"Français parlons en", émission avec Boualem Sansal - La culture dans tous ses états

  • il y a 4 jours
André Bercoff et Céline Alonzo reçoivent Boualem Sansal

Retrouvez La culture dans tous ses états tous les vendredis avec Céline Alonzo et André Bercoff à partir de 13h.

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##LA_CULTURE_DANS_TOUS_SES_ETATS-2024-10-03##

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Transcription
00:00éthique, du globish, de la langue anglo, du franglais, dans ce je cause français, c'est un plaisir, Céline.
00:09Eh oui, je cause français, c'est un vrai plaisir, dit notre chère Léo Ferré, effectivement, mais de quoi ?
00:15Le français est-il le nom ? Une religion, une bataille perdue, une grande victoire, un programme de sélection ethnique,
00:21un logiciel de traduction, quoi d'autre ? Cette question, vous la soulevez dans votre nouvel essai, Boilem Saint-Sal.
00:28Bonjour à vous et merci d'être avec nous sur Sud Radio. Alors, vous publiez le « Français parlons-en » aux éditions du Serre.
00:36À vous lire, la langue française se porte vraiment très mal, et vous n'êtes pas le seul à le penser, mais expliquez-nous en quoi est-ce grave ?
00:44Docteur Boilem Saint-Sal.
00:47La langue transporte notre âme, elle exprime notre âme. C'est ce qu'il y a de plus profond chez l'humain, il l'exprime par la langue.
00:56Il n'y a aucun autre moyen, d'ailleurs, d'exprimer le fond de... C'est les mots. Les mots sont magiques, ils sont pleins de poésie, pleins de mystère,
01:04et ça convient bien à l'être humain. Et de plus en plus, on remplace cette langue qui exprime notre âme par une langue du marché,
01:12une langue des institutions, une langue professionnelle. Et ça, c'est dramatique, parce qu'au fur et à mesure, on perd un peu de notre âme.
01:20Eh oui, effectivement, aujourd'hui, c'est comme vous le dites dans votre livre, c'est le triomphe du globiche et du wesh-wesh.
01:27L'invasion, effectivement, de l'anglais et de l'arabe dans notre langue participe vraiment à notre déclin, selon vous ?
01:33Moi, j'ai rien contre ces langues. Le globiche, il a sa place dans la société, le wesh-wesh aussi.
01:39Non, c'est qu'il y a derrière un processus de colonisation, en fait. Des idées qui ne sont pas françaises s'installent en France et, petit à petit, colonisent les...
01:50Quelque part dans le livre, je dis que les Français sont colonisés par eux-mêmes. Moi, je considère des gens, comme vous avez cité tout à l'heure Mélenchon et compagnie,
02:00sont des colonisateurs. Ils colonisent la France et la langue française en utilisant un répertoire soviétique, vénézuélien.
02:09Non, voilà, la France... — Ah oui, même sur le plan des idées. C'est-à-dire que quand, par exemple, Mélenchon parle de Chavez et compagnie,
02:15il a besoin de puiser ses références ailleurs. C'est ça ? — Oui, voilà. C'est ça. Il faudrait qu'on apprenne l'espagnol vénézuélien pour...
02:24— Oui, exactement. Mais revenons même à la langue. C'est quand même frappant. Bon, on peut vous dire... Oui, attendez, vous êtes... OK, OK.
02:31Mais qu'est-ce que vous voulez quand j'entends effectivement le teasing ? Vous voyez, on dit on va faire un teasing. Ou alors, par exemple,
02:38quand il y a les grandes... Dans les supermarchés, on dit c'est le Black Friday. On dit même pas Vendredi noir, etc. On dit Black Friday.
02:46Est-ce que c'est pas là ? Est-ce qu'on n'a pas, de ce point de vue, perdu la partie ? — Ah bah oui, oui. Non, mais on l'a déjà perdue.
02:54— On l'a déjà perdue, oui. — Il faut déjà nommer les choses. C'est une défaite. Mais une défaite n'est pas définitive.
03:00Une défaite, c'est pour, voilà, rebondir, reconstruire. Donc ce livre-là, c'est pour appeler à la reconstruction de quelque chose.
03:07— Oui, vous voulez dire que... — Une réinvention de quelque chose. — Vous allez même plus loin. Voilà. C'est ça. Mais c'est moi, André.
03:12Vous dites même que le globish, c'est un viol accepté. Il est un vecteur de la globalisation forcée du monde.
03:19— Ah bah oui. C'est tout ce que je l'avais dit il y a un siècle. Quand le viol est inévitable, détends-toi et profites-en.
03:24Donc on est dans cette démarche aujourd'hui. L'anglais, c'est pratique. Ça rend beaucoup de service. Ça nous viole.
03:31Mais enfin, c'est agréable de parler en anglais. — C'était la phrase « Ferme les yeux et pense à l'Angleterre ». C'est ça.
03:37— Juste, Boulême Sansalle, par rapport à ce que vous disiez sur la défaite, etc., au fond, est-ce que vous pensez vraiment,
03:43et je voudrais que vous développiez... On a perdu une bataille, que ce soit le globish ou autre, etc., sur le plan des idées.
03:50Mais on n'a pas perdu la guerre, à votre avis ? — C'est difficile. Où placer le curseur, c'est extrêmement difficile.
