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Pierre Bellemare comme vous ne l’avez jamais entendu ! C’est la promesse de ce nouveau podcast imaginé à partir des archives exceptionnelles du Service Patrimoine Sonore d’Europe 1.
Affaires criminelles, true crime, crimes, enquêtes, crimes historiques ou plus récents, crimes crapuleux, crimes familiaux, crimes inexpliqués surtout : Pierre Bellemare est le pionnier des grands conteurs de récits radiophoniques. Dans les années 70, cette voix culte d’Europe 1 a tenu en haleine les auditeurs avec ses histoires extraordinaires. Des histoires vraies de crimes en tout genre qui mettent en scène des personnages effrayants, bizarres ou fous. Des phrases à couper le souffle, des silences lourds de suspense, un univers de polar saisissant et puissant.
Avec un son remasterisé et un habillage modernisé, plongez ou replongez dans les grands récits extraordinaires de Pierre Bellemare.


Retrouvez "Les Récits extraordinaires de Pierre Bellemare" sur : http://www.europe1.fr/emissions/les-recits-extraordinaires-de-pierre-bellemare

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00:00Bienvenue dans les récits extraordinaires de Pierre Bellemare, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:10Donc chers amis, pour assister au procès, les journalistes accourent du monde entier vers le
00:16Hanover où tombent les premières neiges de l'automne. Évidemment des criminels comme Rudolf
00:23Pleie, il y en a eu d'autres, même chez nous, souvenons-nous de Landru, du docteur Petiot. On
00:29hésite donc à dire qu'on va se trouver devant une affaire typiquement allemande, on ne voudrait
00:34pas laisser entendre que l'Allemagne a l'exclusivité de ce genre de criminels. Pourtant,
00:40nous sommes ici en plein comte d'Hoffmann. La terreur, ce nuance du fantastique des danses
00:48macabres et la ville de T.L. Spiegel et d'Henri Loisler avec ses pignons, ses clochers noirs,
00:54ses toits bossus, encadrent bien ces fantômes tragiques, ces histoires de vampires qu'on
01:01va nous conter au long des audiences. Le lieu même où va se dérouler le procès,
01:25est à vous couper les souffles. C'est un palais de justice, de style Hohenzollern, soufflé par
01:31les bombes. En 1948, il ne reste que piliers de briques noires, escaliers aux marches ébréchées,
01:38semées de gravats. Mais au milieu de ces ruines, on a reconstruit et aménagé une merveilleuse salle
01:44d'audience, bloc de lumière tout neuf, vaste carré aux murs gris clair, au parquet de chaînes blancs
01:50miroitants que jonchent des moquettes beiges. Tout le fond de la salle derrière les juges est
01:55coupé par une immense verrière aux vitraux légèrement colorés de vert et de rose, derrière
02:00laquelle se dessine vaguement la carcasse du palais en ruines. De ce mur de verre se déverse
02:05la lumière froide d'un ciel plein de neige. Vestiaire, téléphone, triple rampe de néon
02:11encadrant le plafond, c'est le prétoire tel qu'en conçoivent un jour de génie les décorateurs de
02:16cinéma. Dans cette clinique judiciaire, trois juges en habit et cravate blanche sous leur robe
02:24noire, six jurés bien mis qui ont l'air de former le conseil d'administration d'une affaire prospère
02:30mais sans grande chance d'extension, vont juger le monstre. Mais inoutiloubliable, quand l'accusé,
02:38Rudolf Pley fait son entrée, enchaîné par les poignets flanqués précédés, suivi de garde en
02:45tunique vert-brouillard, apparemment d'or, coiffé de casquette plate. Je vous disais hier que Rudolf
02:51Pley, au moment de son arrestation, ressemblait à Orson Welles. Il en avait la stature, l'épaisseur,
02:55l'ironie. Mais quelques années ont passé, il a maintenant 27 ans et pour Pierre Cise, il ressemble
03:00de manière hallucinante à l'acteur Peter Lorre, jouant dans le film de Fritz Lang le maudit, le
03:06rôle de son aîné, de son précurseur, le vampire de Dusseldorf. Il est vêtu d'une étrange veste
03:13courte et ronde, couleur moutarde, qui lui donne l'air d'avoir par mégarde passé à l'envers une
