Professeure giflée pour avoir demandé à son élève de retirer son voile : «Ce qui est terrible, c’est que dans ces situations, on se rend compte qu’il y a tout sauf l’unité nationale», selon
Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Mickaël Dorian pour débattre des actualités du jour. Ensemble, ils reviennent sur cette professeure, à Tourcoing, giflée pour avoir demandé à son élève de retirer son voile.
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00:00Europe 1 Soir, 19h21, Mickaël Dorian, en compagnie de Raphaël Saint-Ville et d'Alexandre Malafa et on va revenir sur ce qui s'est passé
00:08à Tourcoing. Une élève soupçonnée d'avoir giflé une professeure qui lui avait demandé de
00:13retirer son voile. La lycéenne a été placée en garde à vue et l'enseignante a porté plainte. Lorsqu'on entend
00:21une histoire pareille, on ne peut pas s'empêcher de penser à ce qui est arrivé à Samuel Paty et à Dominique Bernard. Comment est-ce qu'on
00:29n'en est encore là aujourd'hui, Alexandre Malafaï ?
00:33Ce qui est terrible, c'est que dans ces situations, on se rend compte qu'il y a tout sauf l'unité nationale.
00:39On verra dans les heures et les jours qui viennent les prises de position des uns et des autres.
00:43On est sur un territoire qui est celui de la laïcité, des valeurs sur lesquelles nous sommes censés être tous d'accord,
00:49notamment sur la place des religions et la manière dont l'espace public doit rester effectivement dans cette dimension de neutralité.
00:54Et je suis malheureusement persuadé qu'on aura beaucoup de voix, en particulier à gauche
00:59et sans doute à l'extrême gauche, qui resteront silencieuses.
01:02Parallèlement à ça, je suis aussi très frappé de voir la réaction du père de cette
01:07jeune femme qui est majeure, il faut le rappeler, qui a tout de suite effectivement pris la défense de sa fille. Mais tout ça est
01:13symptomatique. Symptomatique, en fait, d'un malaise profond de société où on n'a pas, depuis très longtemps,
01:18voulu ni responsabiliser les uns,
01:20ni voulu regarder les réalités en face. C'est le défaut, le déni de la classe politique, cette espèce de fuite en avant sur cette
01:26soi-disant poussière qu'on a mis sur le tapis, mais qui n'était pas une poussière, qui était un vrai problème de fond de société où
01:30on ne s'est pas rendu compte que, petit à petit, quelque chose se déconstruisait,
01:35instrumentalisé par les uns, poussé par les autres, parce qu'il y a peut-être un vide de projet de société par ailleurs,
01:39parce qu'on n'a pas cru que la menace était sérieuse. Et aujourd'hui, on est face à ce type de comportement
01:45qui peut valer en effet très loin. Ce qui s'est passé là, c'est gravissime. Ce qui s'est passé
01:48évidemment avec Samuel Paty
01:50par exemple, est encore évidemment d'une toute autre nature. Et je pense qu'aujourd'hui, on est face à une espèce de
01:58problème de réaction collective où on n'est pas capable de faire front en commun. Et tant qu'on ne sera pas capable de faire ce front
02:04en commun pour dire ça, ce n'est pas possible en France, eh bien vous aurez un territoire qui permettra de laisser
02:10propager, grandir, et des idéologies qui sont contraires à notre projet de société, et puis l'instrumentalisation
02:16politique, de cette façon de se comporter, qui finalement fait le lit de certains politiciens comme Jean-Luc Mélenchon.
02:22A peine arrivé, la nouvelle ministre de l'Education nationale, Anne Jeuneté, se retrouve déjà confrontée
02:30aux vrais problèmes, en fait, aux problèmes gravissimes que rencontre l'école d'aujourd'hui. Elle a déclaré « Frapper un professeur, c'est frapper la République ».
02:37Elle a également dit
02:39je veux...
02:41Elle a également dit
02:43que la République ne cèdera jamais face à la laïcité et à la violence. Est-ce qu'elle n'a pas déjà cédé, justement, face
02:50à ces problèmes de laïcité et de violence, Raphaël Stainville ?
02:54Ce serait difficile de l'incriminer alors qu'elle est en poste depuis quelques jours.
02:58Ce qui est certain, c'est qu'elle hérite d'un certain nombre de renoncements qui ont conduit à ce que ce genre
03:06d'actes soit possible.
03:08Alors sans l'incriminer, bien sûr, puisqu'elle faisait un constat. L'école de la République ne cèdera jamais face à la laïcité.
03:14Mais, force est de constater que...
03:16Ça, on est vraiment dans...
03:19Oui, une ministre qui fait des vocalises maintenant. Que peut-elle faire
03:24d'autre que de condamner et de dire que la République
03:29sera respectée partout ? Malheureusement, on voit à quel point
03:33l'école aujourd'hui, et c'est pas le seul problème auquel est confrontée l'école,
03:38mais l'école est confrontée à une offensive islamiste. On l'a vu ces dernières années, avec le nombre de cas d'atteinte à la laïcité
03:49qui était en progression permanente.
03:52Moi, il y a un sondage qui m'a interpellé ces derniers temps, qui avait été commandé par le JLD auprès de
03:59l'IFOP, qui était le regard des Français de confession musulmane, non seulement sur le conflit Israël et le Hamas, mais sur toutes les questions religieuses
04:06et les questions républicaines.
