Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, était l’invité de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.
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00:00Bonjour Bruno Rotaillot. Bonjour Sonia Mabrouk. Et bienvenue à la grande
00:03interview sur CNews Europe 1. Vous êtes le ministre de l'Intérieur, un ministre à
00:06Beauvau qui fait face à son premier mouvement depuis votre prise de
00:09fonction avec une colère agricole, monsieur le ministre, qui s'intensifie et
00:13se durcit des centrales d'achat de la grande distribution occupée, les entrées
00:17du port commercial de Bordeaux en ce moment entravées, une promesse de
00:21paralysie et même de chaos de la part de certains à la coordination rurale.
00:24Vous aviez prévenu, Bruno Rotaillot, qu'il y aurait une tolérance zéro en cas de
00:28blocage durable, le blocage s'installe. Est-ce que vous maintenez ce matin votre
00:32position ? Bien sûr que je la maintiens. Je veux dire aux agriculteurs que je
00:37connais bien. Je suis un enfant de la ruralité, je vis dans la ferme que mon
00:41grand-père avait achetée avant la guerre et mes amis sont beaucoup
00:44d'agriculteurs. Je connais leurs problèmes et je veux leur dire que leur
00:47cause, la cause de la colère, elle est parfaitement justifiée. On les a
00:51enfermés dans une incompatibilité terrible. On a laissé entrer sur le
00:57territoire des produits qu'on interdit de cultiver en France avec des
01:01molécules interdites, c'est-à-dire qu'on leur a, on suradmistre, on
01:05bureaucratise, on leur met de plus en plus de contraintes en France et en même
01:08temps on laisse passer des produits du monde entier et ça c'est pas
01:12supportable. Donc colère légitime ? Bien sûr, par contre je suis ministre de
01:15l'Intérieur. Et donc ? Mali, c'est l'ordre républicain. Je peux pas faire deux poids
01:19deux mesures parce que si j'autorisais une profession à casser, à bloquer, à
01:24faire des atteintes aux personnes, alors ça ne tiendrait plus. Et je l'ai dit,
01:29d'ailleurs vous avez pu observer qu'ils l'ont fait volontairement, au Boulou, la
01:35porte d'entrée, si j'ose dire, de sortie Espagne et France a été libérée. Il n'y a
01:40pas eu de blocage, il n'y a pas d'enquistement au moment où je vous
01:43parle et à chaque fois qu'il y aura un blocage qui sera durable, on sera amené à
01:47débloquer pour les Français. C'est-à-dire comment débloquer très
01:49concrètement ? Tolérance zéro Bruno Retailleau, est-ce que ça veut dire que
01:51vous pourriez être amené à mobiliser des forces de l'ordre face à un
01:54mouvement, mais vous l'avez dit vous-même, populaire dans l'opinion, face à des
01:58paysans qui veulent vivre dignement de leur travail et face à la France qui se
02:01lève tôt ? Écoutez, les instructions que j'ai données encore aux préfets de zone
02:05que j'ai réunis hier après-midi, elles ont été claires. J'aurais dit qu'ils
02:10avaient parfaitement le droit de manifester. En revanche, qu'il y avait des
02:14lignes rouges, pas d'atteinte aux biens ou personne, pas d'enquistement. Quand je
02:18vois que sans doute un membre de la coordination rurale a brûlé, a enflammé
02:24dans une direction du territoire, la DTT à Mont-de-Marsan, alors qu'il y avait du
02:29personnel à l'intérieur, ça n'est pas acceptable.
02:31J'ai demandé au préfet, la préfète l'a fait, que systématiquement, quand il y a
02:36ce genre d'action, eh bien il y ait un signalement à la
02:39justice pour que les fautifs soient poursuivis. Donc encore une fois, la cause
02:44est juste. La manifestation, le droit de manifester est constitutionnel, mais il y a
02:49des limites. Et les limites pour les agriculteurs sont les mêmes limites que
02:53pour l'ensemble de nos concitoyens. Je vous pose l'action, ce n'avait pas été le
02:57cas par rapport à l'ancien ministre de l'Intérieur, qu'il y avait une forme
03:01de géométrie variable, une compréhension différente par rapport aux agriculteurs
03:04et d'autres mouvements. Mais je ne suis pas ministre de l'Intérieur à mi-temps.
