Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Pierre de Vilno pour débattre des actualités du jour.
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00:00Europe 1 Soir. 19h21, Pierre De Villeneuve.
00:04Deux hommes sont là pour m'accompagner pendant cette première heure.
00:07Antonin André, bonsoir. Bonsoir Pierre.
00:09Chef du service politique du Journal du Dimanche, bonsoir Jean-Michel Salvatore.
00:13Bonsoir Pierre.
00:14Communicant et chroniqueur politique, bonsoir à vous Nicolas Pouvremonti.
00:17Bonsoir.
00:18Vous êtes directeur général et cofondateur de l'Observatoire de l'Immigration et de la Démographie.
00:23De nombreuses questions tournent autour du meurtre de la jeune Philippine, 19 ans.
00:29Il y a deux questions que la France entière se pose.
00:33Je pense qu'à la première, vous n'avez pas de réponse.
00:35Mais la deuxième, peut-être que vous en avez une.
00:36La première, c'est que la juge a mentionné un risque de réitération d'effet délictueux
00:40lors de la quatrième possibilité de prolonger le séjour en CRA.
00:44Mais elle a quand même remis en liberté ce violeur récidiviste
00:49au lieu d'attendre peut-être la réponse des Marocains.
00:51L'autre question, c'est pourquoi est-ce que l'OQTF,
00:54qui vise cet homme qui est tout juste en sortie de prison au mois de juin dernier,
01:00pourquoi est-ce que cet OQTF n'est demandé que deux jours avant sa sortie de prison ?
01:04Alors, sur le premier aspect de votre question, je vous confirme que je n'ai hélas pas de réponse ferme.
01:07Ça envoie à des interrogations plus globales sur le fonctionnement de l'assistant général.
01:11Mais cette question est évidemment sur toutes les lèvres et elle mérite absolument d'être posée.
01:14Concernant le deuxième aspect de votre question, la raison de la non-exécution de cet OQTF,
01:19dans ce cas précis, il semble que le délai d'obtention du laissé-passé consulaire par le Maroc
01:23ait joué un rôle crucial. En l'occurrence, que le laissé-passé ait été octroyé par le pays d'origine
01:28lorsque cet individu a été remis en liberté sur décision de la juridiction.
01:33Qu'est-ce que c'est un laissé-passé consulaire ?
01:34C'est un document nécessaire à l'éloignement d'un étranger
01:37lorsque celui-ci n'a pas de document d'identité, par exemple n'a pas de passeport,
01:41ou alors a un titre d'identité périmé de son pays d'origine.
01:43C'est un document par lequel, finalement, le pays qui le reprend
01:46confirme que cet individu est bien un ressortissant de son pays
01:49et que donc il le réadmet sur son territoire.
01:50Vraiment, le pays voisin, ou en tout cas réciproque,
01:53fait des démarches pour retrouver l'individu dans ses bases de données.
01:57C'est ça, c'est ça.
01:58C'est pour ça que ça prend du temps.
01:59Absolument, c'est un argument parfois un peu fallacieux
02:01mais qui correspond aussi à des vraies recherches dans les systèmes d'États civils locaux.
02:04Cette difficulté à obtenir le laissé-passé consulaire,
02:07ça fait partie des raisons les plus fréquentes de l'échec des mesures d'éloignement.
02:11On pourrait en citer d'autres, à commencer par le déficit criant de moyens matériels et logistiques
02:17de notre système de rétention, de rétention administrative.
02:19On sait qu'aujourd'hui, le passage en centre de rétention administrative,
02:22c'est bien souvent une étape indispensable avant de procéder à des éloignements forcés.
02:26Or, on a aujourd'hui 1 800 places dans les centres de rétention administrative en France.
02:29Le ministère ambitionne de porter ce nombre à 3 000.
02:331 800 places pour 120 000 OQTF prononcés chaque année.
