Pour le lancement de la campagne hivernale des Restos du Cœur, le président de l'association, Patrice Douret, est l'invité d'Amandine Bégot.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot avec Amandine Bégot du 19 novembre 2024.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot avec Amandine Bégot du 19 novembre 2024.
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00:00RTL Matin, avec Amandine Bégaud et Thomas Soto.
00:05Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud est de 40.
00:08Les Restos du Coeur lance ce mardi leur 40e campagne.
00:1040 ans que les enfoirés chantent, c'est pas vraiment ma faute s'il y en a qui ont faim,
00:14mais ça le deviendrait si on n'y changeait rien.
00:16Lui et ses formidables bénévoles font tout pour que ça change.
00:19Alors ce matin, Amandine, vous avez choisi d'inviter Patrice Douré,
00:22c'est le président des Restos, bonjour et bienvenue.
00:24Bonjour Patrice Douré, et merci beaucoup d'être là.
00:26Ce matin, on se souvient de cet appel à l'aide que vous aviez lancé l'an dernier
00:29pour la toute première fois.
00:31Les Restos du Coeur avaient dû refuser du monde,
00:32refuser de nourrir des gens qui auraient dû, pu recevoir votre aide.
00:36Est-ce que ce sera encore le cas cette année ?
00:39Et oui, vous avez raison de le rappeler, l'an dernier,
00:41nous avons dû refuser 110 000 personnes que nous aurions acceptées.
00:45Mais malgré cela, nous avons quand même accueilli 1 300 000 personnes,
00:48c'est-à-dire le même chiffre que l'année d'avant.
00:50Et grâce à l'aide que l'on a reçue,
00:52puisque aujourd'hui pour les restos, ça va mieux, c'est très bien.
00:54Mais en revanche, la précarité, elle, va très bien aussi.
00:57Et donc, on va pouvoir consacrer cette aide à de nouvelles actions
01:00et pouvoir renforcer toute l'aide envers les plus vulnérables.
01:03On va parler notamment des enfants, parce que les chiffres sont effrayants.
01:06Mais vous allez devoir, il n'y a plus question de refuser du monde a priori.
01:10Les restos ont toujours refusé du monde.
01:12Malheureusement, on n'a pas la possibilité et on reste totalement raisonnable
01:16sur le fait qu'on ne pourra jamais accueillir 10 millions de personnes
01:19qui, aujourd'hui, vivent sous le seuil de pauvreté.
01:21Donc, il a fallu toujours refuser du monde.
01:22Ce qui est certain cette année, c'est qu'on va pouvoir en accepter plus.
01:26Et notamment, les publics les plus vulnérables,
01:28les familles monoparentales et les enfants, on en a parlé, on va en reparler.
01:31Vous nous aviez dit aussi, l'an dernier,
01:34si on ne fait rien, et on se souvient de cet appel à l'aide,
01:36vraiment, qui nous avait tous surpris, c'était au début du mois de septembre,
01:38si on ne fait rien, les restos vont mettre la clé sous la porte.
01:41Ça, il n'en est plus question.
01:42C'est sauvé.
01:44Pour l'instant, encore une fois, on est extrêmement raisonnable et prudent.
01:48Pourquoi ? Parce que les inquiétudes sont toujours là.
01:51On voit bien aujourd'hui qu'on a une crise sociale qui débute.
01:54Chaque fois qu'il y en a eu une, je pense à 2008,
01:572008, trois ans plus tard, c'était 25% de personnes.
01:59Ça veut dire que les plans sociaux qui sont annoncés en ce moment,
02:01Auchan, Michelin, tout ça, ça vous inquiète ?
02:03Tout à fait. Les premiers thermomètres de cette précarité, ce sont nos bénévoles.
02:07Chaque fois qu'il y a eu une crise, ils ont vu arriver tout de suite
02:10des personnes nouvelles au resto du cœur.
02:12Aujourd'hui, moi, je ne sais pas dire si dans les prochaines semaines,
02:15les prochains mois, nous n'aurons pas la même augmentation d'activité
02:18et donc de précarité. Là, on parle d'hommes, de femmes et d'enfants
02:21qui viennent frapper à notre porte.
02:22Moi, je ne sais pas dire aujourd'hui quels seront les prochains besoins.
02:25Les enfants, je voulais qu'on s'arrête sur ces chiffres qui, je le disais, sont effrayants.
