Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • avant-hier
Mardi 15 avril 2025, retrouvez Alain Bokobza (Responsable de la stratégie d'allocation d'actifs mondiale, Société Générale CIB) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Musique
00:00Le dernier quart d'heure de Smart Bourse chaque soir, c'est le quart d'heure thématique.
00:13Le thème ce soir, c'est celui de l'allocation d'actifs dans un monde un peu différent.
00:18Et nous en parlons avec Alain Bocobzard, responsable mondial de l'allocation d'actifs de Société Générale CIB, à mes côtés en plateau.
00:24Alain, bonsoir.
00:25Bonsoir, Claquard.
00:25Je reprends, Alain, quelques-uns des titres de vos publications.
00:30Donc, vous pilotez le multi-asset portfolio, le portefeuille multi-actif modèle de Société Générale CIB.
00:37Et donc, il y a des rendez-vous importants en septembre 2023 et en mars 2024.
00:42Vous écriviez « Tous les chemins mènent aux Etats-Unis, toutes les routes mènent aux Etats-Unis ».
00:47On était dans le momentum parfait de l'exceptionnalisme américain.
00:52Septembre 2024 et février 2025.
00:54Donc, ça nous ramène à une période assez récente.
00:57Vous commenciez à écrire et vous écriviez par deux fois déjà craquelement dans l'exceptionnalisme américain jusqu'en février 2025.
01:06Et en mars 2025, vous êtes passé à la vitesse supérieure, si je puis dire, Alain,
01:11en décrétant que c'était le moment de la grande rotation.
01:16Et ce que vous appelez grande rotation, c'est voir des investisseurs sortir massivement des actifs américains
01:23ou d'une série d'actifs américains.
01:26Et la question étant, comment survivre à cette grande rotation ?
01:31Déjà, qu'est-ce qui fonde cette nouvelle conviction chez vous, Alain ?
01:34Alors, dans le message qu'on a donné courant mars, on a eu beaucoup de chance sur le timing,
01:41parce que c'était vraiment avant une accélération de toutes ces rotations et de marchés beaucoup plus volatiles.
01:47Comment survivre ?
01:50Le message, j'espère, était clair en disant que c'est dangereux.
01:54Le casting, comme la gouvernance des États-Unis d'Amérique, nous posait problème.
02:00Je pense qu'il n'y a pas qu'à nous.
02:02Et à la base, quand un grand pays vient décaler sa gouvernance avec des thèses économiques qui restent à démontrer,
02:11je vais être gentil, comme quoi on essaie de nous démontrer que le protectionnisme peut avoir des vertus pour celui qui l'initie,
02:19nous on a du mal et on n'a pas l'air d'être les seuls.
02:22Donc ça revient comme un boomerang.
02:25Ils ont lancé un boomerang en disant, on ne va tous pas vous écraser, mais on va gagner une bataille.
02:31Et ça leur revient comme un boomerang.
02:33Donc ça, la gouvernance et le casting des États-Unis nous posent problème.
02:37Donc ce n'est pas nécessairement quelque chose qui est à court terme.
02:41Tant qu'on ne change pas la gouvernance et les objectifs de ce gouvernement, ça peut prendre du temps.
02:48Et le deuxième message, c'était la rotation.
02:50Le message de la rotation, il est beaucoup plus boursier.
02:54En se disant que dans ce plateau, vous avez reçu nombre de stratèges qui calculaient la part des grandes valeurs dans le total,
03:04avec des effets de concentration jusqu'à ce qu'il y ait 7 valeurs.
03:07Parfois, ce n'était plus qu'une seule valeur.
03:09Et quelles que soient les localisations, il y avait des effets de concentration,
03:13notamment sur les valeurs américaines, les grandes techs américaines et les 7 magnifiques.
03:19Donc la grande rotation, c'est plutôt l'idée qu'il n'y en avait que pour le dollar,
03:24que pour les actions américaines, que les techs américaines, que le crédit américain.
03:27Tous les portefeuilles étaient concentrés aux Etats-Unis sur l'exceptionnalisme américain qui est terminé, point la ligne.
03:33Et donc maintenant, il faut aller creuser, creuser, creuser, pour voir comment on peut redistribuer ces portefeuilles.
03:38Et ça va prendre du temps, ce n'est pas du jour au lendemain.
03:40C'est ça la grande rotation.
03:41On va y revenir, mais déjà, je précise, votre papier, votre recommandation a été écrite en mars,
03:49donc bien avant Liberation Day, l'histoire des tarifs, etc.