02:35Plus de 100 000 OQTF chaque année,
02:37entre 600 000 et 900 000 étrangers en situation irrégulière sur le territoire national,
02:40disait le ministre Darmanin à la fin de l'année 2023.
02:43C'est évidemment insuffisant.
02:44Il y a un plan de construction en cours, ça vise 3 000 places d'ici à 2027.
02:48Le ministère a aujourd'hui du mal à tenir cet objectif pour tout un tas de raisons,
02:51notamment parce qu'il y a une obstruction des collectivités.
02:53Personne n'a vraiment envie d'avoir un centre de rétention administrative sur ce territoire.
02:57Ça implique de se donner les moyens à la fois législatifs
03:00pour contraindre aux besoins les collectivités
03:01et surmonter les obstacles à la construction de ces crâts,
03:04comme on a pu le faire, par exemple, sur certaines constructions liées aux Jeux Olympiques.
03:07Vous savez, il y avait un statut projet d'intérêt national
03:09qui permettait d'aller plus vite sur certains de ces obstacles.
03:11Et enfin, ça nécessite aussi des moyens financiers.
03:13Et de ce point de vue-là, le débat budgétaire qui va s'ouvrir sera important.
03:17Oui, j'ai juste une petite question sur les laissés-passés consulaires précisément.
03:20Lorsqu'un pays délivre un laissé-passé consulaire,
03:22est-ce qu'il est d'une durée illimitée ?
03:23Parce que je crois que c'est un sujet aussi.
03:25Ou est-ce qu'il est limité dans le temps ?
03:26De ce point de vue-là, le laissé-passé consulaire,
03:29il peut être à la fois, selon les cas de figure, soit illimité, soit limité dans le temps.
03:33Généralement, il est limité.
03:34À combien ?
03:35Ça dépend, ça peut être plusieurs mois, plusieurs semaines.
03:38En tout cas, la preuve est faite, une fois que le laissé-passé consulaire a été accordé,
03:42que l'étranger en question est bien un ressortissant de ce pays.
03:46Donc ensuite, ça pose la question de la relation diplomatique entre les deux pays.
03:48Mais il y a une forme d'admission a priori qui, elle, reste toujours valable
03:51quant au fait que cet individu est bien un ressortissant du pays d'origine.
03:54C'est pour ça que la France demande une OQTF pour cet individu
03:58au mois de juin, en se disant que si c'est limité dans le temps,
04:01du coup, il pourra l'expulser en septembre.
04:04Ou c'est tellement limité dans le temps qu'au moment où elle a été mise,
04:08le délai est passé d'une certaine façon.
04:10Parce qu'il y a beaucoup de gens qui ont dit que cet individu a été pendant cinq ans en prison,
04:13on avait tout le loisir de demander une OQTF.
04:16En fait, ça pose la question de l'étape de la rétention administrative dans des cas comme ceux-là.
04:19C'est-à-dire qu'en l'occurrence, la fluidité consisterait à ce que l'éloignement se fasse
04:25dès la sortie de prison.
04:26Il y a des préfets qui savent anticiper, qui demandent le laissé-passé consulaire
04:30lorsque arrive soit la fin de la peine, soit la libération anticipée quand elle advient,
04:34et qui permettent finalement d'aller directement vers l'aéroport.
04:38Mais dans la majeure partie des cas, aujourd'hui, la rétention administrative
04:40reste une étape indispensable.
04:41Et les Marocains ont été relancés plusieurs fois dans ce cas précis.
04:43Les Marocains ont été relancés plusieurs fois.
04:45Mais de ce point de vue-là, il y a un manque de coopération globale des pays d'origine.
04:47Le cas extrême en la matière, c'est celui de l'Algérie.
04:50L'Algérie qui, notamment depuis le désaccord avec la France sur la question du Sahara occidental,
04:56vous savez, la France a reconnu que le Sahara occidental appartient au Maroc.
04:58Et comme mesure de rétorsion...
05:00C'était une lettre d'Emmanuel Macron aux Marocains cet été.
