L'acteur, réalisateur et scénariste Franck Gastambinde est l'invité de Léa Salamé ce jeudi 7 novembre. Il est auteur, réalisateur et acteur dans la série "La cage", disponible sur Netflix à partir du 8 novembre. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20/l-itw-de-9h20-du-jeudi-07-novembre-2024-6867195
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00:00Cléa, ce matin, vous recevez un acteur et réalisateur !
00:03Et bonjour Franck Gastonbide !
00:05Bonjour Cléa, bonjour à tous !
00:06Merci d'être avec nous ce matin !
00:07Si vous étiez un personnage historique, un animal, un pays et une émotion,
00:12vous seriez qui ? Vous seriez quoi ?
00:13Alors d'abord, un personnage historique ?
00:15Je crois que ce n'est pas très original, mais Martin Luther King nous manque beaucoup !
00:21Un animal ?
00:22Le chien !
00:23Évidemment !
00:24Évidemment !
00:25On va y revenir, vous allez nous expliquer pourquoi !
00:27Un pays ?
00:28La Colombie, où j'ai tourné mon dernier film qui s'appelle Medellin,
00:32et où j'ai été très heureux de rencontrer une population joyeuse, heureuse,
00:40et ça aussi, ça nous manque !
00:42Une émotion ?
00:44La joie, mais parfois on la cherche !
00:48J'ai l'impression que vous avez fait un choc, l'élection de Trump il y a deux jours !
00:51Ah oui, et puis s'il n'y avait que ça !
00:53Oui, évidemment !
00:54On ne peut pas considérer que tout va bien, loin de là !
00:58Il n'y a pas de talent ici, ce n'est que du travail !
01:00Le talent n'existe pas, vous pouvez devenir qui vous voulez si vous travaillez,
01:04vous atteindrez le sommet !
01:05Moi, je ne suis pas talentueux, je suis obsédé !
01:08C'est ce que dit Conor McGregor, une des stars du MMA !
01:11Il a raison, il n'y a pas de talent, il n'y a que du travail !
01:15Je ne suis pas convaincu d'avoir du talent, je suis certain de travailler beaucoup,
01:20il a probablement raison, mais il y a aussi une injustice dans cette vie,
01:22c'est que parfois il y a des gens qui travaillent moins, et qui ont des résultats incroyables,
01:25donc ça réfléchit !
01:27Franck Gastambin, après valider votre série sur le milieu du rap,
01:31qui avait cartonné plus de 50 millions de vues,
01:33vous sortez demain la cage sur Netflix,
01:36c'est la nouvelle série événement sur l'univers du MMA,
01:39ce sport de combat qui est devenu véritablement un phénomène planétaire,
01:43c'est sans doute les combats les plus suivis aujourd'hui dans le monde entier,
01:46mais à l'origine de votre passion pour le MMA, il y a ça !
01:58Rocky, c'est votre film culte ?
02:03C'est mon film culte, c'est mon idole, c'est le maître à penser,
02:07c'est l'histoire d'un mec en qui personne ne croit,
02:11et qui finit par atteindre des rêves qui étaient parfois trop gros pour lui,
02:14donc ouais, c'est le maître à penser,
02:16puis c'est ce que j'ai essayé de raconter dans la cage,
02:18l'histoire d'un mec en qui personne ne croit.
02:20C'est l'histoire de Taylor, comme Stallone dans le rôle de Rocky,
02:23effectivement un jeune garçon un peu paumé en qui personne ne croit,
02:27et qui rêve de devenir pro du MMA pour gagner de l'argent,
02:32pour aider sa mère qui est dans le besoin à l'origine,
02:35et puis pour trouver sa place dans la société.
02:37Mais personne ne mise sur lui, et à commencer par vous qui jouez l'entraîneur.
