En avril dernier, Shemseddine était lynché à la sortie des cours. Il y a dix jours Elias était tuait pour son portable, un élève poignardé dans son lycée à Bagneux mardi, un autre tabassé ce mercredi près de son collège : comment enrayer cette montée en puissance de la violence des mineurs ? Jean-Marie Vilain, maire de Viry-Châtillon, est l'invité de Amandine Bégot.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 06 février 2025.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 06 février 2025.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00RTL Matin
00:02Avec Amandine Bégaud et Thomas Soto
00:05Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud. Il y a 10 jours, Elias, 14 ans, était tué pour son portable.
00:10Avant-hier à Bagneux, un autre élève a été poignardé dans son lycée.
00:14A Bobigny, un gamin a été tabassé à la sortie de son collège. Mais où tout cela va-t-il s'arrêter ?
00:18Pour en parler, vous avez choisi d'inviter le maire de Viry-Châtillon, Jean-Marie Villain.
00:22C'est dans sa ville qu'en avril dernier, le jeune chème Céline, 15 ans, avait été lynché à mort près de son collège.
00:27Bonjour et bienvenue à vous Jean-Marie Villain.
00:29Bonjour.
00:30Bonjour et merci d'être là. La mort de chème Céline, battue à mort à quelques mètres de son collège, avait, et on s'en souvient, les auditeurs s'en souviennent aussi sans doute,
00:38suscité beaucoup d'émotions dans tout le pays. Je me souviens, monsieur le maire, de vos larmes à l'époque.
00:43Depuis, Thomas le rappelait à l'instant, il y a eu Elias, 14 ans, ce lycéen de 15 ans aussi à Bagneux, Bobigny, et je pourrais en citer plein d'autres.
00:51Dans quel état d'esprit êtes-vous ce matin, quand vous entendez tous ces prénoms, cette liste ?
00:56À chaque fois qu'il y a un prénom supplémentaire, on s'interroge sur à quel moment ça va s'arrêter.
01:02Alors bon, il n'y a pas de solution miracle. On a à chaque fois des prises de conscience.
01:09Moi, je me souviens de la visite du Premier ministre à l'époque à Vérichâtillon pour évoquer le sujet, et c'est vrai que les mots avaient été forts.
01:17Mais on parle toujours de prise de conscience des parents, de prise de conscience des politiques, de ce que nous, on devrait faire.
01:24On essaye en permanence de renforcer, par exemple, la prévention.
01:28Mais quand vous entendez, et on va revenir sur les solutions, mais quand vous entendez cette liste, quand vous voyez Elias, 14 ans, tué pour un portable, en plein Paris,
01:38c'est quoi ? C'est de la colère ? De la tristesse ? Je ne sais pas.
01:43Alors, c'est toujours de la tristesse. D'abord parce que ça remue. Forcément, ça remue le passé à chaque fois.
01:48Bon, à partir du moment où on a un peu d'émotion, c'est quelque chose de compliqué, parce que ça revient, forcément, à chaque fois.
01:54Et ça doit revenir aussi dans les familles. Toutes ces familles qui sont touchées, à chaque fois qu'il y a ce genre d'événement qui se déroule,
02:01ça doit remuer, j'allais dire, le couteau dans la plaie. C'est vraiment ça, de se dire, pourquoi on ne bouge pas ?
02:09Alors, c'est vrai qu'il y a des solutions, il y en a certainement, mais à chaque fois, il y a quand même un sentiment d'impuissance sur cette ultra-violence.
02:16Vous vous sentez impuissant, vous, aujourd'hui, en tant que maire ?
02:19En entendant, à chaque fois, on se dit, mais pourquoi on n'a pas encore fait encore plus que ce qu'on essaye de faire ?
02:25Si on était impuissant, on baisserait les bras, et je crois que ce serait la pire des choses, de se dire, il n'y a pas de solution,
02:31donc finalement, je vais arrêter, je vais faire autre chose, parce que, comme je ne suis pas capable de trouver la solution moi-même,
02:37il va falloir que d'autres la trouvent. Et puis finalement, on repart, parce qu'il y a quand même des choses qui sont faites.
