L'ancien Garde des sceaux, sera à partir du 1er février sur les planches du théâtre Marigny pour la pièce "J'ai dit oui !", mise en scène par Philippe Lellouche.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 14 janvier 2025.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 14 janvier 2025.
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00:00RTL Matin, avec Amandine Bégaud et Thomas Otto.
00:05Il est 8h15, l'interview d'Amandine Bégaud, on l'a découvert en robe, on l'a vu en costume cravate de ministre,
00:11ce matin il est en jean et en pull bien chaud, désormais on va le voir sur les planches et sur scène.
00:15Amandine, vous recevez ce matin l'ancien garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, bonjour et bienvenue à vous.
00:19Bonjour Eric Dupond-Moretti.
00:21Bonjour.
00:21Et merci d'être en studio ce matin avec nous, vous serez donc sur la scène du Théâtre Marigny à Paris
00:27à partir du 1er février prochain pour un spectacle intitulé « J'ai dit oui ».
00:32Pourquoi ce spectacle ? Vous aviez besoin de dire des choses que vous ne pouviez pas dire en tant que garde des Sceaux ?
00:39J'avais expliqué au théâtre dans un seul en scène ce qu'est le métier d'avocat et ses coulisses.
00:47J'ai été ministre pendant plus de 4 ans et je souhaite expliquer maintenant ce qu'est le métier de ministre
00:55et ce que sont les coulisses de ce métier parce que je pense que nos compatriotes ne savent pas trop ce que c'est que d'être ministre.
01:04Mais les coulisses, ça veut dire que vous allez nous révéler des choses, régler des comptes ?
01:08Un peu.
01:09Oui ? Avec qui ?
01:10Un peu. Vous le verrez, venez.
01:14Avec dérision évidemment. Autodérision et humour, mais je veux aborder des sujets qui ne sont pas traités,
01:23dont on n'a pas conscience. Comment ça travaille un ministre ? Quels sont les rapports d'un ministre avec la presse ?
01:31Voilà des choses qui peuvent intéresser nos compatriotes.
01:36« J'ai dit oui », c'est une allusion au « oui » que vous avez dit à Emmanuel Macron.
01:40C'est d'ailleurs ce que vous lui avez répondu quand le Président vous a appelé pour vous proposer d'être garde des Sceaux.
01:45Vous lui avez dit oui tout de suite ?
01:47D'abord on a un peu discuté quand même. On s'est vu à plusieurs reprises, des rencontres informelles,
01:53on a évoqué bien sûr l'institution judiciaire, ses qualités, ses défauts, ses besoins.
02:00Et puis le Président de la République m'a demandé si j'accepterais d'être garde des Sceaux. Et j'ai dit oui.
02:07Et vous n'avez jamais regretté de lui avoir dit oui ?
02:10Non, jamais. Même dans les moments difficiles, il y en a, parce que vous avez quand même des moments de désespoir.
02:20Quand par exemple vous entendez un commentateur blablateur professionnel qui vous explique comment on pourrait améliorer la justice,
02:27alors que d'une part il n'y connaît strictement rien, vous avez envie dans ces moments-là de lui dire « mais prends les clés mon gars,
02:35quitte le blabla pour l'action, viens à ma place ».
02:39Ça ce sont des moments qui ne sont pas des moments formidablement agréables, et puis il y a des moments d'enthousiasme aussi.
02:45Quand on est Place Vendôme et qu'on modifie la Constitution et qu'on permet aux femmes d'accéder enfin à une liberté qui sera consacrée,
02:54qui est celle de disposer de son corps et d'avorter, on n'est pas peu fier.
02:58Ça c'est le plus beau souvenir que vous gardez ces un peu plus de 4 ans passés Place Vendôme ?
03:03C'est un des grands souvenirs, oui bien sûr.
03:05Et le pire souvenir ?
03:08Oh le pire souvenir, il y en a quelques-uns, je les évoque d'ailleurs dans le spectacle à venir.
03:14On choisira, c'est difficile.
03:16Le pire souvenir c'est peut-être de faire des choses et d'avoir une très grande difficulté pour expliquer ce que l'on a fait.
03:23Parce que l'époque préfère la polémique au consensus.
03:27Il n'y a plus de nuance, on est dans le manichéisme absolu, tout est blanc ou tout est noir, entre les deux il n'y a rien.
03:34Et parfois vous travaillez beaucoup, vous préparez des textes qui sont importants.
03:38Je pense en particulier au code de justice pénal des mineurs, c'est la plus grande réforme depuis 60 ans.
03:44C'est passé sous les radars.
03:46Et ça parfois c'est un peu désespérant.
03:48Et vous avez le sentiment que votre travail n'a pas été reconnu à sa juste valeur, c'est ce que vous diriez ?
