Meurtre de Samuel Paty, le combat de sa sœur Mickaëlle : le débat de Charlotte d’Ornellas et Mathieu Souquière

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Chaque jour, des invités opposent leur point de vue sur l'actualité politique. Ce jeudi, Charlotte d’Ornellas et Mathieu Souquière.
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News
Transcription
00:00 - Il est 8h46 sur Europe 1, bon début de journée Dimitri Pablenko.
00:03 - Votre club de la presse Europe 1 pour commenter, décrypter l'actu politique.
00:07 Avec nous ce matin, Mathieu Soucaire, il était sérieste consultant.
00:10 Bonjour Mathieu. - Bonjour.
00:11 - Bienvenue sur Europe 1, vous êtes expert associé à la fondation Jean Jaurès
00:14 co-auteur d'un ouvrage 2022, "La flambée populiste".
00:17 Charlotte Dornelas est avec nous également. Bonjour Charlotte.
00:20 - Bonjour Dimitri.
00:21 - Journaliste à Valeurs Actuelles, c'était donc sa première prise de parole médiatique
00:24 et c'était sur Europe 1 il y a quelques minutes.
00:26 Mickaël Paty, la sœur de l'enseignant assassiné en octobre 2020 à la sortie de son lycée.
00:32 La voix du deuil et du combat contre l'oubli, contre la lâcheté pour la justice.
00:37 Et je crois pouvoir dire que le combat de Mickaël Paty, c'est également le nôtre ici à Europe 1.
00:42 Charlotte Dornelas, alors elle était venue simplement lire cette lettre ouverte
00:47 réclamant au Sénat notamment l'ouverture d'une enquête parlementaire sur les dysfonctionnements
00:53 qui ont abouti à la mort de son frère.
00:56 Il va y avoir un procès quand même dans cette affaire Samuel Paty.
01:00 D'ailleurs non pas un mais deux procès parce qu'il y a sur les 14 accusés 6 mineurs
01:05 mais ça ne suffit pas, nous dit Mickaël Paty.
01:07 Qu'est-ce qui a dysfonctionné dans cette affaire ?
01:10 - Ce qu'elle dit dans sa lettre c'est que oui, il y a l'ennemi qui porte les armes,
01:16 en l'occurrence les islamistes, et qu'évidemment il faut les combattre
01:20 mais que précisément pour les combattre, dans une guerre il y a des responsables pour mener cette guerre.
01:24 Or ces responsabilités elles ont un sens et elle dit en gros
01:28 jusqu'à aujourd'hui je me confronte à une irresponsabilité de fait,
01:31 c'est-à-dire il y a l'ennemi qui a porté le coup et puis c'est tout.
01:34 - Les propagateurs de la rumeur, celui qui a porté le couteau, M. Randoroff, etc.
01:39 - Et elle dit il y a aussi une responsabilité dans l'attentisme, dans la passivité des autorités.
01:44 On sait très bien qu'il y avait une note du renseignement que les menaces qui planaient
01:48 sur Samuel Paty étaient identifiées en effet et il n'y a pas eu cette réaction de protection.
01:53 Et elle pointe cette responsabilité politique justement qui n'a pas su encadrer
01:58 on va dire ceux qui aujourd'hui se retrouvent devant le tribunal.
02:01 C'est une question qu'elle pose qui est éminemment politique.
02:03 Donc moi je trouve ça plutôt sain pour tout le monde
02:07 aujourd'hui que ça se fasse dans une commission d'enquête précisément
02:10 qu'on puisse comprendre en fait pourquoi cette passivité, pourquoi ce pas de vague,
02:15 pourquoi cette peur finalement de réagir, elle le dit elle-même,
02:18 la peur de réagir c'est aussi la peur de stigmatiser,
02:20 on connaît ça malheureusement dans le débat public, on connaît ça en politique.
02:23 Et quand vous avez des implications et des conséquences aussi graves que ça,
02:27 en effet il faut que ce soit à la fois public et une commission d'enquête
02:31 les beaucoup plus en effet qu'un procès en général.
02:33 Alors elle a cette phrase pour résumer Mathieu Soucaire, Mikaël Paty,
02:36 elle dit "on nommait pas un oui-mais derrière le mot décapitation".
02:40 Elle a eu cette impression qu'on mettait un oui-mais sous-entendu
02:43 "oui mais enfin bon il a peut-être un peu cherché quelque part".
