• avant-hier
Retrouvez les émissions en intégralité sur https://www.france.tv/france-2/telematin/toutes-les-videos/
Aujourd'hui, dans « Les 4 V », Julien Arnaud revient sur les questions qui font l’actualité avec Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur.

Catégorie

📺
TV
Transcription
00:00Bonjour Monsieur le Ministre, bonjour Julien, merci d'être avec nous ce matin, c'est une journée importante puisque le Sénat examine donc une proposition de loi
00:11destinée à lutter contre le narcotrafic. D'abord sur le constat, parce qu'on a l'impression que depuis deux ans, il s'est passé quelque chose et le narcotrafic a pris une ampleur colossale.
00:19Pourquoi cette explosion récente ?
00:21Tout simplement parce qu'il y a un phénomène planétaire et que la France en est aussi victime, même si on a des résultats.
00:27Juste deux chiffres, vous voyez, les policiers, les gendarmes, les douaniers ont saisi en 2023 23 tonnes de cocaïne et l'an dernier 47 tonnes, mais le prix n'a pas bougé.
00:37Ça veut dire qu'il y a une submersion, les drogues les plus dures sont désormais disponibles partout, y compris dans nos villages et tout le temps, y compris avec Libership,
00:45c'est-à-dire cette espèce de numérisation et ça n'est pas le consommateur qui va au produit, c'est le produit qui vient au consommateur.
00:53Donc il faut se réarmer parce que c'est une menace désormais avec la corruption, notamment existentielle pour notre pays.
00:59Et l'une des armes que vous mettez en avance, c'est la création d'un parquet national contre la criminalité organisée.
01:04Ça va changer quoi exactement ?
01:06Ce que ça a changé pour le terrorisme.
01:08Lorsqu'il y a 15 ans, on a commémoré la dixième année des attentats terroristes de l'année 2015, on s'est trouvé finalement désarmé.
01:16On a créé un parquet national antiterroriste et on a créé aussi un état-major.
01:21On ne va pas seulement judiciariser, c'est-à-dire créer une spécialisation de la chaîne judiciaire,
01:27on va aussi créer, et ça me concerne directement, un état-major.
01:30Un état-major contre la criminalité organisée qui va comprendre tous nos services de renseignement,
01:36tous nos services d'enquête comme on l'a fait pour le terrorisme.
01:39C'est une cause pour moi qui a la même valeur symbolique et la même valeur en termes de conséquences sur la nation.
01:45Alors hier à votre place, il y avait François Mollins et sur cette question, il disait ça existe déjà.
01:49C'est le parquet de Paris qui s'en occupe, donc on n'a pas besoin de cette nouvelle structure.
01:53Ça fonctionne mal, je vais vous donner un seul exemple.
01:55Vous savez, le dénommé Mohamed Hamra qui s'est évadé, il y a eu deux personnels de la pénitentiaire.
02:02Eh bien, il avait des dossiers dans quatre ou cinq juridictions et donc il n'y avait pas de coordinateur.
02:08Il n'y avait pas quelqu'un qui pilotait, vous voyez.
02:10Donc il faut passer au stade supérieur.
02:12Il faut se donner les armes qui ont fonctionné contre le terrorisme.
02:16Eh bien, il faut qu'on ait les mêmes armes contre la criminalité organisée.
02:19Pourquoi en 2026, puisque c'est cette échéance qu'a donnée Gérald Darmanin, 1er janvier 2026, on ne peut pas aller plus vite ?
02:24J'en ai parlé avec lui puisque ce texte, je le connais bien.
02:27Je veux simplement vous rappeler que j'avais moi, quand j'étais au Sénat, initié la commission d'enquête qui a donné lieu aux conclusions,
02:34qui ont donné lieu ensuite aux textes législatifs qu'on étudie à partir de cet après-midi.
02:40Il faut le faire le plus vite possible.
02:41C'est trop lent, 1er janvier 2026, c'est trop lent ?