02:2939% de vos bénéficiaires sont des mineurs, 15% moins de 5 ans
02:34et près de 10% moins de 3 ans.
02:36Ce sont des bébés, 128 000 bébés accueillis.
02:39C'est un chiffre qui est en constante augmentation.
02:41Qui sont ces enfants ?
02:43C'est terrible. Ce chiffre, je crois que c'est celui qui nous heurte le plus
02:46au-delà de toutes les personnes qui viennent chez nous.
02:49Aujourd'hui, on ne peut plus accepter ça.
02:51Ce n'est pas possible.
02:52L'an dernier, c'était 126 000.
02:54Il y a deux ans, c'était 110 000.
02:55Ce sera quoi l'année prochaine ? 150 000.
02:58Ces enfants, ces bébés de moins de 3 ans,
03:00ce sont peut-être les adultes qui viendront frapper à la porte des restos du cœur
03:03dans quelques années.
03:05C'est inacceptable et on doit prendre notre part de responsabilité
03:09comme nous le faisons.
03:10Les restos bébés ont débuté au début des années 90.
03:13Donc, on le fait depuis très longtemps.
03:15Mais là, on a décidé effectivement, avec l'aide des Français,
03:17d'essayer modestement, tout au long de la 40e campagne,
03:22d'apporter 100% de l'aide alimentaire et matérielle à ces bébés
03:26et puis d'essayer d'aider leurs parents, souvent ce sont des mamans seules,
03:29à s'occuper aussi d'elles.
03:30Ça veut dire leur proposer une alternative pour garder ces enfants
03:35parce qu'elles n'ont pas forcément les moyens d'avoir recours à une garde.
03:37Ça veut dire des rendez-vous, je ne sais pas, médicaux, un soutien psychologique.
03:42C'est tout un accompagnement global.
03:44Concrètement, c'est un accompagnement global.
03:47Alors, c'est de pouvoir passer du temps avec leur bébé et elle dans nos centres d'activité.
03:51On a déjà près de 700 de nos 2348 lieux d'activité
03:55qui sont dotés de ce qu'on appelle un espace petite enfance.
03:58C'est leur permettre de se poser quelques instants
04:00pour discuter avec nos bénévoles de leurs propres besoins
04:02pendant que d'autres bénévoles s'occupent du bébé
04:04et surtout, leur apportent toute l'aide alimentaire et matérielle dont ils ont besoin.
04:08Ces 1000 premiers jours, c'est là où se fait toute la vie adulte du bébé.
04:13Et on ne peut pas laisser un enfant, bien sûr, avoir faim et être dans des situations de précarité.
04:18C'est quelque chose d'insoutenable.
04:19J'imagine que tout ça, ça suppose des moyens de l'argent.
04:22Oui.
04:22Donc, c'est pour ça que vous avez besoin de l'argent des Français
04:24qui ont été au rendez-vous l'année dernière.
04:26Des moyens humains aussi, peut-être ?
04:28Oui, absolument, parce qu'il va falloir déployer des moyens humains très lourds.
04:33Ça ne va pas se faire tout de suite.
04:34Il va falloir du temps.
04:35Il faut qu'on puisse gérer des approvisionnements énormes en lait, en couches, en produits d'hygiène,
04:40une aide matérielle également.
04:41Et puis, il va falloir former tous les bénévoles, tous les nouveaux bénévoles
04:44qui vont venir renforcer tous ces lieux d'activité.
04:47Ça ne sera pas opérationnel demain, mais ça va se mettre en place dans les prochains mois.
04:50Si on veut vous aider, si les auditeurs qui nous écoutent veulent vous aider,
04:53il y a bien sûr les dons sur le site de l'association restauducoeur.org.
04:57Mais si on se dit, moi, j'ai une petite expérience, je ne sais pas,
05:01autour des bébés et que je veux vous aider, comment je fais ?
05:05Très simplement, en allant sur le site des Restos du Coeur,
05:08vous avez la possibilité de déposer une candidature.
05:11Ou en allant dans le centre le plus proche.
05:13Vous savez, il y a toutes les façons de donner.
05:15Donner du temps, c'est important, un peu, beaucoup, parfois beaucoup trop.
05:19Mais donner aussi un peu d'argent, parfois un peu, et puis parfois beaucoup.
05:23C'est l'ensemble de ça qui fait que cette chaîne de solidarité fonctionne depuis près de 40 ans.