02:41Oui, c'est ça. Oui, il a envie d'exister,
02:44vous savez je lui ai mis à ce personnage ce handicap que j'ai moi,
02:48en tout cas mes handicaps invisibles qui sont la dyslexie, la dyspraxie,
02:51tous ces handicaps qui m'ont empêché d'avoir des diplômes dans ma vie,
02:54qui ont empêché d'avoir confiance en moi,
02:57qui ont joué sur tout ce qu'on a besoin dans cette société pour être un peu fort,
03:02et affronter les autres, et affronter les épreuves.
03:05Il en manque, j'en manque,
03:07et il a trouvé un domaine dans lequel il va pouvoir exister, briller,
03:11un domaine dans lequel on va le regarder,
03:14et c'est ce sport dans lequel il donne tout pour réussir.
03:18Ce qui est étonnant, c'est que vous l'avez fait dyslexique et dyspraxique le personnage,
03:23et que le jeune homme qui joue, le jeune acteur Melvin Boomer,
03:26qui joue le rôle phare, le héros Taylor dans la série,
03:31qui avait joué Joy Star dans la série NTM,
03:34ce jeune homme est lui aussi dyslexique.
03:37Oui, évidemment qu'il l'est, et c'était très touchant pour moi,
03:40parce que je voyais ce qu'il ne comprenait pas parfois,
03:43qui sont des choses qui pour tout le monde sont parfois très simples,
03:47pour nous, qui le sont beaucoup moins.
03:50On a dû tourner des scènes en anglais où il a les mêmes difficultés que moi,
03:53parfois des choses de compréhension sur des chiffres, sur des placements,
03:57et du coup il a encore plus compris ce que je voulais raconter dans la quête de ce personnage
04:01qui n'a rien pour réussir, et qui va quand même devoir réussir.
04:05Ce qui est fou, c'est que vous dites « je suis capable de réaliser des films à 20 millions d'euros,
04:08mais jouer aux cartes, c'est trop compliqué pour moi ».
04:10Oui, la liste des choses que je ne peux pas faire,
04:13et pour lesquelles je me sens totalement humilié, ridiculisé, est longue.
04:16Les cartes, par exemple, oui, mais réciter l'alphabet d'un seul coup,
04:20c'est aussi très compliqué pour moi.
04:21Donc il y a cette espèce de paradoxe où parfois nous,
04:24les gens qui ont des handicaps invisibles, vont être meilleurs que d'autres dans certaines choses,
04:27et puis incapables de participer à un jeu de société.
04:32C'est évidemment parfois très compliqué à vivre.
04:35Le MMA, c'est le Mixed Martial Arts, mélange de boxe, free fight, de lutte.
04:41Comment vous expliquez l'engouement aujourd'hui pour ce sport, pour ce MMA ?
04:46Moi, je ne connaissais pas il y a deux ans.
04:48J'ai découvert en invitant ici à ce micro ou à la télé des champions de MMA,
04:52et j'ai vu la communauté qui les suit.
04:56C'est quelque chose qui vraiment passionne les jeunes aujourd'hui.
04:59C'est obsessionnel chez eux, c'est vraiment planétaire.
05:02Toutes les stars du foot, toutes les stars des autres sports regardent les combats de MMA.
05:06C'est vu des millions et des millions de fois de vues chaque combat.
05:10Comment vous l'expliquez ?
05:12Je l'explique.
05:13Évidemment, les gens peuvent penser que c'est lié à l'aspect sulfureux de ce sport.
05:18Pour moi, c'est beaucoup plus...
05:19Parce que c'est spectaculaire et très violent.
05:21C'est un sport de combat très violent.
05:23La réalité surtout, c'est que ce sport fabrique des personnages.
05:26Et on s'accroche à ces personnages.
05:28On s'accroche à Cyril Gannes, le bon gamin,
05:30on s'accroche à Cédric Doumbé, le roi du divertissement,
05:33à Benoît Saint-Denis, le patriote ex-Force Spéciale.