05:03Absolument. Et comme mesure de rétorsion,
05:05l'Algérie qui, elle, est en faveur d'un Sahara occidental indépendant,
05:07coopère encore moins depuis plusieurs semaines sur la réadmission de ses ressortissants.
05:12Là-dessus, il y a une étape qui sera indispensable.
05:15C'est l'engagement d'un rapport de force déterminé, durable,
05:18et dont les pays d'origine savent qu'il peut être durable.
05:20Parce que, comme tout rapport de force,
05:21il faut que la personne que vous avez en face de vous...
05:22Et ça, c'est du ressort de qui, du coup ?
05:24Parce que certains disent que ce n'est même plus du ressort de Bruno Retailleau,
05:28de Didier Goubeau.
05:29Migo, c'est Jean-Noël Barraud, c'est le ministère des Affaires étrangères.
05:31C'est la cohérence globale de l'action gouvernementale et de l'action de l'État.
05:34Il y a même un long jeu...
05:34Voir de l'Europe.
05:35Voir de l'Europe, absolument.
05:37Typiquement, pour ce qui est de l'Europe,
05:39le système Schengen prévoit aujourd'hui la possibilité
05:42de suspendre au niveau de l'espace Schengen la délivrance de visas,
05:45de visas Schengen, c'est-à-dire qui valent pour toute la zone,
05:47à des pays qui ne coopèrent pas assez
05:49dans la réadmission de leurs ressortissants en situation irrégulière.
05:51Jean-Michel Salvatore.
05:52Est-ce que ça ne serait pas plus efficace que ça se fasse État par État ?
05:55Parce que si on fait du donnant-donnant,
05:56si on dit aux États, par exemple au Maroc,
06:00de récupérer ces délinquants,
06:05et s'ils ne le souhaitent pas,
06:06leur dire finalement qu'on ne vous le délivrera pas de visa d'entrée en France,
06:11c'est quand même là une pression diplomatique qui peut être assez efficace.
06:13Il y a aussi une autre pression qui peut être efficace,
06:15c'est que la France, par exemple, soigne énormément
06:18de chefs d'État ou de gouvernements de certains pays
06:21qui sont quand même très contents de pouvoir profiter de la médecine française.
06:25Et si on leur disait, à partir de maintenant,
06:28si vous ne délivrez pas des laissés-passer consulaires,
06:32les hôpitaux français...
06:33Pourquoi est-ce qu'on ne rentre pas dans ce bras de fer ?
06:34C'est exactement la question que posait Vincent Trémolin-Villers du Figaro sur...
06:37Bien sûr, bien sûr.
06:38Absolument, et de ce point de vue-là,
06:39la responsabilité, vous avez raison de le souligner,
06:41n'accompte pas au seul ministre de l'Intérieur, loin s'en faut.
06:43Cette question de la suspension des visas,
06:45elle doit être assumée par tout le gouvernement.
06:46Elle peut être soit générale, si je puis dire,
06:49soit visée effectivement les dirigeants des pays concernés.
06:51Je pense notamment à l'Algérie où les dirigeants algériens
06:56qui possèdent un passeport diplomatique
06:57ont tout un tas de facilités pour se rendre en France
06:59et dans un certain nombre de cas, sans visa.
07:01Il y a aussi tout l'enjeu de l'aide publique au développement.
07:04La France accorde chaque année plusieurs milliards d'aides publiques au développement,
07:07notamment à des pays qui comptent parmi les pays d'origine
07:10des étrangers en situation irrégulière qu'on cherche à éloigner.
07:13Demain, fermer le robinet ou menacer sérieusement
07:15de fermer le robinet de l'aide publique au développement,
07:17c'est aussi un moyen d'action.
07:18Sur l'Algérie, on a eu les accords déviants.
07:21Et post-accords déviants, il y a d'autres accords qui sont signés en 1968
07:26où il y a effectivement un agreement en bon français
07:29entre l'Algérie et la France sur une sorte de libre circulation
07:34des étudiants algériens qui viennent en France.