03:59On peut parler par exemple de défaites... La France a perdu sa culture. — Elle l'a perdue, à votre avis.
04:05— Elle a perdu une bataille politique. Elle n'arrive pas à trouver sa place dans le monde. Elle est chassée de partout.
04:11Elle n'arrive pas à trouver sa place, à s'imposer en Europe. Donc il y a une bataille politique perdue, une bataille culturelle,
04:17une bataille linguistique. — On est vraiment à la ramasse, selon vous ? — Oui, oui. Franchement, on est à la ramasse.
04:23C'est d'autant plus grave qu'on ne l'accepte pas. On ne fait pas ce constat pour rebâtir. — On ne fait pas ce constat,
04:33et donc on ne peut pas se défendre si on ne fait pas le constat. C'est ça. — Voilà. Absolument. Il faut nommer les choses.
04:37Camus l'avait dit. Il faut nommer les choses. Et après, les choses... Je crois qu'après, c'est plus facile.
04:43Quand on sait de quoi on parle, on peut avancer. — Mais le français, effectivement, a longtemps été la langue de la culture,
04:50de la liberté, de la beauté, de la révolution. Effectivement, de l'art de vivre, même, dans la légèreté, comme vous le dites dans votre livre.
04:57Est-ce qu'on a perdu la volonté de puissance ? — Ah, voilà. C'est le terme. Voilà. Nietzsche disait que là où la volonté de puissance
05:07fait défaut, il y a un éclat. La France a perdu cette volonté de puissance qui l'a portée dans le monde, qui a fait qu'elle parlait au monde.
05:16Enfin la France disait « Je parle au monde ». Alors c'est vraiment... Et là, c'est fini. On est à la ramasse, là, carrément.
05:25— À qui la faute, alors, selon vous ? Qui sont les fautifs ? — Un peu à tout le monde, si c'est difficile. La responsabilité, elle est horizontale et verticale.
05:33Alors horizontale, c'est tout le monde, y compris le peuple. — Y compris nous-mêmes. — Et puis verticalement, ça commence déjà avec le président.
05:42Macron, aujourd'hui, fait tout pour finalement achever la culture et la langue française. — Il l'a ni, pratiquement. — Il l'a ni, carrément.
05:50Donc il faut peut-être un peu le rappeler à l'ordre. Mais je pense pas qu'il soit l'homme des renouveaux. Il est l'homme d'une situation perdue, d'une guerre perdue.
06:00Il faut s'inventer de nouveaux héros. — Et pourtant, moi, je m'en sors. Il y a des livres qui paraissent... Il y a des... Et puis ils sont intéressants.
06:10Il y a quand même beaucoup encore des gens, encore une fois, de l'extérieur ou de la francophonie – on va en reparler avec Céline – qui écrivent en français
06:19et qui écrivent de la belle langue de notre pays. Mais vous dites que ça se raréfie, en fait, l'air qu'on respire, l'air français qu'on respire est plus rare.
06:29— Ben c'est comme dans le nucléaire ou dans la bombe atomique. Il faut une masse critique. Si la masse critique n'est pas atteinte, il n'y aura pas réaction en Chine.
06:37Donc on est quelques-uns, effectivement, des Jean-Baptiste qui hurlent dans le désert. Il faudra qu'on soit beaucoup plus nombreux pour que ça crée un courant de pensée
06:46qui, ensuite, va s'inventer des démarches, des programmes et passer à l'action. Bon, moi, je suis dans l'incantation. On est quelques-uns à titiller les choses,
07:00mais ça ne fait pas vraiment bouger le... Par exemple, je dis, moi, il faudrait aujourd'hui, au niveau de l'Académie française, au moins une moitié de francophones.
07:10Il y a un seul francophone aujourd'hui. C'est un Libanais. — Amine Mahlouf, le secrétaire perpétuel. — Amine Mahlouf. Bon, j'ai rien contre les autres. Bon, mais est-ce que le français, c'est toujours le français ?
07:21Est-ce que c'est pas le français francophone ? Donc il y a des stratégies. Mais si on parle des francophones, ce français extérieur est porté par des États. Donc il faut travailler avec eux aussi.
07:35— Bien sûr. Bien sûr. — La France, 60 ans après, n'est pas arrivée à amener l'Algérie à adhérer à la francophonie.
07:43— Ah, parce que l'Algérie n'est pas dans la francophonie. — Non. C'est le seul pays francophone au monde qui n'est pas dans la francophonie. Alors que c'est le plus important.
07:50— Oui, de loin. — Voilà. Et donc ils ont pas su convaincre... Peut-être qu'il y avait derrière une démarche un peu néocoloniale. À un certain moment, on a bien vu que la francophonie était un choix de bataille de néocolonialisme.
08:06— On a très bien vu avec Sarkozy. — Aujourd'hui, l'enseignement du français régresse en Algérie. — Oui. — Alors oui, au niveau de l'institutionnel, oui. Mais ils s'enseignent à travers Internet.
08:20Parce que les Français sentent qu'ils ont besoin des Français. Parce qu'une partie des Algériens vivent en France. Donc il y a un lien charnel avec ce pays-là.
08:28Et il y a aussi une volonté de peut-être, comme moi, de venir un jour s'installer, comme je suis en train de le faire, de venir s'installer en France. Et donc c'est un anglais... Je suis en train d'analyser ce français qui est en train de naître et très très curieux, parce que bon, c'est du français, mais il porte des valeurs qui ne sont pas françaises.