05:38Et on le sait, on s'intéresse aux judos parce qu'il y a Teddy Riner.
05:41On s'intéresse à la natation parce qu'il y a Léon Marchand.
05:44Et on s'intéresse au MMA parce que le MMA crée ses personnages un peu à l'instar du catch.
05:48C'est ce qui fait cet engouement.
05:50Parce que Cédric Doumbé peut remplir un Bercy quand il fait son combat contre Baki.
05:55Cyril Gannes aussi, Benoît Saint-Denis lors du dernier UFC.
05:58Donc pour moi, c'est parce que ce sport crée des personnages et on s'attache à eux.
06:03Ce sport était interdit en France il y a 4 ans.
06:05Mais à cause de sa violence, il est aujourd'hui autorisé.
06:07C'est un sport qui est encadré.
06:09Cédric Doumbé, vous en parlez, c'est une des stars les plus spectaculaires
06:12qui chauffe ses adversaires avant sur les réseaux sociaux.
06:16Ça se passe sur les réseaux sociaux, d'ailleurs on le voit dans la cage,
06:18on le voit dans votre série.
06:20Il était à ce micro il y a quelques mois.
06:22Et je lui avais posé la question de la violence, écoutez ce qu'il dit.
06:24Il y a toujours eu ça.
06:25C'est vrai que la France a beaucoup protégé ses combattants.
06:29Et c'est pas plus mal parce que c'est ça qui fait qu'aujourd'hui
06:31il y a cette effervescence autour de ce sport.
06:34Je pense pas que ça réveille un instinct.
06:36Il y a toujours eu ça.
06:37En fait, nous sommes ce qu'on appelle les gladiateurs des temps modernes.
06:40On a toujours eu ça dans les arènes de Rome.
06:42Ces gladiateurs-là, aujourd'hui, Dieu merci, on ne risque pas la mort
06:46si on perd en combat, sinon mes adversaires auraient beaucoup de soucis à se faire.
06:50Les gladiateurs des temps modernes, c'est ça qui excite les gens ?
06:54Oui, il y a forcément quelque chose comme ça.
06:57Mais encore une fois, je reviens sur le judo, sur la boxe.
07:00La particularité du MMA, vous l'avez compris, c'est que
07:02tous les arts martiaux sont condensés dans un seul sport.
07:05Et ce qui était fascinant, c'est de se dire
07:07qui est le meilleur entre le karatéka, le judoka, le boxeur ?
07:11On va les mettre ensemble et on va définir qui est le meilleur.
07:13Mais finalement, ça reste des arts martiaux avec des règles, un juge, des soigneurs.
07:17Et puis c'est un ascenseur social.
07:19Il nous le disait Cédric Doumbé ici, il disait
07:21à l'origine je l'ai fait pour gagner de l'argent, pour aider ma famille.
07:25Et tous les combattants de MMA que j'ai interviewés disent la même chose.
07:29Ils viennent de milieux souvent très pauvres, très défavorisés.
07:31Et le MMA qui permet, c'est vrai, de gagner des millions.
07:34C'est aussi le cas de votre héros dans la série.
07:36C'est-à-dire qu'à l'origine, c'est vraiment pour gagner de l'argent pour sa famille.
07:39Ça peut monter très très haut, c'est un sport d'argent.
07:42Oui, alors je le dis aussi dans cette série,
07:44le seul moyen de gagner de l'argent dans ce sport, c'est de devenir une star.
07:47Et la preuve, depuis tout à l'heure, on ne parle que des stars.
07:49La réalité, contrairement au football,
07:51dans lequel on peut gagner bien sa vie quand on est un joueur pas très connu,
07:55dans le MMA, c'est pas le cas.
07:57Et c'est aussi ce qui fait que je suis fasciné par ces gens, par leur détermination.
08:00C'est que c'est une vie qu'ils consacrent à ce sport.