03:07Je veux dire que quand on veut rétablir l'ordre républicain, on doit l'imposer
03:12avec des règles qui sont justes, une juste fermeté. Voilà, c'est tout.
03:16Et j'observe d'ailleurs qu'un grand syndicat agricole, je le vois bien, est
03:21responsable, mesure ses actions. Et de la FNSE1. Et j'avais rencontré d'ailleurs la
03:25semaine dernière son président, Arnaud Rousseau, pour donner les limites,
03:29évidemment. Au sujet de l'immigration à présent, Bruno Rotailleau, les derniers
03:33chiffres révélés par le JD News montrent une fermeté qui porte déjà ses
03:37fruits. Augmentation des expulsions de 586%, les éloignements augmentent aussi,
03:41de près de 44%, les refus de délivrance de titres pour motifs de
03:45troubles à l'ordre public augmentent de 14%. Ce sont des chiffres de comparaison,
03:49je le précise, entre fin septembre 2023 et fin septembre 2024, lors de votre
03:54arrivée à Beauvau. Alors, ça va dans le sens de la fermeté, il peut y avoir aussi
03:58l'héritage de l'ancien ministre. Malgré tout, est-ce que c'est le signe qu'il y a
04:02une clarté dans les directives données au préfet ?
04:04La clarté, je pense que c'est le début de l'action politique.
04:08Il y a eu le texte sur l'immigration qui a été très contesté, vous vous souvenez, et je
04:12pense que ce texte nous a donné beaucoup beaucoup d'outils. Il faut aller plus
04:16loin. Moi, j'ai donné des consignes très précises au préfet, j'ai déjà fait une
04:19circulaire de pilotage. Je leur ai dit que mon objectif était de faire reculer,
04:24bien entendu, l'immigration. On lutte contre l'immigration irrégulière et il
04:28faut donner des titres de séjour au compte-gouttes. Voilà, je pense que c'est
04:32une demande des Français. L'an dernier, vous vous rendez compte, on a accueilli, tout
04:37compris immigration régulière et irrégulière, à peu près la population
04:40de la ville de Lyon, plus d'un demi-million d'étrangers sur le sol
04:45français. Vous savez, aujourd'hui, nos compatriotes, qu'ils soient de droite ou de
04:48gauche, ils ont la même demande. La demande, c'est d'être ferme, de reprendre
04:52le contrôle d'un mouvement migratoire qui nous a largement échappé et qui
04:55crée du désordre en France. Alors ces bons chiffres, en tout cas ces premiers
04:58chiffres dans le verre, ne doivent pas masquer aussi ce qui manque, ce qui pêche,
05:01ce sont les OQTF. Est-ce que vous pouvez nous affirmer ce matin, M. le
05:04ministre, que vous arriverez à obtenir la révision de la fameuse directive de
05:08retour européenne, justement ? C'était ma priorité. J'ai un plan pour les
05:13migrations, qui est un plan qui est très articulé, une défense de l'avant, à
05:17l'international pour empêcher des flux de venir. C'est pour ça que je multiplie,
05:21nous multiplions des accords bilatéraux. Par exemple, il y a quelques jours, avec
05:25le Kazakhstan, pour éloigner évidemment des Afghans, par exemple. Ensuite, l'Europe,
05:29on a une directive retour, vous l'avez souligné, elle est mal nommée, c'est une
05:33directive anti-retour. Elle nous empêche les éloignements des étrangers.