03:18camisole de force. Sa cravate claire sort d'une chemise bleu marine. Ses complices le suivent à
03:25distance. Ces trois hommes se haïssent et chacun conspire à la perte des deux autres. On a dû
03:31prendre envers eux les précautions que les dompteurs prennent dans les ménageries pour les fauves dont
03:36on craint qu'ils ne s'entre-dévorent. Pley est tout seul, encadré de garde qu'il faut relever toutes
03:42les heures de crainte qu'il ne relâche leur vigilance. N'oublions pas que s'il a tué des
03:47dizaines de femmes, toutes par des coups frappés à la base du crâne, il a aussi, dans des accès de
03:51colère, tué des hommes. Pourquoi le tient-on, le dos tourné à la salle, face au prétoire ? Eh bien
03:58parce qu'on craint ses réactions. On préfère lui dérober la vue des rares femmes journalistes ou
04:03photographes qu'on a autorisées à assister au procès. Son principal complice, Hoffmann, était
04:08une extrémité du boxe des accusés, perpendiculaire à la stalle où Pley est assis. À l'autre bout du
04:14boxe, et séparé de lui par une garde attentive, on trouve le troisième homme de ce procès-cauchemar,
04:20Schoessler. C'est un assez beau garçon, très brun, dont les longs cils battent devant des yeux au
04:28regard fixe, ce qui lui donne un air faux. Pour ajouter à l'étrangeté de la scène, son avocat
04:37est aveugle de guerre. Face à ces trois hommes, et les tenant sous leur regard comme un savant
04:44tient un microbe sous le miroir du microscope, siègent les trois psychiatres et le médecin
04:51légiste. Ce dernier, le docteur Scholz, est le père du compositeur Norbert Scholz, auteur de la trop
04:58fameuse Lily Marlène, qui demeure pour nous français la chanson amère des années 40. Mais revenons
05:04aux monstres. Pierre Cys écrit « Pauvre monstre », et vous allez comprendre pourquoi. On l'a délivré
05:11de ses chaînes, il s'est dressé, court et trapu sur ses pattes de derrière. Un bref interrogatoire
05:18d'identité et vite on lui demande de s'expliquer. Il va s'expliquer. Et nous allons savoir comment
05:25on devient un monstre.
05:29Les récits extraordinaires de Pierre Belmar, un podcast européen.
05:41Rudolf Pley est né en Saxe, d'un père communiste que la victoire nazie a contraint à se réfugier en
05:47Tchécoslovaquie. Enfant, on le place apprenti chez un maréchal Ferrand. Pley est un mime remarquable,
05:53et limite le compagnon entablié de cuir devant sa masse sur la corne fumante des chevaux. Adressant
05:59un nazi tchèque tente, sans y parvenir, de le rallier à l'homosexualité. A 14 ans, ce qu'il
06:04croit être l'amour lui est révélé dans une cave par une fille de taverne. Pour cette femme vénale,
06:09Rudolf, qui n'a pas d'argent, vole son père qui le chasse. Lorsque la guerre éclate, il a 15 ans,
06:15les services du travail obligatoire l'envoient comme Stewart sur les bateaux de guerre. Il est
06:18coulé par une mine, il se sauve d'un avion abattu en flammes. Partout autour de lui, on souffre,
06:23on saigne, on meurt. Une vie, c'est si peu de choses dans cette Europe où l'on écrase toute
06:29la population d'une ville sous les bombes simplement pour faire peur aux autres, où l'on
06:32fait mourir en un seul jour des milliers d'hommes dans la boue glacée des steppes russes sur le
06:36simple caprice d'un état-major lointain, où l'on parque des êtres par millions pour les faire
06:41périr en application de lois aussi fantaisistes qu'atroces. Qu'est-ce que vaut une vie ? Tout le
06:47monde tue, de toutes les manières. L'état tue, la loi tue, la justice tue, l'armée tue, les SS tuent,
06:53les Russes tuent, les avions américains tuent, les avions anglais tuent, dans les pays occupés les
06:57résistants tuent, bref tout le monde peut tuer. Il suffit d'avoir une raison pour le faire, alors
07:02qu'on ne vienne pas dire à Rudolf Pley que lui seul au monde n'aurait pas le droit de tuer. Et Pley
07:08demande que dans cette salle, ceux qui n'ont jamais tué lèvent la main. Personne ne bouge.
