La comédienne Eye Haïdara était l'invitée de Mathilde Serrell, à 9h20, mardi 18 février.
Retrouvez « L'interview de 9h20 par Léa Salamé » L'interview de 9h20 avec Léa Salamé sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20
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00:00Jusqu'à tant, jusqu'à tant qu'on m'aime !
00:02Ah, il faisait de la rumba lui aussi !
00:04Ah oui !
00:05Oui, il faisait de la rumba, puisque c'est une adaptation d'une grande figure de la
00:10chanson brésilienne Vinicius de Moraes, dans la voix donc de Claude Nougaro, et la chanson
00:14en français s'appelle « Bidonville ».
00:16Et la rumba c'est plutôt en réplique démocratique du concours, mais bon, c'est pas grave !
00:21Et celle que vous venez d'entendre, c'est l'invité de Mathilde Serrel, il est 9h25.
00:25France Inter, le 7-10.
00:32Il n'y a plus de discipline dans ce studio !
00:34Votre invitée Mathilde, donc, est une actrice qui libère !
00:38Oui, je vous l'avais dit, c'est Yaïda Ra, bonjour !
00:41Bonjour !
00:42Elle libère aussi, vous voyez, la conception qu'on peut avoir du studio de radio, si
00:45on était au théâtre, on vous a montré, on a fait tomber le quatrième mur !
00:48Voilà, c'est ça !
00:49C'est quand la dernière fois, Yaïda Ra, que vous avez estimé que là c'était trop ?
00:54Oh là là !
00:57Alors, c'est dur cette question, dis-donc, quand est-ce que j'ai estimé que là c'était
01:02trop ?
01:03Oui.
01:04Tellement de fois !
01:05Alors, on va dans le down ou on va dans le drôle ?
01:08Dans le débordement.
01:09Dans le débordement.
01:11Ah, c'est dur, c'est dur, c'est dur, c'est dur, c'est dur, c'est dur !
01:15La dernière fois, il y a ce truc qui s'est enclenché !
01:19Je crois que c'était, j'aime pas dire son nom, mais je crois que c'était le petit
01:23asticot de Donald Trump, là, je me suis dit.
01:25Elon Musk ?
01:26Ouais.
01:27Alors, on le dit pas !
01:28Si vous étiez à un événement historique, vous seriez quoi ?
01:33Je serais la marche de Martin Luther King.
01:39Pour l'égalité des droits civiques aux Etats-Unis.
01:42Dans Frottez !
01:43Frottez !
01:44L'excellente série de la cinéaste Marion Vernoux qui sera diffusée à partir de demain
01:48sur France 2 et qui est disponible en intégralité en ligne, vous incarnez Solange Diaby.
01:52C'est une femme de chambre gouvernante des hôtels Nowhere.
01:55Ça fait neuf ans qu'elle travaille là, pour une société de prestataires, CleanUp,
01:59qui ne paye pas les heures sup et impose des cadences infernales.
02:02Alors un jour, c'en est trop.
02:04Elle va se mettre en grève et embarquer ses collègues dans un combat pour leurs droits
02:08face à ce géant de loterlierie.
02:09Solange Diaby n'est pas un personnage qui a une culture militante, ni un personnage
02:13victime.
02:14C'est une femme qui a tenu le système jusque-là et qui bascule.
02:18C'est ça qui vous a intéressé Yair Idara ?
02:20Et c'est d'ailleurs même quand on lisait le scénario avec Marion, quand on a fait
02:24cette séquence-là, je lui ai dit j'aimerais bien que ça lui échappe.
02:28On va faire grève.
02:29J'aimerais bien que ce ne soit pas quelque chose de calculé.
02:32Parce que exactement c'est le moment de trop.
02:34C'est ça.
02:35Ça nous échappe.
02:37C'est qu'il y a un moment où on encaisse trop de choses et qu'on dit des choses
02:43qui sont peut-être plus grosses que nous et qu'on n'aurait jamais pensé faire.