05:37J'en ai fait ma priorité, je peux vous l'annoncer aujourd'hui, aux derniers
05:40conseillers ministres de l'Intérieur, les 27 ministres de l'Intérieur européen,
05:44j'ai mis le dossier sur la table et à la quasi-unanimité, nous l'avons décidé et
05:49donc ce sera sous la présidence polonaise. La Pologne prend la présidence de l'Union
05:53à partir du mois de janvier prochain. Ce sera vraiment la priorité des
05:57priorités et nous obtiendrons la modification de cette directive retour
06:02pour rendre beaucoup plus faciles les éloignements. Ce sera une grande
06:05victoire qui va nous permettre de reprendre cet outil juridique en main
06:09qui est essentiel pour les éloignements. Encore faut-il qu'il y ait les
06:12laissés-passés consulaires de l'autre côté. Oui, mais justement... C'est toujours le même
06:16sujet. Oui, mais avec les accords bilatéraux, par exemple, il suffira de
06:19montrer que quelqu'un a transité ou a séjourné dans un pays, même si ça n'est
06:23pas son pays d'origine et nous pourrons le renvoyer. Je viens d'organiser dans les
06:29dernières semaines, d'ailleurs, deux vols groupés qu'on appelait charter avant,
06:33Géorgie et puis avec des Albanais et je pense que cette politique, je la
06:38poursuivrai. Sur la scène européenne et sur la scène nationale, bien sûr, il y a
06:41une perspective d'une nouvelle loi immigration, mais d'abord parlons, Bruno
06:45Rotailleau, de la précédente. Sur le site de l'Assemblée nationale, et j'invite
06:48nos téléspectateurs et auditeurs à y aller, on découvre que seuls 27% des
06:53décrets de la loi immigration ont été promulgués. En clair, un tiers de la loi
06:57immigration seulement est en application. On entend ce matin votre discours
07:02volontariste. Qu'est-ce que vous comptez faire pour remédier et accélérer les
07:05choses à ce niveau-là ? Vous avez raison, ces chiffres, lors de mon arrivée, je les
07:09ai découverts et beaucoup de décrets n'ont pas été publiés pour des raisons
07:14qui tiennent au contexte politique, sans doute.
07:16Simplement, j'ai demandé à mon inspiration de ce que, pour les décrets
07:20qui concernent le ministère de l'Intérieur, tout soit réalisé, finalisé,
07:24publié, avant la fin de cette année. Et ça le sera. Avant la fin de cette année ?
07:29Avant la fin de cette année, les décrets qui dépendent de mon ministère. Il y en a
07:33qui dépendent, par exemple, du ministère du Travail, de la Santé, et je verrai
07:36aussi à ce que mes collègues puissent prendre en charge cette rapidité, cette
07:39réactivité, parce qu'on ne peut pas comprendre, lorsqu'il y a une loi qui
07:42s'implique, il faut que les décrets suivent, sinon... Il faut qu'on demande une autre loi.
07:45Évidemment. Dans la lutte contre la délinquance du quotidien, Bruno Rotailleau,
07:49les chiffres, ce matin, de la grande enquête VRS, vécue et ressentie en
07:53matière de sécurité du ministère de l'Intérieur, parle d'eux-mêmes, le ressenti
07:57sur l'insécurité, je vais donner quelques chiffres rapidement, plus 14% dans son
08:01domicile, plus 10% dans les transports, et puis ce chiffre, 10% des interviewés,
08:05c'est comme si c'était une grande enquête, 200 000 personnes interrogées renoncent à
08:08sortir de chez eux, c'est une forme de capitulation par rapport à une violence
08:13qui devient incontrôlable ? C'est une violence qui s'épand sur tout le
08:17territoire, c'est une violence qui devient de plus en plus désinhibée, et
08:20c'est une violence qui touche de plus en plus des jeunes, de plus en plus de
08:23jeunes sont des victimes, et de plus en plus de jeunes sont des tueurs, sont des
08:27auteurs, c'est dramatique, ça n'est pas seulement une question de sentiments,
08:31c'est une réalité, toutes les 20 minutes un refus d'obtempérer, et tous les jours
08:35au moins 1 000 agressions. C'est la raison pour laquelle j'ai réuni les
08:38préfets, les policiers, les responsables des départements, les gendarmes, à
08:42l'école de guerre, dans l'amphi Foch, il y a quelques jours, pour leur donner des
08:45instructions qui sont claires, je vais leur donner plus de liberté, je vais
08:48leur dire écoutez les préfets de département, les directeurs de la police
08:51des départements, les colonels chargés des groupements de gendarmerie des
08:55départements, je vais vous donner cette liberté parce que ce qui se passe en
08:58Vendée n'est pas sans doute la même chose qu'il s'y passe dans le Val-de-Marne
09:02ou ailleurs, donc vous allez me faire des plans de rétablissement de cette