08:53C'est ça qui est étonnant. C'est-à-dire qu'on prend la coquille, mais pas le fruit qui est à l'intérieur de la coquille. — Vous voulez dire que le verre est dans le fruit. Le verre du cosmopolitisme est dans le fruit.
09:02— Oui, parce que le français est devenu un vecteur de l'islamisme, dans la mesure où l'islamisme s'installe ici. Il a besoin... Il veut convertir qui ? Ben c'est les Français. Donc il faut qu'ils parlent sa langue et qu'ils connaissent ses coutumes.
09:16Et donc ils s'approprient le français comme instrument pour le retourner contre eux. Et ils réussissent parfaitement, à travers les quartiers, les mosquées, les associations culturelles et culturelles.
09:28C'est la tactique du judo. On récupère l'arme chez son adversaire et on la retourne contre lui. — Mais pardon. Est-ce que cette poussée du français, disons, utilisée par les islamistes,
09:43est-ce qu'il n'est pas quand même très minoritaire par rapport au français utilisé par le côté gloubi, justement, le gloubi boulga de la langue universelle ?
09:53Est-ce que vous pensez qu'ils cèdent les uns les autres, en fait, qu'il y a une synergie entre les deux, voulu ou pas ? — Un de nos grands écrivains, hélas assassiné par les islamistes,
10:08nous a laissé plusieurs phrases formidables. Et notamment, il faisait remarquer qu'il y avait deux Algéries. Une Algérie qui avance et une Algérie qui recule.
10:18Je crois qu'aujourd'hui, on peut dire ça de la France. Il y a une France qui avance, bien sûr. Dans certaines régions de France, les choses vont plutôt bien. Les gens sont heureux.
10:29Les choses se passent bien. Et puis dans certains endroits, les choses se passent mal, de plus en plus mal. C'est la France qui recule. C'est l'ascenseur. L'ascenseur monte, le contrepoids descend. On en est là, quoi.
10:44— Et lequel va le plus vite ? C'est ça. — Oui. Et vous dites même dans votre livre qu'un jour, on parlera le chinois, ce Boilem Sansalle.
10:53— Vous pensez qu'on va être aussi... Notre langue va être envahie par le chinois, bientôt ? — C'est garanti, ça. On commence beaucoup... Les jeunes étudiants vont de plus en plus dans la filière chinoise, parce qu'ils allaient sur l'anglais, sur l'allemand.
11:11Ça, c'est le chinois. On choisit le chinois. Il y a un peu d'exotisme, un peu de romantisme à cela. Mais il y a quand même derrière une réalité. La Chine avance à petits pas. Donc on ne verra jamais le moment où la Chine va nous coloniser. On ne le voit pas.
11:28Et c'est comme l'humidité. Elle est là. Elle infiltre les murs doucement, doucement. On ne voit pas jusqu'au jour. On dit « Tiens, ça commence à sentir le moisi ».
11:37La route du soir va être envahie par la route de la soie. — Oui, absolument. — Oui, absolument. — Oui. En tout cas, dans votre livre, ce qui ressort, c'est que vous ne comprenez pas effectivement, et vous le dites textuellement, vous ne comprenez pas pourquoi les Français cèdent devant tout ce parlé débilitant, dites-vous précisément.
11:54Pourquoi cette soumission ? Pourquoi on accepte ? — C'est la facilité. C'est tout simplement la facilité. Il y a un moment où il est plus facile de s'exprimer en anglais. Parce que maintenant, on voyage beaucoup. Donc voilà, on s'exprime très souvent en anglais.
12:09Le français le plus compris... Moi, je voyais beaucoup dans le monde. Il y a 15-20 ans, le français me suffisait. J'arrivais toujours à m'exprimer à l'étranger.
12:19— Vous voyagez dans le monde. Avec le français, vous débrouillez. Maintenant, c'est fini. — Non mais ça, c'est fini. Franchement, il faut impérativement apprendre rapidement l'anglais. Donc il y a la nécessité et puis il y a la facilité.
12:31Il est plus facile d'apprendre l'anglais d'aéroport que le français académique. C'est ça, aussi. — Oui, tout à fait. Mais il faut quand même rappeler que notre langue reste quand même la 5e langue la plus parlée dans le monde.
12:45— Oui, mais voilà. Ça, c'est... Oui, le nombre de locuteurs, on le cite. — C'est décommuniqué, ça. — Ça veut rien dire. Le Mexique fait partie de la francophonie. Ils ont 3 locuteurs en français.
12:58On le compte comme... Voilà. Et l'Algérie, qui fait 40 millions d'habitants, qui sont tous francophones. On ne le fait pas partie de la francophonie. — Mais justement, le non-dit de votre livre... Enfin le non-dit, vous le dites, mais je dirais la ligne rouge,
13:13mais qui n'est pas comme ça. Comment vous expliquez... Vous l'avez parlé, vous dites... Par rapport à l'académie, vous avez dit qu'il serait bien d'avoir une moitié de francophones.
13:21Qu'est-ce qui fait... Moi, c'est vrai que c'est un problème. Qu'est-ce qui fait qu'on a raté la francophonie ? C'est une arme formidable. C'est une arme... Je dis pas letale. C'est pas une arme de guerre.
