• il y a 2 mois
Son président, Bruno Patino, explique sa stratégie d’hyperdistribution et revient sur le phénomène de la rentrée, le documentaire « DJ Medhi : made in France », qui cumule 5,5 millions de vues et 10 millions d’interactions sociales.

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Transcription
00:00Votre invité média, Céline Baydarcourt, est le président d'Arte, chaîne publique franco-allemande
00:05qui enchaîne les belles audiences à la fois sur le linéaire et sur sa plateforme numérique.
00:09Bonjour Bruno Patino.
00:10Bonjour.
00:11La grosse nouveauté pour Arte, c'est que ses contenus sont maintenant aussi disponibles
00:14sur les plateformes de TF1 et de France Télé, c'était déjà sur MyCanal, alors on comprend
00:18la stratégie des autres groupes qui veulent muscler leur offre de streaming, mais quel
00:22intérêt pour Arte, ça vous fera moins de visites sur votre propre plateforme ?
00:26Eh bien justement non en fait, d'abord ça va bientôt l'être, dans quelques semaines,
00:31vous avez mentionné TF1+, France Télé, mais c'est une stratégie, vous l'avez dit,
00:35qui remonte à 2016 en réalité, et une stratégie c'est d'être découvert par le plus de
00:39monde possible.
00:40Alors vous allez me dire, il y a deux façons d'être découvert, si j'ose dire, dans la
00:44plateforme autodistribuée, arte.tv, mais aussi de temps en temps être découvert si
00:50j'ose dire par accident, par hasard, dans d'autres endroits où ne vont pas forcément
00:54les gens qui connaissent déjà Arte et qui, comme ça, ont une possibilité de le découvrir.
00:58Et donc cette politique, on peut l'appeler d'hyperdistribution ou de découvrabilité
01:03qu'on mène à bien depuis plusieurs années, ça a élargi considérablement notre audience,
01:07non seulement en chiffres, ça peut être intéressant, mais aussi par la nature même
01:11de ceux qui nous regardent, qui n'étaient pas forcément ceux qui étaient habitués
01:13d'Arte.
01:14Un téléspectateur de TF1 et donc de TF1+, il peut être intéressé par des programmes
01:18d'Arte ?
01:19Eh bien justement, je le crois oui, je pense qu'on peut s'adresser aussi au grand public.
01:22Vous avez parlé d'audience, quand on est distribué par une autre plateforme, les audiences,
01:28elles sont pour Arte là ?
01:29Oui bien sûr, c'est-à-dire que Médiamétrie est en train d'installer en fait deux paramètres
01:34d'audience linéaire, l'audience éditeur, donc ça c'est l'audience d'Arte, et puis
01:39l'audience qu'on pourrait appeler distributeur, qu'ils appellent player en réalité, par
01:43les agrégateurs.
01:44Et on voit bien qu'il y a deux types d'acteurs dans l'univers numérique qui sont en train
01:47de se distinguer, les agrégateurs qui essayent d'avoir le plus de marques possibles dans
01:51leur offre, et puis les éditeurs qui se concentrent sur une marque même, et évidemment
01:56Arte qui a depuis toujours une politique très affinitaire, avec une ligne éditoriale très
02:01précise et très, je pense, reconnaissable par ceux et celles qui regardent, et ça fait
02:06partie des gens qui vont dans la direction des marques éditeurs.
02:11Mais Arte n'a pas envie d'être agrégateur ?
02:13Non, vous savez, agrégateur ça veut dire une politique de puissance.
02:17Nous depuis longtemps, on est devenu puissant d'une certaine façon, c'est-à-dire qu'on
02:21est de plus en plus, notre audience est de plus en plus élargie, mais notre politique
02:26ça n'est pas d'être agrégateur.
02:27Cela étant, au niveau européen, ça c'est une autre affaire, on agrège effectivement
02:32de plus en plus de partenaires, mais ça c'est une autre partie de notre vie.
02:35Est-ce que vous discutez avec M6 pour intégrer aussi sa plateforme, M6 Plus ?
02:39Écoutez, pour l'instant, on lance ces deux offres-là, le reste on verra.