09:05autorité au quotidien, je vous donne de la liberté mais en contrepartie c'est
09:10des résultats que j'attends, et vous allez mettre aussi, vous allez travailler
09:13dans ce plan de restauration de l'ordre public au niveau quotidien, les
09:18maires, les élus dans le coup, c'est fondamental, d'ailleurs vous serez au
09:21congrès des maires tout à l'heure, les maires face à l'insécurité, bien sûr, le
09:26plan pardonnez-moi monsieur, le plan d'action c'est pour le 15 janvier, vous
09:29leur donnez plus de liberté pour plus de résultats et vous voulez un
09:32diagnostic territoire par territoire, mais qu'est-ce que vous demandez
09:35précisément, mis à part des résultats, qui ciblez-vous ? Je cible d'abord ce
09:39qu'on appelle les délinquants d'habitude, ceux qui pourrissent la vie des
09:41français, pour être clair on a une statistique qui est terrible, entre 5 et
09:4610% de ces délinquants d'habitude, ce qu'on appelle les multirécidivistes, les
09:49multiréitérants, entre 5 et 10% sont à l'origine cause à peu près au moins
09:5550% des actes de délinquance, donc moi ce que je veux c'est que ces gens-là, on
09:59les appréhende, on les mette à l'ombre, ensuite il faut que la justice fasse son
10:02travail, parce qu'une fois qu'on a une baisse, vous voyez, de 50% des actes de
10:07délinquance, on respire un peu plus, donc on va mieux cibler, ça sert à rien de
10:11partir et de se disperser dans tous les sens, je pense qu'il faut cibler et c'est
10:15ce que je leur demande dans ce plan, ils connaissent bien le terrain et ils auront
10:18des résultats. Et il faut que la justice fasse son travail, on aura noté votre
10:21phrase, il ne sert à rien d'avoir un plan aussi ferme soit-il, si il n'y a pas la composante du système.
10:26Bien sûr, d'abord on ne peut pas me demander d'avoir des résultats si
10:30l'ensemble du continuum et le continuum de sécurité c'est la police, c'est la
10:34gendarmerie, c'est le ministère à l'intérieur, ce sont les élus le coup, avec les
10:37polices municipales, je vais conclure ce matin une table ronde avec des maires,
10:42des élus, pour voir comment on peut aller plus loin, pour mieux équiper, pour
10:45donner plus de pouvoir aux policiers municipaux et puis il y a la justice,
10:49j'étais à Meaux dans la ville dont le maire est Jean-François Copé, il y a un
10:53travail remarquable et on voit bien que quand l'État, quand la justice, le
10:57procureur, le président du tribunal étaient là, fantastique, vraiment c'était
11:01remarquable, il y a des résultats.
11:03Vous parlez justement des polices municipales, ce Beauvau des polices municipales, ce
11:06sondage Bruno Retailleau que je vous livre ce matin sur CNews Europe 1,
11:11sondage CSA pour notre chaîne le JDD Europe 1, 66% des Français estiment qu'il
11:15faut systématiser le port d'armes pour les policiers municipaux, à Poitiers la
11:20maire écologiste fait de la résistance, il y a un appel à la grève des policiers
11:23municipaux qui réclament le droit d'être armé après une énième fusillade,
11:27quel sursaut, que faut-il faire, systématiser ce port d'armes ?
11:31Moi je suis attaché, puisque j'ai été élu local, à la liberté des élus locaux, parce que
11:35la police municipale exprime le pouvoir de police du maire, donc c'est au maire de
11:40voir et de décider, mais ce que je dis au maire et y compris à la maire de Poitiers,
11:44c'est qu'aujourd'hui les policiers municipaux sont confrontés à cette
11:47ultra-violence, en les armant on les protège, mais en les armant ça permet de
11:51protéger beaucoup mieux nos concitoyens, encore une fois j'ai cité l'exemple de
11:55Meuse, je pourrais citer l'exemple de Meuse, j'étais chez François Gros Didier
11:59qui est maire de Meuse il y a quelques jours, à chaque fois vous voyez il y a des
12:02résultats, donc il n'y a pas de fatalité, quand vous avez ce continuum, cette
12:06continuité, l'Etat, les maires, la justice, et bien ça fonctionne et on
12:11obtient des résultats. Alors sur les peines, faut-il des peines de prison ferme par
12:15exemple, Monsieur Rotaillos, pour ceux qui menacent de mort des enseignants, des
12:18chefs d'établissement, on vient de voir ce qui s'est passé avec la décision de
12:22justice autour de celui qui avait menacé le proviseur du lycée Maurice Ravel,
12:25600 euros d'amende et un séjour de citoyenneté, le parquet, il est vrai, a fait
12:30appel, mais est-ce que là il faut automatiser le passage par la casse
12:33prison, sachant que nous n'avons pas de peines planchers ?
