Avec Gabriel Marvier, fondateur de l’association « Les Ombres » qui accompagne les jeunes confiés à l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE) dans leur insertion
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00:00Les enfants placés ou alors les enfants de la DAS, comme on le disait il y a quelques années du nom de ces DAS,
00:07ces Directions Départementales des Affaires Sanitaires et Sociales, organismes départementaux qui prenaient en charge
00:13le placement soit en famille, soit dans des centres d'accueil d'enfants hors pelin ou alors placés par la justice.
00:19Ces enfants dans une situation dramatique alors même qu'ils sont pris en charge très jeunes par l'État ou du moins ses services.
00:26Cette semaine le secteur de la profession de l'enfance a manifesté dans tout la France, c'était mercredi,
00:30dénonçant je cite un délabrement inédit de la protection de l'enfance.
00:34Quelle est la réalité et surtout comment pallier cette réalité ?
00:38On en parle avec Gabriel Marvillet, notre invité. Bonjour.
00:41Bonjour, enchanté.
00:42Bienvenue sur Sud Radio, enchanté également.
00:44Vous êtes le fondateur de l'association Les Ombres qui accompagne justement ces jeunes, ces enfants de la DAS comme vous dites,
00:50les jeunes qui sont confiés à l'aide sociale à l'enfance dans leur insertion.
00:53Donc ça veut dire une fois qu'ils sont majeurs, c'est ça ?
00:55Exactement, une fois qu'ils sont majeurs mais surtout une fois qu'ils peuvent commencer à s'insérer dans la vie professionnelle.
01:00Donc au sein des Ombres, nous nous accompagnons les jeunes qui ont à partir de 14 ans
01:04et ce jusqu'à ce qu'ils puissent sortir du système de l'aide sociale,
01:07qui les accompagne du coup jusqu'à 18 ou jusqu'à 21 ans s'ils bénéficient d'un contrat jeune majeur.
01:11Voilà. Alors très concrètement, ces jeunes sont soit dans des centres d'accueil, soit dans des familles d'accueil.
01:18C'est quoi à peu près la répartition entre les deux ?
01:20Alors la répartition, je pense qu'elle est beaucoup plus malheureusement en foyer.
01:23On manque beaucoup de familles d'accueil en France et de plus en plus au fur et à mesure des années.
01:27Sachant que l'accompagnement n'est pas non plus le même et n'est pas aussi riche
01:30selon qu'on est dans un foyer ou dans une famille d'accueil.
01:32Je dirais que la famille d'accueil a l'avantage d'apporter une certaine stabilité à l'enfant
01:36quand l'enfant n'en change pas d'une fois sur l'autre.
01:38Exactement, ce qui n'est pas toujours le cas.
01:40C'est-à-dire que souvent, des enfants placés ont une, deux puis trois familles d'accueil.
01:44Pourquoi ça change d'ailleurs ? En général, ce sont les familles qui en ont assez ?
01:46C'est que ça se passe mal par moment ?
01:48Pas forcément. C'est là-dessus, j'allais dire, le système qui fonctionne ainsi.
01:51Il y a beaucoup de défaillances. Vous mentionnez justement le délèbrement inédit
01:54et puis les manifestations de mercredi dernier.
01:56Là-dessus, pour moi, c'est aussi un constat qu'on partage aux ombres.
02:00Le système est défaillant. J'aimerais citer deux chiffres aujourd'hui sur votre antenne.
02:06Le premier, c'est que 25% des SDF vivants nés en France sont issus de l'aide sociale à l'enfance.
02:11Donc un quart des sans-domicile fixe français viennent de l'aide sociale à l'enfance.
02:15Ce sont les enfants qui ont été confiés à l'État ou du moins à ses services
02:18pour les élever à la place de ses parents qui étaient soit décédés, soit défaillants.
02:22Et c'est incroyable.
02:23Exactement. Et la deuxième statistique est tout aussi effarante.
02:2670% de ces jeunes quittent le système sans diplôme.
02:29Et on sait à quel point le diplôme est important de nos jours pour réussir
02:32et à s'insérer dans la société française.
02:33Sans le diplôme, ça veut dire sans même le niveau brevet.
02:35Sans même le brevet des collèges. Alors parfois, c'est encore plus grave.
02:38Cette semaine, un scandale a éclaté dans le Tarnéga.
02:41Tarnéga, une affaire, une sombre affaire dans un foyer de pédocriminalité.
02:45On ne va pas y revenir. Revenons maintenant sur ce qu'on peut faire.
