• il y a 11 heures

Vendredi, samedi et dimanche dans Europe 1 Soir Week-end, Pascale de La Tour du Pin reçoit un invité au cœur de l'actualité politique.
Retrouvez "L'interview politique d'Europe 1 Soir week-end" sur : http://www.europe1.fr/emissions/linterview-politique-deurope-1-soir-week-end

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Transcription
00:00Nous sommes à dix jours de l'élection américaine.
00:03Les sondages sont extrêmement serrés, c'est très compliqué de dire à une semaine de l'élection américaine
00:10qui de Kamala Harris ou de Donald Trump va remporter cette élection.
00:15On va en parler avec Laurie Kenton, qui est spécialiste d'histoire et de la civilisation américaine,
00:20maître de conférence à l'université de Versailles 51, ces dernières heures.
00:25C'est un peu comme d'habitude, j'ai envie de dire, les démocrates ont reçu le soutien
00:29de Kamala Harris, de personnalités américaines, alors Leonardo DiCaprio, Bruce Springsteen et, par exemple, Beyoncé.
00:39Je ne suis pas là en tant que célébrité, je suis là en tant que mère.
00:43Une mère qui se préoccupe du monde dans lequel mes enfants et tous les autres enfants vivent.
00:49Un monde dans lequel nous avons la liberté de contrôler notre corps.
00:55Bonsoir Laurie Kenton, merci d'être avec nous en direct sur Europe 1, il est 20h33.
01:02Je voulais passer ce son, c'est vrai que c'est amusant, on peut entendre Leonardo DiCaprio, Bruce Springsteen.
01:08Nous on n'a pas ça du tout en France, mais est-ce que c'est une si bonne nouvelle que ça
01:12pour la candidate démocrate que les stars de l'EU se mobilisent, Laurie Kenton ?
01:18On peut voir ça de deux côtés, bonsoir, on peut voir ça de deux côtés.
01:22Les Trumpistes vont toujours trouver que c'est ridicule parce que ça veut dire que c'est le parti des milliardaires, bon d'accord.
01:27Les fans de Bruce Springsteen, a priori, ils votent déjà pour Kamala Harris,
01:32donc je ne suis pas sûr que ce soit une opération très gagnante.
01:35Mais il vaut mieux les avoir de son côté que contre soi, c'est toujours bon à prendre.
01:39Ils permettent de lever des fonds, ce qui indirectement fait vivre la campagne.
01:43Oui, c'est ça, c'est l'argent en fait, c'est pour ça qu'ils se mobilisent.
01:47C'est pour ça qu'ils se mobilisent, effectivement, l'intérêt de leur mobilisation, c'est l'argent en fait.
01:52Il y en a deux. Il y a le premier intérêt, disons indirect, qui ne se compte pas forcément en voie,
01:58c'est de faire vivre la campagne et faire vivre les gens qui vont aller taper aux portes,
02:03aussi toutes les pubs de campagne, ça coûte un argent absolument délirant.
02:07Donc tout ça a un prix et les stars, notamment d'Hollywood, permettent ces levées de fonds.
02:14Bon, ça, c'est le premier aspect.
02:17Le deuxième aspect, c'est le côté cool, en fait.
02:19C'est-à-dire que c'est d'essayer de gratter des gens qui ne s'intéressent pas à la politique
02:23et qui ne s'intéressent pas ou carrément détestent les politiques,
02:27les considèrent comme tous pourris, etc., ça ne m'intéresse pas, je n'y comprends rien,
02:31donc voilà, c'est un peu un cercle vicieux.
02:33Et en fait, le fait de voir sa star préférée, que ce soit Beyoncé, Taylor Swift ou d'autres,
02:39s'intéresser, soutenir, etc., peut-être que ces gens-là, c'est le calcul, vont se dire
02:45« Tiens, peut-être va falloir que je m'intéresse à Kamala Harris si Taylor Swift dit que,
02:50si Beyoncé dit que », et donc ça permet de récupérer des gens qui sont éloignés du politique
02:56et éventuellement de les ramener à soi.
03:00Taylor Swift a fait ça avec son fameux post Instagram, là,
03:04où elle appelait les gens à s'inscrire sur les listes électorales.
03:07Alors, on a beaucoup spéculé pour savoir si ça allait fonctionner ou pas.