07:37Il y a évidemment en toile de fond une sorte de culpabilité de la France
07:42de l'ancienne colonie algérienne.
07:45Et là, il y a différentes voix qui s'élèvent pour dire
07:48c'est fini ça, on arrête.
07:51Pourquoi est-ce que c'est si difficile de dire
07:54finalement, ce que disait Jean-Michel Salvatore,
07:57on va arrêter et puis on va dire que dès lors,
08:00maintenant, c'est plus possible de faire comme on faisait avant.
08:03Ce qui est certain, c'est qu'aujourd'hui,
08:04le régime d'immigration des Algériens vers la France
08:06est une anomalie.
08:07Cette anomalie, vous avez raison de le souligner,
08:08elle remonte à l'accord franco-algérien de 1968
08:10qui a eu plusieurs avenants depuis sa signature.
08:12Le dernier en date datant de 2001.
08:142001, vous vous rendez compte, c'était il y a 23 ans.
08:17Plus de deux décennies.
08:18Et qui est un régime dérogatoire, c'est-à-dire que sur
08:20l'ensemble des sujets qu'il couvre,
08:22le droit ordinaire de l'immigration ne s'applique pas aux ressortissants algériens.
08:25C'est-à-dire qu'on a aujourd'hui un droit de l'immigration
08:27qui, sur un ensemble de ses dispositions,
08:29ne s'applique pas à la principale nationalité bénéficiaire
08:31des titres de séjour en cours de validité.
08:33Nicolas Pauvremonti, vous allez rester encore quelques instants avec nous
08:35parce qu'on a encore beaucoup de questions à vous poser.
08:3719h26, une pause, le journal permanent.
08:39Et on revient dans Europe 1 Soir à tout de suite.
08:42Europe 1 Soir
08:4319h21, Pierre de Villeneuve
08:46Avec nous, Nicolas Pauvremonti, directeur général et cofondateur
08:49de l'Observatoire de l'Immigration et de la Démographie
08:52pendant la pause publicitaire avec Antonin André
08:54et Jean-Michel Salvatore,
08:56on passait en vue les chiffres, j'allais dire
08:58les tristes chiffres
09:00de l'application des OQTF, de l'exécution des OQTF,
09:027%.
09:04Et la question qui se pose, c'est
09:06est-ce que c'est parce que l'administration française
09:09est mal organisée ou pas assez rapide
09:12ou est-ce que c'est parce que le pays d'en face
09:14dit oui, non, peut-être
09:16et qu'il est peut-être mal organisé lui aussi ?
09:18Ça tient évidemment à ces deux facteurs combinés
09:20et de ce point de vue-là, il était fait mention
09:22lors du journal de la possibilité évoquée
09:24d'élargir la durée de rétention administrative.
09:26C'est effectivement une piste qui me paraît intéressante.
09:28Aujourd'hui, le droit européen nous permet
09:30d'aller jusqu'à 18 mois en matière de rétention administrative
09:32des étrangers. En France,
09:34cette durée maximale est de 90 jours.
09:36Elle peut être un peu plus longue pour les individus qui présentent
09:38des profils en lien avec les activités terroristes.
09:40C'est 500 jours en Allemagne, je crois.
09:42Et c'est même
09:44illimité dans certains pays d'Europe.
09:46Les pays du Nord.
09:48Au niveau de l'Union Européenne, c'est limité à 18 mois,
09:50mais il y a tout un tas de grandes démocraties dans le monde où cette durée est illimitée.
09:52Aux Etats-Unis, la durée est illimitée, par exemple.
09:54Donc, en la matière,
09:56se donner aussi plus de temps, par exemple,
09:58pour obtenir des laissés-passer consulaires, ça passe
10:00par le fait d'avoir une durée de rétention
10:02plus longue et c'est une piste intéressante, d'autant que le droit
10:04européen nous le permet.
10:06J'avais une autre question.