02:45 En tout cas ce à quoi elle nous invite,
02:47 l'affaire Samuel Paty a suscité une émotion collective unanime.
02:51 Là la question qui est posée c'est celle en face de cette émotion collective,
02:55 de notre responsabilité collective.
02:57 Donc il y a le procès auquel vous faisiez référence qui s'ouvre
02:59 et qui met en cause 14 personnes, donc la responsabilité de 14 personnes,
03:04 ça n'est pas un fait isolé, ça n'est pas le fait en fait d'un fou isolé.
03:08 Il y a 14 personnes qui sont mises en cause
03:11 dans leurs différents niveaux de complicité avec cette affaire,
03:14 14 personnes dont 6 mineurs, 6 adolescents.
03:17 - Des collégiens, un père d'élèves, etc.
03:20 - Donc il y a bien déjà à travers ce procès
03:22 la notion de responsabilité collective.
03:24 Et autour de cette responsabilité collective d'individus,
03:27 il y a la question de notre responsabilité collective en tant que société.
03:30 Et donc effectivement je pense qu'il est tout à fait intéressant
03:33 qu'à la faveur de cette affaire hors normes,
03:35 nous nous intéressions à la responsabilité
03:40 peut-être de l'institution éducation nationale,
03:42 à la responsabilité du ministère de l'Intérieur.
03:45 Est-ce que tout a été fait au niveau de l'établissement ?
03:47 Est-ce que tout a été fait au niveau de la communauté scolaire ?
03:50 - On le voit aujourd'hui dans la frilosité à rebaptiser tout simplement
03:53 le collège où exerçait Samuel Paty de son nom.
03:56 On voit qu'il y a un refus de le faire
03:57 parce qu'on a peur que ça génère des conséquences, etc.
03:59 - Oui, il y a la responsabilité symbolique
04:01 et puis il y a la responsabilité opérationnelle.
04:03 Alors je ne sais pas si comme elle, elle l'appelle de ses voeux,
04:05 on peut éviter de nouveaux drames.
04:08 Ça, je veux dire, des drames dans une société comme la nôtre,
04:10 le risque zéro n'existe absolument pas, c'est impossible.
04:13 - Non mais on a l'impression quand même,
04:14 attendez, je fais le lien avec l'affaire de Saint-Brévin par exemple.
04:16 Le maire qui dit "j'ai alerté les pouvoirs publics,
04:18 la préfecture sur le fait que je recevais des menaces
04:21 à propos de ce centre d'accueil de demandeurs d'asile sur ma commune,
04:24 il ne s'est rien passé".
04:25 On a l'impression finalement qu'on pourrait décliner quelque part.
04:28 Les situations, elles sont à peu près toujours les mêmes.
04:31 Une espèce d'inertie des pouvoirs publics jusqu'au drame quelque part, Mathieu Soukéa.
04:35 - Oui, il y a aussi des choses, encore une fois,
04:36 c'est compliqué de tout prévoir et le risque zéro n'existe pas.
04:40 Mais ce qu'on voit, c'est qu'effectivement,
04:42 des enseignants peuvent être décapités,
04:44 des infirmières peuvent être assassinées,
04:46 des élus peuvent être menacés.
04:48 Et donc la question est celle de notre organisation collective
04:50 pour limiter au maximum, autant que faire se peut,
04:53 les risques qui pèsent sur ces fonctions symboliques-là.
04:56 Sur les enseignants, puisqu'on parle de Samuel Paty,
04:59 la profession d'enseignant appartient à toutes ces professions
05:03 auxquelles on demande énormément
05:05 et auxquelles on donne quand même symboliquement et matériellement de moins en moins.
05:09 Donc comment est-ce que, dans notre société encore,
05:11 on rééquilibre les choses ?
05:12 - Oui, et puis comment on se fait entendre ?
05:14 Parce qu'on parlait du maire de Saint-Brévin l'autre jour,
05:16 il y a eu la démission, rappelez-vous, d'un élu des Mureaux,
05:18 il y a quelques semaines de cela, face aux injures et menaces,
05:20 le Blanc quitte ma ville, c'était-il entendu dire quand même.
05:24 Donc voyez, il n'y a pas qu'une histoire isolée, il y a des précédents.