02:46Comme cette grève-là.
02:47Et elle le dit dans un soupir comme ça.
02:48Ouais.
02:49On va faire grève.
02:50Ouais.
02:51Je crois qu'elle ne sait même pas ce que ça veut dire en ce moment.
02:53Mais en tout cas, je l'ai entendu quelque part.
02:56Là, on va le faire.
02:58Extrait de Frottez Frottez.
03:00Moi, mon contrat, il est pour vinter une chambre.
03:02Depuis 4 mois, j'en fais 40.
03:0440 matelas retournés, vous imaginez ?
03:06J'imagine très bien, oui.
03:07C'est rentable de sous-payer les gens.
03:09Insupportable.
03:10On n'a pas de panier repas.
03:11On n'a même pas le temps de boire de l'eau tellement les cadences sont infernales.
03:13Ouais.
03:14Et maintenant, ils nous déplacent.
03:15On a 3 filles qui sont envoyées au Nowhere de Lens.
03:17C'est habile.
03:19Honteux, je dirais.
03:20Ça permet de casser les dynamiques de groupe.
03:22C'est classique pour étouffer la contestation.
03:24Vous êtes leur porte-parole ?
03:26Non.
03:27Ça fait juste 9 ans que je travaille là-bas.
03:28Avant les travaux, j'étais déjà là.
03:30J'en ai vu passer des sous-traitants.
03:32Après, on va se dire la vérité.
03:34La plupart des filles, elles ont pas de titre de séjour.
03:36Donc, ils en profitent.
03:38Ils abusent de leur situation de vulnérabilité.
03:40C'est ce que je disais.
03:41Vous êtes leur porte-parole.
03:43Du coup, moi, je suis quoi ?
03:44Grande gueule.
03:47Ça, c'est la copine.
03:48Le syndicaliste joué par Francis Leplay dans Frottez Frottez va accompagner.
03:52Donc, votre personnage de Solange, c'est lui qui la désigne comme leader.
03:54Ouais, c'est lui qui lui fait prendre conscience qu'elle est leader.
03:57Et on est dans une lutte au XXIème siècle où les gens n'ont pas de culture syndicale.
04:01C'est la rencontre vraiment de deux mondes.
04:03Celui de la sous-traitance dans des hôtels avec des poufs en plastique rigolos et des peluches roses sur les lits
04:07où les clients sont toujours plus exigeants en payant moins.
04:10Et ces femmes-là qui n'ont jamais pensé militer ni se syndiquer.
04:15Est-ce que c'est le portrait de la société aussi que dans cette série réalisée, éco-scénarisée par Marion Vernoux que vous aimez ?
04:21Ben oui, il y a quelque chose de très actuel aujourd'hui, de la façon dont on travaille,
04:27ce qu'on autorise d'avoir des sous-traitants, d'autoriser cette société un petit peu, comment on dit ça ?
04:36Un petit peu Uber quoi.
04:38Uberiser la société.
04:40Et puis effectivement, on va souvent vers les gens les plus vulnérables pour faire les choses les plus sales.
04:49Parce qu'on sait très bien que ces gens n'ont pas beaucoup de défense.
04:53Parce qu'on sait très bien que ces gens ont besoin de travailler.
04:56Et qu'ils n'ont pas les moyens de se rebeller.
04:59Qu'ils n'ont pas les moyens d'aller revendiquer quoi que ce soit.
05:03Donc ouais, on profite de ça.
05:05C'est un peu de l'esclavage moderne je dirais.
05:07Et ça s'adresse aussi au public, qui peut voir différemment les gens qui l'entourent au quotidien.
05:13C'est votre credo ça, depuis le sens de la fête qui vous a révélé.
05:16Donc la grande comédie de Nakash Toledano en 2017, ça vous vaut d'ailleurs une nomination au César.
05:21Vous dites que vous choisissez enfin vos rôles.
05:23Et que vous les choisissez notamment pour ça.
05:25Frottez, frottez, il y a le personnage de Solange.
