La grande interview : Linda Kebbab

  • il y a 11 heures
Policière et secrétaire nationale du syndicat de police Unité SGP Police-Force Ouvrière, Linda Kebbab était l’invitée de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.

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Transcript
00:00Bonjour Lida Kebab. Bonjour. C'est votre grande interview sur CNews et Europe 1.
00:04Bienvenue à vous. Vous êtes policière, secrétaire nationale du syndicat Unité.
00:08Vous êtes l'auteur du livre « Guardienne de la paix et de la révolte ».
00:11On va en parler à la fois de la paix et de la révolte, mais tout d'abord je
00:14voudrais qu'on démarre cet entretien par ce qui s'est passé hier au Chenet,
00:16où un policier municipal a été violemment percuté après un refus d'obtempérer.
00:22Le choc a été d'une très grande violence. Le policier est projeté sur plusieurs mètres.
00:26On va entendre l'une de ses collègues hurler, choquée après ce qui s'est passé.
00:30Je préviens que la vidéo peut évidemment heurter ou choquer certains d'entre vous.
00:34Regardez et écoutez.
00:35Le policier a été transporté à l'hôpital en urgence relative.
00:49Fort heureusement, ces jours ne sont pas en danger.
00:51Le suspect qui a été interpellé a transporté une importante quantité de drogue.
00:55Gérald Darmanin, encore ministre de l'Intérieur, a réagi sur X.
00:58Est-ce qu'on peut encore parler, Linda Kebab, d'un refus d'obtempérer ?
01:02Comme je l'ai dit, c'est une volonté manifeste, consciente, délibérée de tuer.
01:07Que ceux qui nous écoutent ou nous regardent comprennent qu'un refus d'obtempérer,
01:10c'est le fait de ne pas respecter l'injonction d'un policier de s'arrêter pour se soumettre à un contrôle.
01:15Il y en a un toutes les 20 minutes, sauf que tous ne sont pas accompagnés,
01:19comme sur ces images, d'une tentative de meurtre ou d'un meurtre.
01:23Il y a quelques jours, nous rendions hommage à un gendarme, M. Comines.
01:28Et puis, aujourd'hui, on a affaire à un miraculé.
01:30Ce policier municipal est un miraculé, compte tenu du choc.
01:33Absolument. Je veux dire, le bruit qu'on entend, malheureusement pour nous, est familier,
01:39parce que beaucoup de policiers ont connu sur la voie publique des collègues qui ont été percutés.
01:44Et évidemment que lorsque l'on parle à chaque fois des tentatives de domicile sur les forces de l'ordre,
01:48les policiers, les gendarmes, les policiers municipaux, les policiers nationaux,
01:52à l'occasion d'un refus de tempérer, il y a, je pense, dans l'imaginaire collectif,
01:56quelque chose d'un peu fictif, quelque chose qui manque de concret.
01:59Et là, on voit clairement une voiture qui percute un homme,
02:02comme on l'a vu il y a quelques jours lors du drame qui a coûté la vie à M. Comines, à ce gendarme.
02:08Là, il faut que l'opinion publique se rende compte qu'un refus de tempérer, ce n'est pas anodin.
02:13Ce n'est pas seulement refuser l'injonction, non, c'est tenter par tout moyen de fuir à ses obligations,
02:19quitte à tuer la vie humaine qui demande de s'arrêter.
02:21Qu'est-ce que ça dit de la personne, de l'individu ?
02:23Je sais que le profil ne vous surprend pas.
02:25Il a été interpellé avec une grande quantité de stupéfiants.
02:28Il est connu de services de police.
02:31Il a énormément, je crois qu'il a 17 mentions sur le fameux fichier des...
02:3717 en judiciaire.
02:37Effectivement.
02:39Qu'est-ce que ça dit de sa manière d'appréhender la police aujourd'hui,
02:41quand il fonce comme ça délibérément sur un agent ?
02:44Eh bien, ça vient répondre finalement à ces défaillances que l'on vient trop souvent dénoncer.
02:48C'est-à-dire que des refus de tempérer, je vous l'ai dit il y a quelques instants,
02:51il y en a un toutes les 20 minutes, toutes les 30 minutes,
02:53tous ne font pas l'objet d'une tentative d'obécite.
