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Chaque jour, des invités opposent leur point de vue sur l'actualité politique. Ce lundi, Géraldine Woessner et Charlotte d’Ornellas.
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NewsTranscription
00:00 7h, 9h, Lionel Gougelot
00:03 Et c'est l'heure du Club de la presse d'Europe 1 comme tous les matins et nous sommes donc
00:07 à la veille d'une nouvelle journée d'action contre la réforme des retraites dont le texte
00:11 arrive en discussion cet après-midi à l'Assemblée Nationale.
00:14 Bonjour Jarlene Vosner, bonjour journaliste au point, bonjour Charlotte Dornelas, journaliste
00:19 à valeur actuelle, bienvenue dans ce studio.
00:21 Alors l'information du week-end à propos de ce projet de réforme des retraites c'est
00:26 cette main tendue d'Elisabeth Borne en direction des Républicains pour obtenir les voix des
00:30 LR.
00:31 La Première Ministre accepte d'étendre le dispositif carrière longue à ceux qui ont
00:35 commencé à travailler entre 20 et 21 ans pour leur permettre de partir un peu avant
00:39 à 63 ans.
00:40 Question mesdames, est-ce que cela va suffire pour rallier les voix des LR ? Réponse ma
00:45 chère Charabine Vosner.
00:46 Écoutez je trouve ça quand même… Ne faites pas cette tête là ! Je trouve très symptomatique
00:52 que cette proposition soit faite à la veille du débat parlementaire, c'est-à-dire que
00:57 c'est une négociation politique, ça montre le poids qu'ont les politiques par rapport
01:04 aux syndicats et aux manifestants.
01:07 La voix de quelques Républicains pour s'assurer de passer la réforme à l'Assemblée pèse
01:13 plus que celle de centaines de milliers de manifestants.
01:15 Ça montre un peu tout le mauvais tour j'ai envie de dire qu'a pris cette réforme.
01:20 Depuis le début, toutes les concessions ont été accordées aux Républicains dans l'espoir
01:26 de parvenir à faire passer cette loi rapidement puisque le gouvernement a fait le choix d'un
01:33 article du 47.1 qui raccourcit les débats et il se trouve un peu sans discours et sans
01:40 proposition face à la rue.
01:42 Donc je rappelle quand même que l'opposition continue.
01:47 Donc moi je m'interroge, c'est un pari et c'est un pari risqué dans la mesure où les
01:53 Républicains sont tout sauf alignés sur cette question.
01:56 On l'a vu d'ailleurs, il y a déjà eu une frange des Républicains qui ont rejeté
02:00 cette main tendue.
02:01 Alors justement Charlotte Dornelas, est-ce que ça représente une sorte de fébrilité
02:05 de la part du gouvernement qui cherche à tout prix à bien caler les voix et l'air pour
02:10 obtenir une majorité à l'Assemblée nationale ?
02:12 Une fébrilité ou un certain réalisme.
02:15 C'est-à-dire que c'est du calcul du nombre de députés qu'il faudra avec le risque,
02:19 en plus il faut être équilibriste parce qu'en effet LR n'est pas un bloc, ils ne sont pas
02:22 tous d'accord.
02:23 Donc ils répondent à certains au LR au risque d'en voir décrocher certains dans leur propre
02:27 majorité.
02:28 Or tout se joue aux députés prêts et donc en effet on assiste à un spectacle, je suis
02:33 100% d'accord, c'est ce qui m'a le plus marqué ces derniers jours, on assiste à un spectacle
02:38 où finalement c'est de la négociation aux députés prêts alors qu'on affiche que de
02:42 l'intransigeance devant la rue avec une opposition extrêmement composite et de nombreuses questions
02:48 qui sont posées dans la rue dont d'ailleurs parfois on a du mal à saisir tous les contours
02:53 et notamment les contours plus larges que l'opposition à la réforme des retraites
02:58 elle-même.