05:28Mais vous étiez aussi Jamila dans « Brillante », des agents de propreté qui se rebellent face à un employeur qui les exploite.
05:34Vous avez été Angèle Lanounou dans « Les femmes du square ».
05:37Vous dites que le cinéma que vous cherchez, c'est celui qui met en lumière les gens qu'on croise au quotidien, c'est ça ?
05:42Et à qui on ne fait pas attention ?
05:43Exactement.
05:44Parce que j'aime bien ces gens dans les coins.
05:48Parce que j'aime bien leur combat.
05:50Parce que ça me touche.
05:52Parce que c'est peut-être des gens que j'ai côtoyés.
05:56Parce que c'est un milieu que je connais.
05:59À la lecture d'un scénario, c'est ça que vous allez rechercher ?
06:03Pas toujours, ce n'est pas systématique.
06:05Mais en tout cas, j'ai envie de raconter des choses.
06:07J'aime raconter des combats.
06:09J'aime prendre la parole pour d'autres.
06:13Et puis il y a des choses, quand c'est bien écrit, il y a des mots que je ne sais pas dire moi.
06:19Et je me dis « Putain, c'est marrant, j'aurais aimé savoir dire ça ».
06:22Alors je me dis « Ok, d'accord, je veux bien faire ce rôle-là ».
06:24Il y a aussi cette idée de l'ordinaire, de la banalité.
06:27Vous avez signé un texte fort dans « Noir n'est pas mon métier ».
06:29Ce livre collectif en 2018 avec Aïssa Maga.
06:32Il y avait eu toute une bande en haut des marches au Festival de Cannes.
06:35Vous avez dit « Je voudrais être une actrice banale ».
06:38Oui, je voudrais être une actrice.
06:42C'est bizarre de dire une actrice banale.
06:44Parce que quand on est une actrice, on veut être tout sauf banale.
06:47Mais en tout cas, je veux raconter les gens de tous les jours.
06:52Les gens qu'on croise tous les jours.
06:54Et je veux être proche de la vie, proche du quotidien des gens.
06:59Je veux qu'on puisse s'identifier.
07:01Il y avait un collectif, si tu es à l'instant dans cet engagement.
07:05Il y a aussi des phrases que vous allez donner comme ça au César en 2023.
07:10Lorsque vous allez remettre le César du meilleur second rôle.
07:15Et puis hop, vous finissez la présentation des candidats de potentiel, des lauréats de potentiel par cette phrase.
07:20« Si j'avais été productrice, je vous aurais payé comme un acteur masculin ».
07:24Oui, exactement.
07:27Ce n'est pas le cas encore aujourd'hui.
07:29Il y a cette idée de collectif de femmes qui vont faire avancer les choses chez vous Aïda.
07:36Oui, j'aime bien.
07:38Je suis une femme.
07:41Je défends l'humain, l'homme comme la femme.
07:43Mais c'est vrai que les femmes, on a encore plein de combats à mener.
07:46Et elles pourront toujours compter sur moi.
07:48Et elles sont plusieurs, d'en frotter, frotter.
07:50Elles sont très différentes.
07:51J'ai parlé de votre personnage de Solange.
07:53Elle a aussi ses enfants.
07:55Elle pète un peu les plombs à la maison parce que justement, elle est surchargée de boulot.
07:59On a aussi Michèle Extolard, au caractère bien trempée, incarnée par Carole Rocher.
08:05Et puis l'avocate féministe Fauché, la cinquantaine sans mec et sans boulot.
08:13Ce trio, c'est aussi une sorte de trio improbable.
08:18Il y a un thriller social de comment ces trois types de femmes qui n'ont rien à voir vont se rencontrer.
08:23Oui, il y a ce petit panel de femmes qui représentent bien les femmes d'aujourd'hui.
08:29Peut-être pas toutes les femmes.
08:32Je suis un peu dure là.
08:34Je trouve que c'est des portraits de femmes qu'on croise beaucoup.