02:42Alors ça marche très très bien aussi sur les réseaux sociaux, Arte, notamment YouTube,
02:46vous y êtes depuis 2016, 20 chaînes aujourd'hui.
02:4928 millions d'abonnés.
02:5028 millions d'abonnés, si on compte aussi Instagram, Snapchat, etc.
02:54Est-ce que ça vous permet d'élargir votre public au-delà des Français et des Allemands ?
02:58Alors au-delà des Français et des Allemands, oui, mais surtout ça nous a permis d'élargir
03:01notre public de façon considérable en Allemagne et en France, c'est-à-dire de toucher justement,
03:06on en revient à ce que je disais là, des gens qu'on n'aurait pas forcément touchés,
03:10notamment les plus jeunes, qui nous ont découvert et qui nous découvrent via, on va dire, trois
03:14grands types de programmes sur YouTube.
03:16D'abord des magazines spécifiques, je prendrai un exemple, le magazine Les Idées Larges,
03:20qui est une magazine de vie des idées, qui n'est pas diffusée à la télévision.
03:22Les contenus spécifiques qui peuvent être des séries documentaires, des séries fictionnelles,
03:29séries documentaires évidemment, on pourrait parler de DJ Mehdi, qui en ce moment est un
03:32véritable phénomène de société.
03:33C'est le gros succès de la rentrée.
03:35Oui, je pense qu'au-delà du succès, c'est un phénomène maintenant.
03:39Cette série documentaire d'épisodes de 40 minutes qui a été pensée pour la plateforme,
03:44pour les réseaux, pour YouTube ou ailleurs, est devenue un vrai phénomène.
03:47Et le troisième point, c'est les documentaires, les grands documentaires qui passent à l'antenne.
03:52Les 52 minutes, les 90 minutes marchent très bien sur YouTube.
03:55La géopolitique, la vie internationale, la science, ça intéresse les plus jeunes.
04:00Vous parliez donc de DJ Mehdi, gros succès.
04:02C'est juste un artiste rap et électro, pour ceux qui ne connaissent pas.
04:06Oui, c'est quelqu'un qui a fait le pont entre le rap et l'électro.
04:12On était très heureux de cette série de Thibaut de Longeville sur DJ Mehdi.
04:17Et tout d'un coup, on ne sait pas pourquoi, cette série dont on savait qu'elle était
04:21d'une qualité exceptionnelle et qu'elle rencontrait un écho très fort dans le monde
04:25de la musique, a un écho considérablement élargi.
04:295,5 millions de vues.
04:30Oui, et puis surtout, en termes d'interaction sociale, on est à plus de 10 millions d'interactions
04:34sociales.
04:35Et surtout, quand je vois un article, je fais un peu de publicité, dans le monde qui raconte
04:41comment les « boomers » essayent de comprendre la série DJ Mehdi, je me dis que c'est gagné.
04:47Pour les audiences, Arte est désormais devancée par une chaîne qu'on ne voyait pas à ce
04:53niveau-là il y a encore quelques mois, c'est-à-dire CNews, qui est devant vous.
04:56Qu'est-ce que cela vous inspire ?
04:58Non mais CNews, c'est une chaîne… Là, on est dans un autre univers.
05:01Les chaînes d'information, si vous voulez, en continu, on voit bien qu'il y a plusieurs
05:05modèles de chaînes d'information qui peuvent être Hard News, Breaking News, et puis les
05:09chaînes de commentaires et d'opinions assises sur l'information qui est CNews.
05:13Moi, je n'ai pas affaire de commentaires sur ça, mais oui, on constate effectivement
05:18que c'est un phénomène actuel dans l'univers médiatique.
05:22Il y a de la place pour tout le monde ?
05:23Il y a de toute façon de la place pour tout le monde, ça c'est clair.
05:26Moi, je pense qu'encore une fois, il y a de la place pour tout le monde, après, c'est
05:32un autre débat sur lequel je ne rentrerai pas.