02:55Beaucoup de personnes, même des personnes dites lambda,
02:58on rappelle quand même que le refus de tempérer est un délit,
03:00qu'il faut quand même se soumettre aux injonctions des policiers et des gendarmes.
03:03Mais néanmoins, on a parmi les gens qui commettent des refus de tempérer,
03:07des personnes qui font demi-tour, qui tentent en tout cas de fuir,
03:09sans nécessairement, sciemment mettre en danger la vie
03:12aussi bien de ceux qui demandent l'arrêt que les usagers de la route.
03:16Là, en revanche, on est sur autre chose.
03:18On est sur ces personnes qui ont peut-être peu d'intérêt pour la vie humaine,
03:21mais surtout qui s'inscrivent dans un parcours délinquant.
03:23Vous avez cité le fait qu'il avait 17 mentions,
03:26non pas dans son casier judiciaire, mais dans les fichiers de police.
03:28La nuance est importante, c'est pour ça que je vous l'ai précisé.
03:30Oui, c'est très important.
03:31Donc, ça n'a pas entraîné condamnation.
03:33Écoutez, je ne veux pas radoter, mais je pense que ceux qui nous écoutent
03:36et nous regardent savent que qui dit interpellation, même en flagrant délit,
03:39qui dit enquête qui met en avant des faits impliquant une responsabilité,
03:45ne dit pas toujours condamnation.
03:47On a tout un processus aujourd'hui judiciaire
03:49où la condamnation n'arrive qu'en tout bout de chemin et malheureusement souvent trop tard.
03:54On est sur le parcours délinquant typique.
03:55Le parcours délinquant face auquel il n'y a pas eu de choc d'autorité,
03:58et notamment le choc, comme j'en appelle souvent de mes voeux,
04:01de ces peines d'emprisonnement très courtes,
04:04des peines d'emprisonnement qui ne désociabilisent pas et durant lesquelles,
04:08parce qu'aujourd'hui le système pénitentiaire en France est aussi en faillite,
04:10durant lesquelles on pourrait, dans peut-être une utopie,
04:15apporter à ces personnes le choc nécessaire pour éviter,
04:18en sortant, qu'ils ne soient pires qu'au moment où ils sont rentrés.
04:20Le mot que vous utilisez est important, Linda Kepam, utopie, vous dites.
04:24Utopie, parce que là, il y a quelques jours,
04:26parce qu'on va parler quand même de la peine que peut écouper cet individu,
04:30la question est posée car lorsque des policiers sont pris à partie dans leur véhicule,
04:34comme ce fut le cas l'an dernier lors d'une manifestation dite contre la violence policière,
04:39eh bien le coupable, qui est reconnu comme tel, il n'y a pas de doute,
04:41il a été reconnu par la justice comme coupable,
04:44eh bien il a écopé de 18 mois de prison avec sursis.
04:47Comment vous avez réagi quand vous entendez cela ?
04:50Et je rappelle, il ne s'en est pas pris à une voiture de police,
04:52il y avait des policiers à l'intérieur qui ont vraiment eu peur d'être lynchés.
04:57Oui, c'est typiquement le genre de profil dont la peine avec sursis signifie souvent rien.
05:03Il peut y avoir des personnes pour lesquelles la peine avec sursis est un vrai coup de semence
05:06qui les remettrait dans le droit chemin.
05:08Mais lorsque l'on a une personne qui prétend en tout cas considérer
05:13que la violence est un acte légitime pour faire passer des idées politiques,
05:16moi j'ai tendance à utiliser le mot terreur dans ces cas-là,
05:20puisque c'est finalement la méthodologie qui importe.
05:22Oui, quand vous faites passer la violence, l'action violente,
05:26pour répandre vos idées politiques.
05:30Donc c'est un projet.
05:30Je n'ai pas d'autre terme.
05:31C'est un projet conscient, délibéré.
05:34L'indacalade, c'est un projet délibéré, conscient.
05:37Oui, bien sûr, il y a un projet délibéré qui est assumé de ces personnes.
05:39Et ce sont des personnes pour lesquelles la peine avec sursis n'est rien,
05:41et elle est totalement insignifiante.
05:43Vous avez dit il y a quelques instants,
05:44on ne parle pas d'une voiture de police seulement qui a été dégradée.
05:46On parle de policiers qui ont été agressés avec des armes, par destination,
05:50parfois avec des cocktails Molotov, des barres à mine, des pavés, etc.