08:39La fille qui arrive à la cinquantaine et que son mari lui dit
08:41« Bon ben écoute, tu t'es occupée de notre enfant pendant plusieurs années,
08:44mais aujourd'hui tu ne me fais plus bander. »
08:48Et puis oui, cette Michèle qui est là, qui veut continuer.
08:53En fait, qui survit, qui est plus dans la survie.
08:56Qui s'en fout de tout et qui l'en survit, qui avance, qui avance, qui avance.
09:00Elles sont toutes en quête de reconnaissance en vérité, quelque part.
09:06Et aussi de libération d'un système de domination.
09:11Elles ont ça en commun, de vouloir se libérer d'un jour, les trois,
09:17dans leur rapport aux hommes, dans leur rapport au système.
09:20Elles sont aussi imparfaites, toutes les trois.
09:22Oui, on peut dire ça.
09:24Vous avez dit que vous habitiez en face de l'Ibis,
09:27où il y a eu cette grève qui a inspiré justement le film avec une femme de chambre
09:32qui est devenue d'ailleurs députée depuis Rachel Keke.
09:36Comment vous aviez-vous vu cette scène à cette époque-là, en tant que riveraine ?
09:40Alors, en tant que riveraine, je les ai vues beaucoup.
09:43C'est vrai que je suis passée beaucoup devant sans trop comprendre ce qui se passait.
09:48Et puis il y a eu le confinement aussi.
09:51Donc à un moment donné, je ne les ai plus vues parce qu'il n'y avait plus personne dehors.
09:55Et puis tout doucement, j'ai pris conscience de ce qui se passait,
09:58mais je n'avais pas fait le lien avec Rachel Keke.
10:01Rachel Keke s'est venue beaucoup plus tard.
10:03Et puis tout doucement, j'ai compris qu'en fait, ces femmes étaient là dans une révolte
10:07et qu'elles étaient là en grève.
10:10C'était des femmes de ménage de l'hôtel.
10:14Mais ça a mis du temps.
10:16Parce que nous, riverains, on voit, on passe devant.
10:18En vérité, on ne s'arrête pas trop.
10:20Vous étiez justement cette personne qui ne s'attarde pas sur les jours du quotidien.
10:23Je suis passée comme ça assez vite.
10:27Cette série, c'est aussi une façon de dire pardon.
10:33Pardon, je suis passée sans regarder.
10:35J'ai regardé trop tard en tout cas.
10:38J'ai regardé, mais trop tard.
10:39Et c'est aussi une façon de...
10:41Des fois, le cinéma, ça me permet aussi de dire pardon pour plein de choses.
10:45Pourquoi d'autres ? À quel autre moment vous avez dit pardon dans vos rôles ?
10:49Je ne le dirai pas.
10:51Mais personne ne nous écoute.
10:53Des fois, c'est une façon de dire pardon.
10:57Je ne vous ai pas regardé, mais là, je vous regarde et j'ai compris.
11:00Il y a ce modèle qui n'est pas le seul.
11:03Celui de Rachel Keke dans le film.
11:05Et il y a aussi ce modèle qui, vous avoue, a pris les gestes de femmes de chambre.
11:11Vous avez travaillé avec des femmes qui sont non-actrices.
11:14Qui sont les actrices non-professionnelles.
11:16Dont c'est le métier justement de faire les chambres.
11:18Dont Berthe Tzialia, je crois qu'elle était sur le tournage.
11:21Elle était incroyable parce qu'elle était sur le tournage.
11:24Le matin, elle travaillait.
11:27Des fois, entre les prises, elle allait faire une chambre d'Airbnb.
11:34Et puis le soir, elle allait travailler.
11:37Elle était incroyable.
11:38Il y avait aussi une actrice DVD, Anne Simba.
11:42Qui, elle aussi, nous a montré beaucoup de gestes.
11:45Des gestes qu'elle pratique au quotidien quand elle fait des chambres.
11:48Pour ne pas se faire mal au dos.