12:35Ça reviendra à cela si vous dites automatisation, j'ai toujours été
12:40favorable aux peines planchers, mais les peines planchers ne sont pas dans
12:42l'arsenal dont dispose la justice. Et vous le regrettez ? Très franchement, un je le
12:46regrette, très franchement, la décision et la sanction, elle est trop légère.
12:50J'ai été révolté il y a quelques jours à Marseille, je vais vous
12:53donner un autre exemple qui m'a vraiment révolté.
12:56Le 11 novembre dernier, deux individus sans doute reliés à la DZ Mafia veulent
13:01estoquer des fonds à un commerçant, 8000 euros, et ils tabassent l'employé.
13:06Heureusement, nos policiers anticriminalité tombent dessus,
13:11comparution immédiate, malheureusement ils sont remis en liberté, certes sous
13:15contrôle judiciaire, ils seront jugés bien entendu au mois de janvier. Mais est-ce
13:20que vous vous rendez compte ? Le commerçant lui, qui a dénoncé ces
13:24individus, qui sans doute sont reliés à la DZ Mafia, il vit dans quel état
13:28aujourd'hui ? Est-ce qu'il faut le protéger ? Donc il faut vraiment que chacun
13:33assume ses responsabilités, au mieux, on est dans un état où l'ultraviolence est
13:37en train de gangréner nos villes mais nos campagnes, il y a le narcotrafic et
13:41ça je suis fondamentalement engagé parce que là encore c'est une des causes
13:45racines de cette ultraviolence. Quand j'ai posé la question il y a quelques jours, ici même à
13:49votre place, sur CNews et Europe 1, au garde des Sceaux, il m'a dit qu'il n'y a pas de
13:52laxisme, de la justice, il n'y en a pas. Non mais moi ce que je constate d'ailleurs, le
13:56procureur, d'ailleurs le procureur qui est encore relié, j'espère que ça durera à
14:00la chancellerie au garde des Sceaux, a fait appel de la décision de justice à
14:03Marseille. Donc attention, il ne faut pas généraliser, simplement moi, parce que
14:09j'ai des policiers, des gendarmes qui sont en première ligne, ils ont des familles,
14:12ils risquent gros et quand ils arrêtent des individus qui, otages pour les
14:18antécédents judiciaires, ont 10, 20 etc, ça les déprime. Voilà, je ne veux pas qu'ils
14:24soient démobilisés, on a besoin de tout le monde mais je sais que, très franchement,
14:27les magistrats font leur travail et eux aussi, ils subissent un poids, une
14:31contrainte de la lourdeur des procédures. Vous savez, les mafias qui ont
14:35d'excellents avocats, ils se faufilent. Plus il y a de complexité dans la
14:38procédure judiciaire, plus ça profite. Donc la complexité, ce n'est pas de l'idéologie ?
14:42Ah, il peut y avoir de l'idéologie, il peut y avoir de l'idéologie, ça c'est
14:46clair, on le sait très bien. Alors que fait-on, parce que vous avez
14:50quand même le verbe, si je puis dire, haut sur certains sujets par rapport aux mafias,
14:53allez-y, monsieur Rotailleux, vous avez parlé de mexicanisation, qui signifie
14:57aussi, puisque, rappelons, le poids des mots est important, un système quand même
15:00de corruption qui pourrait être généralisé dans les ports, auprès des
15:04gardiens de prison, dans nos institutions ? Généraliser, ne l'est pas encore, mais je
15:08l'affirme à ce micro. Il pourrait l'être ? La corruption, oui. C'est pour ça qu'on
15:13comprenne bien pourquoi je fais de cette cause, de la lutte contre le
15:17narco-banditisme, la criminalité organisée, je veux qu'on en fasse une
15:20cause et un combat national. Et de ce point de vue-là, avec Didier Migaud, on est
15:23parfaitement alignés. Et avec le Premier ministre Michel Barnier.
