• l’année dernière
Imaginez grandir avec une belle mère violente et maltraitante, qui vous prive de nourriture et vous humilie quotidiennement. Selon France Info “Chaque année, 50 000 plaintes sont déposées à la suite de violences physiques perpétrées sur des enfants”. Ces enfants grandissent dans la peur et deviennent des victimes de l’autorité parentale.

De la séparation brutale avec sa mère restée au Congo à la nouvelle vie de son père, Tabitha s’est longtemps sentie laissée pour compte. Elle nous raconte son histoire.

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😹
Amusant
Transcription
00:00 rentre de l'école, j'ai pas à manger. Je vois bien qu'elle a à manger parce que
00:03 je vois les assiettes sales mais il n'y a rien dans le frigo ni dans le micro-ondes
00:06 pour moi. Chaque fois, elle me faisait la remarque "toi ici, t'es un enfant bas, ta mère
00:10 elle achète pas de nourriture, ce que moi j'achète c'est pour mes enfants, si tu veux
00:14 manger, t'as qu'à aller te prostituer". Il y a des soirs où je dormais à famille. Le seul
00:18 repas, je l'ai pris à la cantine à midi. Je suis née en Afrique, en République du
00:24 Congo. Mes parents, à ma naissance, ils étaient déjà séparés. Mon père était
00:28 déjà en France pour terminer ses études donc moi je suis restée vivre avec ma
00:32 mère. Je savais que j'avais un papa qui était en Europe mais que pour le moment
00:36 je devais rester avec ma mère. En 2004, mon père a réussi à m'avoir un visa et un
00:42 passeport pour que je puisse voyager et le rejoindre. Ma mère m'a informé, elle m'a dit
00:46 que je vais rejoindre mon père en France, que je vais vivre avec lui et j'ai pas de
00:52 souvenirs qu'elle m'ait expliqué qu'elle ne venait pas. Donc pour moi, j'allais
00:56 rejoindre mon père et quelques temps après, ma mère allait me rejoindre. Le but
01:00 que mes parents voulaient atteindre en me faisant venir en France, c'était tout
01:03 simplement que j'ai une vie meilleure, que je puisse avoir accès peut-être à une
01:07 meilleure scolarité, un meilleur avenir. Moi je comprenais pas vraiment ce qui se
01:10 passait. En tant qu'enfant, je ne comprenais pas qu'il y allait avoir une
01:13 séparation. Une fois arrivé à Dijon, il ouvre la porte et là je vois une petite
01:17 fille, une métisse, courir vers mon père et crier "papa". Donc j'ai pas trop compris
01:24 ce qui se passait, je sais ce que papa veut dire. Donc je me suis dit "attends, il y a
01:28 quelque chose que j'ai pas saisi" et de là il y a une femme du coup qui était
01:31 blanche qui s'approche de mon père et je pense que c'est là que j'ai réalisé que
01:34 en fait il y a une partie du puzzle que je n'avais pas. Elle c'est qui ? Ok donc
01:39 elle c'est, je dois l'appeler maman je pense, elle c'est ma petite soeur. Je
01:43 réalise pas. Je pense que j'étais juste confuse mais je l'ai très vite accepté et
01:47 je me suis surtout dit que j'avais pas le choix quoi. J'ai très vite pris mes repères.
01:50 La femme de mon père elle était super gentille avec moi, elle me mettait à l'aise
01:55 donc j'avais pas de soucis particuliers. Bon ma petite soeur elle était encore
01:59 petite à ce moment là, elle avait deux ans donc elle faisait ses petits caprices
02:02 mais on s'aimait. Elle m'a accepté comme grande soeur, je l'ai accepté comme
02:05 petite soeur donc sur ce côté là on n'a jamais eu de soucis. Donc moi j'étais
02:10 heureuse. Je sentais pas spécialement le manque de ma mère parce que je pense
02:17 vraiment que je ne réalisais pas. Une à deux fois par mois mon père il faisait
02:21 le nécessaire pour qu'on aille dans une cabine téléphonique, qu'on puisse
02:24 appeler et donc j'avais quand même des nouvelles de ma mère. Elle me disait
02:27 oui est-ce que tout se passe bien ? Moi j'étais là oui tout va bien c'est super
02:30 etc etc donc il n'y avait pas de soucis au tout début. Je sais pas spécialement
02:35 ce qui s'est passé entre mon père et du coup ma première benne mère mais il
02:41 est arrivé qu'un jour ils nous ont fait asseoir ma petite soeur et moi pour nous
02:45 expliquer qu'ils allaient se séparer. De là j'ai vécu avec mon père pendant un
02:49 an, nous deux seulement nous deux. On faisait plein d'activités quand je
02:52 travaillais pas. J'étais tout le temps avec mon père. A la fin de ces un an, un jour comme ça
02:56 il est venu me chercher au soutien scolaire et il était avec du coup une
03:01 autre femme et du coup ça a été ma seconde belle-mère. On m'a présenté cette
03:06 femme comme étant la nouvelle femme de mon père donc je l'ai accepté. Et puis
03:09 tout a commencé à changer avec cette dame. On ne dialoguait plus, chacun était
03:12 dans son coin. Elle était devenue un peu méchante. En fait elle criait sur moi pour
03:16 rien. Il suffisait par exemple que j'ai pas fait quelque chose quand même, la
03:19 demander. Elle criait, après il y avait des insultes. C'était espèce d'imbécile, sale
03:25 fille, nanani nanana alors que avant il n'y avait pas du tout ce genre de vocabulaire.
