Alors que Michel Barnier tente d'apaiser la relation avec les syndicats en appelant à la reprise du dialogue social, ceux-ci lui répondent que "tout dépendra du budget". Quelles seront les lignes rouge de la CGT ? Écoutez Sophie Binet, secrétaire générale de la Confédération générale du travail.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 09 octobre 2024.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 09 octobre 2024.
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00:007h42, l'invité d'RTL Matin et ce matin, Thomas, vous recevez Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT,
00:09convaincue que le pays est traversé par une énorme colère démocratique.
00:12Bonjour et bienvenue sur RTL, Sophie Binet.
00:14Bonjour.
00:15Ça vous fait quoi d'être devenu Michel Barnieriste ?
00:17Je découvre.
00:19Il parle un peu comme vous le Premier Ministre, en substance il dit on va aller chercher l'argent là où il est,
00:23il va davantage imposer les plus riches, il avance la hausse du SMIC, ça sera plus 2% dès le 1er novembre et non au 1er janvier,
00:29il a remis en cause et quasiment enterré la réforme de l'assurance chômage du précédent gouvernement, what else ?
00:34What else ? La réforme des retraites qu'il faut abroger et puis surtout nous sommes très inquiets des annonces qui peuvent venir demain sur le budget,
00:42puisque pour l'instant on ne nous parle que de hausse d'impôts pour les plus riches, donc tout va bien.
00:47Sauf que les volumes on les connaît, c'est 20 milliards de hausse d'impôts, 40 milliards de baisse des dépenses publiques,
00:52c'est colossal, c'est inédit et aujourd'hui nos services publics sont à bout.
00:56Vous dites qu'on ne peut pas faire d'économies sur les dépenses publiques aujourd'hui ?
00:59Bah écoutez, ça dépend, là où on peut faire des économies c'est sur les aides aux entreprises,
01:04puisque chaque année la France dépense 200 milliards d'euros quasiment d'aides aux entreprises sans condition ni contrepartie,
01:10c'est un tiers du budget de l'État.
01:11Est-ce qu'on participe à ces aides aux entreprises ?
01:13Oui, mais parfois et souvent...
01:15Mais il n'y a pas 99% des entreprises sont des PME ou des TP ou des très petites entreprises.
01:18Oui mais ce n'est pas elles qui captent le plus d'aides, celles qui captent le plus d'aides c'est les grandes entreprises,
01:22par exemple la grande distribution en capte beaucoup alors qu'elle n'est pas du tout exposée à la concurrence internationale.
01:27Donc il y a besoin de remettre à plat ces aides.
01:30Par contre, si l'objectif du Premier Ministre c'est de faire reculer le financement de nos services publics,
01:36là c'est une catastrophe, je le dis, parce que nos services publics vont déjà très mal.
01:40Il dit on peut fusionner certains services publics et votre collègue de FO, Christian Grollier,
01:44dit la fusion pourquoi pas si c'est pour améliorer le service rendu ?
01:47Oui, j'attends de voir de quoi il s'agit.
01:49Vous n'êtes pas fermé sur le principe ?
01:50Tout dépend quoi. Par contre je suis très inquiète par exemple sur les questions environnementales.
01:54S'il s'agit de fusionner certains organismes dédiés à la biodiversité par exemple, ça serait une catastrophe.
02:01Donc vraiment nous avons besoin de savoir, c'est pour ça qu'il faut très rapidement qu'on puisse connaître le contenu du projet de budget.
02:07Et ce que je dis c'est qu'aujourd'hui nos services publics vont très mal.
02:11Emmanuel Macron nous avait juré la main sur le cœur qu'après le Covid tout changerait en matière de santé.
02:16Depuis le Covid, non seulement les fermetures de lits continuent, mais elles s'accélèrent.
02:20Chaque année c'est 5000 fermetures de lits dans nos hôpitaux.
02:23C'est une catastrophe. Il faut de l'argent supplémentaire pour nos hôpitaux qui sont à bout de souffle.
02:27On entend certains ministres et Didier Migaud, le ministre de la Justice, dire attention le compte ne va pas y être,
02:32le budget de la justice va baisser, ça ne va pas fonctionner comme ça.
02:34Quels sont pour vous les ministères à sanctuariser ? Parce qu'il va falloir aller chercher ces économies à un moment.
02:39Il a tout à fait raison, la justice ça va très mal.
02:42Tout le monde voit bien que c'est de plus en plus long les délais de justice et ça c'est un problème pour tout le monde.