05:54Un policier qui a cru sa vie et celle de ses collègues en danger
05:57et qui s'est senti obligé de sortir son arme.
05:59On imagine bien, même quand il s'agit de policiers formés,
06:03on imagine quand même l'impact psychique sur ces agents.
06:06Et pourtant, à la fin, on dit à cette personne,
06:08vous êtes venu aujourd'hui, vous êtes convoqué par la justice
06:11et vous vous en ressortez libre avec rien.
06:14Le message qui t'a envoyé en un mot, c'est ?
06:16Le message, il est dramatique.
06:17Je vous dis très sincèrement qu'il est très mal accueilli
06:19dans les rangs des forces de l'ordre,
06:20qui reste malgré tout loyaliste aux institutions.
06:23Néanmoins, pour l'opinion publique, je pense que beaucoup,
06:26je ne m'avance pas trop en estimant.
06:29Et dans cette séquence politique qui est importante pour notre pays,
06:32il est temps peut-être de siffler à la fin de la récré.
06:33C'est important ce que vous dites,
06:34parce que j'allais vous poser la question ce matin sur CNews et Europa.
06:37On parle beaucoup, et dans nos médias, des bisbis entre Michel Barnier,
06:40Emmanuel Macron, peut-être de l'impossibilité à former un gouvernement.
06:43Et pendant ce temps-là, des commerces brûlent,
06:45sont payés en Martinique, des policiers sont blessés.
06:47Une population a peur également et demande des renforts de policiers.
06:52Quel est le risque dans un tel contexte ?
06:55Parlons vraiment de ce qui se passe en Martinique.
06:56Et un couvre-feu, je crois, partiel a été décrété.
06:59Écoutez, la Martinique est aux portes de ce qui s'est passé
07:01en Nouvelle-Calédonie il y a quelques mois.
07:03Et d'ailleurs, la Nouvelle-Calédonie continue encore à connaître
07:05des épisodes de violence.
07:06Il y a évidemment un sujet social et économique
07:09dans les dramecoms, qui, pour moi, je vous le dis très sincèrement,
07:12est indigne de notre nation.
07:13On ne peut pas gérer les dramecoms avec l'éloignement philosophique
07:17qui est le paradigme, qui est le nôtre.
07:18Il faut sincèrement apporter des réponses sociales et économiques
07:21aux populations qui sont installées là-bas.
07:23Leur apporter un vrai projet républicain qui, aujourd'hui, est inexistant.
07:26Mais une fois qu'on a dit ça, on ne peut cautionner d'aucune manière
07:30les violences qui sont exercées contre les forces de l'ordre.
07:31Et pas seulement des violences, mais des tentatives d'homicides.
07:34Je vous le dis, des policiers ont dû utiliser leur pistolet mitrailleur
07:37parce qu'ils étaient pris dans le feu d'armes automatiques,
07:40de fusils, d'armes d'épaule, des tentatives d'homicides.
07:42C'est un miracle qu'il n'y ait pas de mort.
07:44Et je vous le dis très sincèrement, puisque je suis en contact
07:46avec notre secrétaire départementale sur place,
07:48qui nous explique qu'on est aux portes du drame,
07:51qu'il n'y en a pas pour le moment, mais qu'à tout moment, ça peut arriver.
07:54Il y a évidemment des pillages qui, en soi, et des violences,
07:58ne répondent pas tant à la question politique de la vie chère localement.
08:02On a aussi une population qui est divisée.
08:04Il y a ceux qui apportent leur soutien aux émeutiers
08:06et de l'autre côté, une population qui est effrayée.
08:08Je vous le dis très sincèrement, Madame Mabrouk,
08:09si on interroge aussi bien les effectifs de terrain
08:12que l'opinion de ceux qui ont conscience de ce qui se passe,
08:15c'est la frilosité avec laquelle l'autorité sur place n'agit pas.
08:20Pourquoi une telle indifférence ?
08:21Vous dites frilosité, peut-être même impuissance.
08:24Mais pourquoi cette indifférence à ce qui se passe en métropole ?
08:26Des policiers sont blessés.
08:28Vous parlez d'armes lourdes qui sont utilisées.
08:30Une partie de la population n'en peut plus.
08:32Les commerces sont pillés, brûlés, alors que c'est contre la vie chère.
08:35C'est très paradoxal.