03:52Vous parlez des questions comme du casting et de la gouvernance, qui déjà étaient des alertes significatives pour vous.
04:01Et puis il y a la question, évidemment, de ce que ça implique pour l'allocation.
04:06Et vous le répétez là à nouveau, ce n'est plus une question.
04:10C'est la fin de l'exceptionnalisme américain, point à la ligne.
04:13Il n'y a pas de point d'interrogation derrière cette phrase, Alain.
04:18Qu'est-ce qui a disparu, qui vous fait dire qu'il n'y a plus d'exceptionnalisme américain ?
04:25Dans l'exceptionnalisme américain, il y avait deux sous-menus.
04:29Il y avait un premier sous-menu qui consistait à observer que tous ceux qui avaient fait des prévisions d'entrée prochaine en récession aux Etats-Unis depuis 4 ans, 3 ans,
04:38finalement, ils se sont rachetés en disant que c'est robuste, ça reste robuste.
04:42Pour être honnête, pour le moment, l'économie réelle aux Etats-Unis reste robuste.
04:46Les créations d'emplois, tous les indicateurs coïncidents, par opposition aux enquêtes, les soft indicators sont très mauvais.
04:54Mais on demande aux gens, qu'est-ce qui se passe dans votre tête ?
04:57Et ils disent, je n'y comprends rien et je suis prudent.
04:59Mais l'économie réelle, pour l'instant, reste relativement robuste.
05:03Donc il y avait un aspect de cette comparaison de la robustesse de l'économie américaine dans la délivrance de croissance,
05:08par rapport au fait qu'il y avait une croissance ni au Japon, ni en Chine, ni en Europe.
05:12Donc ça, c'était une partie.
05:14Et donc là, si on inclut les décisions de relance qu'ils ont au Japon,
05:20les relances qui sont en train de se muscler en Chine,
05:23et le millier de milliards d'euros annoncés par l'Allemagne et tous les pays du nord de l'Europe,
05:30ce n'est pas comme si rien n'avait changé.
05:32Donc là, il y a de la relance, et nous, on voit un profil en J sur la croissance européenne,
05:37avec une accélération du PIB nominal.
05:39Donc là, il y a un rétrécissement de l'écart prévisionnel.
05:43Et d'autre part, dans l'exceptionnalisme, il y avait le fait que
05:46tous ceux qui n'avaient pas suffisamment d'exposition sur les actifs américains en dollars,
05:51donc non couverts sur le change,
05:54finalement avec des résultats de la performance des fonds investis, médiocres ou mauvais.
06:00Et donc l'exceptionnalisme, c'était une hyper-concentration des portefeuilles,
06:04jusqu'à des concentrations qu'on n'a jamais vues dans l'histoire économique.
06:08Et donc dans la fin de l'exceptionnalisme, il y a ces deux variables.
06:11C'est surtout la réponse de politique économique qui m'intéresse à l'extérieur des États-Unis,
06:17qui vient donner un soutien à la conjoncture prévisionnelle.
06:21Et la fin de l'exceptionnalisme en disant que tous les acteurs qui étaient trop concentrés sur les actifs américains
06:26ont pris un gros bouillon, un très très gros bouillon.
06:29Les actifs européens, les actions européennes ont surperformé les actions américaines.
06:33Ça n'était pas arrivé depuis combien d'années ?
06:36Pareil pour les actions chinoises qui ont bien performé.
06:39Donc c'est une nécessité de redistribuer, de ne pas mettre tous ces œufs dans le même panier.
06:43Et donc on va tous chercher le pourquoi et le comment.
06:46Il paraît qu'il y a des belles valeurs en Europe, il paraît qu'il y en a des belles en Chine,
06:49il paraît qu'il y en a des belles au Japon, il paraît qu'il y a des marchés obligataires sur lesquels il y a des rentements,
06:53il paraît que l'euro est en train de monter, que le Yen est en train de monter.
06:56Voilà, c'est plutôt la deuxième partie qui est plus, comment dire, créative en disant
07:02« Allez, redécouvrons les autres marchés des États-Unis, redécouvrons le reste du monde. »
07:06Tout un territoire ou des territoires d'investissement à redécouvrir dans ce monde-là.
07:12Avant même les actions, Alain, la fin de l'exceptionnalisme américain, comme vous dites, point à la ligne,
07:17qu'est-ce que ça implique pour le dollar ?