08:04Et la réalité, c'est qu'ils sont très peu à gagner vraiment leur vie.
08:07Et j'ai même envie de dire, certains que vous avez reçus ici,
08:10ne sont pas des gens qui gagnent ce qu'ils méritent par rapport à l'investissement,
08:14que ça représente de leur vie et aussi de leur santé.
08:16Oui, de l'entraînement, des coups.
08:18Bien sûr.
08:19C'est aussi ce qu'on voit dans la série.
08:21Vous avez réussi à convaincre les plus grandes stars internationales du MMA
08:25de venir jouer des petits rôles dans la série.
08:27Bon, Cyril Gann, le Français, il est là.
08:30Le Canadien, Georges St-Pierre.
08:31L'Américain, John Jones.
08:33Vous dites, lui, « J'étais terrorisé à l'idée de le rencontrer ».
08:36C'est qui John Jones, pour les gens qui nous écoutent ? Ils ne connaissent pas forcément.
08:39C'est le Cristiano Ronaldo du football.
08:41C'est celui contre qui personne n'a jamais gagné.
08:47C'est la star des stars.
08:48Il remet sa ceinture en jeu à New York le week-end prochain, le week-end du 16.
08:53C'était quasiment inespéré.
08:54On parle de Georges St-Pierre qui est un espèce de modèle incroyable qui est le Zidane,
08:58le retraité que tout le monde aime.
09:00Le chic.
09:01Le chic, extrêmement sympathique.
09:03Enfin bon, on l'adore.
09:04Et John Jones, c'est le bad boy, sulfureux et l'approché, alors qu'il est encore le tenant du titre.
09:12Il est vraiment considéré pour beaucoup comme l'homme le plus fort du monde
09:15parce qu'il est le champion des poids lourds du MMA,
09:18qui est donc la discipline qui mélange tous les arts martiaux.
09:20Il maîtrise tout.
09:21Il est effrayant et il a été extrêmement sympathique avec moi.
09:24Et comment vous avez réussi à le convaincre ?
09:26Parce que dans votre précédent film, Médellin, vous avez réussi à convaincre Mike Tyson de jouer un vrai rôle.
09:31Comment ils font confiance à un petit Français ?
09:34Je suis bien d'accord avec vous Léa.
09:36Je me pose la question à chaque fois.
09:37Alors Mike Tyson m'a beaucoup servi pour avoir John Jones.
09:40Ça l'a beaucoup mis en confiance.
09:42Écoutez, on passe par des gens pour essayer de le rassurer.
09:47Puis ensuite, il faut être bon quand on a affaire aux avocats, aux agents,
09:49leur expliquer qu'on est un petit Français qui a fait quelques succès en France.
09:53Et puis surtout, on leur livre des textes qui leur plaisent.
09:56Parce que vous savez, dans ces moments-là, vous connaissez parfois les réflexions.
09:59Les gens se disent oui, mais ils sont venus pour le gros chèque.
10:01Là, on s'adresse à des gens à qui on ne force pas la main s'ils n'ont pas envie.
10:06Il faut qu'ils en aient envie.
10:08Mais vous savez, sur John Jones, en l'occurrence, qui est cette méga star qui est dans ma série,
10:13on a affaire à des gens qui voient aussi la fin de leur carrière arriver assez tôt finalement,
10:17puisqu'ils ont 35 ans.
10:19Et qu'est-ce qui est possible pour ces gens-là ?
10:22Finalement, faire l'acteur, très souvent, ça les intéresse parce que c'est des Américains,
10:25parce qu'ils ont vu Expendable, parce qu'ils ont envie de jouer dans des films.
10:27De l'argent, il y en a aussi dans la série.
10:29On sent que Netflix a 1000 paquets, si je peux me permettre.
10:31Oui, c'est vrai.
10:32Combien le budget ?
10:33Beaucoup.
10:34Ça dépasse les 10 millions d'euros en gros.
