Deuxième nuit de chaos : le débat de Charlotte d’Ornellas et Arnaud Benedetti

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Chaque jour, des invités opposent leur point de vue sur l'actualité politique. Ce jeudi, Charlotte d’Ornellas et Arnaud Benedetti.
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Transcript
00:00 Et à 8h45 sur Europe 1, place au Club de la presse, Dimitri Pavlenko.
00:04 Deuxième nuit de chaos et des meutes en Ile-de-France, mais pas seulement.
00:07 Incendie, pillage de magasins, commissariats attaqués, mairies dégradées.
00:11 Au pluriel tout ça bien sûr.
00:12 Un tir de fusil à pompe, caméras de vidéosurveillance détruites,
00:16 des distributeurs de billets attaqués à la disqueuse.
00:18 La prison de Freyne a siégé pour tenter de libérer des prisonniers.
00:21 Des faits très graves ont été commis cette nuit en France.
00:24 Les dégâts sont considérables.
00:25 L'ordre public est-il en train de vaciller comme en 2005 ?
00:28 On se pose la question à la vue de certaines images.
00:31 Je pense à ces émeutiers par exemple ressortant d'un commissariat
00:34 avec de l'équipement de police intégrale.
00:35 Les gilets pare-balles, les képis, les bottes, les matraques et même les armes à feu.
00:41 Bonjour Charlotte Dornelas.
00:42 - Bonjour Dimitri.
00:43 - Bienvenue sur Europe 1, Arnaud Bénédetti également.
00:45 - Bonjour à vous.
00:45 - Rédacteur en chef de la Revue politique et parlementaire.
00:48 C'est peu dire Arnaud que les appels au calme n'ont pas été entendus.
00:52 - Clairement, mais si vous voulez on a le sentiment qu'on est au début d'une réplique
00:57 de ce qu'il y a été en 2005 avec un facteur supplémentaire,
01:01 parce qu'il était balbutiant en 2005, c'est le facteur des réseaux sociaux
01:06 qui entraîne certainement une surenchère entre les différentes bandes
01:10 qui mettent en coupe réglée les cités dans divers coins de l'île de France,
01:14 au-delà d'ailleurs de l'île de France, puisqu'il y a aussi un certain nombre de villes.
01:17 On n'a vu qu'à Toulouse ou je crois à Lyon également.
01:21 - La Seine-Saint-Denis a été vraiment, pratiquement toutes les villes de Seine-Saint-Denis.
01:24 On émaillait la soirée.
01:27 Le problème c'est que ces appels au calme ont certainement aussi peut-être,
01:31 c'est une hypothèse, ne soyons pas toujours trop pessimistes,
01:35 mais enfin il faut quand même la poser, ont peut-être été aussi
01:38 finalement interprétés par ceux qui la nuit s'affrontent aux forces de l'ordre
01:44 comme un aveu de faiblesse de la part de l'exécutif.
01:46 On voit bien que l'exécutif marche sur des oeufs, il est sur une ligne de crête
01:50 entre un langage qui finalement vise à apaiser,
01:55 mais en même temps il va falloir qu'il fasse preuve de fermeté
01:57 parce que cette situation est inacceptable et elle est surtout inacceptable à mon sens
02:01 aux yeux d'une grande partie de l'opinion publique.
02:02 - Alors, et ne perds pas de temps, Arnaud Bénédetti va au cœur du sujet.
02:05 Réécoutons les propos d'Emmanuel Macron qui sont aujourd'hui abondamment commentés.
02:10 Je vous propose de l'entendre.
02:11 - Les dernières heures ont été marquées par des scènes de violences contre le commissariat
02:16 mais aussi des écoles, des mairies et donc au fond contre les institutions et la République.
02:22 Et celles-ci sont absolument injustifiables.
02:27 - Voilà, ça c'est Emmanuel Macron il y a quelques minutes
02:29 en ouverture de ce comité interministériel qui s'est inauguré à Beauvau.
02:33 Il y a quelques minutes, on fait le point sur la situation en France ce matin.