03:51Je pense que tout le travail des politiques n'est pas reconnu à sa juste valeur.
03:54On est trop dur avec nos politiques, injustes.
03:56Vous savez je m'y arrête un petit moment avec, je dis encore beaucoup d'autodérision,
04:02mais par exemple, le temps politique n'est pas le temps médiatique.
04:06C'est-à-dire qu'un ministre vient chez vous, il dit voilà, je voudrais faire ça.
04:10L'auditeur il se dit c'est une bonne idée, ça c'est bien, ça va dans le bon sens.
04:14Seulement entre le moment où le politique en parle et le moment où ça deviendra une réalité, il va s'écouler beaucoup de temps.
04:20C'est le temps qu'il faut dans une démocratie pour élaborer la loi.
04:24Et alors les gens ils disent mais il nous avait parlé de ça, il ne l'a jamais mis en place, quand est-ce que ça vient, etc.
04:30Ça, ça fait partie des frustrations que ressentent effectivement nos compatriotes et qui pèsent ensuite sur le travail ministériel.
04:38C'est Gérald Darmanin qui est aujourd'hui ministre de la Justice.
04:41Vous vous connaissez bien, vous vous appréciez je crois.
04:44Il était ici même sur RTL la semaine dernière et écoutez ce qu'il disait de son nouveau ministère.
04:50Rien ne va dans le ministère qui m'appartient sur cette question de la drogue.
04:54Quand vous mettez quasiment plus d'une dizaine d'années pour juger quelques affaires.
04:58Quand vous avez dans les bouges du Rhône plus de 200 procès d'assises en attente.
05:01Quand vous avez des milliers de personnes qui attendent leur bracelet électronique.
05:05Et quand le travail de certains avocats, pas tous évidemment, au lieu d'une minorité, c'est de travailler non pas à l'innocence de leurs clients,
05:11mais d'emboliser la chambre de l'instruction, d'emboliser le processus judiciaire pour libérer des tensions provisoires des personnes
05:17parce qu'on sait qu'elles ne seront plus ou pas jugées.
05:19Rien ne fonctionne correctement.
05:21Rien ne fonctionne correctement, il a raison.
05:24Un peu excessif peut-être.
05:27Vous l'avez pris un peu comme une attaque personnelle ou pas ?
05:29Non, pas du tout. On s'entend bien, on a beaucoup discuté.
05:32Nous avons tenté de nous équilibrer l'un l'autre.
05:36C'est quand même votre bilan qui pointe non ?
05:40Laissez-moi répondre.
05:42La lenteur de la justice, il a raison Gérald Darmanin, la justice est trop lente.
05:47Je l'ai dit le premier jour de mon arrivée.
05:50En matière civile, j'ai mis en place l'amiable.
05:53Un procès jugé grâce à l'amiable, c'est 4 mois au lieu de 4 ans.
05:58C'est un vrai progrès.
06:00On a embauché comme jamais quand j'étais garde des Sceaux.
06:04On a envoyé des personnels partout dans toutes les juridictions du pays.
06:09Et les stocks, les dossiers en attente ont diminué.
06:14C'est d'abord une question de moyens.
06:16Ça c'est une réalité et le budget il a augmenté pendant que j'étais là de 40%.
06:21Et depuis qu'Emmanuel Macron a été élu Président de la République, de près de 60%.
06:27Donc il est un peu dur quand même dans son analyse.
06:30Il voit vers à moitié vide en tout cas.
06:32Si le garde des Sceaux arrivait et disait tout va bien, on n'aurait pas besoin d'un garde des Sceaux.
06:38Sur l'embolisation par les avocats, je vais vous dire.
06:42Les avocats, ils se servent de la loi.
06:44C'est la loi qui doit être leur guide.
06:46Et quand certains détournent la loi pour emboliser par exemple,
06:51eh bien ils doivent être poursuivis et sanctionnés.
06:54Voilà ce que je peux dire à la suite des propos que vous me rappelez,
07:00que j'ai évidemment entendu et j'ai eu une petite conversation avec Gérald Darmanin.
07:05Ah vous avez une petite explication quand même ?
07:07Petite conversation amicale.
07:09Mais ça reste votre ami vous diriez ? On peut avoir des amis en politique ?
07:12Oui on peut en avoir bien sûr.
07:14Bien sûr, le tout c'est de se dire les choses.
07:16Vous savez, quand vous faites...
07:18Et vous lui avez dit quoi ? T'es un peu gonflé ?
07:20Vous croyez que je vais vous raconter ça ?
07:23Écoutez-moi, quand vous êtes en conférence de rédaction,
07:25je pense que vous discutez sur les sujets, sur la façon de les traiter,
07:28la hiérarchie, on va parler de ça, pas de ça, etc.
07:31Vous n'êtes pas toujours d'accord.
07:33Dans un conseil des ministres, c'est la même chose.