10:38C'est une série qui coûte cher à fabriquer, bien sûr.
10:40Ça vous change de la petite production artisanale des Caïras, qui était votre premier succès,
10:45Frank Gastonville.
10:46Là aussi, on revient sur votre vie.
10:48C'est vrai qu'au début, on ne vous faisait pas confiance, on ne misait pas sur vous.
10:50On se disait…
10:51Parce qu'à l'origine, vous avez choisi le chien comme animal.
10:54Vous étiez dresseur de chien.
10:55Vous étiez nul à l'école, vous l'avez dit, à cause de vos maladies, de vos handicaps
11:01qui ont été tardivement diagnostiqués.
11:04Et vous étiez dresseur de chien.
11:07Et au début, quand vous êtes rentré dans le cinéma, personne ne vous faisait confiance.
11:11Non, et j'ai presque envie de dire que c'est presque normal.
11:15Oui, moi-même, je n'avais pas vraiment confiance en moi.
11:19Je ne peux pas en vouloir à ceux qui ne croyaient pas en moi, en vrai.
11:23Le parcours a été semé d'embûches.
11:27Mais encore une fois, je vivais mon premier film, les Caïras, comme une espèce de finalité.
11:32Je me disais, c'est génial, dans ma vie, j'aurais fait au moins un film.
11:35Parce que j'étais loin de me douter que j'aurais la capacité d'avoir d'autres idées.
11:38Et puis de trouver des idées dans l'air du temps, de trouver des idées qui allaient plaire aux gens,
11:41et puis que ça allait marcher.
11:42Tout ça a été...
11:44C'était impossible d'envisager ça.
11:45Là où vous avez de la chance, vous, c'est que vous faites des films qui marchent.
11:48On vous appelle le poids lourd du box-office.
11:49Mais vous faites des films sur vos passions.
11:51C'est-à-dire que la série Validé, c'était votre passion du rap.
11:53Aujourd'hui, c'est le MMA, c'est une autre de vos passions.
11:56Et les plateformes vous suivent et mettent de l'argent sur vos films parce que ça marche.
12:01Je me demandais même si vous aviez une passion poterie, si Netflix lâcherait les millions.
12:06Non mais c'est vrai que vous êtes un des rares qui, parce que vous parlez à une communauté,
12:11aux jeunes, vous êtes énormément suivi par les jeunes,
12:13vous arrivez à avoir maintenant les gros chèques, tout ça.
12:16Oui, alors il faut toujours les convaincre.
12:18Vous savez, dans le cas du MMA, quand je parle à Netflix,
12:22il y a trois ou quatre ans, d'un projet sur une série qui s'appelle le MMA,
12:25ils pensaient que c'était une assurance.
12:28Pour être au bon moment, à la bonne période, en ce moment,
12:31quand on se dit que le MMA explose, ça veut dire qu'il y a trois ou quatre ans,
12:34j'ai dû leur dire, faites-moi confiance, ça va marcher, cette série.
12:37Et elle va coûter cher, beaucoup plus cher que Validé, si on se parle d'argent.
12:41Mais oui, j'ai la chance d'avoir des gens qui me font confiance.
12:44Mais encore une fois, ils me font confiance parce qu'ils croient aussi au sujet que je leur propose.
12:48Vous dites que votre enfance, en banlieue, père libraire, mère femme de ménage, classe moyenne, c'était ça.
12:57On regardait les bateaux, on suçait des glaces à l'eau.
13:02Ça va me faire pleurer, celle-là.
13:04Les palaces, les restaurants, on ne faisait que passer devant.
13:10Et on regardait les bateaux, le matin, on se réveillait tôt.
13:17Michel Jeunas, on est loin du rap.
13:20On est loin du rap, mais on n'est pas si loin des débuts de ma vie.
13:24C'était vraiment ça, votre enfance ?
13:26Oui, je ne peux pas en parler beaucoup de ça.