02:37 Hier, il y avait ces mots qui ont beaucoup choqué certains
02:40 où le président de la République évoquait un geste inexcusable de la part du policier
02:45 semblant prendre fait et cause pour la victime et sa famille.
02:50 Est-ce que tout ça n'aurait pas joué un rôle, je prolonge la réflexion que menait Arnaud Bénédetti,
02:55 Charlotte Dornelas, un rôle dans le déchaînement de la violence ?
02:57 - Je pense qu'il y a deux choses, à la fois les propos d'Emmanuel Macron
03:01 qui qualifient le geste du policier d'inexcusable et surtout d'inexplicable.
03:07 C'est-à-dire qu'il clôt l'enquête avant même qu'elle ait commencé,
03:11 avant même j'imagine d'avoir les éléments et surtout...
03:14 - Inexplicable qu'on ne peut expliquer.
03:15 - C'est ça qu'on ne peut expliquer alors que c'est précisément ce que va essayer de faire la justice
03:19 en l'occurrence en entendant à la fois les différents témoins, le policier lui-même, etc.
03:24 Et par ailleurs, le chef de l'État, en décidant au cours de l'enquête d'intervenir dans une affaire,
03:29 se rend potentiellement coupable de ne jamais parler dans les autres.
03:32 Donc pourquoi là, pourquoi cette fois-ci ?
03:34 Quel est le message qu'il veut faire passer ?
03:36 Et par ailleurs, aux forces de l'ordre elle-même,
03:38 c'est-à-dire qu'il intervient uniquement quand il y a un policier qui est mis en cause
03:41 et pas dans les autres affaires qu'on commente genre 12 fois par jour
03:46 étant donné les horreurs qui arrivent dans ce pays.
03:48 Donc ça c'est une chose.
03:49 Maintenant, est-ce que cette parole plutôt qu'une autre,
03:52 comment dire, génère encore plus de violence ?
03:55 Là je crois qu'on se paye un peu de mots.
03:56 On a l'impression que tous les émeutiers de banlieue sont branchés sur la télévision toute la journée
04:02 pour savoir ce qu'ils vont faire le soir.
04:03 Non pas du tout.
04:03 - Vous pensez que dans les exactions commises hier,
04:05 Nahel n'avait pas toujours sa place si je peux dire.
04:09 - C'est-à-dire que si Nahel a sa place dans la tête de tous les émeutiers d'hier,
04:12 il faut m'expliquer ce qui se passe le 14 juillet, le 31 décembre, les soirs de match de foot.
04:16 C'est-à-dire que tout est prétexte,
04:18 même une perquisition dans une cave, au fond d'une banlieue est prétexte à des émeutes.
04:22 Là simplement elles sont toutes ensemble et évidemment ils ont un prétexte qui est plus fort que les autres.
04:27 Ils s'engraignent, ça c'est sûr, sur les réseaux sociaux.
04:29 Donc il y a en plus un concours de qui fera le truc le pire.
04:32 Et en effet les autorités appellent au calme.
04:34 Quand vous êtes une autorité, vous n'appelez pas des émeutiers au calme,
04:37 vous imposez le calme aux émeutiers en fait.
04:39 Et depuis hier on sent la panique, la peur, on ne sait pas les gérer.
04:43 On a des mots d'une douceur et un commentaire complètement hallucinants
04:46 quand on voit la capacité, parfois même d'injure publique, qui pèse sur d'autres dans le débat public.
04:53 - Arnaud Bénédetti, phrase entendue hier à la télévision dans la bouche de David Guiraud,
04:57 donc député insoumis, je le cite,
05:00 "Je n'appelle pas au calme mais à la justice, il se passera ce soir ce qu'il doit se passer."
05:05 Donc il parlait, il était aux alentours de 17h.
05:08 Est-ce que vous pensez que les insoumis retirent un bénéfice politique de cette affaire Nahel ?
05:14 - Alors c'est un vrai problème d'abord qu'un parlementaire, un représentant de la nation,
05:18 n'appelle pas au calme dans une situation d'extrême tension.
05:23 Mais sur le fond, ils sont cohérents avec eux-mêmes.
