Suite des auditions devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale chargée de faire la lumière sur l'action des groupuscules violents lors des manifestations. Les députés entendent Didier Lallement, préfet de police de Paris de mars 2019 à juillet 2022. Celui qui est actuellement secrétaire général de la Mer avait été très critiqué pour sa gestion jugée brutale des manifestations, et son maintien de l'ordre pendant les "gilets jaunes". Retrouvez cette audition en intégralité sur LCP Assemblée nationale.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00:00 Mes chers collègues, notre commission d'enquête
00:00:01 poursuit ses travaux ce matin pour 3 auditions
00:00:03 qui seront, comme c'est le principe que nous avons retenu,
00:00:06 diffusées en direct sur le site de l'Assemblée nationale.
00:00:10 Nous serons donc ensemble jusqu'aux alentours de 11h.
00:00:14 Je vous remercie, M. le préfet Lallemand,
00:00:17 d'avoir accepté de venir échanger avec notre commission.
00:00:20 Vous vous doutez que ce ne sont pas vos actuelles fonctions
00:00:23 de secrétaire général de la mer
00:00:26 qui ont motivé votre invitation,
00:00:28 mais bien l'expérience accumulée au cours de votre carrière
00:00:32 dans le corps préfectoral,
00:00:33 qui vous a particulièrement confronté
00:00:35 à la question des violences en marge des manifestations.
00:00:38 Bien sûr, tout le monde se souvient
00:00:40 que vous avez été préfet de police de Paris,
00:00:42 mais vous avez également officié comme préfet de l'Aisne,
00:00:45 de la Saône-et-Loire, du Calvados et de la Gironde.
00:00:49 Je le souligne à dessein,
00:00:52 car notre travail dépasse le seul cadre parisien.
00:00:55 Vos fonctions dans les départements que je viens de citer
00:00:58 qui supposent un maintien de l'ordre qui n'est pas identique,
00:01:01 on peut l'imaginer, à celui de la capitale,
00:01:03 ont certainement nourri des réflexions
00:01:05 qui ne manqueront pas d'intérêt pour les membres de la commission.
00:01:09 Un questionnaire vous a préalablement été transmis
00:01:12 par notre rapporteur, M. Florent Boudier.
00:01:15 Évidemment, dans l'entretien de ce matin,
00:01:20 l'ensemble des questions ne seront sans doute pas abordées.
00:01:22 Donc si vous pouvez, dans un second temps,
00:01:25 nous transmettre les réponses écrites
00:01:28 pour compléter par rapport à l'audition.
00:01:31 Vous savez quel est le sujet qui nous réunit.
00:01:34 Nous étudions les manifestations du printemps
00:01:37 tant à Paris qu'ailleurs en France
00:01:39 et entre autres aussi en milieu rural.
00:01:42 L'objectif pour la commission est double.
00:01:45 D'abord, comprendre la logique des groupuscules
00:01:47 et des auteurs de violences.
00:01:49 Ensuite, examiner le déroulement des manifestations
00:01:52 pour déterminer si des améliorations sont possibles
00:01:56 ou des correctifs souhaitables.
00:01:59 Justement, des correctifs et des ajustements
00:02:01 dans les principes du maintien de l'ordre,
00:02:03 il y en avait eu plusieurs
00:02:04 à la suite de l'épisode des Gilets jaunes.
00:02:07 Et il n'est pas inutile de se retourner vers le passé récent
00:02:11 pour évaluer ces évolutions,
00:02:13 pour estimer si elles ont répondu aux attentes
00:02:15 ou si elles sont impuissantes face à de nouvelles configurations
00:02:19 et de nouvelles formes de violences.
00:02:22 Nous sommes évidemment impatients d'échanger avec vous.
00:02:24 Avant de vous faire prêter serment
00:02:26 et de passer la parole à M. le rapporteur,
00:02:29 il me revient cependant de poser les 2 premières questions
00:02:32 qui ont vocation à introduire nos débats.
00:02:36 En 1er lieu, à la lumière de votre expérience préfectorale
00:02:39 et de l'actualité, diriez-vous que le régime juridique
00:02:42 actuel des manifestations permet un bon équilibre
00:02:46 entre d'une part le respect des droits fondamentaux
00:02:49 et d'autre part le maintien de l'ordre public,
00:02:52 le principe déclaratif conduit à une tripartition
00:02:56 entre les cortèges déclarés, les cortèges spontanés
00:03:00 et les cortèges interdits ?
00:03:02 Est-ce pertinent et, élément important,
00:03:05 est-ce appliqué de la même façon
00:03:07 sur l'ensemble du territoire national ?
00:03:09 Et en 2d lieu, le préfet est au confluent
00:03:13 de tous les acteurs de la manifestation,
00:03:15 organisateurs, services de renseignement,
00:03:19 unités de maintien de l'ordre, gouvernements,
00:03:21 autorités judiciaires, juridictions administratives.
00:03:25 Diriez-vous que cette position permet d'agir efficacement
00:03:29 sous le double prisme, à nouveau,
00:03:31 de l'ordre public et des droits fondamentaux
00:03:33 ou certaines améliorations vous semblent-elles nécessaires ?
00:03:38 M. le secrétaire général, avant de vous donner la parole,
00:03:41 et en application de l'article 6 de l'ordonnance
00:03:43 numéro 58-1100 du 17 novembre 1958
00:03:48 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires,
00:03:51 je vais vous demander de prêter serment,
00:03:52 de dire la vérité, toute la vérité,
00:03:54 rien que la vérité.
00:03:55 Je vous prie de lever la main droite
00:03:57 et de dire "je le jure" après avoir activé votre micro.
00:04:01 Et je demanderai à M. Piguet de faire la même chose
00:04:04 s'il, à un moment ou un autre, intervient,
00:04:07 mais M. l'Allemand, je vous laisse procéder en premier.
00:04:12 -Je le jure. -Je vous remercie.