02:49Dans les prisons, il y a une surpopulation qui est inacceptable avec des conditions de travail très dégradées pour les gardiens de prison.
02:55Mais c'est aussi dans l'éducation nationale, chacun sait qu'il y a des milliers d'enseignants qui ne sont pas remplacés
03:02avec des milliers d'élèves sans enseignant, parfois depuis le mois de septembre.
03:06C'est une catastrophe pour ces élèves.
03:08J'ai parlé de la santé, dans la santé il faut un investissement supplémentaire avec un plan pluriannuel
03:14de financement de nos hôpitaux et de nos EHPAD publics.
03:16Les soignants et les soignantes sont à bout.
03:18Aujourd'hui c'est une catastrophe.
03:20Donc il faut dépenser plus dans ces secteurs-là, mais où allez-vous chercher l'argent ?
03:23Et bien je l'ai dit, sur les aides aux entreprises, 200 milliards ça laisse quand même un peu de grain de marge de manœuvre.
03:28Et puis ce qu'il faut c'est jouer sur le volet recettes.
03:30Il faut taxer davantage, il faut aller au-delà des 0,3% qui vont payer plus d'impôts ?
03:36Oui tout à fait.
03:37Où est-ce que vous mettez la barre ?
03:38Tout à fait. En fait ce qu'il faut c'est analyser pourquoi est-ce qu'on est dans cette situation budgétaire.
03:421000 milliards de dettes supplémentaires depuis 7 ans grâce à Emmanuel Macron, pourquoi ?
03:463228 milliards au total de dettes pour le coup.
03:48C'est ça, c'est colossal, à cause de la politique de l'offre et des 73 milliards d'impôts chaque année
03:54qui ont été baissés pour les plus riches et pour les plus grandes entreprises.
03:56Donc il faut commencer à regarder sur ces 73 milliards d'impôts pour en rétablir une bonne partie.
04:03Et oui aujourd'hui c'est un problème parce que les plus riches payent toujours moins d'impôts.
04:08C'est la question à laquelle personne ne sait répondre aujourd'hui, ou ne veut répondre.
04:11À combien on est riches ?
04:12Oui mais parce que je pense que c'est une fausse question.
04:14Il y a un problème aujourd'hui de progressivité de l'impôt.
04:17On a baissé l'impôt sur le revenu notamment pour les Français les plus aisés
04:22et dans le même temps on a augmenté la TVA qui est un impôt très injuste.
04:25Ce qu'il faut c'est rétablir la progressivité de l'impôt sur le revenu, rétablir l'impôt sur la fortune
04:30et taxer beaucoup plus les grandes fortunes dont la fortune a énormément augmenté depuis le Covid.
04:36Il y a eu des fortunes de guerre qui se sont faites sur le dos de la crise sanitaire.
04:39C'est un scandale.
04:40Est-ce qu'en fonction du budget qui sortira demain vous pourriez appeler à des mobilisations
04:43ou est-ce que c'est vraiment deux choses différentes ?
04:45Eh bien écoutez on va regarder les choses précisément.
04:47Ce qui est sûr c'est que les retraités sont déjà en train de se mobiliser
04:51parce que c'est quand même très grave d'entendre Michel Barnier nous parler de justice fiscale
04:55et le lendemain de découvrir qu'il se prépare à baisser la retraite de 17 millions de retraités.
05:02En fait il envisage de décaler la revalorisation des pensions de retraite.
05:06Ça serait plus au 1er janvier, ça serait au 1er juillet.
05:09Oui mais la conséquence est très concrète.
05:12Ça voudrait dire en moyenne entre 200 et 300 euros de baisse de pension pour les retraités.
05:17Par an ?
05:18Par an oui tout à fait mais c'est pas rien.
05:20Deux à trois cents euros, les retraités ne sont pas défavorisés.
05:22C'est pas juste de dégrader le niveau de leur pension.
05:25C'est un casus belli pour vous cette question du décalage de la revalorisation des pensions de retraite ?
05:28Oui bien sûr et je le dis casus belli comme aussi toute autre mesure contre les salariés.
05:33Les salariés ont déjà payé depuis sept ans des politiques d'Emmanuel Macron.
05:37On a eu à subir la réforme des retraites.
05:40On a eu l'austérité salariale dans le privé, l'austérité salariale dans le public.
05:44Les fonctionnaires quand même 18% de baisse de pouvoir d'achat depuis 2010.
05:49On a eu à subir une réforme violente du code du travail.
05:52On va aller jusqu'où ?
05:53Là il faut que le balancier passe de l'autre côté.