03:29 Mais encore une fois je ne réagissais pas, je laissais les choses se faire etc.
03:34 Et mon père a fini par être muté en Ile-de-France pour le travail. Donc de là
03:39 je suis restée toute seule avec cette dame. Et là il y a eu vraiment un
03:44 changement très très radical. Par exemple je rentre de l'école, j'ai pas à manger.
03:50 Je vois bien qu'elle a mangé parce que je vois les assiettes sales mais il n'y a
03:52 rien dans le frigo ni dans le micro-ondes pour moi. Je n'ose pas demander, je n'ose pas
03:56 dire où est mon repas, je ne parle pas. Donc je dors, par exemple il y a des soirs où je
04:01 dormais à famille, je n'ai pas mangé. Le seul repas je l'ai pris à la cantine à
04:05 midi. Ensuite il y a eu les bérimades, on me crie dessus pour rien, on m'insulte.
04:11 Vraiment c'est des mots très très violent, du genre "enfant bâtard", "regarde ta mère
04:17 elle t'a abandonné, elle t'a laissé toute seule ici avec ton père, est-ce que tu
04:20 penses qu'une mère qui t'aime elle peut faire ça, ta mère elle t'aime pas,
04:23 personne ne t'aime etc." C'est vraiment des choses comme ça. Et je ne comprenais pas.
04:27 Et de là vu que mon père n'était pas là, n'était plus là, j'avais plus de
04:31 contact avec ma mère en fait. Enfin le rituel d'appeler avec les cabines
04:36 téléphoniques, ça n'existait plus parce que mon père n'était pas là pour le
04:39 faire, elle ne le faisait pas. Après ça, la violence a augmenté dans le sens où par
04:44 exemple quand je revenais de l'école, lorsque je sonnais à la porte, parce que
04:47 j'avais pas les clés, j'étais encore en seine main à ce moment là, lorsque je
04:50 sonnais à la porte, elle ne venait pas m'ouvrir. Donc il y a des fois où j'attendais
04:53 qu'elle vienne ouvrir à la porte. Je sonnais, je sonnais, je l'entendais
04:59 dans la maison, je l'entendais faire des mouvements et tout mais elle ne venait
05:02 pas m'ouvrir à la porte. Il y a aussi eu des coups. En fait, ça montait crescendo.
05:06 Au début c'était les violences verbales mais après ça allait être des petites gifles.
05:10 "Oui, pourquoi tu as fait ça comme ça?" Allez hop, une gifle. Je sais qu'un jour, elle
05:15 criait sur moi, elle criait sur moi, j'ai trébuché dans les escaliers. Franchement, je pense
05:18 que c'est des souvenirs que ma mémoire, elle a effacé au fil du temps. Il y a eu des coups,
05:22 c'était des gifles. Et puis c'était pas des gifles qu'on donne à un enfant, c'était
05:26 des vrais, vrais, vrais gifles comme si j'étais son égal. Et après, au fur et à mesure,
05:31 c'est vraiment à partir de ce moment-là que le manque de ma mère, il commençait à
05:35 être vraiment plus grand. Je me disais "mais en fait, ma mère, elle vient quand?
05:38 Quand est-ce que ça va se terminer? Ça devient trop, trop grave." Lorsque mon père,
05:43 il revenait certains week-ends de son travail, lorsqu'il revenait à Dijon, moi,
05:49 je faisais comme si tout allait bien avec ma belle-mère. Je voulais surtout pas qu'il
05:53 sache que ça n'allait pas parce que je me disais qu'il était loin, qu'il était sur Paris et que
05:57 s'il savait que ça se passait mal avec elle, peut-être que ça allait impacter du coup son
06:02 moral à lui là-bas, son travail. Et je voulais qu'il se dise que tout se passait bien. Donc
06:06 vraiment, mon père, je ne le montrais pas. Je ne le montrais pas, que j'étais pas heureuse,
06:11 que j'étais maltraitée, clairement. Et elle, de son côté, elle faisait comme si de rien n'était.