00:04:14 M. Piguet.
00:04:16 Je vous en remercie et donc, sans tarder,
00:04:18 je vous passe la parole.
00:04:20 -M. le président, je n'ai pas de déclaration préalable.
00:04:24 Je répondrai bien évidemment avec le plus grand plaisir
00:04:27 aux questions qui me seront posées par les membres de la commission.
00:04:30 Peut-être pour, justement, vous répondre directement.
00:04:34 Vous avez évoqué ma carrière.
00:04:38 Je dois vous dire que préfet de police
00:04:40 n'est pas tout à fait un préfet de droit commun.
00:04:45 Il est, si j'ose dire, une autorité de police.
00:04:48 Et il n'est d'ailleurs pas que préfet de police de Paris,
00:04:50 mais de l'agglomération parisienne.
00:04:52 Voilà, juste pour un peu préciser les choses.
00:04:56 Et donc, sur le régime actuel, son équilibre,
00:05:00 je pense que le dispositif est assez satisfaisant.
00:05:04 Mais comme d'habitude, dans notre droit,
00:05:07 nous avons tout le problème de la sanction.
00:05:10 Et telle, par contre, au niveau.
00:05:13 Mais le régime déclaratif, le droit de manifester,
00:05:17 tout ça fonctionne à peu près correctement.
00:05:20 La difficulté porte sur ceux, justement,
00:05:21 qui ne le respectent pas.
00:05:23 Et qui, en fait, sont, dans un grand nombre de cas,
00:05:27 dans une relative impunité.
00:05:29 Donc ça interroge,
00:05:30 mais comme toute une série de sujets dans notre société,
00:05:34 sur l'impunité en la matière.
00:05:38 Sur le préfet lui-même, pour essayer également de faire très court,
00:05:42 là aussi, je pense qu'on a atteint un équilibre
00:05:45 assez satisfaisant.
00:05:47 C'est pour ça que je vais mettre un peu de côté
00:05:48 les fonctions de préfet, de police,
00:05:50 par rapport aux autres fonctions de préfet
00:05:53 de département ou de région, qui sont un peu différentes.
00:05:56 Mais je vais me référer à mon expérience de Nouvelle-Aquitaine
00:06:00 et à la partie gilet jaune de Bordeaux que j'ai pu connaître.
00:06:05 Je trouve que les choses en termes de chaînes,
00:06:08 de commandement, de capacité juridique,
00:06:12 fonctionnent plutôt bien.
00:06:14 Il y a une intégration des forces de sécurité intérieure
00:06:18 autour du préfet qui m'a toujours semblé satisfaisante.
00:06:22 Les situations exceptionnelles
00:06:26 révèlent en fait la solidité de notre dispositif.
00:06:29 Je crois que c'est ce qui vient d'être éprouvé
00:06:31 au travers des violences urbaines en province.
00:06:33 Nous avons un dispositif solide qui date finalement du consulat,
00:06:39 mais qui, en matière de capacité régalienne,
00:06:43 peut justement surmonter des situations très exceptionnelles.
00:06:46 Voilà ce que je pouvais dire en préalable, M. le président.
00:06:49 -Merci beaucoup, M. le secrétaire général.
00:06:52 Alors, évidemment, lorsque l'on regarde le déroulement
00:06:56 d'un certain nombre de manifestations,
00:06:59 vous le disiez vous-même,
00:07:01 ce qui semble parfois poser problème
00:07:03 et qui est aussi repris par un certain nombre de personnes
00:07:08 que nous avons auditionnées,
00:07:09 et vous avez utilisé ce terme il y a quelques instants,
00:07:12 la question de la relative impunité.
00:07:15 Est-ce qu'il y a là nécessité
00:07:19 de faire évoluer le dispositif législatif ?
00:07:23 -La difficulté de faire respecter un système
00:07:30 s'il n'y a pas de sanctions
00:07:33 repose sur l'adhésion de nos concitoyens
00:07:36 à des valeurs communes.
00:07:38 Donc la question qui se pose,
00:07:40 c'est est-ce que cette adhésion est suffisante
00:07:42 pour que, par exemple, pendant les manifestations,
00:07:45 les bons citoyens dénoncent ceux qui cassent,
00:07:48 empêchent de manifester dans la limite de leurs possibilités
00:07:52 ceux qui n'ont pas déclaré ?
00:07:54 Dès lors que vous avez la réponse à cette question,
00:07:56 je crois qu'on peut en déduire un certain nombre de choses.
00:08:00 Non, il arrive quand même assez fréquemment
00:08:03 qu'il n'y ait pas de déclaration dans les manifestations
00:08:06 qu'il y ait des cortèges sauvages,
00:08:08 c'est-à-dire des gens qui quittent le cheminement
00:08:10 de la manifestation telle qu'il était prévu,
00:08:13 avec, dès le début, l'intention de le faire,
00:08:15 ou même qui se rassemblent en début de cortège
00:08:18 et qui empêchent la manifestation de se dérouler,
00:08:21 ce qu'on appelle les précortèges,
00:08:23 les nébuleuses qui se créent en début de cortège.
00:08:26 Et donc, c'est vrai qu'on peut faire tout ça
00:08:29 sans, finalement, le moindre risque juridique,
00:08:33 à part si on est identifié comme étant l'organisateur,
00:08:38 mais à l'idée d'identifier l'organisateur d'un cortège sauvage.
00:08:42 Surtout avec les réseaux, aujourd'hui,
00:08:44 du temps de l'Empire, du 1er au 2e,
00:08:47 vous aviez effectivement des organisations
00:08:50 qui, derrière, organisaient les choses, si j'ose dire,
00:08:55 et avec des chefs, des sous-chefs, etc.
00:08:58 Aujourd'hui, les réseaux vous donnent une transversalité totale
00:09:02 de la façon dont ça fonctionne.