15:27Ce qui est fondamental de comprendre, c'est qu'aujourd'hui, tous les
15:30territoires sont gangrénés, tous. Le rapport sénatorial a été très très
15:36clair et on a bien vu qu'un certain nombre de professions, publiques comme
15:41privées, commençaient à être atteintes par des phénomènes de corruption.
15:45Donc il faut prendre le taureau par les cornes, il y aura un texte qui sera
15:49examiné au Sénat, qui est le fruit d'ailleurs du travail de la commission
15:52d'enquête que j'avais moi-même quand j'étais président du groupe LR au Sénat
15:55diligenté. Je crois qu'on va se donner les mêmes instruments qu'on s'est
15:59donnés il y a dix ans avec le terrorisme. C'est la même chose.
16:01Je veux que le sursaut que l'on a eu, le réarmement de l'État régalien qu'on a
16:06opéré pour lutter contre le terrorisme, cette année on aura sans doute une
16:09petite dizaine d'attentats qu'on aura déjoués. Peut-être que demain il y en
16:12aura. Mais croyez-moi, on n'en est plus du tout au même point.
16:15Je veux maintenant qu'on réarme l'État aussi pour et contre la lutte.
16:19On peut noter d'ailleurs que dans cette lutte vous avez à vos côtés peut-être
16:23des soutiens inattendus comme des maires communistes. Je pense aux maires
16:26communistes de Montreuil qui a dit qu'il y avait certaines idées positives que
16:30vous portiez. Est-ce que vous pourriez aussi, Bruno Rotoyer, vous inspirer de
16:33certains pays dans le monde ? Alors évidemment il y a un côté autoritaire
16:36qu'il faut mettre de côté, voire antidémocratique. Mais par exemple, pourquoi
16:40le Salvador a-t-il réussi justement à lutter et à mettre fin à certains
16:44trafics ? J'observe déjà, vous citez le maire de Montreuil. Je suis persuadé que
16:50sur ce texte, sur cette lutte contre la criminalité organisée, on aura une forme
16:55d'unité nationale. Combat national, unité nationale. Je l'espère vraiment.
17:00Mais certains sont pour la légalisation du cannabis. Je sais, mais voyez qu'un maire communiste et
17:04beaucoup d'autres. J'ai reçu des témoignages de soutien de maires de
17:08gauche, voyez, sur l'action que je mène qui est une action de fermeté.
17:12Bien sûr, il y a l'exemple que vous citez, il y a aussi l'exemple italien.
17:15Un seul, un seul point. On a par exemple, on sait. Pardonnez-moi, quand vous dites bien sûr
17:19l'exemple que vous citez, le Salvador peut-être... Non, l'Italie. L'Italie. Par exemple,
17:23le statut des repentis. On sait qu'on n'a pas ce statut-là en France.
17:27Il le faut parce que c'est comme ça que l'Italie a gagné des points contre les
17:31mafias. Un autre exemple, moi j'ai un commissaire de police qui a failli être
17:35condamné il y a quelques semaines. Pourquoi ? Parce qu'il y avait eu un
17:38travail avec des indicateurs. Il faut donner un cadre, un cadre légal. Parce
17:42que si nos policiers et nos gendarmes ne peuvent pas travailler avec des
17:45indicateurs, jamais on n'arrivera précisément à porter des coups fatals
17:49sur ces réseaux qui sont extrêmement puissants. Alors, vous nous direz tout à
17:53l'heure si vous avez les moyens politiques de vos ambitions Bruno Rotoy.