08:36Pourquoi aujourd'hui, on laisse les policiers ainsi,
08:38comme un filet ténu de sécurité seul ?
08:41Pour les mêmes raisons que l'on ferme les yeux parfois
08:43sur les actes de violence en métropole,
08:45c'est-à-dire un sentiment de pouvoir tenter de récupérer la paix sociale,
08:49mais en réalité, la paix sociale ne se récupère pas
08:51par la pudeur ou la frayeur ou la frilosité.
08:55On a une réponse judiciaire, visiblement, en Martinique qui est insuffisante.
09:00Je vous le dis, il y a des députés qui se sont déplacés localement
09:04pour rendre visite à un des leaders de ce mouvement violent.
09:09Bien connu, figure emblématique et très controversée.
09:12Très connue, très controversée, qui a déjà eu des peines de prison
09:17et pour des faits de droit commun.
09:18Donc, on n'est pas en train de parler d'un homme politique lambda.
09:22Une personne qui a quand même bénéficié d'une visite d'élus localement
09:26pour s'assurer des bonnes conditions de sa garde à vue.
09:28Qu'est-ce que vous voulez dire ?
09:28C'est-à-dire que ces élus ont légitimé ce personnage
09:31qui lui-même légitime la violence ?
09:32Ça apporte une forme de soutien qui interroge.
09:35C'est grave pour les élus de la nation.
09:36Bien sûr, mais ce qui interroge aussi, c'est d'un côté le fait
09:40d'apporter une forme de soutien, parce que c'est ce qui se passe
09:42quand on s'assure de ses bonnes conditions de garde à vue
09:45avant de s'assurer que la justice fonctionne bien.
09:48Et puis après, il y a derrière peut-être une autorité
09:50qui n'ose pas frapper du poing sur la table.
09:53Une autorité aussi en France.
09:54Alors, est-ce qu'il y en a encore une dans ce mouvement un peu de remaniement
09:58qui n'a pas de parole ferme à l'égard de ce qui se passe en Martinique ?
10:02Et puis, il y a aussi peut-être la crainte que la situation
10:04ne s'embrase encore plus et que dans l'opinion publique,
10:06finalement, il y ait, disons les choses peut-être,
10:09une adhésion plus forte à l'égard de ces violences.
10:11Linda Kebab, nous parlons ce matin sur CNE,
10:13de sujets graves, de sujets importants.
10:17Au même moment, c'est un gouvernement qui peine justement à se former
10:20avec, je l'ai dit, des tensions, des bisbis.
10:23Vous avez parlé de ce choc d'autorité.
10:24Est-ce que vous y croyez encore à l'aune de tout ce que vous venez de dire ?
10:27On a commencé par un refus d'obtempérer qui est davantage,
10:29mais ça, c'est la justice qui le qualifiera peut-être une intention de tuer manifeste.
10:33On est passé par ces émeutes en Martinique.
10:36Est-ce que ce choc d'autorité, il peut vraiment arriver,
10:38quelles que soient les incarnations à l'intérieur et à la justice ?
10:41Il peut, je ne sais pas, il doit certainement et il n'est pas trop tard.
10:44La problématique souvent en politique, c'est le fait de ne pas prendre en compte
10:48la nécessité d'avoir un individu avec deux jambes
10:50en matière de sécurité intérieure et de justice.
10:53On ne peut pas faire du en même temps.
10:55Malheureusement, c'est ce qu'on connaît un petit peu trop souvent
10:57avec une forme de récurrence où on va nommer un homme à l'intérieur
11:01ou une femme à l'intérieur avec une certaine sensibilité politique
11:04et tous sont opposés à la justice pour tenter de satisfaire un petit peu tout le monde.
11:07Là, vous parlez évidemment de ce qu'on a connu entre M. Darmanin et M. Dupond-Moretti.
11:10Ça, les policiers, ils ont aussi leur mot à dire, si je puis dire.
11:14En tout cas, ils n'en veulent plus, ils n'en peuvent plus.
11:16Et ça crée une forme d'incohérence.
11:18Je veux dire, quand vous avez à juste titre un ministre de l'Intérieur
11:20qui engage une parole de fermeté à l'égard, je donne un exemple qui me concerne
11:24et qui concerne ceux que je représente, les agresseurs de force de l'ordre
11:26et la nécessité d'être ferme avec eux.