00:09:03 Donc, d'ailleurs, voyez bien que notre droit,
00:09:05 qui est adapté à un organisateur,
00:09:08 enfin, qui vise un organisateur,
00:09:10 qui vise donc des organisations face à la transversalité
00:09:14 de ce que sont l'organisation en réseau,
00:09:16 et je crains que les dernières violences urbaines
00:09:18 les démontrent,
00:09:19 me semblent effectivement inadaptés, M. le Président.
00:09:23 -Je vous remercie.
00:09:25 Je vais passer la parole à M. le rapporteur.
00:09:28 -Oui, merci, M. le Président, M. le secrétaire général,
00:09:31 M. le préfet.
00:09:33 Merci d'avoir accepté cette convocation
00:09:37 devant la commission d'enquête.
00:09:38 Je le rappelle parce que nous avons eu, la semaine dernière,
00:09:41 des personnes auditionnées qui s'étonnaient
00:09:43 du principe même d'une convocation
00:09:44 devant une commission d'enquête.
00:09:45 C'est en effet une convocation,
00:09:46 et j'indiquais d'ailleurs que les préfets, anciens préfets,
00:09:50 étaient eux-mêmes convoqués.
00:09:53 Merci.
00:09:54 1re question.
00:09:56 A la fois, passage à Bordeaux, Nouvelle-Aquitaine,
00:10:00 puis ici, à Paris,
00:10:02 l'évolution du profil des individus
00:10:06 aux groupuscules violents constatés
00:10:08 entre la séquence gilets jaunes,
00:10:11 la séquence que vous avez eue ensuite à traiter
00:10:14 ici, sur la plaque parisienne.
00:10:16 Quelles sont les évolutions que vous avez constatées
00:10:18 dans le profil, la diversité
00:10:21 des individus et groupes violents concernés ?
00:10:24 Ca, ça me paraît important
00:10:25 que nous ayons ce fil long d'analyse
00:10:29 au terme de la commission d'enquête.
00:10:32 2e question.
00:10:33 Vous êtes à l'origine de l'évolution
00:10:35 du schéma national de maintien de l'ordre.
00:10:38 Quels sont les éléments qui, à l'époque,
00:10:40 ont suggéré de votre part d'impulser
00:10:43 cette transformation,
00:10:45 qui a abouti, me semble-t-il,
00:10:47 après vos fonctions, si je ne trompe pas ?
00:10:52 Me semble-t-il.
00:10:53 Quels sont les éléments qui ont poussé à cette évolution ?
00:10:56 Et quels sont les points stratégiques
00:10:59 que vous souhaitiez consolider ou transformer
00:11:02 à travers cette évolution ?
00:11:04 Je vous passe tout de suite la parole.
00:11:08 -Merci, M. le président, M. le rapporteur.
00:11:12 Moi, ce que j'ai pu constater, mais ça n'est qu'un constat
00:11:14 personnel, donc il n'a pas vocation à être généralisé,
00:11:18 c'est effectivement sur les individus
00:11:20 qui se radicalisaient,
00:11:23 le fait, au moment des Gilets jaunes,
00:11:24 qu'on n'avait plus exactement le même profil,
00:11:28 c'est-à-dire le profil, en quelque sorte,
00:11:30 historique du Black Bloc, tel qu'il résulte
00:11:32 du milieu des années 2010,
00:11:34 était plutôt un jaune très politisé.
00:11:37 Les ultra-violents qu'on a vus monter avec les Gilets jaunes,
00:11:40 c'est-à-dire les Gilets jaunes radicalisés,
00:11:43 étaient des Gilets jaunes, c'est-à-dire
00:11:46 des personnes éventuellement plus âgées
00:11:48 et qui n'avaient pas de démarches idéologiques
00:11:53 très structurées, c'est-à-dire
00:11:55 une culture révolutionnaire, classique,
00:11:59 telle qu'elle peut tourner en rhétorique
00:12:03 dans certains groupuscules d'extrême-gauche.
00:12:06 Voilà, donc oui, la constitution d'un Black Bloc,
00:12:10 parce qu'en quelque sorte, à partir du moment
00:12:13 où il n'identifie pas les gens, qu'il y a une unité d'habillement,
00:12:16 la couleur noire, etc., révèle sous les masques
00:12:19 des personnalités assez différentes.
00:12:21 Moi, ce qui m'a toujours frappé dans les manifestations
00:12:23 de Gilets jaunes, qu'elles soient à Bordeaux ou à Paris,
00:12:27 c'est qu'en fait, elles ne duraient pas véritablement la nuit.
00:12:32 Exceptionnellement, ça arrivait jusqu'à 21h à Paris.
00:12:36 Tout état de cause à Bordeaux, ça s'arrêtait un peu plus tôt.
00:12:39 Parce qu'on sent bien que les gens rentrent chez eux
00:12:41 et qu'ils ont un certain nombre de tâches à faire,
00:12:43 éventuellement d'aller chercher les enfants
00:12:45 ou de promener le chien.
00:12:46 Donc, vous voyez, c'est l'irruption d'une classe moyenne
00:12:50 dans des actes de violence qui, du coup,
00:12:53 se retrouvent dans des horaires de manifestation.
00:12:56 Encore une fois, ce que je vous dis est très personnel.
00:12:57 -Pardonnez-moi, M. le Préfect.
00:12:58 Est-ce que vous pouvez enchaîner, vous parlez plus près du micro
00:13:00 pour qu'on vous entende mieux, notamment sur l'enregistrement ?
00:13:04 Bonjour, merci.
00:13:06 -Bon, je ne suis pas, M. le rapporteur,
00:13:08 à l'origine du schéma national.
00:13:10 C'est les ministres de l'Intérieur successifs
00:13:13 et l'actuel qui l'a conclu, qui en sont les acteurs.
00:13:18 Simplement, je suis un des interlocuteurs de la discussion
00:13:24 qui a été, dans les médias, relaté sur mise à distance
00:13:29 ou proximité du maintien de l'ordre,
00:13:32 qui est un débat un peu étonnant, mais qui a été vécu comme ça.