05:26 J'allais dire, ils sont dans leur ligne, c'est-à-dire cette ligne politique d'alliance
05:32 avec un certain nombre de groupes dans les quartiers
05:36 qui constituent aussi d'une certaine façon leur clientèle.
05:39 - Elle est formelle ou elle est en subjective ?
05:41 - Elle est informelle, elle n'est évidemment pas explicitée,
05:44 on ne veut pas la mettre en scène parce qu'on sait qu'elle peut d'une certaine manière,
05:49 disons, crisper l'opinion publique.
05:52 Mais en tout cas, j'allais dire, il y a une logique
05:55 dans le comportement tout à fait contestable de M. Guiraud et des insoumis.
06:00 - Ensuite, pardonnez-moi Arnaud Bédétti, mais il y a cette image
06:03 où l'on voit le député Carlos Bilongo se rendre au contact des émeutiers,
06:06 il se fait jeter.
06:08 - Mais la réalité, c'est que je pense qu'ils font un très mauvais calcul.
06:12 C'est que globalement, l'opinion publique n'acceptera pas
06:17 les scènes de désordre auxquelles on a assisté depuis 48 heures,
06:21 surtout que ces scènes risquent de se répéter malheureusement
06:24 dans les heures qui viennent, surtout ce soir après la marche blanche à Nanterre.
06:28 Donc le calcul politique est un calcul qui vise,
06:31 conformément à un logiciel un peu révolutionnaire,
06:34 à essayer de déstabiliser l'exécutif,
06:38 qui là aussi, à mon sens, n'a pas forcément la rhétorique
06:42 et l'expression indispensables pour calmer la situation.
06:45 C'est le moins qu'on puisse dire, mais le calcul à moyen terme
06:49 de la France Insoumise me paraît un calcul risqué sur le plan électoral
06:53 et sur le plan politique. Encore une fois, ils sont enfermés
06:56 dans leur logiciel, et leur logiciel est d'une certaine manière
06:59 peut-être leur pire ennemi. - Donc j'ai envie de vous dire, comme d'habitude,
07:01 tout ça fait le jeu de Marine Le Pen, qui dénonçait hier
07:04 les deux précipitations, celle d'Emmanuel Macron,
07:07 celle de Jean-Luc Mélenchon, Charlotte Dornelas.
07:10 - En l'occurrence, elle a raison, mais je pense que ce n'est pas la même motivation.
07:13 C'est-à-dire que Jean-Luc Mélenchon réagit extrêmement vite,
07:16 parce que ça y est, il peut réactiver son logiciel, la police tue
07:19 et excite tout le monde, parce que lui-même a expliqué
07:22 qu'il refusait de céder à l'injonction
07:25 des chiens de garde qui allaient lui demander d'appeler au calme.
07:28 Ce sont ses mots à lui. Jean-Luc Mélenchon, lui, exige la justice,
07:31 la fin de l'action en justice, etc.
07:34 Il est dans son logiciel pur juge,
07:37 je suis absolument d'accord, il réagit toujours comme ça.
07:40 C'est évidemment à la fois précipité,
07:43 c'est quasiment lunaire, c'est-à-dire que
07:46 quand vous voyez des députés de la France Insoumise qui, en effet,
07:49 dans les commissariats, vérifient des conditions de garde à vue,
07:52 vous voyez, on a tous vu les images de ce qui s'est passé dans la nuit,
07:55 vérifier les conditions de garde à vue des émeutiers, là c'est très clair,
07:58 ce sont des émeutiers qui le voient, donc en fait ils affichent une proximité,
08:01 peut-être la première fois, et là c'est très clair, c'est un encouragement,
08:04 c'est ni plus ni moins un encouragement à l'émeute.