13:30C'est une arme de paix et de compréhension d'ouverture. Et la francophonie, mais je vais vous dire, dans les médias, on n'en parle jamais. Ça n'existe pas.
13:39C'est comme s'il existait. Oui, on parle de tel ou tel auteur. Mais par exemple, le fait que Samuel Beckett ait écrit en français, le fait que Milankoun Naira ait écrit en français,
13:50oui, mais on ne l'a jamais célébré. Voilà. Ah, c'est bien. Ils sont avec lui. Ils écrivent. Voilà. — Oui. On ne sait pas, au fond. On ne sait pas trop.
13:59Il y a peut-être des considérations politiques. C'est que beaucoup de pays francophones sont d'anciennes colonies de la France. Donc il y a une relation au lendemain de l'indépendance.
14:07Il s'est installé quelque chose, un phénomène d'amour-rejet. — Attraction-répulsion. Ouais, amour-rejet. — Moi, je me souviens jusque dans les années... Début des années 80, on était très amoureux de la France et de sa culture, vraiment.
14:20Et puis bon, les choses commencent à changer. Il y a aussi le fait que la francophonie coûte cher. Ça se finance. Et la France n'a pas su trouver les moyens à mettre au service de la francophonie.
14:34— Oui, les alliances françaises, etc. — Les alliances, les instituts français, la coopération culturelle, financer des bourses, développer des choses ensemble, faire du partenariat pour faire des films, pour faire du cinéma, pour...
14:48Bref, à un moment donné, la francophonie a reculé pour cette raison-là. Quand Sarkozy est arrivé au pouvoir, avec la crise des suprêmes, première décision, on l'a coupé dans la culture.
15:01Aussi bien à l'intérieur, en France, intramuros, que dans les pays francophones. — Dans les pays francophones. On a commencé par couper dans les budgets de la culture.
15:12— Voilà. C'est le plus facile. Puis la culture, on dit « Bon, mais de toute façon, ça va repartir. C'est comme l'heure ». Mais elle repousse. Les usines ne repoussent pas. Et il faut sauver les usines.
15:21— C'est sûr. — La culture, ça paraît... Bon, on peut pas attendre. C'est séculaire, ça. C'est pas sur le même temps.
15:29— Mais remarquez, on a coupé autant d'industries que... — Oui, au final, oui. On a coupé autant là que là.
15:35— En tout cas, par quelle sursaut peut-on sauver notre langue, Boilem Saint-Saël ? On va en parler dans un instant sur Sud Radio.
15:42— Sud Radio. — Parlons vrai. — Parlons vrai. — Parlons vrai. — Parlons vrai. — Hommage à la langue occitane, André Bercoff. Il est un grand défenseur des langues régionales.
15:50Boilem Saint-Saël, dans votre livre, vous le dites, vous l'écrivez. Il est loin le temps où, en France, on parlait couramment 50 langues.
15:57— Ah oui, c'était... La France est conçue sur ses provinces. Donc la véritable France, c'est celle-ci. C'est la France des provinces, donc des 50 langues.
16:07Et le français est une moyenne. On a additionné tout cela pour construire quelque chose qui, somme toute, est artificiel.
16:15Mais elle est riche de toutes les richesses régionales. C'est vraiment très étonnant. On ne voit ça, d'ailleurs, qu'en France.
16:24Par exemple, en Allemagne, aussi, les Landes ont gardé leur langue. Mais elles se sont difficilement agglomérées au sommet pour...
16:34— Alors qu'elle a été faite en France. C'est vrai. — Alors qu'en France, ça s'est fait assez naturellement. Quand il y a eu des résistances,
16:39notamment au niveau de la Bretagne et de la Corse, en fait, certaines régions ont tardé longtemps à rejoindre, à rentrer dans la francisation.
16:50— Eh oui. Ces langues régionales, on les a un peu réprimées en France. Est-ce une erreur de notre part de ne les avoir autant considérées ?
16:59— C'est-à-dire qu'à un moment donné, elles ont pu paraître comme étant sédicieuses. C'est-à-dire qu'il y avait quand même une sédition.
17:06— Oui. Par exemple, indépendantistes, qu'ils soient corses ou bretons... — Oui. Si on veut empêcher la sédition, il faut imposer une langue d'autorité.
17:14Ça, c'est... Si les gens s'expriment dans leur langue, qui devient un emblème. Elle n'est plus une langue, elle est un emblème, un discours, une idéologie.
17:23— Et d'ailleurs, Céline, je voudrais peut-être lire ou vous voulez le lire, le passage magnifique dans le livre de Boislem Sansalle.
17:33— Oui. Effectivement, quand il parle de l'enseignement de l'histoire des langues, vous prônez cet enseignement. Et à ce propos, vous écrivez ceci,
17:40même sans rien savoir de M. Jourdain et du sieur Jean-Baptiste Pauquelin, les petits Français à quelle qu'ethnie, tribu ou faction qu'ils appartiennent,
17:48s'extasieraient de s'entendre baragouiner la belle prose de leur pays. Trop tard, ils ont trop chanté Sacré Charlemagne et leurs parents trop dansés sur les tubes.
