Avec Benjamin Barou-Crossman, comédien.
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00:00 Suite à 7h34, on parle d'une école qui croit en l'égalité des chances.
00:04 Bonjour Benjamin Barouk-Rossmann.
00:11 Bonjour Laurence.
00:12 Merci d'être avec nous ce matin.
00:14 Avec plaisir.
00:15 Vous êtes comédien, metteur en scène et avec votre compagnie TBNTB,
00:19 vous avez lancé l'école de l'égalité des chances à Alfortville en Ile-de-France.
00:24 Une école qui forme gratuitement pendant un an des jeunes des quartiers populaires
00:28 à l'excellence artistique.
00:30 Vous considérez qu'ils méritent l'excellence comme tout le monde, c'est ça ?
00:34 On est entièrement d'accord, ils méritent l'excellence artistique.
00:38 Et d'autant plus que parfois, les artistes dits engagés de l'excellence
00:45 ne viennent pas toujours sur ces terrains-là.
00:47 Et donc nous sommes primordial pour rétablir l'égalité
00:51 que les artistes de l'excellence dans tous les arts
00:55 viennent dans ces quartiers prioritaires et forment notre jeunesse
00:59 et notamment parfois ces jeunes qui sont sortis du cadre scolaire
01:03 et qui sont, on va dire, par moments, qui ont besoin de retrouver le cadre
01:09 via l'adulture et via l'art.
01:11 Oui, c'est ça, le cadre, les outils, via l'art.
01:14 Alors vous le dites, il y a pas mal de profs, d'artistes de renom,
01:17 on peut en citer quelques-uns ?
01:19 Bien sûr, donc on a eu la chance, voilà,
01:22 pour cette aventure de l'École Égalité des Chances.
01:25 Dans ces étoiles, Marie-Claude Pietragala et son compagnon,
01:29 le chorégraphe Julien Dereault.
01:32 L'acteur et metteur en scène au parcours remarquable Robin Renucci,
01:36 directeur de La Criée à Marseille.
01:38 Jean-Claude Cotillard, le papa de l'actrice mondialement connue Marion Cotillard.
01:43 Et puis d'autres qui vont venir avec nous participer à cette aventure.
01:49 Bien sûr, les petites mains, les associations, les gens de terrain,
01:53 puisque l'idée c'est d'aller vers ces quartiers,
01:55 de jouer en bas des tours d'immeubles,
01:57 d'aller dans les maisons pour tous, dans les centres sociaux.
02:01 Il faut, on a bien vu lors des récentes émeutes,
02:04 il faut se réapproprier, il faut que ce jeu de jeunesse,
02:07 il ne suffit pas, il faut qu'ils s'approprient ces lieux de culture,
02:10 il faut qu'on vienne à eux pour qu'ensuite ils viennent à nous.
02:12 Oui, c'est ça.
02:13 Alors vous le dites aussi, l'objectif,
02:15 pour certains ça va être peut-être de les préparer
02:17 au concours des grandes écoles du spectacle vivant,
02:19 et pour d'autres, tout simplement, de retrouver le chemin des études.
02:22 C'est ça Benjamin Barouch-Grossman ?
02:24 Oui, de retrouver le chemin des études,
02:27 de retrouver le chemin de l'emploi, quel qu'il soit,
02:30 puisqu'on sait très bien qu'ils ne vont peut-être pas tous devenir des artistes.
02:33 Mais en tout cas, ils auront appris à prendre confiance en eux,
02:37 à mieux s'exprimer pour certains d'entre eux,
02:39 puisque parfois il y a des problèmes à l'oral et à l'écrit.
02:42 Donc il y aura aussi des cours du soir en langue française.
02:44 Donc pour leur permettre aussi, quand ils vont avoir un entretien d'embauche,
02:48 d'être plus solides.
02:49 Et puis il y a tous les métiers techniques autour du théâtre,
02:52 mais aussi autour de la danse.
02:54 Il y a le son, il y a la lumière.
02:55 Et on voit bien que le théâtre ou ces arts-là,
02:58 on apprend à travailler ensemble,
03:00 tout en ayant sa propre individualité, sa propre différence,
03:05 et comment ces différences-là, sur un plateau de théâtre,
03:08 arrivent à travailler ensemble.
03:10 Et c'est tout ça le projet de l'École Égalité des Chances,
03:12 et on voit bien qu'aujourd'hui, c'est plus que nécessaire,
03:15 avec tout ce qui se passe, avec l'actualité,
03:17 d'œuvrer même à l'Égalité des Chances aussi, pour les femmes.
03:22 Ce sera un des grands sujets de cette école.
03:24 Alors là, vous avez déjà peut-être commencé concrètement
03:27 des ateliers de mise en scène, d'écriture.
03:29 Comment vous les avez sélectionnés, ces jeunes, en fait, des quartiers ?
03:32 Alors, à la fois, on passe par les associations,
03:35 mais pour être très sincère avec vous,
03:37 comme on cherche les fameux "décrocheurs",
03:39 ceux que le système n'arrive plus à toucher,
03:42 qui sont sortis du cadre,
03:44 on va en bas des tours d'immeubles.
03:46 Moi, j'habite dans le quartier Sud-Alfort-Ville,
03:49 qui est un quartier prioritaire, et on se balade.
03:52 On va dans les cafés, on va en bas des tours d'immeubles,
03:55 on passe par les réseaux sociaux,
03:56 puisque maintenant, aujourd'hui, Snapchat, etc.,
03:59 c'est très à la mode.
04:00 Donc, on passe par leur code à eux,
04:02 pour que petit à petit, ils s'approprient peut-être nos codes à nous.
04:05 Mais comment ils réagissent quand vous leur dites
04:08 "Bon, ben voilà, j'ai monté une école,
04:10 on peut vous enseigner pendant un an du théâtre, de la danse."
04:14 Comment ils réagissent ? Est-ce qu'ils disent
04:16 "Ah non, mais c'est pas pour moi." ?
04:17 Parce que voilà, la culture, ça a aussi une image un peu élitiste.
04:20 On est d'accord.
04:21 Il faut encore rappeler que 80% des Français
04:24 ne sont jamais rentrés dans une salle de spectacle,
04:27 donc ça interroge aussi, et les artistes doivent s'interroger.
04:30 Et bien, pour être très sincère avec vous,
04:32 au début, il y a les a priori.
04:33 Par exemple, moi, quand je leur ai dit "On va faire du théâtre",
04:35 ils m'ont dit "Non, c'est pour les fous."
04:37 Ah oui, complètement.
04:39 J'ai eu "Ouh, tel théâtre de la ville, c'est pas pour nous."
04:45 Etc.
04:47 Donc, il faut petit à petit, on va dire, aller vers leur code.
04:51 Et en Ile-de-France, surtout dans les quartiers, dans les banlieues,
04:55 là où il y a une puissance, c'est par le hip-hop.
04:58 Que ce soit le rap ou la danse.
05:00 Donc, petit à petit, je leur dis "Fais-moi un texte de rap,
05:03 ou sinon, si c'est via le théâtre du corps,
05:06 "Galala, dérouo, fais-nous une danse hip-hop."
05:09 Et puis, petit à petit, on va peut-être t'amener à la danse classique.
05:12 Moi, petit à petit, je vais peut-être les amener à Molière.
05:14 Mais pour pas qu'ils soient inhibés, je passe par leur code à eux.
05:18 C'est ça. En tout cas, belle initiative,
05:20 l'école de l'égalité des chances avec Benjamin Barouk-Rossmann.
05:23 Merci beaucoup de nous avoir parlé ce matin,
05:25 et belle journée à vous.