07:19Parce que là, et vous êtes bien placé pour le savoir, d'avoir une séquence sur quelques séances,
07:26sur une semaine où tout chute, le dollar, les tréjuries, les actions américaines, c'est assez rare.
07:35Et de voir encore une fois le dollar baisser sur cinq séances consécutives face à toutes les devises du monde,
07:41dans un moment de stress, d'incertitude maximale, ce n'était pas forcément intuitif.
07:49Dans les convictions qu'on a cherchées à faire passer mi-mars, fondées sur le casting et la gouvernance qui ne nous plaisaient pas,
07:58partant de ce qui se passe à Washington, on a baissé le poids des actifs risqués,
08:04le poids des actions, des actions américaines, des obligations privées, on a baissé le poids des matières premières,
08:10on a monté le cash, on est resté très pondéré sur le marché de l'or, on a acheté du yen,
08:16donc on avait une allocation défensive, donc on a baissé le poids des actifs risqués,
08:23entre autres les actions et les matières premières qui ont bien baissé depuis.
08:27Il y a un élément qui a choqué tous nos lecteurs, c'était le fait que dans un moment où on est risk-off,
08:35comme on dit, normalement le dollar monte, et on avait en mars baissé le poids du dollar américain,
08:42et non pas que c'était du risk-off partout, mais c'était un risk-off sur les Etats-Unis.
08:47C'est-à-dire que le problème de gouvernance, il est aux Etats-Unis,
08:51le problème du casting, est-ce que vraiment ils sont si pragmatiques que ça ?
08:55Est-ce que la guerre commerciale, finalement, c'est du transactionnel ?
08:59Comme on l'a cru un trop long moment, il y a du transactionnel, malheureusement il n'y a pas que ça.
09:04Il y a beaucoup d'idéologies qui n'est pas prouvées par la science économique,
09:07et ça, ça peut faire peur, sur le déroulé même pour la suite.
09:11Et donc finalement, c'est la prime de risque qu'on met sur les actifs américains.
09:16Tous les actifs américains ont baissé, le dollar a baissé, les actions ont baissé,
09:20celles qui étaient les plus chères ont baissé plus que les autres.
09:23Les obligations privées ont vu le rentement monter, donc perte en capital, etc.
09:29Donc c'est vraiment une problématique de gouvernance, celle qu'on a pu la dire.
09:34Et c'est pour ça que c'est un moment assez spécial dans l'histoire économique,
09:37de voir la prime de risque sur les actions devenir à l'encontre des actifs américains.
09:42C'est rarissime comme événement.
09:45C'est la grande rotation.
09:46Oui, c'est ça. Et quand vous dites grande rotation, c'est aussi, il y a une perspective de durabilité.
09:53Ce n'est pas un call tactique.
09:54Maintenant que le marché américain a un peu baissé, on peut y revenir.
09:57Ce n'est pas ça l'idée, Alain.
10:00Vu le niveau de concentration et de détention maximale qu'on a atteint sur ces actifs américains,
10:06on n'est pas à la fin de l'histoire, après une semaine de baisse.
10:09Je suis plus confortable dans les deux sous-menus qu'on avait tout à l'heure sur la fin de l'exposition américain,
10:15sur le fait qu'on a commencé la redistribution des portefeuilles pour voir où est-ce qu'il existe des territoires d'investissement positifs.
10:22Ce n'est pas simplement que je fais de l'arbitrage contre ce que j'avais.
10:25Si j'achète un actif dans mon portefeuille, j'ai besoin d'avoir des outils d'évaluation pas trop chers
10:32et des momentum qui font que le flux d'informations va être positif.
10:37Ce n'est pas que contre, il faut qu'il y ait des arguments pour.
10:39Sinon, ce n'est pas durable.
10:40Je suis plus confortable sur la redistribution des portefeuilles pour faire notre métier de gestion de portefeuilles,
10:47que ce soit pour un particulier ou un institutionnel,
10:50qu'il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier.
10:52C'est la redistribution qui dit son nom.
10:55C'est la fin de l'exposition américain dans la gestion d'actifs.
10:58Certains, aux Etats-Unis notamment, ont fait des appels à l'entrée immédiate en récession de l'économie américaine.
11:05Pour nous, c'est prématuré.
11:06Il y a plutôt des appels positifs sur le soutien à la conjoncture par des plans fiscaux
11:12dans les pays qui ont les moyens de le faire au nord de l'Europe,
11:14qui vont dans cette direction, qui ravivent un peu les espoirs de démarrage de la croissance en Europe,
11:20soutenus par la puissance publique quand elle n'en a les moyens.