02:43On a senti, Avéry, qu'il y avait quelque chose qui avait bougé, il y a eu une vraie prise de conscience.
02:48Qu'est-ce qui a changé ?
02:49En particulier, on voit que les jeunes sont plus sensibles à toutes les actions qui sont faites.
02:53En tout cas, on a cette impression-là.
02:55Parce que l'un d'eux, un de ceux qu'il connaissait, a été touché et a été tué.
02:59Oui, on a senti, le jour où cette marche blanche a eu lieu, Avéry Châtillon, c'est beaucoup de monde,
03:042000 personnes dans la rue, sur un espace de 200, 300, 400 mètres, c'est énormément de monde,
03:10de tous âges, des gens de toutes conditions, de tous les quartiers de Viry, d'ailleurs, qui étaient venus.
03:16Et donc, ça marque profondément les esprits de se dire, on ne veut pas de ça.
03:21On ne veut pas de ça, on ne vit pas pour ça.
03:23Puis la famille avait besoin de ce soutien, de toute façon.
03:26Jean-Marie Villain, vous évoquiez à l'instant le déplacement de Gabriel Attal, qui était alors Premier ministre.
03:32C'était une dizaine de jours après la mort de Chemseydine.
03:34Il était venu faire ce grand discours, appelant à un sursaut d'autorité.
03:37Je veux que ces drames cessent, avait-il dit.
03:42Neuf mois plus tard, les drames, ça continue.
03:45Je pense qu'il y a, vous savez, on est dans une situation politique, vous l'avez évoqué toute la matinée,
03:50sur les votes du budget, les censures, etc., qui ont ralenti considérablement.
03:54La dissolution, la censure, y contribuent aussi.
03:57Alors, ce n'est pas de la responsabilité de la censure, mais forcément, mathématiquement,
04:02ça repousse des décisions qui sont importantes aussi pour la France.
04:05Et il est temps de mettre ça sur la table et de se décider à ce que, au niveau législatif, on prenne des décisions fortes.
04:12Il y a cette proposition de loi de Gabriel Attal qui va être débattue la semaine prochaine à l'Assemblée.
04:17Des sanctions notamment pour les parents, des amendes pour les parents absents aux convocations des juges des enfants.
04:24Vous y êtes favorable ? Il faut en arriver là ?
04:26Alors, oui, j'y suis favorable, à condition qu'on insiste aussi pour que, lorsqu'il y a des familles monoparentales,
04:31le conjoint, quel qu'il soit, mari, femme, ex-mari, ex-femme, soit présent aussi.
04:36Parce que c'est trop facile de mettre, par exemple, on a très souvent des femmes isolées qui se retrouvent avec leurs enfants
04:41et qui travaillent et donc n'ont pas le temps de s'occuper et de gérer cette éducation.
04:45Les papas sont bien tranquillement à 500 km et puis finalement se délaissent complètement de cette responsabilité.
04:54Donc il faut rappeler les pères alors ?
04:55C'est important que tout le monde soit présent, parce que ça serait trop facile que la pauvre maman qui travaille en permanence
05:00pour justement s'occuper de ses enfants, finalement, ça soit elle qui prenne toute la responsabilité.
05:04Il y a aussi la question, bien sûr, de la justice des mineurs, des peines plus lourdes, revoir l'excuse de minorité.
05:10Tout ça, vous y êtes favorable ? Ça changerait quelque chose ?
05:12Alors, c'est une partie de la réponse.
05:14Une autre partie de la réponse, c'est qu'il faut éduquer les parents.
05:18Il y a des jeunes parents qui ont des enfants, peut-être des parents d'ailleurs un peu moins jeunes...
05:22Éduquer les parents ?
05:24Oui, bien sûr que oui.
05:25Qui doit éduquer les parents ?
05:27L'école des parents, d'une certaine façon, on peut tous participer de cette éducation.
05:33On ne devient pas parent comme ça, ce n'est pas vrai.
05:35Moi, je ne crois pas à ça.
05:37J'ai appris aussi avec mes enfants, peut-être, avec mon épouse.