17:58Abétissants de mai 68, les voilà pour l'heure, plus du côté des mangas psychédéliques, des tweets éclairs, des souras impitoyables et des sitcoms d'âes chiens sur le net
18:08que des libelles mélancoliques du Vicomte de Châteaubriand. Belle plume, Boislem Sansalle.
18:14— Je crois que, oui, c'est le jour où les Français vont redécouvrir leur langue, ils vont tomber sous le charme. Voilà. Il faut leur parler un vrai français. Et ça va parler à leurs oreilles.
18:26Ça va réveiller les choses. — Ça, c'est les instituteurs. Ça, c'est les profs. C'est leur boulot. Les parents, bien sûr. — Ah oui, absolument. Ça commence déjà dans la famille.
18:34— Dans la famille aussi, c'est vrai. — À la famille, on apprend aux enfants à bien prononcer, à construire des phrases et pas des mots. Parce que les enfants parlent des mots.
18:46« Je », « non », « manger ». Donc il faut leur apprendre à construire des phrases. Et de plus en plus compliquées. Alors évidemment, sujet-verbe-complément, mais on l'articule.
18:57Une langue, à un moment donné, doit atteindre le récit. Donc on récite. On dit un mot, on fait des phrases. Donc ça permet d'introduire de la logique et de continuer dans l'esprit de l'enfant.
19:11Et puis ensuite, on passe au récit. On lui raconte quelque chose. — Eh oui. Alors Boislem Sansalle, revenons à votre livre « Le français parlons-en ».
19:19C'est un cri d'amour à la langue française. Alors vous, vous êtes francophone de naissance. Comment vous est venu cet amour de notre langue ?
19:26— L'école. L'école de la République française. Voilà. Moi, je suis né évidemment à l'Algérité française. Donc j'étais à l'école républicaine.
19:34Et c'était très beau, quoi. On nous a appris le français et la République française. — Est-ce que vous aviez comme moi à Beyrouth nos ancêtres les Gaulois ?
19:42— Les ancêtres les Gaulois. On a chanté cela en rang. Mais la France a été un excellent colonisateur culturel. — Tout à fait.
19:52— Très mauvais colonisateur politique. Elle n'a pas pris conscience que les gens, ils ont une culture, ils ont une identité, qu'il faut mélanger ces choses-là
20:00et essayer de construire quelque chose ensemble. Mais sur le plan culturel, c'était fameux. — Eh oui. Alors vous, par exemple, quels sont les...
20:06— Elle nous a francisés en 2 temps 3 mouvements. Elle nous a fait aimer cette langue. Elle nous a fait aimer la poésie française. Elle nous a fait aimer
20:13les grands auteurs, Labartine, Victor Hugo. C'était presque demi-dieu. C'était plus un écrivain. C'était un prophète.
20:23— C'est vrai. Écoutez, quand vous pensez qu'en Argentine ou Liban et ailleurs, on pouvait dire « Ariane, ma sœur, de quel amour blessée vous mourez de ce bord où vous fûtes laissée ».
20:34— Fabuleux. Fabuleux. Je crois que nous avons un auditeur. Michel. Bonjour, Michel. — Oui, bonjour. Bonjour, André. Et merci de me recevoir sur votre ligne.
20:49Et c'est plutôt une remarque que je voudrais faire à M. Buémez-Françal, qui est quelqu'un que j'écoute avec beaucoup d'attention sur les réseaux en particulier.
21:02— Alors c'est sur sa vision actuelle de la langue française. J'aimerais lui donner simplement un petit... J'aimerais lui donner entièrement raison.
21:17Mais en fait, je ne peux pas. — Pourquoi ? Allez-y, Michel. Pourquoi ? — Oui, non. Je pense simplement... Enfin moi, je vis dans le 22.
21:26Je vois que la pratique de la langue française est, comme le disait M. François Asselineau, étant quand même en progression dans le monde. Et ça, c'est une chose qu'il faut pas oublier.
21:38Et la deuxième chose, c'est que le regard que portent les pays francophones est plutôt nuancé, c'est-à-dire qu'ils comptent encore sur cet esprit français qui n'est pas mort. Voilà.
21:51Je serai très court. Et je voulais dire ça à M. Buélem, que je crois qu'il aime vraiment la France. Et c'est pour ça qu'il a cette analyse parfois un petit peu sévère. Voilà.
22:03— Alors Buélem-Françal. — Oui, c'est vrai que le français se répand dans le monde, puisqu'il y a... La francophonie existe encore. Les instituts sont encore là. Ils forment.
22:14Mais moi, j'ai beaucoup fréquenté ces instituts. On apprend le français comme on apprend l'anglais. C'est de l'anglish, c'est du franglish. Il n'y a pas derrière ce mouvement culturel... Ça reste une langue.
22:30La langue, c'est la langue plus la culture. — Oui. Vous voulez dire qu'il y a la langue, mais il n'y a pas la culture. — Il n'y a pas la culture. Sinon, c'est un logiciel de traduction, comme je le dis dans le titre.
22:41C'est une langue de traduction. On traduit du français à l'anglais, du français au chinois. On est dans la traduction. Et la traduction est souvent une trahison, en tout cas au niveau du sens profond.
22:55Ça passe pas avec les mots seulement. Ça passe par la culture, par plein de choses, des petits canaux. C'est comme le sang, il circule dans le corps à travers les grosses veines.