11:50La façon par où elle commence.
11:53Elles nous ont montré tout ça.
11:55Elles ont partagé tout ça avec nous.
11:56Et puis c'était une force aussi d'avoir ces femmes.
11:59C'était une force pour nous de les regarder.
12:02De les voir prendre cette aventure de cinéma qui leur tombait comme ça un petit peu du ciel.
12:08Et qui changeait un petit peu leur quotidien.
12:10Et nous qui sommes des actrices et qui allons sur les plateaux beaucoup plus souvent.
12:16Même si on a toujours beaucoup de passion pour notre métier.
12:19Mais il y a des trucs un peu très automatiques qui s'installent.
12:22Et de voir ces femmes pour lesquelles c'était complètement nouveau.
12:25Et de les voir prendre avec tant d'amour, tant de passion.
12:30Moi, ça m'a fait du bien.
12:33Ça m'a encouragée.
12:34Ça vous a modifié aussi dans le jeu ?
12:36Oui, complètement.
12:37C'est justement Vincent Lindon qui dit souvent qu'il rentre par ses personnages grâce aux gestes.
12:42Et tant qu'il n'a pas les gestes du personnage, il n'est pas sûr de le tenir.
12:45On va l'écouter.
12:46Vincent Lindon, par rapport à ce gros mot qu'on appelle.
12:48L'engagement.
12:50C'est une question à laquelle tous les artistes ont été, sont et seront confrontés.
12:56Doit-on user de sa notoriété, aussi modeste soit-elle, pour porter haut et fort la parole des sans voix ?
13:03Ou au contraire, refuser d'exprimer publiquement une position dans des domaines
13:08où nous n'avons ni légitimité, ni compétence particulière ?
13:13Je n'ai pas la réponse.
13:16Les seuls engagements incontestables d'un artiste, d'une ou d'un cinéaste notamment,
13:21sont sans nul doute les œuvres auxquelles ils prêtent leur concours.
13:25Simple acteur, je traverse des personnages qui portent d'autres noms que le mien,
13:29exercent d'autres métiers, des puissants parfois, des vaincus plus souvent,
13:34car ce sont eux qui m'émeuvent et m'inspirent pour essayer de toucher au cœur.
13:38C'est notre métier.
13:41En 2022, pour l'ouverture du Festival de Cannes,
13:44vous feriez de ces mots les vôtres ?
13:46J'y étais et j'étais très touchée quand j'ai entendu ça.
13:49Mais moi j'admire la carrière de Vincent Lindon,
13:53je sais que c'est quelqu'un que je regarde beaucoup et j'aime ses choix énormément.
14:00Et la question de la légitimité, vous vous l'êtes posée comme lui,
14:05c'est quelque chose qui vous a travaillé dans l'engagement ?
14:07Bien sûr, bien sûr, mais je ne m'attarde pas là-dessus
14:10parce que si je me la pose trop, je ne fais plus mon métier.
14:14Donc effectivement, elle revient tout le temps.
14:20Et puis moi je suis quelqu'un qui doute tout le temps, je suis constamment dans le doute.
14:24Et quand je vais sur les plateaux, j'essaye de mettre ces questions à part
14:29parce que vraiment c'est des choses qui ne me rendent pas service en vérité.
14:36C'est des gouffres ?
14:37Oui, oui.
14:38On va essayer de ne pas s'y plonger.
14:40Cela dit, vous repensez toujours à vos rôles.
14:42Vous êtes une perfectionniste, vous dites toujours que vous auriez pu faire la prise différemment,
14:45que vous auriez pu le dire différemment.
14:47C'est exactement ce que je dis, je doute tout le temps, mais tout le temps.
14:50Et puis après je vais croiser quelqu'un qui va me faire un autre récit de sa vie,
14:54je vais me dire voilà, je me suis trompée, c'était pas comme ça que j'avais joué.
14:57Je vais être sous la douche, je vais refaire les scènes.