03:11Ce qu'on peut dire objectivement, c'est que quand elle fait ce genre de messages,
03:15ce n'est pas la première fois, il y a une explosion des inscriptions sur les listes électorales
03:20et ce qu'on sait, c'est que généralement, ça se convertit en vote.
03:24Incroyable ! Je ne sais pas si c'est transposable en France, ça ? Franchement, non ?
03:29On n'a pas les mêmes systèmes, on n'a pas des stars forcément.
03:33Oui, il y a ces puissants.
03:35En France, on n'a pas de Bruce Springsteen.
03:41Après, on va se faire des ennemis.
03:44En fait, le problème, c'est que ceux qui se sont mêlés de politique,
03:48on a un petit peu la même chose.
03:50Quand des acteurs de gauche soutiennent les candidats de gauche,
03:53on dira que les millionnaires soutiennent la gauche.
03:56Quand un certain nombre d'artistes ont soutenu Nicolas Sarkozy,
03:59par exemple, c'était la fin de leur carrière.
04:01Maintenant, plus personne ne veut s'occuper de politique.
04:03Et on l'a vu, ça en 2022 en particulier,
04:06ça a été noté dans la presse qu'il y avait un désert artistique
04:12pour soutenir les candidats.
04:16Il faut vraiment qu'il y ait, par exemple, Marine Le Pen au deuxième tour
04:20pour qu'un certain nombre sorte de leur réserve.
04:24Globalement, il y a un évitement du politique de la part des artistes
04:28parce qu'il y en a un certain nombre qui ont payé pour leur carrière.
04:32À propos de cette élection américaine,
04:34Loric Henton, où en est-on exactement ?
04:37De la France, de là où nous sommes,
04:43on a un peu le sentiment que la candidate démocrate est en difficulté
04:46face à Donald Trump qui, malgré ses emportements,
04:51malgré le Capitole, malgré...
04:55Enfin, la liste est longue.
04:57Il est au seuil de remettre un pied à la Maison-Blanche.
05:01Mais il y a quatre ans, c'était inimaginable.
05:03Il y a six mois, c'était très imaginable quand même.
05:06En face de Joe Biden.
05:09À qui la faute, Loric Henton ?
05:13On se retrouve dans cette situation aujourd'hui.
05:16Il y a plusieurs explications qui se combinent.
05:19Ce qu'on voit généralement, c'est qu'il y a un certain nombre de gens...
05:22Alors, il y a deux types d'électeurs trumpistes.
05:25Il y a les fans absolus qui, de toute façon,
05:29considèrent que toute attaque est un mensonge.
05:32Donc ça, de toute façon,
05:33ils sont absolument imperméables à toute critique
05:36et ils sont plutôt du genre à applaudir
05:40tout ce qui sort un peu du cadre,
05:43qui est disruptif, violent, etc.,
05:45parce que pour eux, c'est une solution pour sauver une Amérique
05:47qui est en train de couler.
05:48Et eux, ils voient ça d'un bon oeil.
05:49Ce que d'autres voient ça d'un mauvais oeil,
05:51eux, ils voient ça d'un bon oeil.
05:53Et puis, il y a tous ceux qui disent explicitement
05:55qu'ils n'aiment pas Trump ou qu'ils l'aiment pas trop,
05:57qu'ils aimeraient bien qu'il twitte moins,
06:00qu'il soit un petit peu moins.
06:01Mais finalement, en fait, ils s'en foutent
06:03parce que deux choses l'une,
06:05soit c'est bon pour eux parce qu'ils pensent
06:07qu'à tort ou à raison, peu importe,
06:09qu'il est meilleur pour l'économie,
06:11qu'il va gérer le pays comme un chef d'entreprise.
06:14Bon, il a fait énormément de faillites dans sa carrière,
06:16mais ça, visiblement, ils le savent pas trop
06:18ou ils veulent pas le savoir.
06:20Et puis, il y a le côté également,
06:24c'est pas seulement Trump, mais c'est un Républicain,
06:26donc c'est mieux pour le business.
06:28Moi, je suis auto-entrepreneur
06:29ou j'ai une petite entreprise,
06:31donc finalement, je l'aime pas trop,
06:33mais bon, bon an, mal an, c'est peut-être mieux pour moi.