02:59 Ça c'est vrai mais il n'empêche qu'on voyait Elisabeth Borne, on commentait il y a encore
03:03 quelques jours l'intransigeance d'Elisabeth Borne la veille de la nouvelle manifestation
03:07 et là tout à coup ça se débloque pour quelques députés LR qui n'est pas non plus la force
03:12 politique la plus représentative aujourd'hui dans le pays donc c'est étonnant de voir
03:16 le fossé se creuser entre le calcul à l'Assemblée que je comprends, c'est-à-dire qu'ils n'ont
03:20 pas trop le choix en fait en réalité, que de faire ce calcul-là et l'opposition de
03:25 la rue qui semble inexistante.
03:27 Restons sur les LR.
03:28 Dans leur tête.
03:29 Oui, les LR ils en veulent encore plus Géraldine Vosner.
03:33 Certain.
03:34 Pour faire ce que dit Olivier Marleix ce matin dans le Figaro, il réclame encore des inflexions
03:36 pour ceux qui notamment ont commencé à travailler à 16 ou 17 ans.
03:40 Est-ce qu'elle a encore des cartes dans son jeu ?
03:43 En fait c'est tout le problème c'est que là on est en train de ça y est je pense qu'on
03:47 a perdu de toute façon l'opinion publique qui n'y comprend plus rien et tout le monde
03:50 se comporte comme si 43 annuités c'était un plafond, c'était quelque chose qu'il fallait
03:57 jamais dépasser.
03:58 Je rappelle que ça n'a jamais été le cas.
04:01 C'est l'un des prérequis.
04:02 En fait c'est un plancher 43 ans.
04:04 Aujourd'hui il y a des gens qui travaillent jusqu'à 62 ans certes mais qui cotisent 45
04:11 annuités.
04:12 Ça existe donc c'est vrai que cette réforme là va plutôt réduire le nombre de gens
04:17 en général qui doit travailler jusqu'à 45 ans.
04:20 En gros là c'est l'assurance que ceux qui ont commencé à travailler jeunes ils ne
04:23 travailleront pas plus de 44 ans voire plutôt moins ce qu'a annoncé la ministre ce week-end.
04:29 On a perdu complètement ça de vue et les républicains renient complètement leurs
04:34 engagements précédents.
04:35 Ils vous disent que les circonstances ne sont pas les mêmes.
04:40 Et puis ce qu'on retient aussi c'est quand même la clause de revoyure promise par Elisabeth
04:45 Borne en 2027.
04:46 En gros elle a déjà annoncé à faire une réforme qui soit un petit peu consistante.
04:50 Elle dit de toute façon il faudra remettre ça sur la table, on renvoie ça au prochain
04:54 président à la prochaine élection présidentielle.
04:56 - Mais ce qui est étonnant c'est que les LR en effet répondent que les circonstances
05:00 ne sont pas les mêmes.
05:01 Ils répondent même plus dans le détail en tout cas pour ceux qui ont changé d'avis
05:04 en tout cas en apparence.
05:05 Ils répondent qu'eux ils prévoyaient une réforme des retraites dans un projet plus
05:08 global de société.
05:09 Sauf que depuis le début de ce débat, pardon, mais le projet global de société personne
05:13 ne l'impose dans le débat.
05:14 - Vous voulez parler de quoi ? Des questions de démographie ?
05:16 - Par exemple la question du travail lui-même, la question de l'assistanat, en tout cas dans
05:23 leur bouche c'est comme ça que c'est dit, toutes ces questions-là n'apparaissent pas
05:27 dans le débat et tout le monde se focalise en effet sur des chiffres, un nombre d'annuités,
05:31 entre l'âge, l'annuité, l'âge de départ, l'âge de commencement du travail, si bien
05:36 qu'à la fin même eux je pense sont perdus dans ce dont ils parlent et dans les revendications
05:40 qu'ils ont.
05:41 Donc en effet on ne sait plus ce qu'a lâché Elisabeth Borne, ce qu'elle va lâcher, ce
05:45 qu'elle a lâché avant Noël, ce qu'elle lâchera avant Pâques.
05:48 - Donc on en est réduit finalement à un calcul purement arithmétique pour savoir si...