10:08Lorsqu'une personne
10:10doit être expulsée,
10:12est-ce qu'elle peut refuser
10:14d'embarquer
10:16dans un avion ?
10:18Et jusqu'où elle peut utiliser
10:20des recours pour ne pas partir ?
10:22Alors, il y a effectivement un ensemble de recours préalables au fait d'arriver dans l'avion.
10:24Ensuite, dans l'avion, il peut y avoir parfois une obstruction physique,
10:26d'où le fait que les éloignements
10:28forcés coûtent cher, parce qu'il y a une escorte de policiers.
10:30De ce point de vue-là, une piste
10:32qu'on ne creuse peut-être pas assez, c'est celle des vols groupés,
10:34ce qu'on appelait autrefois des charters,
10:36et notamment les vols groupés organisés par l'agence Frontex,
10:38qui permet de faire des vols groupés communs
10:40avec plusieurs pays européens.
10:42Il a été tracé, notamment dans les rapports de la Cour des Comptes,
10:44que cette démarche des vols groupés
10:46est plus efficace, à la fois dans le taux de réussite
10:48de l'éloignement, et aussi moins chère.
10:50Et là, c'est une possibilité de coopération
10:52qui nous est offerte par le droit européen actuel.
10:54Parce que les passagers, très souvent, n'acceptent pas
10:56de voir... Oui, c'est ce qui est arrivé avec les charters,
10:58qui avaient été très combattus à l'époque
11:00de Charles Passe, quoi. Absolument.
11:02Mais le fait d'affronter des vols spécialement dédiés à l'effet de l'éloignement
11:04et de le faire en lien avec l'agence Frontex
11:08Voici une autre initiative qui... Enfin,
11:10en dehors du fait que, évidemment, c'est un sujet
11:12qui mériterait une coordination européenne
11:14beaucoup plus efficace
11:16et beaucoup plus harmonisée, parce qu'effectivement, on voit bien que le sujet
11:18touche tous les pays d'Europe.
11:20J'ai pas l'habitude de prendre, par exemple, Georgia Meloni,
11:22mais il y a une initiative qu'elle a mise en place
11:24qui est assez intéressante, je trouve.
11:26Elle a noué un accord avec l'Albanie
11:28lui permettant de dépêcher des juges
11:30italiens qui sont en Albanie
11:32et qui, sur place en Albanie,
11:34statuent sur les demandes d'asile
11:36ou de réfugiés. C'est une initiative
11:38je crois assez originale en Europe, mais
11:40en l'occurrence, ça veut dire que c'est possible.
11:42Et est-ce que cette piste-là,
11:44une possibilité qui est réclamée par une partie de la classe politique,
11:46c'est-à-dire de statuer dans les pays de départ,
11:48est envisageable et possible,
11:50selon vous ?
11:51C'est une possibilité qui, effectivement, est non seulement
11:53utilisée à l'heure actuelle par le gouvernement Meloni,
11:55mais qui a aussi été réclamée au niveau européen
11:57par 15 gouvernements de pays membres sur 27
11:59dans une lettre signée au printemps dernier
12:01qui demandait la possibilité, effectivement,
12:03d'externaliser le traitement des demandeurs d'asile
12:05hors des frontières de l'Union Européenne.
12:07Ce qui est évidemment une question majeure, parce que, sur une décennie,
12:09entre 2013 et 2023, l'Union Européenne
12:11a reçu 8 millions de demandeurs d'asile sur son sol.
12:13En termes démographiques, c'est comme si elle avait reçu
12:15un nouvel État membre, ce serait le 15ème par la taille de sa population,
12:17juste après l'Autriche, juste avant la Bulgarie.
12:19Évidemment,
12:21il y a une partie seulement de ces demandeurs qui obtiennent
12:23l'asile, même si en France le taux a beaucoup augmenté,
12:25c'est 44% de taux de protection l'an dernier.
12:27Mais sur ceux qui restent, la majeure partie
12:29des déboutés restent sur le sol français,
12:31restent sur le sol européen.