00:13:37 Il est nécessaire que les forces de sécurité intérieure,
00:13:40 les dispositifs, s'adaptent à la réalité
00:13:43 de ce que sont les manifestations.
00:13:45 Très longtemps, on n'a pas eu besoin
00:13:47 de se rapprocher des manifestations,
00:13:49 ou du moins pas en cas de volonté de dissolution uniquement.
00:13:54 Et la nature même des manifestants,
00:13:56 à partir du milieu des années 2010,
00:13:58 a complètement changé, ou nécessité de changer cette approche.
00:14:01 Et c'est vrai que j'ai proposé d'être beaucoup plus au contact.
00:14:06 Être plus au contact, je le signale d'ailleurs à la Commission,
00:14:09 a comme conséquence de tirer infiniment moins au LBD.
00:14:14 Parce que là aussi, j'ai lu toute une série de choses
00:14:17 sur l'utilisation des LBD.
00:14:19 Mais quand je suis parti de la préfecture de police,
00:14:22 on tirait très peu au LBD.
00:14:24 Alors que je rappelle, en décembre 2018,
00:14:27 sur une manifestation, il y a eu plus de 1 000 tirs.
00:14:30 Sur les manifestations, moi, lorsque j'ai terminé,
00:14:33 si on tournait à une centaine de tirs ou une cinquantaine,
00:14:36 c'était vraiment le maximum.
00:14:37 Parce que la proximité, justement,
00:14:40 évite, en utilisation d'armes intermédiaires,
00:14:43 de constituer sur la distance.
00:14:45 Je me permets vraiment d'insister là-dessus.
00:14:48 Et donc, après, le schéma national de maintien de normes
00:14:50 ne porte pas de doctrine très précise en la matière.
00:14:53 Mais il évoque simplement la nécessité de s'adapter.
00:14:56 Et d'ailleurs, je note que mon successeur,
00:14:58 qui est un remarquable préfet de police,
00:15:02 applique finalement, justement, ce schéma
00:15:05 exactement dans le même esprit.
00:15:07 En fonction de la nature de la menace,
00:15:09 on se rapproche ou on s'éloigne.
00:15:11 Mais il n'y a pas, si vous voulez,
00:15:12 dans le schéma national de maintien de l'ordre,
00:15:14 d'évidence doctrinale aussi structurée.
00:15:19 Quand une fois, il faut savoir faire preuve d'adaptation.
00:15:22 Considérer qu'on peut gérer aujourd'hui les manifestations
00:15:26 telles qu'on les gérait au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale
00:15:30 ou sous le début de la Ve République serait absurde.
00:15:34 Parce que, tout simplement, nos concitoyens ont changé.
00:15:36 Ils ne sont plus les mêmes.
00:15:38 La façon de manifester n'est plus la même.
00:15:42 Regardez les images de manifestations des années 60.
00:15:47 Elles ne sont pas exactement les mêmes.
00:15:50 Parce qu'il y avait des grandes organisations constituées
00:15:53 qui, elles-mêmes, assuraient, avec leur service d'ordre,
00:15:58 la sécurité des dispositifs.
00:16:01 Moi, je me suis retrouvé dans la situation très paradoxale
00:16:04 d'être le principal organisateur de manifestations
00:16:07 pendant ma période préfet de police,
00:16:09 puisqu'il n'y avait plus de service d'ordre.
00:16:11 Du moins, sur les gens qui, à l'époque, déclaraient des manifestations.
00:16:15 Ils ne s'en sentaient plus la responsabilité.
00:16:17 Ils n'avaient plus la capacité de les organiser.
00:16:20 C'est-à-dire que nous, police, étions en train de les encadrer
00:16:24 par défaut de leur capacité à le faire.
00:16:26 Alors que ce n'était pas, du temps de ce que j'appelle
00:16:29 les grandes organisations syndicales ou politiques,
00:16:31 véritablement la façon dont se passaient les choses.
00:16:34 Donc, la transformation de ce que sont nos concitoyens,
00:16:39 influe forcément sur la transformation
00:16:41 de la méthode du maintien de l'ordre.
00:16:43 -Merci beaucoup.
00:16:47 Je me tourne vers les collègues qui souhaitent...
00:16:51 Oui, M. Thavien, je vous en prie.
00:16:54 -Merci, M. le président, M. le rapporteur, M. le préfet.
00:16:57 Merci pour vos propos.
00:17:00 Alors, moi, j'avais une question sur le maintien de l'ordre.
00:17:04 Est-ce que vous pensez qu'aujourd'hui,
00:17:06 par rapport à ce qui s'est passé avec les Gilets jaunes,
00:17:09 vous savez qu'il y a eu...
00:17:11 En fait, la loi prévoit déjà de condamner la troupement
00:17:16 avec le 431-3 du Code pénal.
00:17:20 Donc, un troupement sur la voie publique
00:17:21 susceptible de troubler l'ordre public.
00:17:23 Est-ce que vous pensez qu'aujourd'hui,
00:17:25 on devrait avoir une capacité d'intervention
00:17:27 beaucoup plus rapide ?
00:17:29 C'est-à-dire que nous avons des individus qui arrivent,
00:17:35 qui commencent à se regrouper,
00:17:39 avec peut-être des intentions malvenues,
00:17:43 et il y a toujours un temps de latence.
00:17:45 C'est-à-dire qu'on se dit, bon, peut-être qu'ils vont finir
00:17:48 par se disperser, et on voit qu'au final, pas du tout.
00:17:53 Est-ce que vous pensez qu'aujourd'hui, justement,
00:17:55 ça a peut-être été...
00:17:57 Alors, peut-être pas une erreur,
00:17:58 mais est-ce que ça devrait être un axe d'amélioration
00:18:01 pour, justement, essayer d'intervenir
00:18:03 beaucoup plus rapidement sur des individus
00:18:05 qui seraient présents sur la voie publique ?
