Aujourd'hui à 6h20, Amélie Perrier reçoit Thomas Brail, le fondateur du Groupe national de surveillance des arbres. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-6h20/l-invite-de-6h20-du-vendredi-27-decembre-2024-1825800
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00:00Toute la semaine, à cette heure-ci, nous invitons dans notre studio des personnalités
00:04qui ont marqué l'année et ce matin, nous a rejoint un écureuil.
00:07Bonjour Thomas Braille.
00:08Bonjour.
00:09Les écureuils, c'est ainsi que l'on nomme les militants pour la protection des armes
00:12qui se perchent dans les cimes pour empêcher leur abattage.
00:15Et votre combat le plus médiatique cette année, c'était la lutte contre l'autoroute
00:19A69 entre Toulouse et Castres.
00:21On en est où aujourd'hui du chantier ?
00:24Le chantier continue à se poursuivre puisque les décisions de justice ne sont jamais
00:32favorables et ne sont jamais en notre faveur.
00:34C'est assez triste d'ailleurs.
00:36On voit bien que dans les tribunaux toulousains, on plane l'ombre des laboratoires Pierre
00:41Fabre et de l'Etat.
00:42Et ça, on le dénonce maintenant et c'est assez visible.
00:45On va en parler.
00:46Pierre Fabre qui est le premier employeur du département du Tarn et qui milite donc
00:48pour cette autoroute A69.
00:50Oui, tout à fait, puisqu'il a investi au capital de la Tosca.
00:53Le promoteur de l'autoroute, bien entendu.
00:57Je veux dire, la cellule d'investigation de France Inter a fait un super travail là-dessus.
01:02Tout a été révélé au grand jour et c'est complètement aberrant en 2024 de voir un
01:09petit peu qu'on a remis ce projet au goût du jour, un projet qui date d'il y a trente
01:12ans.
01:13L'A69, à Tosca dit, il y a 70% des ouvrages d'art qui ont été construits, 60% du budget
01:18dépensé.
01:19En d'autres termes, c'est déjà tellement avancé qu'on ne peut plus reculer.
01:23Oui, sauf qu'ils oublient de dire qu'ils ont un an de retard dans les travaux puisque
01:25le fait d'avoir bloqué les chantiers, c'est aussi le but d'être sur le terrain et de
01:30bloquer le chantier pour que la justice travaille.
01:32En fait, on a saisi la CADA et on s'est aperçu qu'ils avaient un an de retard dans le plan
01:36de mis des travaux.
01:37Donc après, vous savez, ce qu'ils disent et ce que nous, on vérifie, ce n'est pas
01:41les mêmes choses.
01:42Et les arbres ? Vous étiez là-bas pour protéger les arbres.
01:44Ils ont tous été coupés ?
01:45Oui, il n'y a plus d'arbres, c'est une saignée béante, c'est catastrophique.
01:51C'est des terres agricoles qui sont les plus fertiles de la vallée du Giroux qui ont été
01:54abîmées.
01:55Vous avez l'Anne-à-Phratie qui est à deux mètres sous terre, donc c'est pour ça que
01:59les céréales sont magnifiques là-bas, on n'a pas besoin d'arroser.
02:02En fait, on est en train de tout dégrader, de tout abîmer pour une autoroute qui n'a
02:06pas de sens puisqu'on l'a déjà dit, c'est pour gagner entre 15 et même pas 20 minutes.
02:11Entre Toulouse et Castres.
02:12Entre Toulouse et Castres pour 17 euros l'aller-retour.
02:15Voilà, donc qui va pouvoir se payer ça ? En fait, c'est une autoroute pour les riches
02:20et ce n'est pas du tout un projet social, comme nous le disent nos politiques de la
02:23région, comme Carole Delga le dit.
02:25Mais si tous les arbres ont été coupés, est-ce que le combat sert encore à quelque
02:28chose aujourd'hui ?
02:29Bah écoutez, moi je pars du principe que celui qui ne se bat pas risque de perdre,
02:35mais celui qui ne se bat pas a déjà perdu.
02:39Donc on fait quoi en fait ? On regarde les choses s'effondrer et on ne fait rien ? On
02:44a des enfants, moi j'ai un fils et je me bats pour lui.
02:47C'est notre rôle de parent de préserver nos enfants.
02:49Vous le dites, la justice pour l'instant ne vous donne pas raison.
02:52Il y a eu encore une décision en décembre du tribunal administratif de Toulouse qui
02:56a choisi de relancer l'instruction.
02:58Ça permet en fait au constructeur de la 69 de continuer les travaux.
03:02Vous vous demandez l'arrêt évidemment ?
03:03Alors si, la justice nous donne raison, puisqu'on a une magistrate, elle est rapporteure publique
03:07très courageuse d'ailleurs, c'est la plus courageuse de toutes j'ai envie de dire.
03:10Elle va dans votre sens.
03:11Elle va dans notre sens.