06:15 Et en plein milieu de mon année de sixième, donc mon père est revenu et il nous a dit "il faut
06:23 que vous rassemblez vos affaires parce que vous allez venir me rejoindre sur Paris dans les
06:29 événements". Encore une fois, j'ai accepté parce qu'on m'a pas demandé mon avis. On m'a pas dit
06:32 "est-ce que ça te dérange de changer d'école, de faire ceci, de faire cela". On m'a juste dit
06:36 "rassemble tes affaires, on s'en va". Donc de là, mon caractère, il a vraiment vraiment changé. En
06:42 fait, toute la violence que je pouvais recevoir à la maison, moi, je le rendais du coup à mes
06:47 camarades de classe. Donc j'étais devenue très très très turbulente, je me battais constamment,
06:52 que ce soit avec des garçons, des filles, je me battais, je me battais. En fait, je savais plus
06:57 m'exprimer, je répondais toujours par la violence parce que lui, à la maison, les violences ont
07:01 continué quand mon père n'était pas présent. En fait, il arrivait qu'elle ait à me crier dessus
07:06 devant mon père, mais je pense, vraiment je pense, je dis ça avec des pincettes, je pense que lui,
07:11 il voyait ça plutôt comme une réprimande qu'une mère peut faire à sa fille lorsqu'elle se comporte
07:16 mal. C'était rare qu'elle me tapait devant mon père ou qu'elle me parlait très très très mal
07:21 devant mon père. Donc voilà, donc les violences, elles ont vraiment vraiment continué, que ce soit
07:24 les insultes, que ce soit les coups. En fait, elle ne s'occupait pas de moi. Entre temps,
07:28 je me suis inscrite à l'athlétisme parce que j'avais besoin de me défouler, en fait, j'avais
07:32 besoin d'être le moins possible à la maison et du coup, j'avais supplié mon père de m'inscrire
07:36 à l'athlétisme. Donc je faisais de l'athlétisme et il m'était déjà arrivé en fait de ne pas être
07:40 performante pendant mes entraînements parce que tout simplement, je n'avais pas assez mangé. Et
07:44 donc là, je revenais de l'école, je me suis dit, je ne peux pas aller à l'athlétisme comme ça sans
07:49 manger, je suis, je dois manger. Il faut savoir qu'elle ne voulait pas que je touche à la nourriture
07:53 qu'elle, elle avait préparée ou de la nourriture qu'elle avait achetée. Donc à chaque fois,
07:57 elle me faisait la remarque, toi ici, tu es un enfant bâtard, ta mère, elle n'achète pas de
08:01 nourriture, tu ne manges pas ce que moi j'ai acheté, ce que moi j'achète, c'est pour mes enfants. Si
08:06 tu veux manger, tu n'as qu'à aller te prostituer et t'acheter de la nourriture. Alors tu demandes
08:10 à ton père de te donner de l'argent et de t'y racheter ta nourriture mais si c'est moi qui fais
08:14 les courses, tu ne manges pas. Donc c'était comme ça. Donc quand je voulais manger, je devais manger
08:17 en cachette mais là, à ce moment-là, en fait, je savais que je devais manger. Donc j'ai pris des
08:21 petits hamburgers qu'on chauffe rapidement. Je les ai mis à chauffer donc elle a dû entendre le
08:25 micro-ondes. Donc elle est venue, elle m'a dit qu'est-ce que tu manges, etc. Est-ce que c'est
08:29 toi qui l'as acheté, est-ce que c'est ta mère qui l'a acheté, est-ce que c'est, voilà. Donc moi,
08:33 je n'ai juste pas répondu, j'ai pris l'hamburger. Donc de là, elle l'a pris de ma main, il était
08:38 bouillant, elle l'a jeté sur moi, en fait, il était encore dans le plastique. Elle a jeté sur
08:43 moi donc le plastique, il a explosé donc au niveau de mon cou, j'avais une brûlure, ça m'a fait une
08:50 cloque avec le temps. Et quelques jours après, je devais aller chez la nièce à mon père parce que
08:53 du coup, c'est elle qui faisait venir des coiffeuses pour qu'elle puisse me coiffer vu que ma belle-mère
08:58 ne s'occupait pas du tout de moi à ce niveau-là. Et la coiffeuse, elle me dit "mais qu'est-ce que
09:02 t'as ?" Donc je lui ai dit, je me suis brûlée avec le fer à lisser, parce que j'ai essayé de lisser
09:07 mes cheveux mais ça se voyait que ce n'était pas du tout ça. Et ma soeur, je l'appelle ma soeur mais
09:11 c'est la nièce à mon père. Une fois que la coiffeuse, elle est partie, elle me demande "qu'est-ce qui
09:15 t'est vraiment arrivé ? Dis-le-moi etc." Et de là, je lui ai dit "écoute, c'est ma belle-mère, c'est
09:22 la femme de papa, elle m'a jeté l'hamburger sur moi parce qu'elle ne voulait pas que je meurs."