12:33Le compte en 2015 disait 96%,
12:35et le ministre, en fin d'année dernière, disait 9 déboutés sur 10
12:37restent en France après avoir été déboutés.
12:39J'aimerais qu'on écoute tous ensemble,
12:41tous les 4, et évidemment les auditeurs,
12:43qui sont beaucoup plus nombreux que nous 4,
12:45Sandrine Rousseau, qui était l'invité
12:47ce matin de France Inter.
12:49Elle s'interroge sur ce qu'advient
12:51un individu sous OQTF
12:53dangereux une fois rentré dans son pays d'origine.
12:55J'ai commencé en disant que c'était un féminicide
12:57et qu'il fallait le punir sévèrement,
12:59mais je suis inquiète
13:01du fait que
13:03l'extrême droite utilise
13:05quelques faits divers comme ça,
13:07et en font un sujet
13:09de société. Et moi, quand j'entends
13:11que le sujet c'est l'OQTF, je m'inquiète
13:13quand même du fait que nous n'ayons
13:15aucune espèce de considération sur le fait
13:17que ce type est dangereux, manifestement,
13:19puisqu'il a tué Philippine, et que
13:21s'il était dans un autre pays, il est tout aussi
13:23dangereux, et il met tout autant
13:25en danger d'autres femmes.
13:27Derrière le discours
13:29de Sandrino Souza, il y a quelque chose qui me frappe,
13:31et peut-être que vous pourriez
13:33nous faire un commentaire là-dessus, c'est à quel point
13:35la gauche est faillible sur ce sujet.
13:37C'est-à-dire qu'aujourd'hui,
13:39le sujet de la protection
13:41des Français vis-à-vis
13:43d'un certain nombre de sujets migratoires
13:45en est à un tel point
13:47que, par exemple, à Marseille, dans les cités
13:49habitées par des immigrants de première génération
13:51qui viennent d'Algérie dans les années 70,
13:53aujourd'hui, on vote Rassemblement National.
13:55Parce qu'en fait, on veut un droit à la sécurité,
13:57et d'une certaine façon,
13:59on veut refermer la porte derrière soi,
14:01derrière la dernière génération arrivée,
14:03parce qu'on revendique ce droit à la sécurité.
14:05La gauche n'a jamais
14:07considéré ces sujets-là de façon concrète,
14:09en s'y attaquant concrètement,
14:11considérant qu'elles étaient instrumentalisées par le Rassemblement National.
14:13Ce que fait Sandrino Roussola,
14:15c'est exactement dans la même veine.
14:17C'est-à-dire que c'est une façon...
14:19Sciemment, je ne sais pas, ou par bêtise,
14:21mais la gauche a failli sur les questions migratoires
14:23de façon extrêmement coupable,
14:25en considérant que comme ces sujets étaient
14:27instrumentalisés par le Rassemblement National,
14:29il ne convenait pas de s'en occuper concrètement.
14:31C'est une faute majeure. Le premier droit
14:33en France, y compris pour les populations
14:35populaires, c'est le droit à la sécurité.
14:37Dans le même, et je vous laisserai répondre
14:39Nicolas Pouvomonti, dans le même sens,
14:41vous avez ce communiqué de presse
14:43aujourd'hui du syndicat de la magistrature,
14:45qui dit que
14:47l'emballement
14:49de cette affaire autour
14:51du meurtre abject,
14:53je reprends les mots de Bruno Retailleau,
14:55de la nomination de Didier Migaud
14:57en tant que garde des Sceaux,
14:59depuis hier, l'hyper-focalisation
15:01des médias sur un fait
15:03criminel visant une femme,
15:05l'activation d'une rhétorique
15:07xénophobe et les classiques procès en laxisme
15:09de la justice,
15:11avait dénoncé l'existence d'un véritable droit
15:13à l'inexécution des peines. Voilà, je ne vais pas vous lire
15:15tout, mais voilà ce qu'écrit par exemple
15:17le syndicat de la magistrature.