02:43Non, il m'a expliqué qu'il avait besoin d'un peu de temps pour mettre en route ses propres services.
02:48L'important, c'est que ça se fasse.
02:50Nous allons nous créer cet état-major de lutte dans les prochaines semaines.
02:55Et ce sera la direction nationale de la police judiciaire qui en sera la tête de réseau, qui en sera le pilote.
03:01Alors, il y a un relatif, il y a un consensus politique.
03:03C'est une proposition transpartisane, comme on dit.
03:05En revanche, le monde judiciaire est très divisé.
03:07On le voit largement ces derniers jours dans la presse, notamment les avocats qui sont vent debout,
03:10notamment parce que le texte prévoit que certains moyens utilisés pendant l'enquête ne seront pas communiqués à la défense.
03:16Pourquoi faire ça ?
03:17Mais ça me paraît très simple.
03:20Je vais vous donner un exemple.
03:21Quand vous avez des techniques d'enquête, si vous mettez, si vous versez ces techniques d'enquête au dossier,
03:27des avocats, tous ne sont pas bien intentionnés, notamment ceux qui défendent les mafieux,
03:33verront les techniques d'enquête.
03:34Ils auront aussi recours à des noms et qui pourront être menacés.
03:39Ils se sentent un peu stigmatisés, les avocats, quand vous dites ça.
03:42Il y a une mauvaise foi des avocats, ils manœuvrent, ils instrumentalisent la justice pour la contourner.
03:47Les avocats sont toujours du côté des droits de la défense.
03:49Simplement, moi, ce que je veux, c'est que nos enquêteurs soient protégés.
03:53Les enquêteurs qui dépendent notamment de mes services, qu'ils soient gendarmes, qu'ils soient aussi policiers, doivent être protégés.
04:00Et les techniques spéciales, notamment les techniques les plus pointues, doivent être cachées.
04:05Parce que sinon, si on les dévoile, on n'arrivera pas la fois suivante à confondre ces narco-racailles.
04:11C'est ça qui est important.
04:12De même que je veux donner au préfet beaucoup plus de pouvoir pour expulser de son logement social un trafiquant,
04:17pour faire en sorte qu'il ne reparaisse plus sur le lieu de son point de deal.
04:22Je veux aussi saisir les biens qui ont été acquis grâce à l'argent de la drogue.
04:26C'est fondamental.
04:28Il y a un autre sujet aussi fondamental, c'est le sujet de la justice des mineurs.
04:31Évidemment, tout le monde a été choqué par ce qui s'est passé en fin de semaine dernière.
04:34Et puis ce week-end, la mort d'Elias, cette adolescente de 14 ans qui a été tuée pour un simple vol de portable.
04:39Deux mineurs ont été arrêtés.
04:41Ils étaient déjà bien connus de la police et de la justice.
04:44Ils attendaient leur jugement dans une autre affaire.
04:45Ils n'étaient pas censés être ensemble et pourtant, ils l'étaient.
04:48Est-ce que vous dites ce matin, ce drame aurait pu être évité et il y a eu des défaillances,
04:53comme l'écrit le Figaro dans la justice des mineurs ?
04:55Et bien sûr, la justice des mineurs, je pèse mes mots.
04:58En France, c'est un fiasco.
05:00Celui présumé coupable, il a fait des aveux.
05:04Vol à réunion, vol avec violence, extorsion par violence, vol aggravé, escroquerie.
05:10Pensez-vous qu'il ait fait un seul jour de prison ?
05:12Aujourd'hui, c'est terrible.
05:14La violence des mineurs, c'est un échec en France et il faut absolument y remédier.
05:18Il faut, par exemple, des comparutions immédiates, mais pas seulement.
05:21Il ne peut pas y avoir d'excuses de minorité qui soient la règle.
05:24Il n'y a pas d'excuses, même de minorité, pour celui qui tue un enfant de 14 ans.
05:29Pareil, on repousse toujours plus loin les peines de prison.
