucoup plus jeune pour anticiper sa dépendance future.
08:18Marie Lécuyer, vous nous expliquez il y a un instant que vos établissements fonctionnaient
08:22avec du déficit, comment est-ce que vous pouvez tenir dans ces conditions ? Vous pouvez rendre
08:28un budget qui n'est pas à l'équilibre à la fin de l'année ?
08:29Alors oui, de fait c'est ce qui se passe, concrètement une très grande majorité d'établissements
08:35est en déficit depuis deux ans et on vit sous perfusion depuis deux ans l'État via
08:40des aides exceptionnelles et les départements parce que beaucoup de départements ont mis
08:43la main à la poche ces deux dernières années pour venir en soutien des établissements
08:47et des services du grand âge.
08:49Seulement les départements ne vont pas pouvoir continuer à faire ça et on ne peut pas vivre
08:55éternellement sous perfusion.
08:56Il faut, comme l'a dit M. Richelieu, des moyens pérennes, effectivement je suis d'accord
09:00sur le chiffrage, on avait chiffré à 10 milliards d'euros à la FNADEPA il y a quelques
09:04années, aujourd'hui on serait peut-être à même 13-14 milliards compte tenu de l'inflation
09:10mais il faut des moyens pérennes parce qu'aujourd'hui on ne vit qu'avec des crédits exceptionnels
09:14et que les établissements arrivent au bout de leurs réserves et certains commencent
09:17déjà à fermer.
09:18M. tout de suite parlait des établissements…
09:20Vous avez des exemples ? Dans votre région peut-être ?
09:23Dans notre région on a quelques établissements qui ont fermé, des petits établissements,
09:29parfois des établissements publics qui dépendaient de CCS parce que la commune, le département
09:34n'a plus de sous à venir mettre pour éponger la dette et c'est catastrophique pour les
09:40personnes âgées de la commune et pour le personnel qui a employé.
09:43Et aujourd'hui on est arrivé au point de rupture, au point de bascule et si on attend
09:48encore deux ans, trois ans, il sera trop tard.
09:50On est un peu comme dans le réchauffement climatique, c'est-à-dire que tout le monde
09:54sait que la vague démographique arrive, vous l'avez très bien dit, on ne prend pas les
09:57moyens suffisants et là on est au point de rupture et si on n'agit pas maintenant ce
10:01sera trop tard.
10:02Enjeu de ressources, enjeu financier aussi pour les familles.
10:06Bonjour Catherine.
10:07Oui bonjour, bonjour à toutes et à tous.
10:09Vous nous appelez du département de l'Essonne ?
10:11Tout à fait, merci.
10:12Votre maman je crois est en EHPAD ?
10:15Ma maman âgée de 98 ans et 11 mois est en EHPAD depuis bientôt deux ans, ma maman
10:20est en toute petite retraite et pour subvenir aux frais d'établissement nous sommes obligés
10:26mon mari et moi de faire un prêt.
10:28Nous payons actuellement 1100 euros par mois pour que ma maman puisse rester dans cet établissement.
10:34Voilà où nous en sommes aujourd'hui.
10:36Nous avons gardé ma maman à domicile pendant 15 ans.
10:41Et maintenant ça n'est plus possible et donc vous êtes obligé de contracter ce prêt ?
10:45Voilà, donc jusqu'à maintenant nous avons tenu, nous avons tenu, nous avons tenu et
10:49nous avons appelé notre banque la semaine dernière qui était assez surprise de notre demande.
10:54Nous avons dit que c'était pour une auto, une voiture, des travaux.
10:56On lui a dit non.
10:58On lui a dit le pourquoi.
11:00Merci Catherine pour ce témoignage.
11:01Marie Lécuyer, est-ce que ça se produit régulièrement pour les familles que vous connaissez dans votre EHPAD à Vannes ?
11:08Alors non, je suis un petit peu surprise de la situation mais il y a différents types d'établissements.
11:15Dans les établissements comme les miens qui sont habilités à l'aide sociale,
11:19à partir du moment où ni le résident ni ses enfants n'ont les ressources suffisantes pour financer le séjour,
11:25on fait un dossier de demande d'aide sociale au département
11:28et le département prend en charge tout ou partie des frais de séjour.
11:32Maintenant les situations sont différentes selon chaque département.
11:35Je ne connais pas la situation en Essonne et il faut quand même que l'établissement soit habilité à l'aide sociale.
11:40Je conseillerais à cette dame de vérifier si oui ou non l'établissement où est hébergé sa maman est habilité à l'aide sociale
11:47et si c'est le cas à faire une demande de dossier d'aide sociale
11:50parce qu'il est inenvisageable que les familles doivent souscrire des prêts pour financer les établissements.
11:56Olivier Richefou sur ce point, vous qui présidez le département de la Mayenne.
11:59Rien d'autre à ajouter, ce que vient de dire Marie Lécuyer est parfait.
12:01C'est la bonne démarche à accomplir.
12:03Nous nous accompagnons plus de 1500 personnes âgées dans le département qui n'ont pas les moyens.
12:08Les retraites en milieu rural sont assez modestes.
12:11Mais il faut que l'établissement soit habilité.
12:13La totalité des établissements publics le sont.
12:16En revanche, les établissements privés, lucratifs ne le sont pas toujours et c'est peut-être le cas de madame.
12:20Plus de 10 milliards d'euros à trouver par an, nous dites vous.
12:2213-14 nous dit Marie Lécuyer.
12:24Qui doit porter l'effort en priorité ?
12:27Les actifs qui sont de moins en moins nombreux par rapport aux retraités ?
12:32L'effort sera collectif, ça ne viendra pas que d'une seule poche.
12:35Sans doute que les prix vont augmenter.
12:38Les familles devront à ce titre-là y contribuer.
12:41Il faut sans doute trouver des solutions qui mobilisent le système assurantiel.
12:46Sans doute aussi la collectivité de ceux de nous tous qui travaillons encore.
12:51C'est un sujet pour lequel suffisamment de rapports existent pour qu'on prenne enfin des décisions.
12:56Vous êtes le référent sur ce sujet pour l'association des départements de France.
12:59Est-ce que vous accepteriez de rentrer au gouvernement pour porter cette réforme, Olivier Richefou ?
13:03En tout cas, il faut que des gens rentrent au gouvernement sur ce sujet.
13:06Et ils restent. Parce qu'en trois ans, j'ai dû avoir quatre intellectuels différents sur le sujet.
13:11Et ça devient peut-être un peu fatigant par moments.
13:14Merci à tous les deux d'avoir participé à ce 13-14 aujourd'hui.
13:18Marie Lécuyer, directrice d'EHPAD public à Vannes dans le Morbihan.
13:21Merci également à Olivier Richefou d'avoir été avec nous.
13:24Président UDI du département de la Mayenne.
13:2613h45 sur Inter.