15:19Pensez le crime à travers la question de l'immigration.
15:21Focalise le débat
15:23sur la question de l'expulsion des personnes étrangères
15:25en situation irrégulière et empêche
15:27de réfléchir aux solutions
15:29pour une peine juste et efficace.
15:31Voilà ce qu'écrivent une bonne partie
15:33des juges syndiqués
15:35de notre pays. Nicolas Pauvron-Montigny.
15:37Ce qui est certain, c'est que sur une large part
15:39de ces sujets migratoires,
15:41les dirigeants de la gauche politique
15:43électorale se trouvent aujourd'hui dans une espèce de double décalage.
15:45D'abord en décalage avec
15:47leur propre électorat. On a aujourd'hui
15:49entre deux tiers et trois quarts des Français, selon
15:51une enquête d'opinion, qui estiment que les niveaux d'immigration en France
15:53sont aujourd'hui trop élevés.
15:55Alors c'est jusqu'à 95% des électeurs RN.
15:57Mais c'est aussi, par exemple, la moitié des électeurs
15:59E élevés. Puisqu'on évoque
16:01Sandrine Rousseau, c'était ce que nous disait le sondage d'Oxa Backbone
16:03de juin 2023.
16:05Et un décalage aussi par rapport
16:07à ce qu'est la réalité de la gauche au niveau européen.
16:09De ce point de vue là, on a beaucoup parlé
16:11depuis deux ans, et à juste titre, de ce qu'on appelait
16:13le modèle danois. Le virage qui a été pris
16:15à Copenhague par les sociaux-démocrates
16:17danois sur ce sujet, et qu'ils
16:19continuent de porter aujourd'hui au niveau européen. Le Danemark
16:21est par exemple à l'avant-garde des demandes
16:23relatives à l'externalisation du traitement des demandeurs
16:25d'asile hors de l'UE, et aussi en décalage
16:27plus près de chez nous avec ce que fait aujourd'hui le SPD.
16:29En Allemagne, tout à fait. Qui annonce à la fois
16:31le rétablissement temporaire des contrôles aux frontières
16:33intérieures, et qui annonce la suppression
16:35des allocations pour les demandeurs d'asile
16:37rentrés dans l'UE par un autre pays
16:39que l'Allemagne. A titre de comparaison, aujourd'hui
16:41en France, ces demandeurs d'asile qui ne devraient pas
16:43déposer leurs demandes en France selon le règlement de Dublin
16:45Vous savez, le règlement de Dublin, c'est cette idée que
16:47quand on demande l'asile dans l'UE, on le fait dans le premier
16:49pays où on met le pied, ces demandeurs
16:51d'asile dublinais reçoivent une allocation pour les demandeurs
16:53d'asile. La France était déjà
16:55sur les principaux aspects de l'accueil et du séjour
16:57des étrangers, globalement plus attractifs
16:59que ses voisins. Au fur et à mesure
17:01que ses voisins restreignent leur voie d'accès,
17:03elle devient plus attractive en miroir.
17:05Ce qui est fou, en fait, c'est le
17:07fossé qu'il y a entre
17:09Sandrine Rousseau,
17:11le syndicat de la magistrature, et ce que pensent vraiment les
17:13Français. Parce qu'on voit bien que,
17:15quelle que soit l'appartenance politique
17:17des Français, en fait,
17:19ils demandent des mesures
17:21beaucoup plus sévères. Et là, demain,
17:23le Figaro publie un
17:25sondage de Doxa que je trouve assez intéressant
17:27et qui montre que, par exemple,
17:29sur quasiment toutes les propositions de
17:31Retailleau, 80%
17:33des Français considèrent qu'il faut les appliquer.
17:35Rétablir le délit pénal de séjour
17:37irrégulier supprimé depuis 2012
17:39par Hollande, 79%
17:41des gens, il faut le rétablir.