03:12Elle a clairement remis en cause l'autorisation environnementale parce qu'elle estime qu'il
03:17n'y a pas de raison impérative d'intérêt public majeur.
03:19Sauf que le tribunal a relancé, mais ils n'ont pas relancé sur les bonnes questions.
03:24Ils ont relancé avec une note qui a été envoyée par l'état en disant qu'ils allaient
03:29payer une partie du prix du péage.
03:31Ce qui est totalement dérisoire d'ailleurs puisque c'est juste sur 10 kilomètres et
03:35ça représente 90 centimes sur le prix du péage.
03:38Donc vous voyez, on est vraiment loin de ce qu'on a demandé.
03:41Et si la justice ne vous donne pas raison, ne va pas dans votre sens, est-ce que ça
03:45se passe toujours devant les tribunaux votre combat aujourd'hui ? Ou est-ce que vous
03:49envisagez le combat ailleurs ?
03:51Non, mais le combat il doit être partout, je veux dire, il doit être sur le terrain
03:55pour mettre en lumière les problématiques et puis ensuite il doit se faire dans les
03:58tribunaux.
03:59Enfin, on est toujours dans la légalité puisqu'on porte des recours, moi en tant
04:04que fondateur du groupe national de surveillance des arbres, on porte des recours avec notre
04:07association.
04:08Et on est énormément d'associations à porter des recours et heureusement que les
04:11associations existent parce que je ne sais même pas dans quel état serait cette pauvre
04:14planète.
04:15C'est ce qu'il faut se dire aujourd'hui quoi.
04:16Donc c'est du temps qu'on donne en fait, on n'est pas payé pour faire ça.
04:19Moi je ne suis pas payé, moi je travaille comme plein de personnes à côté et puis
04:23ensuite au lieu d'aller jouer au tennis ou au foot, nous on est obligé de se battre
04:27sur le terrain.
04:28On a besoin que tout le monde s'y mette aujourd'hui quoi.
04:29Et pour vous battre sur le terrain, donc vous montez en haut des arbres, vous avez
04:33entamé l'année dernière une grève de la faim, 38 jours de grève de la faim, vous
04:37êtes même allé jusqu'à la grève de la soif, vous mettez votre vie en jeu pour ces
04:41causes-là ?
04:42Bah écoutez la grève de la faim c'était pour rappeler que si on abîme les terres agricoles
04:46on ne pourra plus manger.
04:47Et la grève de la soif c'est pour dire qu'on touche aussi au système hydrique, on touche
04:51aux arbres.
04:52Les arbres c'est ce qui nous permet d'avoir de l'eau sur la planète, il ne faut pas
04:54l'oublier, car c'est eux qui créent les nuages et qui créent la pluie.
04:57Donc c'était vraiment symbolique le fait de faire ça, mais oui bien sûr.
05:00Mais vous savez, moi je ne sais plus comment alerter en fait.
05:03J'ai peur tous les matins quand je regarde mon fils au petit déjeuner, je le vois il
05:07est heureux et je me dis qu'est-ce que je vais faire pour lui quoi.
05:09Ça m'attriste en fait, ça me donne envie de pleurer quand j'en parle.
05:12Parce que je ne sais pas, j'ai l'impression qu'on n'a pas l'impression, je n'ai pas
05:17l'impression de vivre sur la même planète et je vois qu'il y a des dégradations permanentes
05:22et je me dis mais bon ça on est les seuls, les quelques personnes qui se battent sur
05:26le terrain, on est les seuls à s'en apercevoir.
05:28En fait c'est la question, ça m'empêche de dormir parfois.
05:31On a parlé de la 69, il y a d'autres combats que vous menez en ce moment pour protéger
05:38les arbres ?
05:39Il y en a partout, je suis même parti jusqu'en Guyane pour dénoncer les problématiques,
05:43on rase les forêts pour mettre des panneaux photovoltaïques et partout en France aussi
05:47d'ailleurs, il y a 150 000 hectares de forêts françaises qui vont être rasées, je répète
05:52150 000 hectares pour mettre des panneaux photovoltaïques.
05:55Alors le photovoltaïque c'est bien mais ne le mettons pas dans les forêts, mettons-le
06:00sur des lieux déjà anthropisés, des lieux déjà abîmés par l'homme et on les a ces
06:04espaces-là.
06:05Donc il ne faut pas abîmer nos forêts, c'est la seule source qui va pouvoir nous faire
06:09sortir de ce marasme.
06:11Thomas Braille, merci d'avoir été notre invité ce matin à la table de France Inter.
06:15Je rappelle que vous êtes à la tête du GNSA, le groupe national de surveillance des arbres.
06:20Oui tout à fait, et puis on a lancé une campagne d'appel à dons, donc on vous invite
06:25bien entendu, le nerf de la guerre c'est toujours l'argent, mais nous on s'en sert
06:27intelligemment, donc faites des bons placements.
06:30Pour le GNSA, merci Thomas Braille, bonne journée.