00:18:10 Est-ce que vous pensez qu'aujourd'hui, justement,
00:18:11 on devrait...
00:18:13 Les forces de l'ordre devraient intervenir
00:18:14 beaucoup plus rapidement
00:18:17 pour pouvoir mettre fin à cet attroupement ?
00:18:21 Merci.
00:18:22 -M. le secrétaire général, je vous en prie.
00:18:26 -Oui, mais je partage, M. le député,
00:18:28 la nécessité d'intervention rapide.
00:18:30 C'est pour ça que j'ai été à l'origine
00:18:32 de la création des braves motos.
00:18:35 Dieu sait si ça m'a été reproché.
00:18:38 Parce qu'il faut des vecteurs,
00:18:39 c'est-à-dire des moyens d'arriver
00:18:41 sur des manifestations irrégulières
00:18:44 ou régulières, d'ailleurs, en cas de trouble,
00:18:46 de façon extrêmement rapide.
00:18:48 Quand on a 30 kg sur le dos,
00:18:50 on court infiniment moins vite
00:18:51 qu'un garçon avec des baskets,
00:18:52 ou bien un garçon ou une fille, d'ailleurs,
00:18:54 avec des baskets.
00:18:56 Et donc, il faut se rendre compte de cette réalité-là.
00:18:58 Faire débarquer une unité,
00:19:01 enfin, une compagnie ou un escadron de CRS,
00:19:04 de ces camions après leur transport,
00:19:06 c'est du temps, c'est normal.
00:19:08 Un déploiement de 80 fonctionnaires ou militaires
00:19:11 dure un certain nombre de minutes.
00:19:14 Donc, il faut avoir des vecteurs
00:19:16 de transport extrêmement rapides.
00:19:18 Et j'ajoute, d'ailleurs, que circuler dans Paris
00:19:20 nécessite même pas le faire en 4 roues.
00:19:23 Et donc, vous voyez bien que l'aménagement urbain
00:19:25 est aussi un élément de paix public.
00:19:30 Et d'ailleurs, il suffit de se référer au baron Haussmann.
00:19:32 Ce que je dis n'est pas très, très nouveau.
00:19:36 Mais dès lors qu'on réduit l'espace de circulation,
00:19:39 on permet aussi que se glissent dans la ville
00:19:42 des manifestations qui sont plus ou moins régulières,
00:19:47 parce qu'elles sont possibles dès lors.
00:19:51 Tout est dans tout, et réciproquement,
00:19:52 si je peux me permettre cette citation.
00:19:55 Oui, alors après, vous faites sans doute référence,
00:19:57 j'imagine, à l'interdiction préalable
00:20:00 d'un certain nombre de manifestants,
00:20:03 conseils constitutionnels, etc.
00:20:05 Et c'est vrai qu'il est dommage que l'outil juridique
00:20:07 qui est permis dans les stades
00:20:09 ne soit pas dans les manifestations.
00:20:11 Mais mieux que moi, vous connaissez le sujet.
00:20:13 Est-ce qu'il y a des possibilités d'évolution juridique
00:20:16 qui permettraient de le faire ?
00:20:17 A mon avis, ça serait souhaitable,
00:20:19 mais je dépasse ma condition en le suggérant.
00:20:24 Mais il faut avoir quand même conscience de la limite,
00:20:27 d'un tel dispositif, si jamais il existait un jour.
00:20:30 Par définition, le Black Block est très difficile à identifier.
00:20:36 Par construction, puisque c'est fait pour ça, un Black Block.
00:20:41 Et donc, il faut quand même, en termes de droit public,
00:20:48 de défense des libertés individuelles,
00:20:50 avoir suffisamment d'éléments pour l'interdiction.
00:20:53 Un supporter sportif, c'est beaucoup plus facile à tracer
00:20:57 et c'est beaucoup plus simple de motiver l'interdiction.
00:21:00 Dans ce cas-là, ça serait compliqué.
00:21:02 Surtout que dès lors que vous identifiez un Black Block,
00:21:06 vous voyez bien qu'il y a une pénalisation.
00:21:10 Je voudrais me permettre d'ailleurs
00:21:11 de faire une petite incidente sur la pénalisation.
00:21:14 On est aujourd'hui dans un dispositif
00:21:17 où il y a une demande de pénalisation de la manifestation.
00:21:21 C'est assez nouveau.
00:21:24 J'allais dire de mon temps, mais quand j'étais jeune,
00:21:26 c'est-à-dire avant la chute du mur,
00:21:28 les choses ne fonctionnaient pas du tout comme ça.
00:21:31 L'essentiel de l'action de police était de mettre fin
00:21:33 à la manifestation qui posait des problèmes.
00:21:36 Et personne n'était dans l'idée d'interpeller
00:21:40 et de présenter devant le juge les gens qui cassaient, etc.
00:21:44 Donc la pénalisation qui a atteint l'ensemble des sphères de la société
00:21:47 qui maintenant concerne le droit de manifester,
00:21:52 tout simplement parce qu'il y a une volonté populaire, sociale,
00:21:56 et que le juge veut s'en mêler,
00:21:58 conditionne assez fortement l'action des services de police.
00:22:01 Et quand vous interpellez quelqu'un qui a cassé,
00:22:05 ça peut servir de motivation plus tard
00:22:07 pour l'interdire de manifester,
00:22:09 mais ce qui compte, c'est de pénaliser,
00:22:11 de le présenter à un juge.
00:22:13 Donc je pense qu'il y a...
00:22:17 Enfin, j'ai une véritable interrogation
00:22:19 sur cette évolution de la pénalisation du droit de manifester.
00:22:22 Quand je dis pénalisation du droit de manifester,
00:22:25 attention, pour être parfaitement clair,
00:22:27 je ne veux pas dire par là qu'il faut pénaliser le droit de manifester,
00:22:30 mais qu'on fait intervenir le juge dans la sanction
00:22:33 de ceux qui ne respectent pas justement ce droit de manifester.