06:35Et après, il y a un autre point
06:37qui est un petit peu plus dérangeant
06:40du point de vue de la politique,
06:41c'est tous ces gens qui disent
06:44que la vie est devenue beaucoup trop chère,
06:46c'était mieux avant, au moins sous Trump,
06:48les prix étaient moins chers.
06:49Donc les gens ont l'impression que voter Trump,
06:51c'est une machine à remonter le temps
06:53et que les prix vont revenir d'un coup,
06:56le 6 novembre, ils vont revenir au niveau de 2019.
07:01Le problème, c'est que c'est pas possible
07:03et que Trump a hérité de l'économie d'Obama en 2016
07:07et que Trump va hériter de l'économie de Biden
07:10et donc des niveaux de prix de Biden
07:13s'il est réélu,
07:14et donc quand il arrivera au pouvoir en janvier 2025,
07:17il va pas faire s'effondrer les prix
07:19comme ça, en claquant des doigts.
07:21Donc ça, c'est un raisonnement
07:22qui est complètement fallacieux,
07:23mais c'est un petit peu le problème de la démocratie,
07:25c'est que toutes les voix comptent,
07:27y compris les gens qui ont des raisonnements économiques
07:29qui tiennent pas debout.
07:31Et c'est en gros ce qui anime
07:35une bonne partie des gens qui n'aiment pas Trump
07:38mais voteront ou sont prêts à voter Trump
07:40pour ça, pour la question des prix.
07:42Un mot sur Kamala Harris
07:44et notamment sa posture
07:45dans cette dernière ligne droite de campagne présidentielle,
07:48Kamala Harris,
07:49qui, par exemple,
07:51traite Donald Trump de fasciste.
07:54Est-ce que c'est une bonne stratégie
07:55de la part de la candidate démocrate
07:57de tomber, justement,
07:58dans les travers de Donald Trump ?
08:02On verra si c'est une bonne stratégie ou une mauvaise stratégie
08:05après les résultats.
08:06Pour l'instant, c'est une stratégie.
08:08Il y a une différence,
08:09on compare souvent avec Biden,
08:11on dit qu'elle fait du Biden.
08:13Non, Biden, il avait une campagne
08:16assez négative sur Donald Trump,
08:20mais c'était quand même relativement tôt.
08:22Et là, on est dans un timing
08:23qui est complètement différent.
08:24Là, on parle aux indécis.
08:26Les gens qui ont fait leur choix,
08:28de toute façon, eux,
08:29ils ont même déjà voté,
08:30donc c'est pas eux qu'on va essayer de convaincre maintenant.
08:32On va essayer de convaincre,
08:33entre maintenant et le 5 novembre,
08:35tous ceux qui n'ont pas encore décidé.
08:37Et ça peut être le petit truc
08:39qui les fait pencher finalement
08:42du côté de Kamala Harris,
08:43parce que c'est quand même pas acceptable,
08:45ça fait peur, on se demande, etc.
08:47Donc ça peut les faire basculer.
08:49C'est pas du tout le même public auquel on parle.
08:51Pour moi, c'est pas la même stratégie.
08:53Est-ce que c'est pertinent ?
08:56Disons que sur la campagne positive
08:58qu'elle a faite au début,
08:59ça permettait d'énergiser un peu les foules
09:01et c'était pas du luxe
09:02parce qu'elle avait quand même
09:03une popularité qui était très basse.
09:05Et là-dessus,
09:06elle a réussi son pari
09:08d'inverser un petit peu la courbe
09:10et de mener une campagne
09:12qui était beaucoup plus robuste
09:15que ce qu'on aurait pu craindre
09:16puisqu'elle était quand même
09:17pas très aimée au début.
09:18Donc là-dessus, mission accomplie.
09:19Après, sur la fin de la campagne,
09:21il y a un certain nombre de thèmes
09:22sur lesquels ça n'accroche pas vraiment.
09:24Sur l'immigration et sur l'économie,
09:26de toute façon, les gens voient
09:27Trump et les Républicains comme supérieurs.
09:29Donc elle a un peu réduit l'écart
09:31sur la crédibilité économique.
09:32Faut pas oublier ça, quand même.