05:33On veut leur éviter la sanction, mais je pense qu'il faut faire l'inverse.
05:36On est naïf ?
05:37Mais on est beaucoup trop naïf.
05:38Pour moi, ces jeunes ne sont pas des victimes de la société, ils sont des voyous.
05:43Et il faut donc faire en sorte qu'on ait des courtes peines.
05:46Ils ont besoin, ils n'ont plus d'empathie.
05:48Ils peuvent tuer sans que ça les gêne.
05:50Donc, il faut une butée.
05:52Une butée, c'est la prison.
05:54Quelques semaines, une semaine, des courtes peines.
05:56Vous êtes favorable à cette formule-là, des peines très courtes, une semaine, 15 jours, mais appliquées tout de suite ?
06:01Ça fait des années, je le pense.
06:03Alors pourquoi ça ne rentre pas en vigueur ?
06:04C'est difficile à mettre en place ?
06:06Mais non, mais pas du tout.
06:07Il y a une idéologie.
06:09Il y a une idéologie qui consiste à dire que la prison, c'est horrible.
06:13Non, la prison peut être rédemptrice, notamment lorsque, dès les premiers faits graves, la sanction tombe immédiatement.
06:20Là, on fait l'inverse.
06:21Qu'est-ce qu'on fait ?
06:22On installe ces jeunes, ces mineurs, dans des parcours de délinquance.
06:25Et il faut arriver au 30e antécédent parfois, avec des choses très graves,
06:30pour que la sanction qui va alors être beaucoup plus lourde tombe.
06:33Mais ils ont vécu, d'ici là, une sorte d'impunité qui les a poussés finalement au crime.
06:39C'est ça qu'il faut dénoncer.
06:40Ces mesures qui sont notamment prévues dans une proposition de loi qui est présentée par Gabriel Attal sont très, très contestées par le monde judiciaire.
06:48Vous le savez bien.
06:49À partir de quand vous pourrez mettre tout ça en place, d'après vous ?
06:51Est-ce que ça pourrait être fait rapidement ?
06:53Écoutez, la proposition de loi de Gabriel Attal, je la soutiens.
06:57Je voudrais même qu'on aille un peu plus loin, puisqu'aujourd'hui, il y a ce qu'on appelle une césure.
07:01C'est-à-dire que dans notre droit, pour la justice des mineurs, quand vous reconnaissez d'abord la culpabilité, et plusieurs mois après, la sanction doit tomber.
07:09Le temps peut-être de laisser une chance, effectivement, aux mineurs de passer à autre chose.
07:14Mais si on veut redonner du sens à la sanction, il faut que quand la culpabilité tombe, la sanction tombe avec.
07:20Donc il faut en finir avec la césure.
07:22Écoutez, si vous avez des enfants, est-ce qu'il vous viendrait à l'esprit, pour le bon sens, quand vous avez un gamin, il fait une bêtise, et vous lui dites
07:31« Je reconnais ta bêtise, mais la sanction, on verra des semaines plus tard, des mois plus tard. »
07:35Ça ne tient pas debout.
07:37Ça n'est pas éducatif.
07:38Il faut en revenir à une sanction qui ait du sens, c'est-à-dire une sanction qui soit aussi pédagogique.
07:43Ce sera mis en place quand ?
07:44La proposition de loi Attal, par exemple, elle sera examinée quand ?
07:47Elle sera examinée dans quelques jours, au mois de février, et j'espère qu'elle sera votée parce que c'est absolument nécessaire, y compris nécessaire
07:55pour ces jeunes délinquants.
07:56On les laisse dans leur délinquance et on les pousse à aggraver, justement, ces parcours de délinquance.
08:01Et ces peines courtes, d'après vous, on les verra arriver à partir de quand ?
08:05Le plus vite possible, parce qu'il ne faut pas des prisons qui coûtent très cher.
08:08Il faut des prisons beaucoup plus légères.
08:10C'est des peines ultra courtes.