17:55Mais tout d'abord, est-ce que comme le ministre de l'économie ce matin dans le
17:58Parisien Antoine Armand, eh bien vous dites au Premier ministre, attention,
18:01attention à l'impôt de trop ? Non, mais bien sûr. J'ai toujours... C'est quand même une
18:07pression sur le Premier ministre. C'est pas une pression. Simplement, Michel
18:10Barnier, en 15 jours, il a dû faire un des budgets les plus exigeants qu'on ait
18:14jamais fait sous la Ve République. Jamais. Vous le qualifiez d'exigeant ou vous le
18:17qualifiez d'équation totalement insoluble ? Exigeant. C'était insoluble. Et la copie,
18:21elle n'est pas parfaite. C'est même pas moi qui le dis. J'utilise les mots même
18:24du Premier ministre. On est bien conscient. Deux tiers d'économie, un tiers de
18:29dépenses, est-ce que tout cela nous réjouit ? Eh bien non. Simplement, si ça
18:34n'était pas ça, c'était la crise financière. On va voir dans quelques jours, une grande
18:37agence de notation va donner une note en matière de dette française. Mais croyez-
18:43moi, si Michel Barnier n'avait pas eu ce courage de prendre encore le taureau par
18:48les cornes et d'avoir un budget très, très, très exigeant, la crise financière...
18:51J'ai regardé ce qu'il en avait été en Grèce. C'est moins 20 à moins 50 % pour
18:56les retraites publiques ou privées. C'est une baisse de salaire qui touche les
19:00plus petits salaires, de moins 15 à moins 20 à moins 30 %.
19:03Donc, s'il ne passe pas à crise financière, hier, le ministre des Affaires étrangères
19:09a affirmé sur ce plateau que si Marine Le Pen votait la motion de censure, ce serait
19:13la chianlie. La chianlie ? Ce n'est pas déjà le cas quand on voit des déficits ?
19:17C'est la crise politique, mais c'est immédiatement la bascule dans une crise financière.
19:21C'est vous le chaos, monsieur le ministre de l'Intérieur ?
19:23Ce n'est pas ça du tout. Mais ce que je peux dire, et je l'affirme à ce micro, c'est
19:28que demain, si le gouvernement tombait sur le budget, il y aurait immédiatement une
19:32crise financière. Et les mécanismes de crise financière, je les ai étudiés, on voit
19:37comment ça se passe. Ne croyez pas que la France soit exempte, justement, et puisse
19:42être à l'écart de tout cela.
19:43On veut comprendre. Crise financière et crise de régime ?
19:44Crise financière et crise politique. Mais vous savez que la dissolution…
19:48De régime ou politique ?
19:49De régime et politique. Pourquoi ? Parce que la dissolution, on ne peut en faire une
19:55nouvelle qu'à l'été prochain, avec des élections au mois de septembre. Ça
20:00sert à quoi de faire tomber un gouvernement sur un budget ? Ça sert précisément à
20:06mettre le chaos financier.
20:07A bon entendeur Marine Le Pen. C'est-à-dire Marine Le Pen, si elle appuie sur le bouton,
20:10elle met le chaos. C'est elle qui serait comptable de la situation financière.
20:14Moi, je respecte chacun sa propre politique. Mais faire tomber le gouvernement, très bien.
20:20Pour mettre un Premier ministre de gauche ? Pour mettre à ma place Mme Pannot comme
20:27ministre de l'Intérieur ? C'est ce que veut le Rassemblement national ? Faire tomber
20:32un gouvernement où il y a des gens de bonne volonté ? C'est l'union des bonnes volontés.
20:36Tout n'est pas parfait. J'en suis parfaitement conscient. Mais les Français nous ont donné
20:40une situation qui est compliquée. Il n'y a pas de majorité au Parlement.
20:43Et vous avez imprimé votre marque, Bruno Rotailleau, au ministère de l'Intérieur.
20:47Votre nom est désormais cité comme potentiel présidentiable. Reste à savoir si vous aurez
20:51les moyens de vos ambitions si tel n'était pas le cas. Est-ce que vous assumeriez de
20:55dire je ne peux pas agir comme je souhaite ? Je ne peux pas tenir les promesses que
20:58j'ai faites, notamment sur CNews et Europe 1 ce matin. Je quitte donc mes fonctions.
21:02Non, mais je pense que la règle est claire. Je crois que quand Michel Barnier m'a choisi
21:09pour ce poste qui est un poste très exigeant, très, très difficile de Beauvau, il a choisi
21:14un style, il a choisi des convictions, il a choisi un homme. Chacun sait que je n'ai
21:19jamais reculé sur mes convictions. Chacun sait, et vous l'imaginez, que si demain,
21:23on m'entravait, on m'entravait, et si demain on me demandait ou on m'imposait des contraintes
21:29qui rendraient impossible la politique, le cap que le Premier ministre lui-même m'a
21:32donné d'ailleurs, je retirerais les conséquences, évidemment.