17:43Sur durcir les conditions d'octroi de titre de séjour
17:45pour les sans-papiers, 78%
17:47des Français considèrent
17:49qu'il faut effectivement les durcir.
17:51Et puis, il y a d'autres éléments.
17:53Par exemple, l'instauration des peines planchers, on est à 80%.
17:55Donc, globalement, on voit
17:57qu'il y a quasiment un consensus français
17:59pour serrer la vis
18:01et on est malheureusement face à
18:03une partie de la classe politique
18:05et une partie de la magistrature
18:07qui mènent un combat idéologique
18:09et qui ont
18:11des conceptions pénales qui sont
18:13à rebours de ce que les Français veulent.
18:15Que pensent, en quelques secondes seulement,
18:17parce que le temps nous manque, Nicolas Pouventier,
18:19le directeur général et cofondateur
18:21de l'immigration et de la démographie,
18:23est-ce que vous pensez que
18:25finalement, les Français auront
18:27gain de cause sur
18:29cette bataille qui est très
18:31lointaine et vous rappeliez
18:33cet accord de 68
18:35entre l'Algérie et la France,
18:37j'allais dire, le dernier
18:39amendement date de 2001, c'est-à-dire
18:41il y a 23 ans, c'est totalement ubuesque de se dire
18:43qu'on ne revient pas sur cet accord. Est-ce que
18:45les Français vont avoir
18:47gain de cause sur cette question de l'immigration ?
18:49La vraie difficulté, c'est qu'on se trouve
18:51aujourd'hui dans une situation où les grandes
18:53masses de l'immigration, je pense à l'immigration familiale,
18:55à l'asile, se trouvent hors
18:57de contrôle du politique. La Cour des Comptes,
18:59dans un rapport de 2018, avait estimé que
19:01seule la moitié des titres de séjour qu'on accorde
19:03aujourd'hui en France relève d'une vraie décision du politique.
19:05C'est globalement l'immigration étudiante et l'immigration professionnelle.
19:07Pour ce qui est de l'immigration familiale
19:09et de l'asile, ce sont des
19:11champs qui sont corsetés en amont
19:13par un certain nombre de traités, donc le droit européen
19:15en la matière et le droit de la CEDH,
19:17la Convention de Genève de 1951 sur le statut des réfugiés.
19:19Donc ça veut dire qu'il y a toujours un recours ?
19:21Ça veut dire qu'il y a toujours un recours et ça veut dire que
19:23on ne peut pas agir par la simple loi en la matière
19:25parce qu'il y a une logique de hiérarchie des normes qui fait que
19:27la loi ne doit pas aller à l'encontre des conventions internationales.
19:29Ou alors sortir des traités.
19:31Ou les renégocier, ou émettre des réserves
19:35dans ces directions-là. Et pour donner un exemple concret
19:37de ce que ça donne sur cette question de la Convention sur l'asile,
19:39cet été, la Cour nationale du droit d'asile
19:41a estimé que l'ensemble
19:43des femmes et des jeunes filles afghanes
19:45étaient susceptibles de bénéficier du statut de réfugié
19:47en France. Donc ça fait environ 20 millions de personnes.
19:49Sachant qu'avec l'asile vient ce qu'on appelle la
19:51réunification familiale, qu'il y a une sorte de version
19:53maximaliste au regroupement familial, sans critères
19:55de logement, sans critères de ressources.
19:57On voit où nous mène ce régime de l'asile qui est
19:59aujourd'hui complètement sorti du champ démocratique.
20:01Merci d'avoir été avec nous en direct sur Europe 1.
20:03Voilà, Pouvrot, montie !
20:05Dans un instant, on se retrouve pour la suite des débats.
20:07Je vous signale juste qu'Olivier Delacroix vous accueille
20:09pour la libre-antenne du lundi
20:11au jeudi à partir de 22h30
20:13juste après les années top 50.
20:15Vous pouvez dialoguer
20:17avec lui en toute liberté en appelant
20:19le 01 80 20 39 21.
20:21A tout de suite sur Rome.