14:59C'est horrible, c'est horrible.
15:01Ça vous pourchasse.
15:03Alors il y a des choses qui vous ramènent parfois au réel,
15:05notamment la première fois que vous êtes allée au Festival de Cannes,
15:07je crois que quand vous êtes rentrée...
15:09Mais d'où on sait ça ?
15:12Alors il faut dire qu'on en parlera un petit peu plus tard,
15:14mais quand même vous avez accompagné Jean-Luc Godard au Festival de Cannes.
15:18Mais quand vous êtes rentrée, votre mère vous a ramené au réel, indirectement.
15:22Qu'est-ce qu'elle vous a dit ?
15:23Ouais, ouais, ouais, ouais.
15:24Moi je suis rentrée de Cannes la première fois,
15:26j'étais en train de lui raconter tout ce qu'on a fait.
15:28On a fait ça, on a fait ça.
15:29Elle me dit ouais, ouais, super.
15:30Tu peux passer l'aspirateur ? J'ai pas eu le temps.
15:32Et puis après tu me racontes ton délire.
15:35Oui, oui, oui, quand tu passes une semaine au Majestic,
15:38tu sais pas quand tu vas rentrer, tu vas passer l'aspirateur
15:44et tu vas aller chercher le pain, quoi.
15:46Elle garde toujours ce rôle pour vous ramener sur Terre ?
15:50Je pense que c'était même pas fait express.
15:52C'est normal, tu rentres de Cannes, tu passes l'aspi.
15:55C'est juste ça, c'est vraiment...
15:57Elle était dans un speed elle aussi,
15:58elle m'a dit passe l'aspirateur, fais ça.
16:00Et voilà, j'ai pas eu le temps de faire ça.
16:02Et moi, j'arrive avec mes bagages de Cannes, mes bijoux.
16:04Mais voilà, c'est normal.
16:06Tu poses tout ça et tu te mets au boulot.
16:09Je parlais de Jean-Luc Godard, mais c'est parce qu'on le sait pas forcément.
16:12Mais c'est quand même votre premier film, c'est avec lui.
16:14C'est pas mon premier film.
16:16C'est pas votre premier, mais c'est quand même...
16:18C'est dans les premiers, ouais.
16:19C'est dans les premiers, c'est en 2007.
16:21Et vous allez à Cannes en 2008.
16:22C'est filmé le socialisme ?
16:24C'est socialisme, le film socialisme, effectivement.
16:27Et qu'est-ce qu'il vous a...
16:28Je crois qu'il vous a filé une caméra et vous a laissé le film au tennis.
16:32Exactement.
16:34Il m'avait filé une caméra parce que dans le film, je joue une journaliste qui filme.
16:39Et donc, il voulait que je sois un petit peu habituée à tenir cette caméra, à faire des plans et tout.
16:46Donc, il me disait d'aller filmer un petit peu à gauche, à droite, des animaux.
16:48Et lui, il aimait bien jouer au tennis.
16:50Et je suis venue le filmer un jour au tennis.
16:55Et puis...
16:58Et vous avez fait quoi de ces images ?
17:01Je lui ai donné.
17:02Vous l'avez donné ?
17:03Parce qu'il m'a dit un truc sur le coup.
17:06Je me suis dit pour pas qu'il y ait de problème.
17:09Il me dit ces images, elles vont finir sur Youtube.
17:14Et j'ai enlevé la casse.
17:15Je lui ai donné.
17:16Vous lui avez donné, preuve de votre bonne foi.
17:18Il vous a donné en retour.
17:19Et il m'a donné la caméra.
17:21La caméra.
17:22Vous dites que c'était un peu un punk, Jean-Luc Godard.
17:24Un vieux punk qui vous a embarqué dans cette histoire.
17:27Jean-Pierre Bacré aussi, c'est un peu un autre punk qui vous a accompagné dans le sens de la fête.
17:31Qu'est-ce qu'il vous a transmis, Yaira ?
17:34Alors, Jean-Pierre, il avait...