02:48Vous avez parlé du taux de chômage inédit, du nombre, de la proportion d'enfants placés
02:51ou d'anciens enfants placés parmi les SDF.
02:54Vous, vous les accompagnez comment ? Vous avez 500 bénévoles.
02:57Alors on en a maintenant plus de 800. La mobilisation citoyenne fonctionne justement.
03:01Et on a pu aider un peu plus de 2200 jeunes depuis notre création il y a seulement 4 ans.
03:05Comment est-ce qu'on les accompagne ? C'est très simple.
03:07On a créé une plateforme qu'on a co-construite avec les services d'accueil familial
03:10ou avec lesquels on travaille pour que le jeune de l'ASE,
03:13quel que soit justement son département d'origine,
03:15quel que soit le foyer dans lequel il est placé, puisse déposer sa demande.
03:18Sa demande, elle est là pour répondre à un besoin,
03:20que ce soit justement l'aider dans ses candidatures Parcoursup,
03:23que ce soit l'aider dans la rédaction de sa lettre de motivation, de son CV.
03:27Pour lutter contre l'électronisme.
03:30Alors l'électronisme, c'est en gros l'incapacité à se servir d'Internet par exemple
03:34ou des logiciels, ça touche les personnes âgées mais aussi ces jeunes-là du coup,
03:37tellement ils sont déconnectés de l'apprentissage que tout un chacun peut faire.
03:41Exactement, mais on ne se rend pas compte forcément des écarts.
03:43Moi si je dois résumer rapidement l'aventure des ombres,
03:46on est parti de ce constat de défaillance structurelle du système
03:49et aussi de tout ce qui malheureusement empêche la bonne insertion de ces jeunes.
03:54C'est-à-dire qu'ils sont poussés vers des formations courtes
03:56puisque leur accompagnement s'arrête dès les 18 ans,
03:58il manque de capital social, il y a un problème justement de fracture numérique
04:02et c'est face à ce constat qu'on en a opéré un second,
04:05qu'il existe par contre beaucoup de bonnes volontés en France,
04:08beaucoup de gens qui ont envie d'avoir un impact, un impact positif sur la société
04:11et notre idée justement plutôt que d'ériger des murs,
04:13ça a été de construire des ponts entre ces populations
04:15pour qu'elles puissent enfin se parler et s'aider.
04:17En gros, ils s'entraident et c'est ce qui se passe grâce aux ombres.
04:21Concrètement, vous avez parlé de ces jeunes, quel que soit leur département,
04:24ça a son importance parce que contrairement à ce qu'on pourrait penser,
04:27on n'a pas les mêmes chances selon qu'on est un enfant placé par exemple en Seine-Saint-Denis
04:31ou dans les Hauts-de-Seine, vous allez me dire un département est riche,
04:33l'autre est pauvre, ça devrait être plus facile dans les Hauts-de-Seine,
04:35c'est tout le contraire.
04:36Alors effectivement, les disparités entre les départements sont très impressionnantes
04:40et c'est contre cette injustice sociale que nous luttons justement aux ombres
04:44avec l'objectif de l'anniveller par tous les moyens possibles.
04:47On a l'avantage d'avoir une communauté de bénévoles qui est répartie dans toute la France
04:50et qui donc peut permettre d'aider les enfants aussi dans toute la France.
04:53Pour moi en fait, si j'ai un mot à passer, c'est que ce mentorat,
04:57il est là pour changer des vies.
04:59On dit souvent le don du sang sauve des vies, le mentorat change des vies.
05:02Alors moi j'ai un appel à faire aujourd'hui justement de mobilisation citoyenne,
05:05mobilisez-vous, n'hésitez pas justement à changer la vie de ces jeunes,
05:09ils en ont besoin.
05:10Alors comment on fait pour s'inscrire par exemple sur les ombres ?
05:12Alors c'est très simple, on a un site internet, c'est www.les-ombres-du-sys.com
05:18Là vous aurez justement le bouton si vous êtes un jeune de l'ASE,
05:21vous avez envie justement d'être aidé, vous avez le bouton si vous êtes mentor,
05:24vous avez le bouton si vous avez envie de faire un don.
05:26Le site est très bien structuré, il vous permettra aussi de connaître un peu plus
05:29sur les ombres puisque aujourd'hui en 5 minutes il est difficile de tout détailler
05:32justement sur le fonctionnement de ce système.
05:34Mais aller plus loin, n'hésitez pas.
05:35Merci beaucoup et bon courage en tout cas Gabriel Marvier,
05:38je rappelle que vous êtes le fondateur de l'association Les Ombres.
05:41A bientôt sur Sud Radio !