23:06Mais ensuite, ça part dans des milliers de petites veines minuscules qui vont dans le cerveau, dans l'œil. C'est ça qui manque. Ce qu'on enseigne, c'est un bon prof qui a 30 jeunes en face de lui.
23:20Bon, il leur apprend à coucher les gaisons, les truffes. Enfin c'est pas... — Oui, mais quand la famille ne parle pas français, vous parlez de la famille...
23:26— Oui, et puis en plus, la famille ne parle pas, donc ça reste cantonné. Donc oui, c'est des francophones, mais bon, ils apprennent le français comme on l'apprend l'anglais, quoi. C'est pour un usage utilitaire.
23:38— Oui. Alors vous, Boilem Saint-Sal, vous êtes un militant de la francophonie depuis toujours. La France la défend encore, mais sans y croire, dites-vous. Les francophones aiment plus le français que les Français eux-mêmes, dites-vous.
23:52— Oui, moi, je le vois autour de moi. Je vois par exemple en Algérie des familles qui vraiment se saignent pour... L'école est arabisée. Donc ils voient un peu dans quelle direction ça va.
24:05— On enseigne plus le français, pardon, dans les écoles publiques. On enseigne plus le français dans les écoles publiques d'Algérie.
24:11— Ah, c'est fini. On l'enseigne une heure par semaine. — C'est tout. — C'est tout.
24:17— Oui. L'ambition aujourd'hui du président, c'est d'angliciser le pays, apparemment. — Oui, oui. À la décision des crises, les choses commencent à se mettre en place. Donc je pense que dans 5 ans, ça va être comme le Rwanda.
24:26En 5 ans, ils sont passés du français 100% à 100% anglais. Donc nous, on est face à deux phénomènes. Donc il y a l'anglais, l'arabe. Puis on a aussi un problème avec le berbère.
24:41— Oui, en plus, oui. — La question est compliquée, hein. — Oui. Alors à propos des francophones, dans votre livre, vous écrivez aussi ceci.
24:49Vous dites que les francophones se demandent s'il faut laisser le français à la garde des Français ou le prendre sous leur protection collégiale ou le mettre sur la curatelle de l'UNESCO.
24:59Mais à quels francophones confier la garde de notre langue, Boilem Saint-Saël ? — À moi, par exemple. Je suis candidat.
25:06— Ministre de la francophonie. Mais il faut créer un front de libération du français par les francophones. — Oui, je pense qu'il faut... Je crois qu'ils ont des choses à dire.
25:17Mais en plus de ça, c'est-à-dire qu'en plus du français, ils apportent quelque chose. Je sais pas. Quand on parle de Mabonkou, il apporte quelque chose du Congo.
25:28Le Congo, c'est quand même une richesse culturelle. Il s'exprime en français. Mais il amène quelque chose à travers ses livres, un regard sur le monde que la France n'a plus, maintenant.
25:38La France ne cherche plus à regarder le monde. Elle regarde à peine l'Europe. Et elle sait peut-être pas le faire. — Et Saint-Gaël et tous les autres, enfin.
25:45— Oui, c'est-à-dire que vous dites qu'au Congo et au Sénégal, c'est là que le français se porte mieux. — Ah oui. Oui, je l'ai constaté. Les gens dans la rue parlent en français très correct,
25:54plus correct que celui qu'on entend dans beaucoup de quartiers ici. — Ah oui ? — Je vous dis pas, les intellectuels, Souleymane Diédiane parle en français.
26:05Mais alors... Je sais pas s'il y a à l'Académie. On le comprendrait, quoi. — Juste, Céline, nous avons Pépito au téléphone. Pépito, qui nous appelle de Brive-la-Gaillard. Voilà encore un Brive-la-Gaillard, quand même.
26:17— Bonjour, Pépito. — Bonjour à toute l'équipe. — Salut, Pépito. On vous écoute. — Moi, je voulais faire un constat. J'ai 63 ans. Et j'ai eu la chance de passer mon certificat d'études.
26:32— Oui. — Et donc le français était éliminatoire. Et moi, quand je travaillais, parce que j'ai eu la chance d'être à la retraite, mes collègues de boulot qui ont le BTS, le bac pro, le bac... Et même mes responsables, l'orthographe,
26:53quand ils laissaient des mots, je me tirais les cheveux. Parce que moi, je suis pessimiste. Votre avis était peut-être qu'il est optimiste. Ouais, peut-être qu'au Canada, ils sont amoureux...
27:06Oui, au Québec, ils sont amoureux de la langue française. Et il a modifié un peu avec beaucoup de charme. Mais en France, autour de moi, j'ai des copains... Parce que bon, j'ai un certain âge.
27:18J'ai des copains de 40 ans. Et ils disent que je suis nul en orthographe. Voilà. Parce que moi, ça me fait vraiment peur. Parce qu'on est en train de perdre le fil de la langue française. C'est une culture qui est très riche.
27:34— Oui. Et Boislem-Sensal, c'est vrai qu'il y a un problème. L'orthographe, c'est la langue aussi. — Oui, oui. La langue, c'est un corps et esprit. Donc le corps de la langue est martyrisé.
27:48Regardez la langue inclusive. Enfin on a des tas de trucs. Et puis on veut simplifier. — Qui exclut tout. — Voilà. On supprime les accents circonflexes. Qu'on fasse... Là, moi, je suis d'accord qu'on travaille sur la langue, qu'on la fasse évoluer.