11:28Et que dans le même temps, vous avez, pas seulement pour les forces de l'ordre,
11:31mais l'ensemble de la société, une circulaire qui a toujours cours aujourd'hui,
11:34qui date de Mme Belloubet, qui continue d'exister sous M. Dupond-Moretti
11:38et qui dit que la peine d'emprisonnement ne doit être prononcée qu'en fonction
11:42de la capacité hôtelière des établissements pénitentiaires
11:44et que ça doit être la dernière solution.
11:46C'est-à-dire que quand on est petit, on nous apprend que la prison
11:49est la réponse qui doit être donnée aux délinquants et aux criminels.
11:51En France aujourd'hui, c'est la philosophie, c'est le paradigme,
11:54la prison est la dernière solution.
11:56Vous avez forcément une incohérence entre les deux,
11:57on a l'impression d'avoir une forme de daeu qui ne marche pas droit.
12:00Et au final, on a, dans l'opinion publique,
12:02des interrogations sur le bon sens de l'action politique.
12:05Il faut aujourd'hui deux jambes qui partent dans la même direction.
12:09Dans une autre affaire ô combien emblématique et politique,
12:11l'affaire Nahel qui avait entraîné des émeutes partout en France.
12:14Je rappelle qu'après un refus d'obtempérer, là encore,
12:17Nahel a été touché mortellement par un tir policier.
12:19Évidemment, la mort d'un homme est à regretter et à condamner.
12:23Mais à l'aune aujourd'hui des procès verbaux, Linda Kebab,
12:25consultés par nos journalistes, notamment du JD News,
12:29il semble que la version des partis civils,
12:31je mets quand même des conditions et des nuances,
12:33se retrouve fragilisée sur certains points.
12:35Par exemple, sur le fait que Nahel ait été frappé.
12:38Il n'y a pas de trace de coup.
12:40Je rappelle qu'à l'époque, l'avocat de la famille de Nahel
12:43avait parlé d'un assassinat.
12:45Avec un peu de recul aujourd'hui, qu'est-ce que ça vous inspire ?
12:48Ça m'inspire uniquement le fait que déjà à l'époque,
12:50je disais que si je refusais d'entrer sur le fond de l'affaire
12:54et que je laissais la justice faire,
12:55hors l'hystérie médiatique et politique qui avait lieu autour de ce drame,
13:00il y avait aussi le fait qu'en effet, comme vous l'avez dit il y a deux secondes,
13:03un avocat qui allumait les braises,
13:05qui dès les premiers instants avait déclaré
13:09sur une chaîne d'information continue qui n'est pas la vôtre,
13:11et sans aucune opposition à ce moment-là,
13:14contre sa parole qui était pourtant mensongère,
13:15que les policiers avaient fait un faux.
13:17Or, les policiers n'ont jamais rien rédigé
13:19puisqu'au moment des faits,
13:21immédiatement le policier est emmené à l'hôpital,
13:23puis dans les locaux de l'IGPN où il est désarmé.
13:25Et donc il n'a jamais rien rédigé et pourtant on a parlé d'un faux,
13:27ce qui a participé à embraser le pays.
13:29D'un faux et de policiers qui se seraient entendus justement pour une même version.
13:32C'est cela, ce qui est absolument faux pour le coup.
13:34Donc on a accusé les policiers d'être auteurs d'un faux en écriture publique.
13:38On a parlé de coups qui avaient été donnés.
13:42Évidemment, moi personnellement, j'avais l'intime conviction
13:44que ce n'était pas la réalité.
13:45Et vous ne le saviez pas à ce moment-là.
13:46Mais les faits nous donnent raison.
13:48Également l'intentionnalité, parce qu'en fait,
13:50toute l'affaire va tourner autour de l'intentionnalité du policier.
13:53On peut remettre en question peut-être la technique professionnelle.
13:57On peut remettre en question le fait que la technique professionnelle
13:59puisse conduire éventuellement à une mise en danger de soi-même,
14:02qui ensuite a un effet domino, un effet papillon et conduit à un drame.
14:06Mais parler d'assassinat est créé dans l'opinion publique.
14:10Je veux dire, l'idée que des policiers sortirent avec leur arme
14:14dans le but d'assassiner des jeunes au volant d'une voiture,
14:17je suis désolée, c'est criminel.