17:36C'est un autre genre de punk.
17:37Ouais, c'est un autre genre.
17:39C'est pas vraiment...
17:40J'aurais pas choisi le mot punk, mais...
17:43Jean-Pierre, en tout cas, moi, au moment où je l'ai connu, c'est vraiment ça.
17:47Je pense que s'il y a un mot, c'est ça, c'est la transmission.
17:49On était beaucoup de jeunes sur ce plateau et il avait quelque chose à nous donner,
17:54à nous offrir, à tous, à tous les jeunes sur ce plateau.
17:59Même en le regardant, même à travers les scènes,
18:07entre les scènes, les façons dont on jouait,
18:11il avait ce petit mot pour nous dire,
18:13« Ouais, tiens, moi j'aurais essayé ça ou j'aurais essayé ça ».
18:16Il avait vraiment quelque chose de l'ordre de la transmission vis-à-vis de nous.
18:19Et ça vous a beaucoup apporté à ce moment-là
18:23et ensuite, on vous a retrouvé devant la caméra,
18:25Damien Jahouy pour En Thérapie, un inoubliable rôle d'Inès.
18:28Il y a toujours des femmes qui viennent vous voir après ce rôle d'Inès dans En Thérapie
18:32parce que vous aviez une maternité un peu contrariée,
18:35la maternité contrariée du personnage.
18:37Et beaucoup de gens sont venus vous voir après, c'est toujours le cas ?
18:39Des femmes, des hommes...
18:41Je pense que c'est un rôle en tout cas qui a beaucoup marqué le public.
18:52Les retours que j'ai sont beaucoup, beaucoup sur En Thérapie.
18:56Ils sont très touchants aussi.
18:58C'est vrai que les gens se racontent beaucoup.
19:00Et vous n'allez pas nous dire ce qu'ils vous disent.
19:02En tout cas, moi je vous dirais ce que ça m'a fait moi,
19:05en tant que mère de voir le personnage d'Inès dans En Thérapie.
19:08Mais c'est l'heure de la traditionnelle séquence des impromptus.
19:12Vous n'en réfléchissez pas ?
19:13Vous répondez aux débeautés, Yarida Ra ?
19:15Ok, je me prépare.
19:17Ok !
19:18Oasis ou Blur ?
19:19Non !
19:21Vous êtes une grande fan de la pop anglaise du début des années 90.
19:25Je vous demande de choisir.
19:27Oasis.
19:28Oasis !
19:30Toledano ou Nakash ?
19:31Pareil, c'est le même genre de choix, impossible.
19:33Alors là, je réponds.
19:35Toledakash.
19:37Julia Roberts ou Meryl Streep ?
19:39Non !
19:41Julia Roberts.
19:43Et puisqu'on est dans les dilemmes,
19:45Corneille ou Racine ?
19:47Corneille !
19:57C'est horrible ça !
19:59On leur dira pas !
20:01Ils ne l'entendront pas.
20:03Pour me la raconter, Racine.
20:05Parce que c'est beaucoup plus dur.
20:07J'aurais dit Corneille, vous avez tourné 6 ans quand même.
20:09Racine, c'est un défi.
20:12Liberté, égalité, fraternité, vous choisissez quoi Yarida Ra ?
20:16Fraternité sans suscité.
20:18Et Dieu dans tout ça ?
20:20Il est partout.
20:22Il nous accompagne.
20:24Dieu, c'est très intime, je crois.
20:28Ok, on vous laisse avec lui alors.
20:32La nouvelle série de France Télé,
20:34qui démarre demain à l'antenne,
20:36mais qui est disponible en intégrale sur le site,
20:38c'est Frottez ! Frottez !
20:40C'est signé de la cinéaste Marion Vernoux.
20:42Vous y êtes extraordinaire Yarida Ra.
20:44Et tous vos collègues et militantes non professionnelles de ce film.
20:49Je vous souhaite bonne route et bonne journée.
20:51Merci beaucoup.