28:03D'accord. Mais il faut le faire intelligemment. Il faut pas que ce soit bureaucratique, il faut pas que ce soit administratif juste pour des besoins. Je ne sais quels besoins.
28:12— La langue inclusive, qu'est-ce qu'elle apporte aux Français ? Mais rien. À part ajouter des points dans des phrases, elle apporte quoi ? Derrière, il y a des revendications idéologiques qui sont bizarres sur le sexe.
28:24Enfin c'est un autre problème. Il faut pas tout mélanger. La langue, c'est la langue. Les questions du genre et des machins, ça se discute sur notre plateau.
28:32— Oui. Mais aujourd'hui, Boilem Saint-Sal, comment sauver notre langue ? Qui peut lui redonner de la grandeur ? Dans votre livre, vous parlez effectivement... Vous dites qu'il faudrait peut-être en faire une cause nationale de cette langue.
28:44— Mais absolument. À un moment donné, oui, il faut passer à cette... Ça, c'est comme dans le système de défense. Defcon 1, bon, on se sent menacé, mais pas trop, donc on bouge pas, on fait la sieste.
28:54Defcon 2, on nous dit... — Ça se réveille, oui. — Il y a peut-être quelque chose à l'horizon. Il faut y regarder. Bon, on est à Defcon 5. C'est-à-dire que là, on est assiégé. On le voit bien dans tous les domaines, pas seulement sur la question de la langue.
29:08La France est en train de perdre ses bases industrielles, parce que les bases d'économie, c'est l'industrie. Voilà. Donc ça, on le voit. Et donc il faut agir, tous et immutes, sur tout.
29:21— Et est-ce qu'on devrait se battre, justement, pour que notre langue devienne la langue officielle de l'Europe, par exemple ?
29:27— Voilà. Alors moi, je pense qu'un des moyens de mobiliser les Français... Il faut une cause. Il faut que quelqu'un porte un drapeau sur le palace blanc d'André IV, quoi. Eh ben c'est ça. Voilà. Il faut se donner ça comme objectif.
29:41— Oui, la langue officielle de l'Europe, le français. — L'Angleterre est partie. Mais on continue d'utiliser sa langue comme... La France est toute indiquée pour revendiquer ça, faire du français la langue.
29:53— Et pas l'anglais, puisque l'Angleterre elle-même a quitté l'Europe, donc l'UE. — A quitté, absolument. Et puis voilà. Il y a encore beaucoup de francophones en Europe qui voteraient, qui accepteraient.
30:05Mais il faut se battre. Donc la France doit aider les pays comme la Hongrie, la Pologne, tout ça, à enseigner le français, à créer des liens par les bourses, par... Voilà. Mais ça, c'est un moyen pour ancrer la lutte.
30:25— Sinon, on peut le faire intramuros, tout simplement. C'est au niveau de l'école, des lycées, des universités, de la presse, évidemment. Vous êtes un grand véhicule de la chose et du gouvernement.
30:41— En revanche, concernant le terme francophonie, vous expliquez dans votre livre – et effectivement, vous avez entièrement raison – vous dites qu'il divise, il met d'un côté le français et de l'autre le francophone.
30:52Et vous dites qu'il faudrait absolument trouver un autre mot à cette francophonie. Mais est-ce que vous avez une idée, par exemple, lequel ?
30:59— Ça a été un débat énorme entre écrivains pendant très longtemps. Et ça continue un peu moins. C'est que des gens comme moi, comme Maboncou, comme d'autres, quand ils vont... Vous voulez acheter, vous, mon livre, à la FNAC, vous regardez...
31:19Un livre en français, vous regardez le rayon français. Eh ben vous ne trouverez pas mon livre. — C'est pas vrai. A la FNAC, c'est... Alors, il est où ? Dans quel rayon ?
31:27— A la FNAC, c'est le rayon francophone, étranger. — Ah, ça, c'est intéressant. Je ne savais absolument pas ça.
31:32— Vous voulez dire que j'y vais à la FNAC, je vais à Boilems-en-Salle, vous êtes dans le rayon francophone ?
31:37— La FNAC a quand même un peu évolué sur la question, mais jusqu'à une date récente, bien sûr. Mais si je veux acheter Amine Malouf, les perpétuels qu'il est de l'Académie, si je vais sur le rayon français, je le trouverai pas.
31:52— Ah, ça, c'est pas mal. — Je le trouverai dans le rayon étranger, francophone. — Ça, je voyais. C'est une révélation. C'est intéressant. Ah oui, francophone.
31:58— Voilà. Absolument. — On sépare les Français des... Alors que vous écrivez en français, etc.
32:03— Les auteurs africains, c'était un débat qui nous a agité pendant des mois, des mois. Et maintenant, on arrive à des trucs inverses. C'est qu'on veut être dans le rayon francophone.
32:14On ne veut plus être assimilé des petits écrivains français qui racontent n'importe quoi, de la mauvaise littérature.
32:21— Oui. Alors ils vont être contents, les petits écrivains français. — C'est un beau débat.
32:25— Et justement, à propos de l'écrivain franco-libanais Amine Malouf, j'aurais cité cette phrase que vous écrivez dans votre livre.