05:53 - On a vraiment l'impression que le calcul est de tous les côtés en même temps et
05:56 puis en effet il y a les forces qui dans le fond à la fois la France Insoumise qui elle
06:00 table plus sur la rue et le Rassemblement National qui continue sa stratégie de parlementarisme
06:08 sage et raisonnable on va dire dans la séquence, mais c'est clair que sur la question des retraites
06:13 franchement bon courage pour s'y retrouver.
06:15 - La journée de mobilisation de masques, elle peut changer quelque chose Géraldine
06:17 Fausse-Naire ?
06:18 - Je ne sais pas, je pense qu'il est trop tôt.
06:21 Là maintenant j'ai l'impression que l'enjeu quand même pour la rue c'est le retrait de
06:25 cette mesure d'âge et puis il n'y a pas autre chose parce que les avancées encore une fois
06:28 ont déjà été données, pas à la rue mais aux Républicains.
06:33 Donc une retraite à 1200 euros brut pour tous c'était quand même un sacré morceau qui
06:38 a été lâché dès le départ.
06:40 Étant donné que la motivation de cette réforme c'est quand même de préserver un équilibre
06:46 financier du système, personne ne parle plus d'argent, voilà il y a des poches sans fin,
06:51 on n'y est plus vraiment déjà parce qu'elle permet de faire 19 milliards d'économies,
06:57 les concessions qui ont été lâchées représentent déjà quasiment 9 milliards, l'équilibre
07:02 il était à 12-13.
07:03 - Il faudrait pas que ça coûte de l'argent à l'arrivée cette histoire.
07:05 - D'où la clause au voyeur, parce que de toute façon on sait déjà que cette réforme
07:08 ne tiendra qu'un petit nombre d'années en fait.
07:11 - Alors du côté des oppositions il ne faut pas s'attendre à autre chose qu'une partition
07:15 écrite à l'avance, je crois qu'on peut le dire, guerre de tranchées, coup d'amendement
07:18 de la part de la NUPES.
07:20 Moi je me dis peut-être une stratégie peut-être un petit peu plus subtile du côté du Rassemblement
07:24 National et de Marine Le Pen qui va en profiter pour afficher sa fibre sociale sans tomber
07:29 dans l'obstruction systématique.
07:31 C'est le sentiment que vous avez également Charlotte Darnelas ?
07:33 - Oui en effet, elle fait ça d'ailleurs depuis les élections législatives, il y a une stratégie
07:38 de sérieux à l'Assemblée Nationale, pas de débordement et de discussion et en effet
07:44 c'est-à-dire que comme la question même au sein des... enfin depuis la gauche très
07:51 composite elle aussi jusqu'aux républicains, toutes les revendications se font sur le terrain
07:54 social donc elle nage dans une eau qu'elle a revendiquée on va dire pendant toute la
08:01 campagne donc en effet la séquence c'est probablement pour elle en tout cas entre autres
08:06 qu'elle est la meilleure.
08:07 - La possibilité de paraître comme la vraie force d'opposition "raisonnable" entre guillemets
08:12 à côté du...
08:13 - Oui la force de l'ordre ce qui est original en l'occurrence mais oui oui complètement.
08:18 - Charlotte Darnelas ?
08:19 - Disons qu'elle a deux atouts, le premier c'est la lisibilité, c'est l'une des seules
08:24 en tout cas qui n'a pas varié dans ses positions sur les retraites, je veux dire ce qu'elle
08:29 a proposé pendant la campagne présidentielle c'est ce qu'elle propose aujourd'hui c'est-à-dire
08:33 la retraite à 60 ans pour ceux qui ont travaillé, commencé à travailler jeunes, à 62 ans pour
08:38 les autres, elle a toujours dit "j'assume que ça ça coûte 10 milliards c'est un choix
08:45 de société etc."
08:46 donc c'est assez lisible pour les gens, elle n'a pas varié.
08:50 Et le deuxième atout, effectivement c'est le mode opératoire, c'est ce choix de ne
08:55 pas déposer beaucoup d'amendements, je crois que c'est moins d'une centaine d'amendements,
08:59 de ne pas rentrer dans le... et puis de taper sur LFI qui organise le chaos selon elle.
09:06 Je pense qu'elle joue, alors à court terme elle est un peu invisibilisée dans les débats,
09:11 mais à long terme oui c'est un choix plutôt pertinent.