07:36Mais il faut qu'il y ait une seule voix.
07:38Gérald Darmanin et moi, on a eu des désaccords,
07:41mais nous avons toujours fait en sorte de ne pas les rendre publics.
07:44Voyez-vous ? Au nom de la solidarité gouvernementale,
07:47et puis parce qu'on s'apprécie et qu'on se respecte.
07:49Je sais qu'il sera un bon garde des Sceaux.
07:52Éric Dupond-Moretti, général de Darmanin,
07:55dit vouloir regrouper les 100 plus gros narcotrafiquants
07:57dans une seule et même prison.
07:59Ça fait partie des sujets sur lesquels vous avez travaillé.
08:02Une seule prison existante qu'il dit vouloir vider d'ici l'été.
08:05C'est une bonne idée d'après vous ?
08:07Et surtout, est-ce que c'est réalisable ?
08:09C'est une très bonne idée.
08:11Parce qu'après l'affaire AMRA,
08:15qui est une affaire dramatique,
08:17où les personnels pénitentiaires ont trouvé la mort,
08:20d'autres ont été gravement blessés.
08:22Lors de cette tentative d'évasion ?
08:23Oui, bien sûr. On a découvert un certain nombre de choses.
08:25Notamment les téléphones portables dans les maisons d'arrêt,
08:28avec des difficultés, notamment techniques, je le rappelle.
08:31Il y a aujourd'hui des téléphones qu'on ne peut pas trouver.
08:34Les assaillants, pardon, je ne sais pas comment on peut les appeler,
08:36courent toujours. Il faut juste le rappeler.
08:38Madame, laissez-moi développer un peu mon idée,
08:41parce que sinon vous allez me perdre, vous savez.
08:43Moi, je suis un besogneux.
08:45Il y a des téléphones portables, on ne peut pas les trouver,
08:47parce qu'ils sont en matière plastique, par exemple.
08:49Les difficultés techniques.
08:51Il est impérieux que les détenus,
08:55en particulier les gros trafiquants de stups,
08:57ne puissent plus disposer de téléphone.
09:00L'idée de Gérald Darmanin est excellente.
09:03Ensuite, il faut réaliser ça.
09:05Ça implique par exemple, à mon sens,
09:07que des juges d'instruction acceptent de se déplacer
09:10dans l'établissement pénitentiaire en question
09:12pour procéder aux interrogatoires.
09:14Donc, il y a des choses à mettre en place,
09:17et moi je suis absolument convaincu que Gérald Darmanin
09:20veut avancer sur cette question.
09:22Le narcotrafic, d'ailleurs, on avait commencé à y travailler.
09:26Moi, j'avais un texte qui était prêt.
09:28Je l'ai dit à Didier Migaud au moment de la passation de pouvoir.
09:31Ce texte, il est toujours sur la table,
09:33et moi je suis absolument convaincu que Gérald Darmanin
09:37mettra en oeuvre ce texte.
09:39Vous savez, je tricote ma posture de ministre
09:44en détricotant ce que l'autre a fait.
09:46Je pense que c'est une continuité.
09:48Et nous avons été, et lui il est toujours,
09:50au service du même président de la République,
09:53et de la même politique en la matière.
09:55Que dites-vous aujourd'hui, Eric Dupond-Moiretti ?
09:57La politique, plus jamais ?
09:59Ah non, non, non, je ne dis pas ça.
10:01Ministre, moi, jamais, vous m'entendez, etc.
10:04À une époque où je n'imaginais pas une seule seconde
10:07qu'on me ferait cette proposition.
10:08Alors aujourd'hui, même si vous me dites
10:10« Funambule au Cirque Brundère »,
10:12je dis, écoutez, pourquoi pas, je ne m'interdis rien.
10:16Je vais évidemment d'abord travailler encore ce spectacle,
10:21parce que ça demande beaucoup de boulot.
10:23Un livre aussi ?
10:24Alors, un livre, oui.
10:27Et puis, ensuite, le métier d'avocat, pas le métier d'avocat,
10:30tout ça, rien, je ne m'interdis rien dans cette vie nouvelle.
10:35Et pourquoi pas, un jour, un retour en politique.
10:38Comme ça, vous voyez, j'ai tout envisagé,
10:41et plus personne ne me fera de reproches,
10:43quel que soit mon choix à venir.
10:45Bon, en attendant, c'est sur la scène du théâtre Marigny à Paris
10:47qu'on va venir vous voir.
10:48J'ai dit oui, à partir du 1er février,
10:50mise en scène signée Philippe Lelouch,
10:52et puis ensuite, vous partirez en tournée.
10:54Lausanne, Angers, Biarritz, Metz, Strasbourg,
10:56enfin, un peu partout, à partir du 22 mars.
10:5922 mars, New York !