32:32« Nous allons vite, avant que les liquidateurs du François ne relèvent la tête et ne se lient contre lui, le prier de la rebaptiser... »
32:38En parlant de l'Académie française, de la rebaptiser donc Académie francophone et de lui trouver un hymne qui désigne nommément
32:46les ennemis de la France et des francophones. À quoi ressemblerait cet hymne, Boilem Saint-Sal ?
32:52— Mais figurez-vous qu'il y a eu des tentatives, bien sûr, d'écrivains francophones qui s'estiment... Ils écrivent en français.
33:03Ils sont publiés dans des maisons d'édition française. Mais ils sont mis de côté. Donc il a été... Par exemple, je suis un peu d'ailleurs à l'origine...
33:14Vous avez reçu Emmanuel Razavi. C'est un copain. Donc avec lui et d'autres, on a créé le Parlement des écrivains de la Méditerranée,
33:22parce qu'on n'a pas voulu utiliser le mot francophone, parce que, bon, ça aurait été une provocation. Mais effectivement, il y a des débats.
33:33Moi, je milite. Et ce serait formidable si l'Algérie, un jour, acceptait sa francophonie et fasse du français la langue nationale.
33:43Parce que là, on pourrait créer une Académie française d'Alger. — Vaste programme, ça, Boilem Saint-Sal.
33:48Vaste programme. On demandera au président Tebboune. On va envoyer un président Tebboune, je crois, après cette petite pause.
33:55— Oui. On va se retrouver dans un instant sur Sud Radio avec Boilem Saint-Sal. À tout de suite.
33:59Boilem Saint-Sal, vous vivez entre la France et l'Algérie. Et au printemps dernier, vous avez décidé de prendre la nationalité française.
34:05Qu'est-ce qui vous a poussé à faire ce choix ? Racontez-nous.
34:09— Mais c'est que tout simplement, je suis né français. J'ai toujours vécu dans ce cadre-là. Donc voilà.
34:17— Donc vous n'avez pas régularisé la situation. Pourquoi ?
34:19— C'est parce que tant que je croyais que l'Algérie continuait sur cette ligne, voilà, donc on garde le français, la francophonie,
34:28et on développe des relations sympathiques avec l'espace francophone d'une manière générale, la France en particulier,
34:36tant que je croyais à cela... Peu importe que je vive ici ou là-bas, c'est pareil.
34:42Mais là, mon pays, c'est vraiment... Il est parti dans une toute autre direction. Là, on est...
34:47— Vous avez toujours autant d'ennemis en Algérie ? Vous avez toujours autant d'ennemis en Algérie ?
34:52— Oui. Oui. Des ennemis professionnels. Ils se sont fait une profession de...
34:59— Mais quand vous dites « ça part dans une autre direction »...
35:01— Ça part... Bon, déjà, l'islamisation qui a atteint des niveaux... Je veux dire, l'islamisation, à la limite, moi, j'ai rien contre.
35:08Mais ça se radicalise de plus en plus. Ça devient de plus en plus fou, de plus en plus bête, au point que...
35:15Notre président, il y a 15 jours, il dit « Ah, si l'Égypte nous ouvrait les frontières, demain, on vient envahir Israël ».
35:22Quand un président d'un pays, un président tient des discours pareils, c'est fini, quoi.
35:28Et puis, la dictature, en ce moment, n'a jamais atteint... C'est pire que tout ce que nous avons pu vivre.
35:36— Vous citez dans votre livre...
35:38— Je vais venir un moment donné pour faire le bilan.
35:40— Oui. Et donc, vous avez fait le bilan. Mais vous étiez né français, donc vous aviez la société française.
35:44— Oui. — Oui, c'est ça.
35:46— Mais d'être aujourd'hui à part entière, qu'est-ce que ça a changé en vous ?
35:48— Alors, c'est ce que je dis. Tous les matins, je me sens même plus libre et plus heureux que la veille.
35:52Alors c'est pas mal, hein.
35:54— C'est très joli, ça. Vous l'étiez dans le Nirvana. Mais je rappelle, vous avez cité les 13 citations qui comptent pour vous dans votre livre.
36:01— Ah oui, oui. — J'en citerai une. Elles sont magnifiques, toutes.
36:04Raymond Aron, Thucydide, Legrand, Thomas Mann, Gilles Deleuze et Boilem Sansal, d'ailleurs.
36:09Mais vous avez cette chose formidable. Raymond Aron disait que l'ignorance et la bêtise sont des facteurs considérables de l'histoire.
36:15Hélas. Et vous luttez contre ça.
36:18— Oui, mais c'est ce qu'on voit, voilà. — Oui, c'est ce qu'on voit. Absolument.
36:22— Boilem Sansal, merci d'être venu sur Sud Radio.
36:27Au début de votre livre, vous précisez « Boilem Sansal, écrivain francophone à la retraite en recherche d'une vraie espérance ».
36:37On vous souhaite bonne chance avec André Berkamp dans votre quête.
36:41Je rappelle donc que votre livre « Le français, parlons-en » est paru aux éditions du CERF.
36:48Lisez-le, parce que vraiment, c'est un grand plaisir de langue, de lecture et de réflexion.
36:53Vraiment. Olé, je disais, en lisant ce livre.
36:56— Un très grand livre. — Merci à vous.
36:58Tout de suite, vous retrouvez Brigitte Lahaie sur Sud Radio.

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