08:07 Mais en effet, la France Insoumise qui prétend se dresser
08:10 contre un système, on voit qu'Emmanuel Macron,
08:13 sa précipitation, et même le commentaire extrêmement bienveillant
08:16 médiatique global sur ce qui est en train de se passer
08:19 et les raisons de la colère qu'on analyse froidement alors qu'on accuse
08:22 de récupération la moindre personne qui fait un tweet sur une autre affaire,
08:25 on sent que là pour le coup, c'est pas le
08:28 logiciel politique, c'est la peur, c'est la crainte,
08:31 on sent que tout le monde a peur, alors que précisément, c'est un rapport
08:34 de force qui est en train, encore une fois, de s'installer dans les banlieues
08:37 et clairement il n'y a que les émeutiers qui le mènent,
08:40 là c'est très clair. - À l'instant, Éric Zemmour,
08:43 son compte Twitter, appelle à la mise en place de l'état d'urgence
08:46 dès ce soir, on court tout droit vers
08:49 cette situation qui est une répétition, comme vous le disiez,
08:52 redites un peu de la situation d'il y a 18 ans, 2005.
08:55 - Oui, alors ça peut être une réponse en tout cas
08:58 si les émeutes perduraient, je ne suis pas
09:01 sûr que dans l'immédiat, l'exécutif
09:04 use de ce dispositif,
09:07 même si... - Qu'est-ce que ça changerait d'ailleurs très concrètement, Arnaud Bénédicti ?
09:10 - Ça changerait que, je veux dire, ça permettrait de donner des moyens
09:13 aux forces de l'ordre de pouvoir mieux contenir
09:16 la situation sur le terrain, et ça c'est
09:19 quand même quelque chose d'essentiel. On a vu que l'état d'urgence, malgré tout,
09:22 en 2005, avait permis de garroter
09:25 la crise. Alors, on est dans une situation un peu
09:28 différente de celle de 2005, parce que d'abord la temporalité
09:31 n'est pas la même. En 2005, on était à la veille de l'hiver,
09:34 et d'ailleurs le gouvernement à l'époque priait pour que l'hiver arrive vite
09:37 pour mettre un terme à cette situation. Là, on est au cœur de l'été.
09:40 Ce qui rend encore plus difficile vraisemblablement la situation,
09:43 c'est que l'été est une saison propice aux émeutes urbaines,
09:46 donc on se retrouve aujourd'hui dans cette situation. Donc on peut imaginer
09:49 qu'à un moment donné, le gouvernement n'ait pas d'autre choix que de recourir
09:52 à l'état d'urgence si cette situation perdurait. Et encore une fois,
09:55 il y a peu de chance qu'elle s'arrête dans les 24 heures qui viennent.
09:58 - Charlotte Dornelas ? - Non mais la question de l'état d'urgence, moi, ce que je vois
10:01 à la fois dans le comportement sur le terrain, dans les consignes
10:04 qui sont reçues, et là où des policiers témoignent que, encore une fois,
10:07 on leur dit, genre dans la journée, "Passez pas dans tel ou tel quartier
10:10 parce que les policiers eux-mêmes sont vécus par les autorités comme
10:13 une éventuelle provocation", c'est vous dire "On en est rendus".
10:16 C'est-à-dire que si vous ne voulez pas assumer cet ordre-là,
10:19 l'état d'urgence peut donner des moyens supplémentaires, encore faut-il donner
10:22 l'ordre de s'en servir et de le mettre en place.
10:25 Et là, encore une fois, on revient sur la question de que veulent exactement
10:28 les autorités politiques dans cette situation ?
10:31 Est-il seulement capable d'assumer, de vouloir gérer la situation
10:34 ou attendent-ils que ça passe ? Et alors, attendre que ça passe au début
10:37 du mois de juillet, ça peut durer longtemps, je pense.
10:40 - Merci Charlotte Dornelas, merci Arnaud Bénédetti,
10:43 le rédacteur en chef de la revue politique et parlementaire, et je vous rappelle,
10:46 donc, marche blanche à 14h, la maman de Noël
10:49 qui appelle à marcher pour son fils, pour la révolte
10:52 également, des mots qui pèsent lourd quand même dans le contexte
10:55 actuel, évidemment. On va continuer d'en parler toute la journée sur Europe 1,
10:58 punchline 18h, Laurence Ferrari, à midi, Romain Désart
11:01 vous prendrez La Parole, 01.80.

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