13:29Pourquoi ?
13:34Parce que le chemin était long, et pendant ce chemin, on prend des coups.
13:40Et j'essaie d'être fier du chemin.
13:45Ce n'est pas toujours facile.
13:47Aujourd'hui, après tout ce chemin long, vous avez du mal à en parler, toujours du mal à en parler quand on vous interroge sur l'enfance.
13:55On devine des carences affectives.
13:57Aujourd'hui, à 46 ans, vous avez été fait chevalier de l'ordre des arts et des lettres.
14:01Vous dites, j'ai mis du temps à assumer.
14:04Oui, je savais que vous alliez m'en parler, et on m'en parle maintenant à chaque fois.
14:09Oui, j'ai vite regardé la définition et à qui on les donnait pour être sûr que je n'étais pas complètement illégitime.
14:16Une partie de moi qui pense qu'il l'est.
14:18Mais oui, c'est très difficile d'avoir son premier diplôme à 45 ans.
14:22Évidemment, on a l'impression qu'on nous donne ça un peu pour nous faire plaisir.
14:26Oui, quand j'appelle ma mère pour lui dire que je viens d'avoir mon premier diplôme à 45 ans,
14:34quand je sais le mal que ça lui a fait d'avoir un gamin qui était incapable d'avoir ne serait-ce que son brevet d'école.
14:38C'est beaucoup d'émotion.
14:41Qu'est-ce qu'on va faire de lui ? C'est la phrase que vous avez le plus entendue dans votre enfance.
14:45Oui, et j'essaie d'en vouloir à personne, d'avoir pensé ça, parce que moi aussi, je me disais qu'est-ce que je vais faire de moi ?
14:51Je ne comprends rien des cours auxquels j'assiste.
14:54On parle d'une époque où la dyslexie n'était pas vraiment détectée.
14:58J'étais soit un imbécile, soit un feignant.
15:00Pourtant, j'avais vraiment conscience d'être ni l'un ni l'autre, mais je n'avais aucun moyen de le prouver.
15:04On vous mettait un magnéto la nuit, des cassettes de table de multiplication pour que ça rentre, et ça ne rentrait pas.
15:09Et ça ne rentrait pas.
15:10Et ça ne rentre toujours pas.
15:11Non, et je dois maintenant vivre avec.
15:13La seule chose, et c'est aussi le message que je dis à tous les gens qui me contactent par rapport à ça,
15:17c'est que je suis convaincu que le cerveau compense.
15:20Et que ce qu'on n'a pas d'un côté, on l'a de l'autre.
15:23Alors moi, ça a développé une créativité.
15:25Qu'on aime ou qu'on n'aime pas ce que je fais, c'est un autre débat.
15:27En tout cas, ça a développé une créativité qui me permet de faire ce métier.
15:30Mais les choses dans lesquelles je suis incapable, malheureusement, elles sont toujours là.
15:33Aujourd'hui, elle est fière de vous, votre mère ?
15:35Oui, je crois.
15:36Vous avez publié sur Instagram le message sur Le Chevalier des Arts et des Lettres.
15:41Elle vous écrit « Mon chéri, il y a longtemps que je suis rassurée quant à ton avenir.
15:45Si on avait pu diagnostiquer cela, on aurait pu éviter ce mal-être qui t'a rendu malheureux.
15:49Mais à la fois, t'as rendu plus fort. Aujourd'hui, c'est la plus belle récompense.
15:52Quelle belle réussite. Je suis fière de toi, mon fils, avec plein de cœur. »
15:55C'est mignon ?
15:57Très mignon.
15:58Ce succès aujourd'hui que vous avez, vous disiez à Libération,
16:02« J'ai fait ce métier pour être aimé. J'ai besoin de prouver, de réussir. »
16:06Ça y est ? On est bon ? Ou il y a toujours ce manque de confiance ?