14:18Mais à ce moment-là, le venin du soupçon est parti très vite.
14:21Il est parti très vite.
14:22En plus, on nous a parlé de révolte urbaine.
14:24Il n'y avait pas de révolte.
14:25Qu'est-ce qu'il y a de révoltant ?
14:26De révolter, pardon, à aller piller des magasins de criateurs.
14:30Et quand même la mort d'un homme.
14:32Non, mais je veux dire, vous allez piller, je suis désolée pour la marque,
14:34mais on ne va pas piller des magasins à la coste pour crier sa révolte
14:38lorsque il y a la mort d'un homme.
14:40On ne crame pas, je suis désolée.
14:41C'était un prétexte pour vous ?
14:42Vous savez, tout ce qui s'est passé était un prétexte.
14:44Mais bien sûr que ce n'est pas un prétexte.
14:45Pas grand monde n'a manifesté, et même cassé, j'allais le dire,
14:50par rapport à l'indignation suite à la mort d'un homme.
14:5380% des interpellés, ce sont les chiffres qui le disent,
14:55ne connaissaient même pas le prénom de ce jeune homme qui est mort.
14:58Donc c'est dire à quel point c'était totalement opportuniste.
15:02Quel est le sens de la révolte lorsque des gens vont brûler la voiture
15:06d'un ouvrier d'un quartier populaire qui voit sa voiture brûlée,
15:09et alors même qu'il n'a pas les moyens de s'offrir les garanties
15:12de pouvoir être remboursé pour avoir une nouvelle voiture ?
15:14Quel est le sens de la révolte lorsqu'on nous dit que 80%,
15:18comme je vous l'ai dit, des interpellés ne connaissaient même pas le prénom de Nahel ?
15:22Et surtout, quel est le sens de la révolte lorsqu'une fois qu'on a tout pillé et tout brûlé,
15:27il n'y a absolument aucun projet des acteurs politiques
15:29qui ont pourtant fait s'embraser la situation ?
15:31Et moi, ce sur quoi je veux revenir aujourd'hui,
15:33c'est que ce trouble à l'ordre public,
15:36pour prendre le terme un petit peu politiquement correct,
15:40a coûté à ce policier quatre mois de détention préventive.
15:43Quatre mois de détention,
15:45non pas parce qu'il était possible qu'il réitère les faits,
15:47non pas parce que potentiellement son profil ne garantissait pas toute représentation face à la justice,
15:53non, mais parce qu'il y avait des craintes de continuité des meutes.
15:56Et c'est ça qui est dramatique dans notre pays,
15:57c'est-à-dire que la main des magistrats a décidé en fonction de délinquants et de criminels
16:02qui ont mis le pays à feu et à sang.
16:04Parallèlement,
16:06vous avez parlé il y a quelques jours sur votre chaîne,
16:08on a tous une pensée pour la famille de cette petite Camilia
16:11qui est morte sous les roues d'une moto d'une personne qui faisait un rodéo-moto.
16:15Là, les images clairement démontrent que l'enquête continuera de se confirmer.
16:21Mais en tout cas, il y a visiblement quelque chose qui est plutôt assimilable à quelque chose d'un rodéo-moto.
16:25Vous avez été choquée par le fait qu'il ne soit pas en détention ?
16:28Alors, choquée parce qu'il n'est pas en détention,
16:30je vous le dis tout le temps,
16:31les décisions de justice appartiennent aux magistrats qui ont le dossier entre les mains.
16:34Mais néanmoins, quand on met en policier quatre mois de préventive,
16:36alors qu'on est assuré de son profil et de sa garantie de représentation,
16:40et qu'en face, on a dans l'opinion publique,
16:41l'écoute d'une situation où un enfant meurt,
16:44d'une personne qui fait preuve visiblement de mauvaise foi
16:46et dont on n'a pas la garantie qu'il restera dans le droit chemin
16:50et qu'il y a un quelconque contrôle judiciaire,
16:52oui, ça interroge dans l'opinion publique.
16:53Et ça, ça participe à la remise en question de la confiance de nos concitoyens dans les institutions.
16:58Votre colère aussi est froide et votre indignation.
17:00Merci Linda Kebab, gardienne de la paix et de la révolte aussi.
17:04On l'entend ce matin. Merci à vous.
17:05Merci à vous.
17:06Sous-titrage Société Radio-Canada