09:26 Donc elle a appelé mon père, elle lui a dit "écoute, si tu ne veux pas t'occuper de ta fille, tu me l'envoies,
09:31 reste avec moi. Si elle retouche encore une fois, du coup, à moi. Je viendrai moi-même chez elle et je
09:36 m'occuperai de son cas." Et mon père, il était choqué parce qu'il n'était pas du tout au courant de ce
09:40 qui s'est passé. De là, en fait, tous les week-ends, la nièce à mon père exigeait que presque tous les
09:45 week-ends, je me retrouve chez elle. Le temps passe, le temps passe, les années passent aussi. On arrive en
09:50 2020, entre temps, j'ai été diplômée, j'ai signé un CDI, j'ai pris mon appartement seule et pour moi,
09:58 je pensais que c'était la bonne solution de faire ça. Ici, je vais enfin être seule, je n'aurai plus
10:04 d'autorité etc. Mais là, en fait, ça a été comme une sorte de descente aux enfers parce qu'en fait,
10:09 j'étais toute seule, du coup, comme dans un épisode dépressif, en fait, j'étais pas bien, je pleurais
10:14 constamment, j'étais vraiment vraiment pas bien et je me suis dit "bon, en fait, je peux juste pas
10:19 continuer comme ça". J'ai cherché à voir une psychologue. On a commencé ma psychothérapie, je parlais
10:24 toujours à mon père mais c'était... on prenait des nouvelles, en fait, c'était pas très récurrent. On s'en
10:29 m'a donné des messages, par exemple, "une fois donne-moi pour savoir si tout allait bien etc." Avec ma mère,
10:33 j'avais pas du tout de contact parce qu'en fait, ce qu'il faut comprendre, c'est que pendant toute
10:40 mon enfance, j'ai été coupée d'aide parce que lorsqu'elle appelait, avec ma seconde belle-mère,
10:44 lorsqu'elle appelait, c'était tout un scandale. Pourquoi elle appelle chez moi ? Elle n'a qu'à
10:49 appeler sur le téléphone de sa fille etc. alors que moi, j'avais pas de téléphone avec mon jeune
10:53 âge. Donc ma mère, pour le bien en fait du foyer de mon père, elle avait tout simplement décidé
10:59 d'arrêter d'appeler. Et avec la psychothérapie, des fois j'envoyais des messages à ma mère pour savoir
11:04 si elle allait bien, prendre des nouvelles etc. Mais je me disais "mais je la connais pas cette
11:08 dame". En fait, pour moi, je connais pas cette dame. Je ressentais pas le moque de ma mère, vraiment,
11:12 c'était très troublant à dire. Et l'élément déclencheur, c'est qu'il y a eu le décès de mon grand-père,
11:18 de qui j'étais très très proche quand j'étais petite et j'avais beaucoup de souvenirs avec lui,
11:21 ça m'a vraiment fait du mal. Avec ma mère, ça nous a rapprochés parce que du coup, on s'appelait
11:26 souvent pour savoir comment ça allait se passer, les funérailles etc. Et de là, quand je parlais
11:32 avec elle, je sentais vraiment qu'elle aussi, le décès de son père, ça l'avait énormément impacté.