05:33Bruno Pettineau, vous étiez le président du comité de pilotage des États généraux
05:36de l'information, qui ont remis leur rapport le mois dernier au président de la République
05:39après neuf mois de travaux, quinze propositions parmi lesquelles, peut-être, et pardon de
05:44vous le dire, des choses qui apparaissent, en tout cas, comme des enfonçages de porte
05:47ouverte.
05:48Faire plus d'éducation aux médias, sensibiliser le public à la désinformation, labelliser
05:53les médias éthiques, c'est à la hauteur des enjeux ?
05:55Non, je pense que là, vous caricaturez, pardon d'être aussi direct.
05:59D'abord, on pourrait, de façon juridique, combien de propositions rentrent dans le cadre
06:05législatif ou dans le cadre réglementaire européen des SA et des MA ?
06:09Et vous verrez que, pratiquement, sur les quinze propositions, vous en avez treize qui
06:12nécessitent soit une loi, soit un changement de régulation au niveau européen.
06:16Donc, dire que c'est de l'enfonçage de porte ouverte, alors que ça va demander sans doute
06:19des discussions parlementaires, gouvernementales ou des discussions au plus haut niveau européen,
06:23c'est un peu aller vite en besogne.
06:25Moi, je pense qu'il faut que vous regardiez pourquoi il y a ces trois choses-là.
06:28On se dit, pour rééquilibrer un peu l'écosystème de l'information, il faut à la fois avoir
06:33des mesures à l'encontre des citoyens, des médias et de leur façon de vivre, de
06:38leur gouvernance et des journalistes, de leur façon aussi d'exercer leur métier, pour
06:42leur permettre d'exercer leur métier.
06:44Donc, on a essayé, et encore une fois, c'est une œuvre collective, donc on a essayé,
06:48j'allais dire, d'être dans ces trois domaines-là.
06:51Donc, que vous preniez des propositions, et encore une fois, c'est un socle, c'est-à-dire
06:56que derrière, le législateur, l'exécutif, les autorités européennes feront ce qu'elles
07:00décident de faire.
07:01Nous, nous ne sommes rien.
07:02Nous n'avons pas le pouvoir de le faire.
07:03Mais elles vont vraiment faire quelque chose ? Qu'est-ce qu'elles vont devenir, vos propositions ?
07:06Je l'espère.
07:07Écoutez, ça, vous ne pouvez pas le voir le lendemain, c'est-à-dire qu'on regarde
07:10quelques mois après si ces propositions sont devenues loi ou pas, et vous avez vu qu'un
07:15certain nombre de parlementaires en reprennent un nombre.
07:17La ministre de la Culture a déclaré la semaine dernière qu'effectivement, elle allait en
07:22reprendre un certain nombre.
07:23Moi, je pense que dans le domaine des concentrations, pour assurer le pluralisme dans cette vie-là,
07:27dans le domaine de la gouvernance des médias, dans le domaine du modèle économique pour
07:30faire vivre les médias indépendants, on a la chance, nous, d'être dans l'audiovisuel
07:33public.
07:34Ça, c'est une décision, à un moment donné, du législateur de décider ou pas de la suite
07:39de l'audiovisuel public.
07:40Et Dieu sait si.
07:41Si, évidemment, je pense que le service public est absolument essentiel à la vie d'une
07:45nation.
07:46Mais le modèle économique des médias indépendants...
07:47Et vous dites l'éducation aux médias, tout ça, etc.
07:50Mais regardez bien, dans l'ensemble des propositions, je pense que l'éducation aux faits est une
07:55chose absolument nécessaire.
07:56Vous allez me dire, oui, c'est pas grand-chose.
07:57Prenons un exemple, la Finlande, 68% des gens ont confiance en la formation, c'est le seul
08:02pays aujourd'hui qui a une politique d'éducation aux faits et aux médias qui commence dès
08:06le plus jeune âge.
08:07Nous verrons le résultat, éventuellement, de vos propositions dans les mois ou dans
08:11les années qui viennent.
08:12Merci d'être venu, Bruno Patino.
08:13Merci à vous.
08:14Président d'Arte, dans le dernier livre, un essai, Rire avec le Diable, vient de paraître
08:18aux éditions Grasset.
08:19Merci à tous les deux.
08:20Merci.

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