05:27Vous allez fêter, j'aime pas ce mot fêter, ce 40e anniversaire,
05:31parce qu'on se serait tous bien passé, bien sûr, de cela.
05:35Est-ce que vous diriez aujourd'hui, Patrice Douré, que les bénéficiaires que vous aidez
05:39sont encore plus en difficulté qu'il y a 5, 10 ou 20 ans ?
05:43Oui, par rapport à 1985, il y a beaucoup de choses qui changent,
05:47mais malheureusement, il y a ce qui ne change pas.
05:49En 1985, en Coluche-Acrée-les-Restos, on parlait de nouveaux pauvres.
05:53Aujourd'hui, ils ne sont pas si nouveaux, ils sont toujours là,
05:56ils sont beaucoup plus nombreux, et ils sont surtout beaucoup plus pauvres.
05:59Et ça, ça ne s'arrête pas.
06:00Et il y a une forme de colère froide aujourd'hui
06:03de toutes les associations de solidarité, à se dire, mais on attend quoi ?
06:07Simplement de se dire que chaque année,
06:09c'est une simple fatalité de se dire que les chiffres vont augmenter.
06:12Mais derrière les chiffres,
06:14ce sont, je le redis, des hommes, des femmes et des enfants qui viennent frapper à la porte,
06:18qui nous disent, moi une fois que j'ai payé mon loyer et mes charges,
06:21je n'ai plus un seul euro.
06:23La fin du mois, elle est au début du mois pour eux.
06:25C'est ça le problème.
06:26Vous allez voir Michel Barnier, le Premier ministre, tout à l'heure,
06:29puisque un chapiteau est installé pour deux semaines à Gennevilliers,
06:32tout près de Paris, là où tout a commencé avec Coluche il y a 40 ans.
06:35Qu'est-ce que vous demandez au Premier ministre aujourd'hui ?
06:37Nous, ce que nous attendons, ce sont des mesures structurelles.
06:40Ce n'est pas normal que chaque année, il y ait de plus en plus de personnes en difficulté
06:43face à l'alimentation, au logement, et toutes les associations le disent.
06:47Il faut des mesures structurelles.
06:49On n'a pas pour ambition de voir chaque année nos chiffres d'activité croître.
06:52Nous ne sommes pas une entreprise faite pour ça.
06:54Nous sommes une association de solidarité.
06:57Donc, je vais déjà lui rappeler qu'effectivement, il faut des mesures
06:59pour faire en sorte qu'il y ait moins de gens qui aient besoin de nous.
07:02Et puis, deuxièmement, on a besoin de son soutien encore.
07:04Aujourd'hui, ce qu'on demande, ce sont des mesures très simples.
07:07Quand on sait que...
07:09Aujourd'hui, c'est très compliqué au niveau des finances publiques, on l'a bien compris.
07:12Mais quand on donne 1 euro d'argent public au resto,
07:15on déploie 4 à 5 euros de missions sociales sur le terrain.
07:19Ce qu'on souhaite, c'est qu'ils prennent, ils nous accompagnent sur une décision qui est importante,
07:23c'est l'exonération de TVA, sur les achats alimentaires des associations.
07:26C'est-à-dire qu'aujourd'hui, vous achetez des biens, enfin des aides,
07:29des aliments, pour nourrir bien sûr vos bénéficiaires, et vous payez la TVA dessus ?
07:34C'est-à-dire qu'on n'achète plus du tiers de ce qu'on distribue gratuitement, et on paye la TVA dessus.
07:38C'est une économie que l'on pourrait directement consacrer à nos missions.
07:41C'est le premier point.
07:43Et puis, Michel Barnier connaît très bien l'Europe.
07:44On a besoin de l'Europe pour nous soutenir.
07:46On va commencer l'année prochaine à renégocier le budget de l'aide européenne.
07:50Pour les restos, c'est 1 repas sur 5.
07:52Il va falloir que le gouvernement nous appuie
07:54pour qu'on puisse s'assurer d'un renouvellement de ce soutien qui est important pour nous,
07:58mais surtout pour les gens qu'on aide.
07:59Juste d'un mot, exonérer cette TVA, c'est des millions de repas en perspective ?
08:04C'est ça aussi ?
08:05C'est une estimation de 6 à 10 millions de repas supplémentaires pour les restos du cœur.
08:09Merci beaucoup.