11:36 Et donc moi, en novembre 2022, j'ai pris un billet pour aller au Congo. En fait, c'était comme si je
11:42 partais rencontrer des inconnus. Donc j'avais trop peur, est-ce qu'ils vont m'accepter, comment je
11:47 suis, comment je m'exprime, qui je suis devenue, est-ce qu'on aura des choses à se raconter, est-ce
11:52 que moi je vais les accepter. Donc c'était vraiment des interrogations pendant tout le vol. Dès que
11:56 je suis arrivée, j'ai pris une douche, je me suis changée, j'ai dit au chauffeur "Allez, on va voir ma
12:00 mère, elle habite à tel quartier, j'ai l'adresse, on y va". On arrive à l'adresse indiquée, je reconnais
12:06 mon cousin qui était dehors, mais j'avais un doute. Lui, il me reconnaît directement, il est content,
12:11 il me saute dans les bras et tout etc. Et on se dirige vers la maison, il y avait ma mère, ma tante
12:17 et ma cousine. Il dit "Regardez qui est là, regardez qui est là, elle est enfin là etc." Et de là,
12:23 tout le monde a commencé à crier, moi aussi j'ai commencé à crier etc. Et c'est comme ça que j'ai
12:29 revu ma mère après plus de 20 ans. J'étais complètement déconnectée de la situation. En
12:35 fait, je savais que cette personne c'était ma mère, mais c'est comme si je ne le réalisais pas. Des
12:39 fois, je n'arrivais pas à réaliser ce qui se passait. En fait, des fois, elle me parlait, je la regardais
12:43 et je me disais "En fait, c'est elle ma mère. En fait, c'est trop bizarre, je suis avec ma maman etc."
12:49 J'étais vraiment un bébé. En fait, j'étais redevenue comme un enfant parce qu'elle faisait tout pour
12:52 moi. Elle me faisait à manger, elle me repassait mes habits. En fait, j'étais comme un enfant.
12:59 Et en fait, ma famille maternelle m'apportait tellement d'amour que je n'arrivais pas à réaliser
13:05 qu'un jour j'ai pu douter que ces personnes m'aiment ou m'affectionnent. Ils étaient tellement
13:10 heureux d'être avec moi. Ils me rappelaient toutes les cinq secondes, ils me rappelaient ce que je
13:16 faisais quand j'étais petite avant qu'on soit séparés. En fait, je pense que c'est de là que j'ai
13:20 compris que j'ai souffert de cette séparation, mais eux également en fait. En étant grande,
13:26 en ayant 25 ans etc, faire ce voyage, c'est comme si je me réconciliais avec une partie de mon passé.
13:33 En fait, c'est comme si j'essayais de rattraper le temps que j'avais perdu en voyageant en fait,
13:39 en venant en France. Et c'est comme ça en fait, je recollais des morceaux de verre qui étaient
13:43 brisés parce qu'en fait, toute la carence affective que j'avais au niveau maternel,
13:50 c'est comme si je la récupérais en fait. C'est comme si je me ressourçais. Aujourd'hui,
13:56 après tout ça, après ce voyage, mes relations que ce soit avec mon père ou avec ma mère ont
14:01 complètement changé. Ma mère et moi, on s'appelle tous les jours, mais on s'envoie des messages,
14:06 on ne passe plus une semaine en fait sans se donner des nouvelles. On reste au téléphone
14:11 pendant des heures. Avec mon père, on a toujours gardé un contact, on a toujours été assez proches.
14:18 C'est plus quand il est reparti en Afrique et qu'il a été séparé de cette femme qu'on s'est
14:23 réconciliés je peux dire. On s'appelle, on parle au téléphone etc. C'est pas pareil, en fait c'est
14:30 vraiment pas pareil. Avec ma mère en fait, c'est nouveau, c'est vraiment nouveau. En fait,
14:34 cette histoire, j'arrive à la raconter aujourd'hui avec le sourire ou sans pleurer. Je pense qu'il y
14:40 a une partie qui est grâce à la psychothérapie aussi parce que je me suis un peu réconciliée
14:45 avec ce qui s'est passé dans le passé. Je m'en veux pas, je m'en veux moins parce que souvent,
14:51 je me suis dit peut-être que si ma belle-mère elle me déteste, c'est à cause de moi. Avec la
14:55 psychothérapie, j'ai pu voir que non, je ne dois pas me placer en tant que coupable, en tant que
15:01 responsable. Et aussi surtout, j'ai eu un gros problème pendant longtemps avec mes émotions. J'ai
15:06 du mal à dire ce que je ressens ou à montrer ce que je ressens. Mes omessons, elles sont un peu
15:12 chamboulées. Donc à des moments où je dois être triste, souvent je suis heureuse. À des moments
15:16 où je dois pleurer, souvent je ris. Et cette histoire, je la raconte très très peu. Aujourd'hui,
15:21 je sais pas si je peux dire que je suis totalement en paix avec mon histoire, mais en tout cas,
15:25 ce qui est sûr, c'est que je suis réconciliée avec ma famille, avec ma mère, ce qui est le
15:29 plus important, et avec tout ce qui a pu se passer. Je garde quand même des traumas de ce qui m'est
15:36 arrivé. J'ai quand même des séquelles. Ça se voit au niveau de mon comportement, ça se voit au
15:41 niveau physique, des choses comme ça. Mais je l'accepte mieux.
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