07:15« Taisez-vous ! » dit le juge. « Alors que ceux qui ont tué lèvent la main ! »
07:21Personne ne bouge. Une espèce de gaieté funèbre luit dans les yeux de Pley. Dieu porcins le cercle
07:32des lunettes à monture de fer. Elle descend difficilement cette gaieté jusqu'à ses lèvres.
07:38Et cela arrive, et alors recrue d'horreur, on le voit émettre une sorte de gloussement convulsif.
07:45C'est ça, son rire. En 1944, il fait une première et grave crise d'épilepsie,
07:53bientôt suivie d'une seconde. On le soigne à la manière énergique du troisième Reich. On veut
07:57le stériliser, comme on l'a déjà fait d'ailleurs pour sa sœur. Mais l'hôpital où il attend cette
08:02cruelle opération est détruit de fond en comble par les bombardements. Vous voyez bien qu'on a
08:07tous les droits dit Pley, même celui de stériliser les gens. Et ne dites pas le contraire, car je
08:12suis sûr que vous regrettez qu'on ne l'ait pas fait. Vous vous dites, si on l'avait stérilisé,
08:16peut-être qu'il n'aurait pas tué toutes ces femmes. C'est ainsi que pour Pley s'est passée
08:22la longue guerre. Quand il rentre chez lui, c'est pour y trouver l'occupant russe, il dit,
08:27les Ivan, comme nous disions les fritz. Il est enroulé dans la police auxiliaire soviétique.
08:31Un jour, il intervient carabine à la main pour séparer un russe et un polonais qui se disputent
08:36le butin d'une ferme qu'ils viennent de piller. Ils blessent le russe d'une balle, aident à le
08:40penser aussitôt. Alors, dit Pley, alors, au contact de ce corps chaud, de ce sang, à entendre ses
08:49plaintes, je compris que là était pour moi la source de toutes les satisfactions. Dans la salle,
08:59un silence vertigineux dans lequel on entendrait presque palpiter le coeur défaillant des femmes
09:05prêtes à se trouver mal. Le juge tousse, sans doute pour se persuader qu'il ne vit pas un
09:11cauchemar. Poursuivez, dit-il. Alors, Edolf Pley explique que ce qui déclencha chez lui cette
09:22réaction en chaîne d'assassinat, c'est le spectacle, un matin d'hiver, dans le brouillard du
09:28Tyrol bavarois, d'un wagon plein de cadavres féminins, nus et froids, arrêtés aux portes
09:35d'un camp de concentration. À ce moment, Rudolf Pley ressent comme une espèce de pudeur. « Dois-je
09:45continuer ? Cela va devenir indécent. » Le greffier répond d'une voix égale. « Continuez, nous savons
09:56tout cela. » Rudolf Pley continue. « C'est nous qui ne continuerons pas, ayant l'habitude de respecter
10:05nos auditeurs. Et puis, je n'ai qu'aucun mot ne saurait rendre du reste, c'est le ton égal de ce
10:10récit qui parfois semble étouffer le narrateur, lequel s'arrête longuement, trépale, reprend son
10:16souffle par de longues aspirations. Ce sont les affreux dons d'acteurs du personnage, schémas
10:22énormes qui se promènent, comme des crabes mous sur la table, ou qui font le simulacre de serrer
10:27pour étrangler, de tirer pour arracher, et parfois le pied qui martèle le tapis, imite avec un
10:33réalisme affreux des piétinement féroces. C'est un vomi. » D'ailleurs, Pley explique ses crimes
10:41d'une phrase. « Je ne sais pas, dit-il, comment on peut avoir du plaisir avec une femme sans la
10:47tuer. Je ne comprends pas les autres hommes. Il leur suffit de les caresser, moi, il faut qu'elles
10:51meurent. Cela m'est absolument nécessaire, c'est vital pour moi, c'est pour cela que je ne pouvais
10:56pas rester en prison, pour cela que j'ai demandé la place du bourreau, c'est pour cela que j'ai
11:00avoué ce que vous appelez mes crimes. » Avec jactance, il conclut. « Je suis comme je suis.