21:36N'êtes-vous pas en train de préparer les conditions de votre départ ?
21:40Mais non.
21:41Ne vaut-il pas mieux partir seul, choisir son départ, que partir emporté par une mission
21:45de censure ?
21:46Je veux démontrer. Non, non. Très franchement, d'abord, vous avez parlé de la présidentielle.
21:50Moi, ma force, c'est ma liberté. Moi, je ne suis pas dévoré par le virus de la présidentielle.
21:56C'est ce qu'on dit au début.
21:57Je ne suis pas dans le coup d'après, ce qui me donne une forme de force et de liberté.
22:02Vous êtes une anomalie alors dans l'enquête politique, M. Roncailleau ?
22:05Peut-être, mais en tout cas, je suis là pour accomplir une mission. Pour moi, la politique,
22:10c'est un idéal. Voilà, c'est un idéal. Cet idéal, je m'y consacre et je veux montrer
22:15et je le montrerai si j'ai du temps. Je le montrerai que la politique, elle peut faire
22:19quelque chose aujourd'hui.
22:20Si vous avez du temps, vous avez tout dit. Est-ce qu'il y a des lignes rouges ? Je pense
22:23par exemple, et je connais, on connaît vos convictions depuis très longtemps sur l'euthanasie,
22:27sur le suicide assisté. Si le gouvernement ne tombe pas avant, est-ce que vous pourriez
22:31rester au sein d'un exécutif qui fait passer une telle loi ?
22:33Un projet de loi, ça me poserait des questions, c'est clair.
22:39Des questions existentielles, j'ai supposé.
22:41Des questions qui sont importantes. Encore une fois, j'ai des convictions et qu'on ne
22:44me demande pas de les changer. Je me suis déjà exprimé à multes reprises. Je pense
22:48que l'objectif et la priorité, ça doit être de permettre aux Françaises, aux Françaises,
22:54au moment où ils vont mourir, de les soulager. Mais on peut les soulager avec des soins palliatifs.
22:59C'est ce que je veux et je pense que le gouvernement serait bien inspiré d'avoir un grand plan
23:03massif, massif de déploiement des services de soins palliatifs parce qu'il y a, au moment
23:08où je vous parle, 20 départements qui en sont privés, des centaines de personnes qui
23:12vont mourir sans qu'on puisse soulager la douleur. C'est ce que moi je veux et je pense
23:16que l'euthanasie est une mauvaise solution.
23:18Qui est le chef de la droite aujourd'hui, M. Retailleau ? Vous serez demain en déplacement
23:22avec Laurent Wauquiez. Évidemment, cette image va beaucoup faire parler.
23:25Je suis très heureux de me rendre en haute loi.
23:28Je m'imagine. Ma question c'est qui le chef de la droite ?
23:31Laurent Wauquiez est le patron de notre groupe, LR à l'Assemblée nationale.
23:36Et qui est le patron du patron ?
23:38Le patron du patron, aujourd'hui, il y a un parti qui n'a pas de président.
23:43Vous savez pourquoi ? Je pense que Laurent peut jouer à l'avenir un rôle important.
23:46Et vous aussi ? J'imagine que les Français vous voient comme candidat potentiel et présidentiable.
23:52Non, je ne suis pas sûr qu'ils me voient.
23:55Moi, les Français, j'en suis sûr parce que je suis moi-même surpris du soutien de mes
23:59mesures de fermeté. Parfois, j'ai pu créer des polémiques.
24:01Je m'en fiche. C'est en fait, en réalité, ce que pensent par bon sens les Français.
24:05Un homme d'action, donc ?
24:07Totalement. Je veux démontrer que la politique n'est pas impuissante, qu'on peut bousculer
24:11la fatalité. Et ça, c'est fondamental.
24:12Qu'on soit de droite ou qu'on soit de gauche, on devrait essayer de croire encore à la
24:16politique.
24:17Pour croire en la politique, il faut des actes et des résultats.
24:19Mais j'en aurai, si on me donne du temps.
24:21Merci, M. Rotailleau.
24:22C'était votre grande interview.
24:23Je vous dis à bientôt sur CNews Europe.