00:22:37 Et encore une fois, c'est un phénomène récent
00:22:38 qui date du milieu des années 2000,
00:22:40 qui oblige les policiers et les gendarmes
00:22:43 à créer tout un dispositif de PV,
00:22:50 de façon d'apporter la preuve,
00:22:53 qui est assez lourd, de garde à vue,
00:22:57 de norias pour emmener les gens en garde à vue
00:22:59 dans les différents endroits qui sont prévus,
00:23:02 de permanence des parquets pour suivre ensuite les gardes à vue.
00:23:06 Tout ça n'existait pas il y a une vingtaine d'années.
00:23:10 Tout ça n'existait absolument pas.
00:23:12 Voilà. Donc oui,
00:23:14 ce que vous évoquez rejoint mon propos préalable.
00:23:19 Oui, moi, je crois qu'il faut effectivement
00:23:21 qu'il y ait un peu plus de sanctions
00:23:23 contre ceux qui ne respectent pas la règle du jeu collectif.
00:23:28 -Merci beaucoup, M. le secrétaire général.
00:23:30 J'aimerais qu'on revienne justement sur ce point.
00:23:34 Dans l'ouvrage que vous avez publié il y a quelques mois
00:23:37 intitulé "L'ordre nécessaire",
00:23:40 vous avez une partie qui est consacrée aux obstacles
00:23:42 qui sont aujourd'hui rencontrés
00:23:45 par la mise en oeuvre du maintien de l'ordre.
00:23:48 Et vous avez un passage où vous évoquez le fait
00:23:52 que le dispositif de maintien de l'ordre
00:23:54 au moment des Gilets jaunes était trop statique.
00:23:58 Vous l'avez un peu évoqué incidemment
00:24:01 en disant que vous aviez cherché à introduire
00:24:04 des éléments de mobilité.
00:24:06 Est-ce que vous pourriez nous en dire un petit peu plus ?
00:24:09 Et sur ce retour d'expérience,
00:24:13 quelles sont un petit peu les recommandations
00:24:16 que l'on peut faire par rapport au fait
00:24:20 que ce maintien de l'ordre était sans doute trop statique ?
00:24:24 -Je vous remercie, M. le président,
00:24:27 d'avoir cité ce petit ouvrage sans prétention.
00:24:32 Quand vous ne bougez pas, les autres bougent.
00:24:38 Subir un siège est la pire des situations.
00:24:43 C'est malheureusement ce qui se passait à Bordeaux,
00:24:47 puisque à Bordeaux, j'ai passé plusieurs mois
00:24:51 à défendre la mairie, puisque je rappelle
00:24:54 que les Gilets jaunes à Bordeaux
00:24:56 n'attaquaient pas la préfecture,
00:24:58 mais attaquaient la mairie de Bordeaux.
00:25:02 Et c'est très compliqué de défendre un bâtiment,
00:25:07 de rester au même endroit,
00:25:08 parce que vous concentrez beaucoup de violence à ce moment-là.
00:25:11 Les gens veulent absolument passer
00:25:13 et vous êtes là précisément pour les empêcher de passer.
00:25:16 Donc le choc est d'autant plus violent
00:25:19 qu'il y a cette opposition systématique.
00:25:21 Et comme ils ne passent pas,
00:25:23 ils se dirigent ailleurs
00:25:27 pour manifester leur colère par la destruction.
00:25:31 Et donc, quand vous êtes en situation de siège,
00:25:34 c'est-à-dire enfermé dans cet espace que vous protégez,
00:25:38 vous ne pouvez pas aller sur les arrières
00:25:41 où les manifestants cassent.
00:25:43 Nos concitoyens ne le comprennent pas
00:25:45 en ayant l'impression qu'il y a une totale impunité
00:25:47 et en disant "mais qu'est-ce que vous faisiez ou vous étiez ?"
00:25:50 Tout simplement, on était en incapacité
00:25:54 de sortir de l'espace que nous avions nous-mêmes créé.
00:25:57 Donc c'est une situation qu'il est nécessaire, à mon avis,
00:26:01 d'éviter par-dessus tout.
00:26:03 Et pour éviter ça, il faut être mobile.
00:26:06 Enfin, si vous voulez, c'est un vieux principe stratégique
00:26:09 qui existe depuis la nuit des temps.
00:26:11 Le meilleur moyen de défendre une position,
00:26:13 c'est justement de ne pas être dessus.
00:26:15 Je pourrais me référer à une série d'auteurs en la matière.
00:26:20 Donc il faut être mobile.
00:26:22 Il faut qu'il y ait une capacité, justement,
00:26:24 d'être sur la périphérie des dispositifs,
00:26:29 parce que c'est sur la périphérie des dispositifs
00:26:31 que se passent les destructions, les casses, etc.
00:26:34 Donc la mobilité est absolument essentielle.
00:26:36 Or, nous étions dans un système de maintien de l'ordre
00:26:42 qui était basé sur un rapport de force assez statique.
00:26:47 C'est-à-dire, les cortèges étaient encadrés
00:26:50 par des services d'ordre
00:26:52 qui faisaient, en quelque sorte, la police des cortèges.
00:26:57 Et les fonctionnaires de police ou les gendarmes mobiles
00:27:01 étaient sur un certain nombre d'endroits.
00:27:04 Et dans ce bon vieux temps,
00:27:06 finalement, les manifestations se passaient de la même façon.
00:27:09 On savait à peu près où allaient se faire les frottements.
00:27:12 Il faisait partie de la rhétorique du dispositif,
00:27:15 parce qu'on avait l'habitude de ces interlocuteurs
00:27:18 et on savait, grosso modo, comment se passaient les choses.
00:27:21 Il y a quand même des exceptions à ce que je dis.
00:27:23 Si je le regarde de façon historique, c'est mai 68.