11:06Il faut me prendre tel quel. Je suis un homme qui a le droit de tuer. » Entendez par là qu'une force
11:14extra-humaine le pousse, et qu'il n'est en rien responsable. Il sent grouiller en lui un nœud de
11:19vipère, il dit. « Des bêtes sont en moi ! » Nous admirons en vérité qu'une cour de justice,
11:25au siège des magistrats scrupuleux, ait pu entendre si longtemps ces minutieuses turpitudes,
11:30expliquer par exemple que pour empêcher l'identification des cadavres qui avaient
11:34servi à son plaisir, il laissait le corps sur place, jetait la tête en zone russe.
11:38L'accusé soudain s'arrête, médite et déclare d'une voix songeuse et musicale « C'est curieux
11:47comme la chaleur se retire vite du corps d'une femme qu'on vient de tuer. » Les spectateurs ont
11:54envie de crier « Mais faites-le donc taire ! » Au contraire, le président le relance d'un mot,
11:59et l'extraordinaire récit recommence. Les psychanalystes qui ont pour tâche d'expliquer
12:09le comportement de Pley au juge sont quatre, dont le très grand savant disciple de Sigmund
12:15Freud, le professeur Ewald. Cet érudit sexagénaire pointe en direction du criminel un
12:21index doctoral et dit gravement « Il est probable qu'un jour, étant bébé, au moment où votre mère
12:29vous donnait le sein, vous avez vu tuer un lapin ou un quelconque animal de ferme ainsi, vous avez
12:35associé dans votre subconscient de nourrisson la notion de sang, celle de nourriture et celle de
12:40la chaleur du sein féminin. Voilà l'origine de votre perversion. » Comment décrire ? Le sourire
12:49amusé avec lequel Pley accueille ce savant discours, c'est la mine avec laquelle un homme
12:53raisonnable écoute les propos d'un enfant. Il a l'air de penser « Mais où va-t-il chercher
12:57tout ce qu'il dit ? » À la fin, il convient, comme on cède à puéril raisonnement, « Ingénieux,
13:03je n'y avais pas pensé. C'est bien possible. » Puis, soudain, comme s'il décidait de revenir
13:08aux choses sérieuses, il conclut « Ah, au fait, non, j'ai été élevé au biberon. » Et le voilà
13:13reparti vers son droit de tuer. Croyez-vous vraiment qu'il soit plus déraisonnable de tuer
13:19pour le plaisir que pour imposer une idée stupide ? Il prétend d'ailleurs que ce droit est héréditaire.
13:26« Si l'on a voulu me stériliser, c'est pour que je ne transmette pas mon caractère à mes enfants.
13:31Or, j'ai un fils. Il aura donc mon caractère et il tuera aussi. Et il tuera mieux que moi,
13:36car il sera mieux outillé. Je n'ai fait que lui montrer la voie. D'ailleurs, ce n'est pas fini.
13:40Je suis convaincu que je tuerai encore. » Dites-vous bien, chers amis, qu'il n'y a là aucune comédie.
13:47Il ne joue pas la folie pour sauver sa tête, puisque la peine de mort a été récemment supprimée en
13:51Allemagne occidentale. Non, il parle de son droit de tuer comme d'une évidence. Écoutez-le. Vous
13:57croyez qu'il n'y aura plus de guerre, plus de révolution, plus de camp de la mort ? Nous ne
14:01sommes qu'à 25 km du rideau de fer. Qui vous dit qu'on ne videra pas un jour les prisons ? Est-ce
14:06qu'on n'utilise pas les détenus de droits communs pour garder les camps de concentration pendant les
14:10guerres ? Il y a 61 témoins dont la plupart ne savent rien. On leur fait prêter un serment
14:18collectif et on les entend l'un après l'autre. Une femme raconte qu'elle a employé Play comme
14:25garçon de taverne pendant un an, du 18 février 1944 au 7 février 1945. C'est l'effrayante année
14:32de la débâcle hitlérienne. Dans ce final fracassant, dans le crépuscule des dieux nazis
14:39que Wagner n'aurait pas imaginé, Play se sent comme un gardon dans l'eau claire. Il trafique
14:44de tout, il boit, il mange tout son sou, il se déguise, mystifie les cérémonies officielles en
14:49se collant des fausses barbes pour y paraître et, aux surprises, il n'est pas hitlérien. Chaque fois
14:54qu'il passe devant un portrait du Führer, il lui montre le poing et fait avec ses lèvres un bruit