16:10Non, je crois qu'on ne se guérit jamais complètement de ça.
16:13J'en ai fait un moteur.
16:15Mais vous savez, la dyslexie nous emmène dans un chemin très vicieux
16:19parce qu'on fait tout pour aller mieux.
16:22Finalement, on doit se battre contre une espèce de dévalorisation
16:26parce qu'on nous a tellement répété qu'on était nuls.
16:28On a fini vraiment par le croire.
16:30Et puis, ça nous fait faire des mauvais choix.
16:32Et puis maintenant, on se bagarre contre ça.
16:35J'essaye de me nourrir de mes petites victoires.
16:37Je me suis autorisé récemment dans mes bureaux
16:39à mettre des photos de moi sur mes films.
16:43J'avais tellement peur que ce soit un égotrip que je ne le faisais pas.
16:45Et puis maintenant, je me suis dit, il faut que tu acceptes que ça t'aide à te dire
16:48« Bon, mon gars, tu as quand même fait tout ça. »
16:50Parce que parfois, j'ai toujours l'impression que chaque film, chaque série,
16:53chaque succès était un coup de chance, que je ne serais pas capable de renouveler.
16:56Donc, c'est une espèce de combat permanent contre moi-même.
16:58Les impromptus, pour terminer, vous répondez rapidement sans trop réfléchir.
17:01Instagram ou X ?
17:03Instagram.
17:04X, non.
17:05J'y suis, mais c'est quand même le lynchage permanent.
17:08C'est un drôle de réseau.
17:09Elon Musk, il vous fascine ou il vous angoisse ?
17:11Il m'angoisse terriblement.
17:13Mike Tyson ou Mohamed Ali ?
17:17Mohamed Ali, pour la mentale.
17:19Mike Tyson, parce qu'il m'a fait un cadeau génial de jouer dans mon film.
17:22Scarface ou Raging Bull ?
17:24Raging Bull, sans hésiter. Scarface, c'est un loser.
17:27Damso ou Tiakola ?
17:31Je dirais Damso, c'est plus ma génération.
17:33PSG ou OM ?
17:35Ni l'un ni l'autre.
17:37Vous n'aimez pas le foot ?
17:38Je m'en fous un peu.
17:39Alcool, drogue, sexe, quelle est votre vie ?
17:43Aucun des trois, mais il y en a quand même un que je pratique qui est le sexe.
17:47Je n'ai jamais bu, je n'ai jamais pris de drogue de ma vie.
17:49Je suis très ennuyeux.
17:50C'est vrai ?
17:51Vieillir, ça vous angoisse ?
17:53Non, je m'y fais.
17:55L'argent fait-il le bonheur ?
17:56Non.
17:57La fidélité, c'est important ?
17:59Très.
18:00Avoir des enfants, vous y pensez ?
18:01De plus en plus.
18:02La dernière fois que vous avez pleuré ?
18:05J'ai failli tout à l'heure là.
18:07Vous avez vraiment une cage chez vous, Franck ?
18:10Oui, j'ai une petite cage pour m'entraîner et pour regarder mes potes s'entraîner aussi.
18:13Vous votez ?
18:15Non.
18:16Qu'est-ce qui vous indigne ?
18:19La jalousie, la méchanceté des autres.
18:22Liberté, égalité, fraternité, vous choisissez quoi ?
18:27La fraternité, j'aimerais y croire un peu plus.
18:29Et Dieu dans tout ça ?
18:31J'espère qu'il existe.
18:33La série événement sur Netflix, 5 épisodes, s'appelle La Cage, sur l'univers du MMA,
18:39si vous voulez tout savoir avec les plus grandes stars aujourd'hui de cet univers, est réalisée.
18:44Et aussi vous êtes dedans, Franck Gastambide.
18:47J'étais ravie de vous avoir.
18:48Merci Léa, merci énormément.
18:49Très belle journée à vous.