04:08Et ce qui était intéressant, c'était vraiment le hiatus qu'il y avait entre la communauté musulmane dans son ensemble, et sa jeunesse.
04:16Une jeunesse qui se radicalise, qui est en accord à plus de 57 % avec les idées des frères musulmans,
04:23qui est en accord avec
04:26une application totale ou partielle de la Sharia en France pour 35 % des 18-25 ans.
04:32Ça, c'est un phénomène nouveau, et qui fait que l'école est vraiment en première ligne, et le réceptacle de cette radicalité qui s'exprime
04:41aujourd'hui
04:42avec cette poussée en France.
04:44Jules Torres, dans ce studio tout à l'heure, faisait allusion à l'affaire des voiles de Creil. C'était il y a
04:5035 ans aujourd'hui. On a l'impression que ces sujets, finalement, n'ont pas évolué aujourd'hui, Alexandre Malafaille, 35 ans après.
04:57Ils n'ont pas évolué. Il y a peut-être un début de prise de conscience, et encore il est très très relatif.
05:02Il faut rappeler que les premiers rapports importants sur ce sujet ont été
05:07publiés en 2003-2004. A l'époque, c'est Nicolas Sarkozy qui était ministre de l'Intérieur, et tous ces rapports ont été enterrés.
05:12Alors, c'est le fameux pas de vague, j'en sais rien. En tout cas, il y a une volonté de
05:17manifeste de ne pas avoir pris les sujets très au sérieux, et aujourd'hui,
05:19on a l'impression qu'on pousse des cris d'orfraie quand on découvre ces réalités-là. Mais ces réalités-là, on les connaît depuis très longtemps.
05:24Là, vous avez un autre sondage, vous parliez de sondage Raphaël Stainville, qui est sorti il y a peu de jours
05:29avec la Fonde Apple et l'IFOP,
05:31qui s'intéresse, en effet, à la question de l'antisémitisme, qui est aussi très corollaire à toutes ces problématiques-là,
05:36et pour essayer de comprendre d'où vient l'antisémitisme en France. On voit qu'il y a effectivement deux courants,
05:41on va dire, politiques, un à l'extrême droite et l'autre à l'extrême gauche, et souvent très teintés d'islamo-gauchisme, qui
05:48effectivement
05:50manifestent un comportement antisémite, à la fois par les mots, mais par les actes, et quand vous sondez, effectivement, les populations
05:56musulmanes, pratiquantes, plus elles sont pratiquantes, plus elles vont à la mosquée, c'est ce que révèle, effectivement, le rapport avec Fonde Apple, plus
06:01elles sont tentées d'avoir des propos extrêmement
06:06désagréables, et manifestent de l'antisémitisme.
06:09Alors, on ne peut pas dire que toutes les populations musulmanes, qui sont religieuses et qui vont à la mosquée, tiennent des protocoles antisémites.
06:14Non, mais on arrive à un musulman sur deux, un pratiquant sur deux, ce qui est beaucoup en termes de
06:20ration, et c'est ça qui est
06:22démontré, en tout cas, par le sondage. Je ne dis pas que c'est vrai, je dis simplement que c'est ce que dit le sondage.
06:26Mais on a l'impression qu'on découvre la réalité, et cette réalité, pardon, on la connaît depuis très longtemps.
06:30Les alertes, on les a eues depuis très longtemps.
06:32Les mises en garde, on les a eues depuis très longtemps.
06:34Ce n'est pas la première fois qu'on a ce type de problème, et on a le sentiment qu'effectivement, on est, en effet, avec des
06:39bruits de bouche les uns, et l'agitation politique des autres. Alors, on a interdit la baïaille il y a un an,
06:44je ne suis pas sûr que ça a été d'une très très grande efficacité.
06:46Oui, c'est-à-dire qu'aujourd'hui, les lois, elles sont là, Raphaël Stainville, mais on n'arrive pas du tout à les faire appliquer.
06:51En l'occurrence, la baïaille, c'était un texte réglementaire,
06:54mais c'est précisément parce que, vous avez évoqué l'affaire du voile de Creil, c'est
06:59précisément parce qu'il y a eu des renoncements et des lâchetés il y a plus de 35 ans, qu'on a tardé finalement à avoir une réponse ferme
07:06sur ces signes religieux qui s'imposaient
07:09à l'école, qu'aujourd'hui, le phénomène est presque
07:13inenrayable, si ce n'est
07:16à faire une démonstration d'autorité, qu'aujourd'hui, nombre de professeurs ou de
07:23dirigeants d'école sont aujourd'hui incapables. Et il faut ajouter une autre chose,
07:27c'est-à-dire que d'un côté, vous avez une poussée d'une offensive islamiste du côté des élèves,
07:31mais il y a aussi un certain nombre de professeurs et de directeurs d'école qui, aujourd'hui, sont imprégnés d'une idéologie qui fait qu'ils
07:39se refusent à appliquer la loi
07:41telle qu'elle existe depuis 2004, où les textes réglementaires qui sont venus s'ajouter pour préciser
07:48les choses. Et ça permet aussi cette offensive
07:52et ces coups de boutoirs donnés à la légitimité.
07:54Merci beaucoup Raphaël Stainville d'avoir été avec nous ce soir, directeur adjoint de la rédaction du JDD. Merci Alexandre Malafaï, fondateur
08:01du cercle de réflexion Sinopia.