00:27:27 Et avant, bien évidemment, ce sont les événements
00:27:30 issus de la fin de la guerre d'Algérie
00:27:35 et notamment les manifestations parisiennes,
00:27:37 qui étaient atypiques par rapport à cette règle-là,
00:27:40 mais cette règle-là était celle-là.
00:27:42 Et donc, la conception des maintiens de l'ordre
00:27:45 était basée sur ce positionnement statique.
00:27:48 Et la composition même de nos dispositifs de maintien de l'ordre
00:27:54 est basée sur ce dispositif statique.
00:27:58 Les compagnies et les escadrons
00:28:00 ne se scindent pas en dehors de la demi-compagnie
00:28:03 ou du demi-escadron.
00:28:05 C'est-à-dire très rarement de la section pour la compagnie,
00:28:10 c'est-à-dire de la vingtaine.
00:28:13 Or, dans des dispositifs de cette nature,
00:28:15 et notamment sur les effectifs préfectures de police,
00:28:18 nous sommes descendus dans des fractionnements
00:28:20 au niveau du groupe, c'est-à-dire au niveau de 6.
00:28:23 C'est dangereux de fractionner des effectifs
00:28:26 à des petits niveaux comme ça
00:28:27 parce que, bien évidemment, ils peuvent se faire attaquer
00:28:30 parce qu'ils ne sont pas suffisamment nombreux.
00:28:33 Mais c'est très efficace
00:28:35 parce que, du coup, vous étendez votre zone de contrôle,
00:28:37 mais à charge pour vous d'être en capacité
00:28:40 de recomposer le collectif qui est ainsi décomposé
00:28:44 dans son unité de base à 60 ou 80.
00:28:49 Donc, voilà, ce n'est pas simplement les vecteurs,
00:28:52 c'est aussi la façon de conduire les opérations de maintien de l'ordre.
00:28:56 Bon, c'est vrai que ce n'est pas pratiqué pour le moment,
00:28:59 c'est ce que j'explique, par les compagnies de CRS
00:29:02 ni par les escadrons de gendarmes mobiles.
00:29:04 C'est pratiqué par les compagnies d'intervention
00:29:06 de la préfecture, de police,
00:29:08 et ça nécessite une grande maîtrise technique
00:29:11 et une vision des choses.
00:29:15 C'est pour ça que, lorsque je suis devenu préfet de police,
00:29:20 ma première préoccupation,
00:29:22 ça a été de géolocaliser les fonctionnaires.
00:29:24 Malheureusement, quand je suis arrivé,
00:29:27 les géolocalisations n'existaient pas,
00:29:29 elles existaient sur les véhicules,
00:29:31 pas sur les individus.
00:29:32 C'est un dispositif qui a été mis en place
00:29:34 et qui a été poussé par les deux précédents ministres,
00:29:37 l'actuel et son prédécesseur,
00:29:39 qui permet aussi d'avoir des moyens de transmission,
00:29:41 permet de géolocaliser les fonctionnaires.
00:29:44 Et donc, c'est beaucoup plus efficace,
00:29:46 puisque vous savez à peu près où ils sont.
00:29:49 Rien n'est pire que de perdre des gens
00:29:51 au sens de ne plus avoir de visibilité sur eux.
00:29:55 Je vais vous expliquer un peu mieux ce que j'essaye de dire.
00:29:58 Une grosse manifestation à Paris,
00:30:02 c'est un service d'ordre
00:30:04 qui fait entre 4 000 et 6 000 fonctionnaires.
00:30:10 C'est un exercice qui se fait sur un terrain
00:30:15 dans le plus important des cas de 3 km sur 3 km.
00:30:19 La plupart du temps, c'est 2 km sur 2 km.
00:30:22 Parce que Paris est tout petit,
00:30:24 contrairement aux cités anglo-saxonnes.
00:30:26 Paris, je crois, est la 5e ville la plus dense du monde.
00:30:29 Et on revient sur le baron Haussmann.
00:30:32 L'espace vous contraint.
00:30:35 Quand vous êtes sur un tout petit espace de cette nature,
00:30:38 dans une densité urbaine extrêmement forte,
00:30:41 la difficulté, c'est de ne plus savoir où sont les effectifs.
00:30:45 Et de ne plus intervenir à bon escient.
00:30:47 Et de faire que des effectifs se retrouvent au contact,
00:30:51 de manifestants violents,
00:30:53 sans que vous les ayez véritablement voulus, ni eux-mêmes.
00:30:55 D'où l'importance de la géolocalisation,
00:30:57 de la vision globale.
00:31:00 Et de la façon dont s'organise le dispositif.
00:31:03 A Paris, on l'a par les caméras.
00:31:05 Mais c'est pour ça que les drones sont assez essentiels.
00:31:07 Parce que les drones,
00:31:09 contrairement à ce qui est raconté de façon bêbête par certains,
00:31:11 ne servent pas à identifier les gens.
00:31:14 Vous n'avez pas besoin d'identifier les gens avec des drones.
00:31:16 Puisque vous avez des caméras à Paris.
00:31:18 Il faudrait être particulièrement pervers pour aller faire voler un drone.
00:31:20 Pour identifier des gens.
00:31:22 Vous voyez très bien sur le système de vidéosurveillance.
00:31:26 C'est pour ça que j'ai beaucoup regretté
00:31:28 d'avoir interrompu du jour au lendemain le vol des drones.
00:31:30 Et qu'il a fallu pratiquement 3 ans
00:31:32 pour faire re-voler des drones.
00:31:34 Alors que n'importe quel citoyen français
00:31:37 peut faire voler des drones.
00:31:39 La situation, jusqu'à il y a encore quelques semaines,
00:31:41 c'est que les seuls qui ne pouvaient pas faire voler des drones
00:31:43 dans ce pays, c'était la police et la gendarmerie.
00:31:45 Je suis un peu agacé parce que j'ai trouvé ça véritablement dommage.