05:39On a trouvé des solutions pour essayer de donner à nos enfants une éducation qui soit respectueuse, justement, des uns et des autres.
05:47On voit bien, on a parlé tout à l'heure de la suppression des téléphones sur votre antenne.
05:54Par exemple, dans les collèges, c'est quelque chose qui pollue la vie et pollue l'intellect.
05:58Donc, il faudrait interdire les portables dans vos collèges ?
06:02Et au lycée ?
06:04Oui, de toute façon, il y aura sûrement...
06:06J'ai entendu beaucoup parler de cadres tout à l'heure, ça m'a fait beaucoup rigoler.
06:10Amener du cadre, c'est bien. Il faut être un petit peu clair dans ce qu'on veut dire.
06:15Au moins, dans un premier temps, on interdit.
06:18Et puis, si au bout d'un an, deux ans, trois ans, on s'aperçoit qu'il faut assouplir, pourquoi pas ?
06:23Mais il faut prendre des décisions.
06:24Il faut y aller, c'est ce que vous dites ce matin au gouvernement, aux politiques.
06:27Si on ne va pas tout de suite prendre des décisions, de la même façon sur les peines qu'on peut donner.
06:31Moi, je suis favorable à l'éloignement, par exemple, des enfants qui sont responsables de ces faits,
06:38qui ont sûrement plein d'explications pour être devenus de cette façon-là.
06:43Mais ça n'empêche pas qu'il y a très certainement une forme de pension obligatoire.
06:47Et puis, vous savez, quand un gamin commence à casser un abribus parce qu'il s'est amusé le soir avec ses copains,
06:53il faut peut-être lui dire, pendant dix heures, tu vas venir ramasser les papiers dans toutes les rues de Viry-Châtillon.
06:59Et peut-être qu'à ce moment-là, il comprendra que ça a un coût.
07:02Et que rien ne peut être impuni.
07:04Jean-Marie Villain, vous les voyez, au quotidien, ces jeunes violents à Viry-Châtillon et ailleurs ?
07:10Vous êtes vraiment un élu de terrain.
07:12Les jeunes ne sont pas tous vivants de violences.
07:14Ce que je veux dire, c'est que vous les voyez.
07:16Et bien sûr, loin de moi l'idée, et d'ailleurs, tout le monde le dit, c'est une minorité qui bascule.
07:22Comment expliquer, par exemple, ceux qui ont battu à mort Chem Cédine ?
07:26Comment expliquer qu'ils en soient arrivés là ?
07:29Vous savez, les images qu'on voit, on parlait des réseaux sociaux aussi,
07:34des jeux qui sont ultra violents.
07:36Alors, ce n'est pas la seule raison.
07:38Mais on sent bien quand même que c'est tellement facile sur un jeu de prendre une kalachnikov
07:42et de descendre 250 personnes dans l'espace de quelques secondes.
07:45Pourquoi s'interdire ça ?
07:47On voit cette violence des coups.
07:50Je pense que l'esprit est débridé, dans le mauvais sens du terme.
07:54Et qu'on ne s'interroge même plus de savoir comment, objectivement, on peut se dire
08:00je vais prendre une barre de fer ou je vais taper sur la tête de quelqu'un.
08:04Une gifle, ça fait mal.
08:06Mais donc une barre de fer, ça détruit tout.
08:08Mais comment on peut en arriver là ?
08:10C'est quelque chose qui me sort par la tête.
08:13Je n'arrive pas à le comprendre.
08:14Sincèrement, je n'arrive pas à le comprendre.
08:15Merci beaucoup d'être revenu ce matin sur RTL.
08:17Merci beaucoup Jean-Marie Villain, maire de Viry-Châtillon.
08:20Il faut rappeler les pères à l'ordre.
08:22Il faut éloigner les enfants responsables des agressions.
08:24Rien ne peut être impuni.
08:26Oui, il faut interdire les portables à l'école, au moins pendant 2-3 ans.
08:29Bref, il faut prendre des décisions.
08:31On entend vos mots forts face à une situation qui nous tétanise.