14:58incongru. Aujourd'hui, en revanche, il noircit de « Heil Hitler » des pages entières. Play serait-il
15:05un homme des causes perdues, un courtisan du malheur ? Bien sûr, le procès dure plusieurs
15:11jours. Avant d'en arriver à la conclusion étrange de cet étrange procès, disons peut-être deux mots
15:17des complices. Schussler, qui a cherché refuge dans les mines d'uranium soviétique où il a connu
15:23un travail de forçat, une discipline de bagne et une nourriture infâme, revient de la Légion
15:28étrangère. Au garde-à-vous, les jambes raides, le profil aigu et la voix grave et assurée, il n'a aucun
15:35des stigmates du criminel. Pourtant, il avoue sa complicité dans deux meurtres et va se rassoir à
15:40son banc. Hoffman, lui, s'avance sous bonne garde face à ses juges, l'air brutal et fatigué du vieux
15:46baroudeur. Hoffman est le seul négateur de cette affaire. Il nie tout en bloc, sans nuance. Il n'était
15:52pas là, il n'a rien fait, il n'a rien vu. Alors, Pley lève deux doigts en l'air dans la direction du président
15:59et les fait claquer comme un écolier qui demande à sortir. Ce qu'il veut, c'est la permission de
16:04déverser en direction d'Hoffman une Kyrielle d'un Jurobsen. Car il n'y a aucun doute que les deux
16:10complices étaient là, l'un ou l'autre, à chaque crime pour dévaliser le cadavre. Ils suivaient Pley
16:15comme les hyènes ou les chacals suivent les fauves pour dévorer leur reste. Mais encore une fois, ne
16:22croyez pas que Pley soit une brute élémentaire. C'est très vrai qu'il a les pectoraux et les bras
16:27d'un gorille, mais sous son front jaillissent souvent les étincelles d'une intelligence, d'une intelligence
16:33en ruine. Pierre Six l'entend avec stupeur murmurer à propos de l'une des femmes qu'il a tuées. « Chacun
16:40de nous tue ce qu'il aime ». « Chacun de nous tue ce qu'il aime », c'est l'un des plus brillants paradoxes
16:48d'Oscar Wilde. Il ne peut s'agir d'une rencontre et Pierre Six le fait interroger par l'un de ses gardiens.
16:55« C'est une phrase d'Oscar Wilde », répond en effet Rudolf Pley. « Je l'ai apprise en classe autrefois ».
17:01Ainsi, les petits Allemands apprenaient en 1935 que « chacun de nous tue ce qu'il aime » quand les petits
17:08Français apprenaient que deux pigeons s'aimaient d'amour tendre. Enfin vient le dernier jour de ce
17:14procès extraordinaire. Bien entendu, il se termine sur l'inévitable condamnation de Pley à la
17:22détention à vie puisque la peine de mort n'existe plus en Allemagne. Et alors, alors on s'aperçoit
17:30avec stupeur qu'il n'a vraiment tenu qu'à l'extraordinaire personnalité de l'accusé que le
17:36procès ne paraisse pas scandaleux et inutile, scandaleux parce qu'inutile. À quoi aurait servi ce
17:44procès si Rudolf Pley avait été une brute élémentaire ? Pley, lui, semble satisfait d'en avoir fini et il se
17:53lève. « Il est toujours joyeux quand on l'emmène, c'est parce qu'il va manger. Le monstre dévore en
17:58effet à chaque repas cinq litres de soupe épaisse, trois kilos de pommes de terre, un kilo de viande. »
18:02Il en était du moins ainsi pendant le procès sinon il refusait de parler. Tous les clochers
18:08de la ville lancent leurs carillons dans l'air froid. Demain c'est la fête de tous les saints.
18:13Des centaines de bourgeois en gibus et redingotes tenus de rigueur pour cette cérémonie s'en iront
18:18dans les cimetières suivant leurs épouses aux bras chargés de fleurs.
18:32Vous venez d'écouter les récits extraordinaires de Pierre Bellemare. Un podcast issu des archives
18:49d'Europe 1 et produit par Europe 1 Studio. Réalisation et composition musicale Julien
18:55Tarot. Production Raphaël Mariat. Patrimoine sonore Sylvaine Denis, Laetitia Casanova,
19:02Antoine Horeclu. Remerciements à Roselyne Bellemare. Les récits extraordinaires sont
19:08disponibles sur le site et l'appli Europe 1. Écoutez aussi le prochain épisode en
19:14vous abonnant gratuitement sur votre plateforme d'écoute préférée.