05:27 Je voudrais qu'on évoque cet autre sujet aussi ce matin,
05:29 Charlotte Dornelas, Bruse, Besançon,
05:31 voilà, ce sont des communes en région
05:34 qui vont accueillir des sans-abris parisiens,
05:38 alors sans-abris, des migrants en réalité,
05:41 pour leur immense majorité,
05:42 évidemment, ça suscite beaucoup d'inquiétude dans les communes
05:45 qui ont été choisies pour accueillir ces fameux sas de report,
05:49 un plan de répartition donc des migrants,
05:52 on dit à l'occasion des Jeux Olympiques,
05:53 Charlotte Dornelas, c'est quand même loin les Jeux Olympiques,
05:55 y a-t-il un lien vraiment, pensez-vous, entre les JO
05:57 et cette répartition de la pression migratoire
06:02 qui, il est vrai, est quand même massivement concentrée sur l'île de France ?
06:05 - Oui, c'est vrai, alors le lien il n'est pas directement assumé,
06:08 on ne dit pas "ah bah tiens, on va mettre tout ce beau monde dehors
06:11 pour que la ville soit prête à accueillir les touristes",
06:13 mais il est clair que le préfet a lui-même expliqué
06:17 qu'il y a beaucoup d'hôteliers aujourd'hui
06:19 dont les chambres sont prises par l'État
06:21 pour loger ces migrants essentiellement,
06:24 et qui aujourd'hui veulent récupérer ces chambres
06:26 pour les louer plutôt à des gens qui viennent aux Jeux Olympiques,
06:29 on les comprend bien, enfin on comprend ce qui les pousse à faire ça,
06:32 et donc l'État réagit à ça,
06:33 donc c'est clairement à l'approche des Jeux Olympiques,
06:35 et par ailleurs, je pense que, en effet,
06:37 si vous avez des millions de gens qui vont débarquer à Paris,
06:39 et qu'on ne voyait les campements qu'il y a,
06:41 parce qu'on commence en l'occurrence aussi
06:43 par démanteler ces campements
06:45 qui sont un peu partout autour de Paris
06:47 ou en région parisienne,
06:49 il est évident que l'État a besoin, on va dire,
06:52 d'éloigner ces personnes.
06:54 Maintenant le problème c'est que ça s'ajoute à la répartition des migrants
06:56 dont on a déjà parlé,
06:58 là la seule différence c'est qu'en effet ce qui permet
07:00 de dire qu'on va répartir les sans-abri...
07:02 - Mais d'où ça vient ce plan ? Qu'est-ce que c'est que ce plan ?
07:04 C'est une décision de la mairie de Paris ? De l'État français ?
07:06 - Non, non, non, c'est une décision, oui,
07:08 du gouvernement qui a demandé aux préfets
07:10 de dix régions en France
07:12 d'ouvrir des SASS temporaires pour examiner la situation
07:14 et ensuite... - Ah, sur une demande de l'Union Européenne aussi, il faut le dire.
07:17 - Voilà, et en gros,
07:19 la demande de l'Union Européenne
07:21 elle concerne la répartition qui est déjà organisée,
07:23 en gros vous répartissez dans les régions
07:25 selon les capacités d'hébergement,
07:27 et là s'ajoute à ça cette histoire de SASS
07:29 où pendant trois semaines vous prenez
07:31 toutes les personnes qui veulent bien monter dans le bus,
07:33 et la différence c'est que ce n'est pas simplement
07:35 les demandeurs d'asile, vous avez également
07:37 aujourd'hui, peuvent monter dans les bus, des déboutés
07:39 du droit d'asile, par exemple, à qui on a demandé de partir
07:41 mais que quand même on va aller envoyer
07:43 en région. - Donc débouté du droit d'asile,
07:45 qui a demandé à pouvoir rester sur le sol français,
07:47 ça lui a été refusé, mais il n'est pas
07:49 accompagné à la frontière, et donc
07:51 là il va se retrouver finalement à prendre un bus pour aller en région.
07:53 - Et donc qui veut en fait monter dans ces bus,
07:55 qui veut évidemment aux migrants débouter
07:57 quelle que soit la situation administrative,
07:59 et ensuite dans les SASS, qui sont censés les accueillir
08:01 que trois semaines, sera examiné
08:03 justement leur situation
08:05 pour leur proposer un hébergement dans la région
08:07 dans laquelle ils sont envoyés.
08:09 Voilà, quel est le programme
08:11 mis en place. - Mathieu Soucaire.