09:34Mais évidemment,
09:35quand toute une volée
09:37d'anciens collaborateurs de Trump,
09:39tous plus républicains les uns que les autres,
09:41le traitent de fascisme,
09:42il y a peut-être quelque chose à exploiter
09:44dans le cadre de sa campagne.
09:46Elle aurait tort de se priver là-dessus.
09:47C'est pas elle qui l'accuse de fascisme.
09:49Elle reprend les termes,
09:50notamment de John Kelly,
09:51son ancien chef de cabinet.
09:53Autre question,
09:55Laurie Kenton, spécialiste de l'histoire
09:57et de la civilisation américaine.
09:59Et pour nous, Français,
10:01toujours pareil, je regarde avec nos yeux,
10:05qui de Kamala Harris ou de Donald Trump
10:07serait le meilleur président ?
10:11Du point de vue français,
10:12faut pas se faire d'illusions.
10:13On a toujours des étoiles dans les yeux
10:14quand on pense aux Américains.
10:16Ils défendent d'abord leurs intérêts.
10:18Et on a vu avec l'affaire des sous-marins
10:20australiens que ça a beau être Biden,
10:22quand les intérêts américains sont en jeu,
10:25il n'y a plus de sentimentalité,
10:26on peut ranger la faillette.
10:28Il n'y a vraiment plus d'histoire commune.
10:30Donc si Kamala Harris est élue
10:33et qu'elle doit faire valoir les intérêts
10:35de l'économie américaine
10:37contre les intérêts européens ou français,
10:39elle ne se privera pas de le faire.
10:41Donc il ne faut pas non plus...
10:43En revanche, c'est vrai qu'on a deux types
10:45de diplomatie qui sont très différents.
10:47On va avoir un type de diplomatie assez classique
10:49qui respecte les alliances
10:51dans la limite des intérêts,
10:53mais qui est plus ordonné,
10:55on va dire, avec Kamala Harris.
10:57Et on va avoir un type de diplomatie
10:59un petit peu plus imprévisible,
11:02plus transactionnelle,
11:04comme on dit, avec Donald Trump.
11:06Donc là-dessus, c'est plus compliqué à gérer
11:09parce qu'on ne sait jamais trop
11:11quel coup il va jouer et comment,
11:13et s'il va se tenir à une ligne
11:15ou s'il va faire demi-tour
11:17assez rapidement.
11:19Donc le problème principal
11:21d'une hypothèse Trump,
11:23c'est l'imprévisibilité
11:25et le fait qu'il est beaucoup plus engagé
11:28dans une guerre douanière
11:30avec un certain nombre
11:32d'adversaires, d'abord la Chine,
11:34mais il n'est pas fan de l'Allemagne
11:36et comme l'Allemagne, c'est l'Europe,
11:38il va s'en prendre également à l'Europe.
11:40On ne sait pas encore dans quelle mesure,
11:42mais il a plus ou moins la main,
11:44ça c'est important parce que
11:46sur pas mal de points, il va être limité
11:48par le Congrès. Donc il ne faut pas trop
11:50s'inquiéter sur certains points.
11:52En revanche, sur la politique douanière,
11:54il a beaucoup plus la main.
11:56Et donc là-dessus, il peut faire
11:58ce qu'il veut.
12:00Et là, ça pourrait venir un problème pour nous.
12:02Merci beaucoup, Laurie Kenton.
12:04J'espère qu'on aura la chance de vous
12:06recontacter la semaine prochaine.
12:08Peut-être qu'on y verra un peu plus clair
12:10samedi prochain, à quelques jours de cette élection
12:12présidentielle, où tout peut arriver.
12:14Nous reviendrons vers vous.
12:16Évidemment, merci d'avoir été
12:18avec nous en direct sur Europe 1.
12:20Il est 20h44, une petite annonce en taine
12:22pour les copains. Tous les week-ends,
12:24samedi et dimanche,
12:26à 10h10. Retrouvez les pronostics
12:28de Thierry Léger pour les plus
12:30grandes courses Hippie, Paris-Longchamp,
12:32Vincennes, Chantilly, Auteuil.
12:34Vous retrouverez également tous les pronostics de Thierry Léger
12:36en podcast et en replay sur le site
12:38et l'application Europe 1.
12:40Voilà, c'était pour Europe 1.

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