08:12Parfois, ça peut être une semaine, 15 jours.
08:14On ne parle pas, à ce moment-là, de crime, mais on parle, par exemple, de jeunes qui ont été tabassés dans des établissements particuliers.
08:21Mais aujourd'hui, ce qui est incroyable, c'est qu'il existe en France un droit au premier tabassage sans que celui-là soit vraiment puni.
08:29Alors cette semaine, c'est aussi l'entrée en vigueur de la nouvelle circulaire qui règle les questions d'immigration.
08:34Vous dites que jusqu'à présent, il y avait une forme de prime à l'irrégularité en France, c'est-à-dire ?
08:39Moi, je veux réduire, j'assume de vouloir réduire l'immigration et de lutter contre l'immigration irrégulière.
08:45Mais si on régularise des gens qui ont fraudé, des clandestins, c'est-à-dire qu'ils ont violé nos frontières à tour de bras,
08:52si on les régularise à tour de bras, à ce moment-là, on envoie un mauvais signal et on ne peut pas maîtriser, du coup, l'immigration.
08:58Donc, il faut être exigeant parce qu'il y a des frontières, il y a la loi.
09:02Et ceux qui violent la loi, eh bien, ils doivent se dire non, non, la régularisation, c'est au compte goutte uniquement.
09:07Donc, à partir de maintenant, en cas d'OQTF, vous ne serez pas régularisé, c'est ça le message que vous dites ce matin ou pas ?
09:12Il y a aussi ce message, ça, c'est important.
09:15Et quand on a une mesure d'éloignement, par exemple une OQTF, là encore, ça doit être révisitoire.
09:21Mais il y en a certains, notamment au Rassemblement national, Jordan Bardella, pour ne pas le nommer, hier, qui dit Bruno Retailleau, moi, je l'aime bien.
09:27Il est sincère, mais c'est le ministre de la Parole.
09:29En réalité, tout ce qu'il dit, moi, je suis sûr que ça ne verra jamais le jour.
09:32Que lui répondez-vous ?
09:32C'est faux.
09:33J'ai déjà des résultats.
09:35Entre novembre 2023 et novembre 2024, par exemple, on a fait baisser les visas de long séjour de 20 %, fait baisser les demandes d'asile de 8,5 %.
09:47Les mesures d'expulsion qui dépendent du ministre ou des préfets ont augmenté de 182 %.
09:55Il y a des résultats.
09:57Je sais que la situation est compliquée puisqu'il n'y a pas de majorité au Parlement, mais j'agis.
10:02Chaque jour, j'agis et je ne laisse rien passer.
10:04Regardez les influenceurs algériens.
10:06Est-ce qu'avant moi, on avait tapé ces influenceurs à chaque fois qu'ils franchissaient la ligne jaune ?
10:12C'est-à-dire qu'ils appelaient au crime, au viol, avec des propos parfois antisémites.
10:18Je ne laisse rien passer.
10:19Vous n'avez pas peur d'être victime des négociations en cours avec le Parti socialiste ?
10:22Parce qu'on voit bien que le PS va dire peut-être d'accord, on vote pour le budget, mais en échange, il faut museler Retailleau pour dire les choses un peu crûment.
10:28Si c'était ainsi, je partirais.
10:31Mais ce n'est pas votre propre esprit ?
10:33Non, j'ai écouté le Premier ministre hier.
10:37Il a justifié la politique que je souhaite mener, bien entendu sous sa direction.
10:42Il est Premier ministre en disant que tout est une affaire de proportion, de nombre et qu'on atteint, je reprends son expression, la zone grise.
10:50Cette zone où une société est déstabilisée parce que trop, c'est trop.
10:54La loi du nombre, c'est la loi qu'il faut maîtriser en matière d'immigration.
10:58On a entendu le coup de pression de Bruno Retailleau ce matin dans les 4V.
11:01Si vous n'êtes pas entendu, vous partirez.
11:03Merci beaucoup.
11:05Merci à tous les deux.