08:13 - C'est répandu à tort ou à raison, l'idée
08:15 qu'en matière migratoire, nous avions perdu
08:17 le contrôle. Là quand même, rappelons
08:19 qu'il s'agit d'une initiative des pouvoirs publics,
08:21 effectivement de l'État, pour organiser
08:23 mieux les choses. Organiser mieux les choses
08:25 parce qu'effectivement vous avez aujourd'hui une concentration
08:27 de l'afflux de demandeurs d'asile
08:29 en région Île-de-France, en région parisienne.
08:31 - 1 sur 3 à peu près, pour se faire une idée.
08:33 - Ouais, on dit même 1 sur 2.
08:35 - C'était 1 sur 2 en 2020, la pression
08:37 s'est légèrement détendue sur l'Île-de-France.
08:39 - On sait qu'il y a une surconcentration en Île-de-France, et du coup
08:41 une saturation des capacités d'hébergement.
08:43 - Parce qu'il existe un dispositif
08:45 national d'accueil, c'est le nom de ce...
08:47 - Mais cette sursaturation
08:49 aboutit à ce que effectivement les demandeurs d'asile
08:51 se retrouvent à Paris ou en banlieue,
08:53 dans la rue. Là il s'agit d'organiser les choses
08:55 pour que les quelques centaines qui arrivent
08:57 on les répartissent dans une dizaine de régions.
08:59 - Mais c'est une bombe politique ça,
09:01 quand même. - Ça peut créer des difficultés, mais encore une fois
09:03 il s'agit de quelques centaines
09:05 de personnes qu'on répercute
09:07 dans une dizaine de régions. - C'est des milliers
09:09 qui quittent chaque mois. - Et précisément
09:11 des régions qu'on choisit en fonction de critères
09:13 objectifs et sociaux. Les capacités d'accueil,
09:15 on transfère les personnes là où il y a des
09:17 capacités d'accueil, des endroits où on peut les
09:19 accueillir, en fonction du taux de chômage,
09:21 en fonction d'autres indicateurs
09:23 sociaux, pour faire en sorte que ça se passe
09:25 le mieux possible. Alors, c'est pas parce qu'on fait
09:27 les choses bien que derrière ça se passe
09:29 nécessairement bien. On sait qu'on a, dans
09:31 certains coins, un rejet vis-à-vis
09:33 de ce type de projet qui pose des
09:35 difficultés. - Simplement sur la
09:37 question de la... On dit qu'on a perdu la maîtrise,
09:39 pour moi c'est une nouvelle preuve qu'on a perdu
09:41 la maîtrise. Quand vous en êtes
09:43 rendus à ne pas suivre les
09:45 décisions administratives, et en l'occurrence
09:47 à dire à des déboutés qui devraient quitter le pays
09:49 et que vous n'arrivez pas à faire quitter le pays,
09:51 finalement on va vous mettre en région et
09:53 on organise quelque chose. Le rapport parlementaire
09:55 qui a été fait sur cette organisation dit
09:57 "il va falloir que les préfectures parlent avec les élus locaux".
09:59 Jusqu'à maintenant, les élus locaux
10:01 ne sont pas automatiquement, d'abord,
10:03 concertés
10:05 sur l'accueil qui va arriver, et les Français
10:07 absolument jamais. On se souvient du maire de
10:09 Calac qui avait dit "on va pas faire des référendums,
10:11 80% des gens vont nous dire non". - Ce rapport ne dit pas
10:13 que tout est parfait, mais ce rapport dit bien que la
10:15 situation s'est améliorée précisément
10:17 avec ce type d'organisation, et là
10:19 où je vous contredis, c'est qu'on a
10:21 d'autant moins perdu le contrôle qu'on l'a repris là-dessus.
10:23 Il y avait, comme le disait Dimitri,
10:25 50% des demandeurs d'asile,
10:27 la moitié d'entre eux se concentraient
10:29 en Ile-de-France, il y a encore 2 ou 3 ans.
10:31 On a réussi, grâce à ce dispositif,
10:33 à baisser à 33%. - On a réussi
10:35 à répartir l'immigration qu'on n'arrive pas
10:37 à contrôler partout en France. - L'objectif, c'est d'être à 25%
10:39 dans quelques années, et du coup on devrait y arriver.
10:41 - Merci à tous les deux, le débat va évidemment continuer sur ce sujet
10:43 tout au long de la journée sur Europe 1. Merci beaucoup
10:45 Mathieu Soucaire d'être venu nous voir ce matin dans le club
10:47 de la presse Europe 1. Charlotte Dornelas,
10:49 également, bonne journée.

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