05:56C'est aux grandes entreprises et aux plus riches de passer à la caisse.
05:59Sur la réforme des retraites que vous évoquiez au tout début de cette interview,
06:01Michel Barnier est ouvert à des aménagements raisonnables et justes.
06:04C'est quoi pour vous des aménagements raisonnables et justes ?
06:06La brogation de la réforme des retraites.
06:08C'est la raison pour laquelle la CGT propose une conférence de financement
06:12pour que nous puissions faire nos propositions pour financer nos retraites.
06:15Donc c'est rien du tout ? Vous voulez rien d'autre que la brogation de la réforme ?
06:18Cette réforme est injuste.
06:20Vous irez la voir autour de la table ou pas ? Parce que lui il a dit que ce n'est pas le sujet.
06:23On va aller autour de la table pour dire qu'il faut abroger la réforme des retraites
06:26et qu'il faut revenir sur cette mesure d'âge.
06:28On va aussi aller autour de la table pour dire qu'il faut enfin des mesures pour la pénibilité.
06:33Parce qu'aujourd'hui c'est un scandale.
06:35Il y a beaucoup de métiers qu'on ne peut plus faire après 55 ans voire même parfois 50 ans.
06:39Il n'y a pas de système de départ anticipé pour pénibilité.
06:42On va aussi parler de la situation des femmes qui s'est dégradée encore avec cette réforme.
06:46Sophie Binet, sur la réforme des retraites il y a une opportunité.
06:48Le Rassemblement National va proposer la brogation de cette réforme le 31 octobre à l'Assemblée
06:52en profitant de sa niche parlementaire.
06:54Est-ce que vous appelez les députés de gauche à voter cette PPL et à faire tomber cette réforme des retraites ?
06:58Ça s'appelle une imposture sociale cette proposition de loi.
07:01Pourquoi ? Parce que d'abord elle n'arrivera jamais au Sénat
07:04étant donné que le Rassemblement National n'y a pas de groupe.
07:07Et ensuite parce que ça n'est pas financé.
07:09Pour abroger la réforme des retraites il faut proposer un financement
07:12pour garantir le financement de notre système de retraite par répartition.
07:15Le Rassemblement National fait comme si on pouvait abroger la réforme des retraites
07:18en juste augmentant le prix du tabac.
07:21Bon, n'importe quel enfant de 6 ans sait que ça ne va pas tenir.
07:24Donc c'est pas par là qu'il faut gagner la brogation.
07:27Nous, nous pensons qu'il faut amender le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
07:31Je sais qu'il y aura beaucoup d'amendements qui vont être déposés en ce sens.
07:34J'appelle le gouvernement à laisser les députés voter et à respecter leur vote.
07:37Souhaitez-vous que le gouvernement, c'est ma dernière question,
07:39prolonge la possibilité pour les consommateurs de faire leurs courses alimentaires
07:43avec leur ticket restaurant ? C'est en discussion.
07:45Une prolongation ou pas de ce dispositif ?
07:48Je pense que ce n'est pas une bonne solution.
07:50Le ticket restaurant a été fait pour permettre aux salariés de déjeuner le midi.
07:55Et ça doit être son objectif premier.
07:57Ce n'est pas un supplément de pouvoir d'achat.
07:59Donc ce qu'il faut, c'est augmenter les salaires.
08:02Aujourd'hui, dans le privé, on ne s'est pas remis de la grosse séquence inflationniste.
08:07Et aujourd'hui, le niveau de notre salaire, c'est la daresse qui le dit,
08:10est équivalent à celui de 2012.
08:12C'est là-dessus qu'il faut travailler.
08:14Nous avons gagné une augmentation du SMIC de 2% au 1er novembre.
08:17Il faut que tous les salaires augmentent immédiatement du même prix.
08:20Et puis, il faut une nouvelle augmentation du SMIC importante en janvier.
08:23Merci. Vous demandez une autre augmentation du SMIC ?
08:25Bien sûr. Là, ça ne suffira pas.
08:27Les 2%, c'est un premier signal.
08:28Mais en janvier, il faut une autre augmentation du SMIC.
08:30Et puis, j'insiste sur les femmes qui sont majoritaires parmi les SMICards,
08:34notamment à temps partiel, il faut parler de la situation des temps partiels
08:37qui sont bien loin du SMIC mensuel.
08:40Merci beaucoup Sophie Milly d'être venue sur RTL.
08:42Merci. Bonne journée à vous.
08:43Et vous restez avec nous puisque vous êtes dans un tout petit...