11:22Ce n'est pas en France, ce n'est pas en Italie, ce n'est pas dans les pays du Sud, mais ce n'est pas grave.
11:25L'Europe redécolle.
11:26C'est des choix positifs de réallocation, effectivement.
11:32Beaucoup de questions.
11:33Sur le dollar, on en a parlé.
11:35Sur les treasuries américains, la dette souveraine américaine,
11:39qui a baissé conjointement avec le dollar au cours de cette semaine écoulée,
11:44est-ce qu'il y a un problème de fonctionnement technique sur le marché des treasuries américains
11:48ou est-ce qu'on est simplement dans une phase de déleveraging un peu forcée qui casse peut-être un peu les corrélations ?
11:56Parce que là aussi, moment de stress, dette souveraine américaine,
12:01ça a été vu à travers de grandes crises financières, baisse du AAA, etc., comme des actifs refuges.
12:06Le jour où les États-Unis se font dégrader du AAA, le disant américain baisse.
12:10Alors, il y a à la fois des éléments fondamentaux et techniques
12:14qui peuvent expliquer le retracement qu'on a fait,
12:19donc une augmentation des taux de financement de l'État américain.
12:22On parle souvent d'un put de la Réserve fédérale, c'est-à-dire d'une banque centrale
12:28qui peut assouplir quand il y a des grandes crises de la volatilité.
12:31Souvent, les banques centrales sont là pour calmer le jeu par les baisses de taux.
12:36Le président de la Réserve fédérale américaine est on ne peut plus clair
12:39sur le fait que des mesures protectionnistes par les tarifs vont être inflationnistes à très court terme,
12:44sans doute d'ici l'été aux États-Unis.
12:47Tous les grands groupes qui exportent aux États-Unis ont affiché une politique extrêmement claire,
12:51ils vont monter les tarifs, donc l'inflation va monter.
12:54Dans un contexte d'augmentation à court terme de l'inflation,
12:56même s'il existe un risque conjoncturel aux États-Unis, la fête ne peut pas bouger.
13:01Donc là, on a à court terme, d'ici l'été, disons,
13:03on a très peu ou pas de protection de la Réserve fédérale américaine.
13:06Il y a des débats là-dessus, nous on est très clair là-dessus.
13:09Donc ça explique aussi fondamentalement.
13:12Techniquement, il y a aussi dans cette guerre commerciale,
13:16l'administration américaine s'est attaquée à des États souverains
13:21qui sont très gros détenteurs de tréjuries,
13:24dont la Chine, dont le Japon.
13:26Et peut-être qu'ils ont balancé un peu.
13:29Donc ça fait partie des outils en disant,
13:32faites attention, vous ne tenez pas la barbichette,
13:34mais nous aussi on vous tient.
13:35Donc là, il y a des enjeux géopolitiques.
13:38Tout ce qu'on fait de plus en plus est géopolitique.
13:40Et les enjeux de détention par les étrangers
13:43de la dette souveraine américaine sont en jeu.
13:45Mais les tréjuries restent un actif américain en dollars
13:50qui est intéressant toujours dans la construction de portefeuille ?
13:55Je pense que les taux finiront par baisser
13:57quand la Fed interviendra en baissant ses taux.
14:00Mais ce n'est pas tout de suite.
14:01C'est plutôt une question de timing,
14:03en disant à partir de quand on active ça.
14:05Pour l'instant, on assiste plutôt à de la volatilité.
14:07Et quand on traite les marchés, la volatilité,
14:10il faut faire très attention à son timing d'intervention
14:13parce que ça veut dire qu'on a du mal à court terme
14:15à expliquer les variations parce que c'est volatile.
14:17Mais tendanciellement, cette économie américaine devrait ralentir
14:21et ça devrait à un moment donné permettre à la Réserve fédérale
14:24de baisser ses taux, ce qui sera un vecteur vertueux
14:27pour les obligations d'État américaines.
14:29Merci beaucoup Alain.
14:29Merci d'être venu nous expliquer comment survivre
14:32à la grande rotation.
14:33Alain Bocobza, responsable mondial de l'allocation d'actifs
14:35de Société Générale CIB, invitée de ce dernier quart d'heure
14:38de Smart Bourse.
14:49Smart Bourse vous a été présenté par Silex.
14:52Conseil en investissement, produits structurés,
14:55gestion d'actifs, technologie.

Recommandations