09:13 Alors deux mots sur le régime spécial des parlementaires, parce que ça fait un petit
09:17 peu de buzz là...
09:18 Vous avez regardé Charles de Courson.
09:19 Ces derniers temps, oui ou non, est-ce que ça sera l'occasion de réformer le système
09:27 des retraites des parlementaires ?
09:28 Bah ça devrait, ça devrait, c'est une évidence, on ne peut pas demander des efforts aux français,
09:33 voir des gens qui vont dans la rue légitimement s'inquiéter de mesures qui vont les impacter
09:41 directement sans qu'on touche à ce régime spécial.
09:45 J'entendais des ministres ce matin sur les matinales des radios qui disaient encore "oui
09:49 nous supprimons les régimes spéciaux".
09:51 Bah non c'est pas vrai, il n'y a qu'une partie des régimes spéciaux qui sont réformés,
09:57 pas complètement supprimés, il y a la clause du grand-père.
09:59 Non c'est assez timide, effectivement oui, le régime des parlementaires devrait sauter.
10:04 Charlotte Dornella, c'est un geste politique nécessaire selon vous ?
10:07 Bah oui, je ne vois même pas comment ils arrivent à se poser la question, il semble
10:10 qu'il existe un débat...
10:11 La preuve !
10:12 Non mais je suis d'accord, je trouve ça complètement dingue, et surtout ce qui est marrant c'est
10:16 que quand le sujet est arrivé, on a senti la crispation, c'est-à-dire qu'il y a des
10:20 sujets auxquels on ne touche pas alors qu'en effet la thématique et la demande est celle
10:24 de l'effort depuis le début, oui ça me paraît absolument évident.
10:28 Il faut en discuter.
10:29 Pour conclure, en plein débat sur cette réforme, voilà que l'un des ministres en première
10:34 ligne, Olivier Dussopt, qui était l'invité de Sonia Mabrouk tout à l'heure, fait l'objet
10:36 d'accusations de favoritisme de la part du PNF.
10:39 Alors on ne va pas rentrer dans le détail, il y a une enquête qui a été ouverte en
10:42 2020 qui ressurgit.
10:44 Est-ce que ça ne vous fait pas penser à quelque chose, Charlotte Dornella ?
10:47 Ah bah si, c'est-à-dire que les affaires qui surgissent au bon moment, c'est-à-dire
10:50 au plus mauvais moment pour eux, au-delà de la question du timing de la sortie de
10:58 cette information, c'est la question de la vie politique elle-même.
11:02 C'est-à-dire que ce n'est plus possible en fait, sur des affaires que personne ne
11:06 maîtrise, des dossiers auxquels personne n'a accès évidemment, des accusations qui
11:10 sont évidemment infamantes sans qu'elles soient vraiment très précises et sans qu'on
11:14 puisse les comparer les unes aux autres même dans leur gravité et qui ont pour but d'arriver
11:20 au pire moment et d'empêcher d'être la chose de plus qui va empêcher le débat de
11:23 fond, ça rend la vie politique impossible et le choix de la vie politique aussi impossible.
11:28 On parlait juste avant du régime spécial de la retraite des parlementaires.
11:32 On peut demander beaucoup d'efforts aux parlementaires etc.
11:36 Mais il faut à la fin qu'il y ait des raisons aussi de s'engager en politique et si vous
11:40 êtes attaqué sur la question de la justice, attaqué sur le train de vie que vous avez,
11:45 attaqué sur la manière dont vous défendez vos idées dans la vie politique de manière
11:48 générale et quel que soit d'ailleurs votre bord, bah plus personne n'ira.
11:51 En un mot, Geraldine Vosner, ça fragilise malgré tout Olivier Dussopt ?
11:54 Je ne sais pas.
11:56 J'observe en tout cas que certains médias, certaines mêmes institutions judiciaires
12:01 sont devenus des acteurs politiques à part entière et ça pose une vraie question sur
12:08 le fonctionnement de la démocratie.
12:09 Merci, merci Charlotte Dornelas, merci Geraldine Vosner.
12:13 Culture Média, juste après.