00:31:48 Et je ne voyais pas véritablement était le problème.
00:31:50 Le drone vous permet d'avoir une vision globale.
00:31:52 C'est-à-dire sur justement cet espace.
00:31:54 Que ne vous permet pas d'avoir les caméras.
00:31:57 Puisqu'il faudrait reconstituer l'image
00:31:59 et c'est techniquement impossible.
00:32:01 Donc voilà, c'est extrêmement important
00:32:03 d'avoir cette vision globale, etc.
00:32:05 Pour envisager un mouvement d'ensemble
00:32:07 qui vous permette de préserver la manifestation.
00:32:10 Parce que j'ai passé mon temps, pendant 3 ans et demi,
00:32:12 à essayer de faire en sorte
00:32:14 que les manifestations déclarées
00:32:16 arrivent à leur point d'arrivée.
00:32:18 Puisque ces groupes de têtes,
00:32:21 ces nébuleuses qui bloquent les manifestations,
00:32:23 qui sont des groupes de têtes qui sont des groupes de têtes
00:32:25 qui sont des nébuleuses qui bloquent les manifestations,
00:32:27 qui empêchent le déroulement de la manifestation,
00:32:29 sont le pire en matière démocratique
00:32:32 de ce qui peut arriver.
00:32:34 Puisqu'on ne permet pas l'expression de la contestation,
00:32:36 l'expression régulière de la contestation.
00:32:38 Ce qui empêchait les manifestations,
00:32:40 quand j'étais préfet de police,
00:32:43 ce n'étaient pas les policiers et les gendarmes.
00:32:45 C'étaient les précortèges,
00:32:47 ces manifestants, ces groupuscules
00:32:49 qui n'avaient qu'un seul objectif,
00:32:51 que les choses ne se passent pas.
00:32:54 Et c'est ce qui dégénère.
00:32:56 Parce que quand vous avez un bouchon au début de la manifestation,
00:32:58 d'abord ça énerve à juste titre les manifestants,
00:33:00 qui imaginent que ce sont des mesures de police
00:33:02 alors que ce sont des oppositions,
00:33:05 et cela nécessite l'intervention de la police,
00:33:07 ou de la gendarmerie.
00:33:09 Et intervenir en début de manifestation
00:33:11 sur ces précortèges,
00:33:13 c'est toujours extrêmement délicat.
00:33:16 J'ai bien compris que les syndicats
00:33:18 m'en avaient beaucoup voulu du 1er mai 2019.
00:33:20 Et depuis refusent de manifester
00:33:22 et depuis refusent de me rencontrer
00:33:24 quand j'étais préfet de police.
00:33:27 Parce qu'ils ont pensé
00:33:29 que l'intervention que nous avions faite
00:33:31 au début de la manifestation du 1er mai 2019,
00:33:33 qui avait provoqué un peu d'agitation
00:33:37 au début de cortège,
00:33:40 était à l'origine des difficultés
00:33:42 qu'avait rencontré le carré de tête des manifestants.
00:33:44 Puisque je rappelle que ce jour-là,
00:33:46 le secrétaire général de la CGT a été évacué,
00:33:48 et il a été évoqué,
00:33:51 que la CGT a été évacuée de son carré de tête,
00:33:53 et que FO est sortie de la manifestation.
00:33:55 Moi, le sentiment que j'ai eu,
00:33:57 mais à vrai dire,
00:33:59 parce que j'en avais une vision globale,
00:34:02 c'est que ce sont plutôt des gilets jaunes
00:34:04 qui sont intervenus sur ce cortège.
00:34:06 Et nous n'avons fait que les disperser en amont.
00:34:08 Ce qui explique ensuite que ces organisations syndicales
00:34:10 ont refusé de me rencontrer
00:34:13 tout au long de mon mandat de préfet de police.
00:34:15 Je l'ai assez profondément regretté.
00:34:17 J'ai toute une série de lettres
00:34:19 à chaque fois que je leur proposais cette rencontre.
00:34:21 Et je me suis beaucoup réjoui
00:34:24 qu'à l'occasion de la nomination de Laurent Nunez,
00:34:26 il soit sorti de cette posture
00:34:28 et qu'il ait enfin accepté les contacts
00:34:30 avec le préfet de police.
00:34:32 C'est ce qui se passe aujourd'hui
00:34:35 et j'en suis véritablement très satisfait.
00:34:37 -Merci. M. Lucas.
00:34:39 -Merci, M. le président, M. le rapporteur, M. le préfet.
00:34:44 Ma question change un peu de registre.
00:34:46 Elle vise à comprendre la conception
00:34:49 philosophique, civique et morale
00:34:51 du maintien de l'ordre en France
00:34:53 pour éclairer nos travaux sur ce point.
00:34:55 Vous aviez déclaré une formule restée célèbre
00:34:57 en marge d'une manifestation à une manifestante.
00:35:00 Nous ne sommes pas, madame, dans le même camp.
00:35:02 Je crois citer de mémoire vos propos.
00:35:04 Vous me corrigerez évidemment
00:35:06 s'ils sont inexactes.
00:35:08 Ce qui m'intéresse dans cette formule,
00:35:11 c'est pas l'élément de provocation médiatique
00:35:13 ou de réaction un peu rapide, à chaud.
00:35:15 J'imagine que vous étiez d'accord
00:35:17 dans une journée particulièrement vive.
00:35:19 C'est ce que cela peut révéler
00:35:23 de la conception du maintien de l'ordre.
00:35:25 Et donc, est-ce que vous considérez,
00:35:27 et avec vous, en réalité,
00:35:29 est-ce que vos autorités tutelles à l'époque,
00:35:31 est-ce que votre hiérarchie considérait
00:35:34 et considère d'après vous encore aujourd'hui
00:35:36 qu'il y a dans les mobilisations sociales
00:35:38 deux camps face à face, ce qui induit,
00:35:40 quand on a une conception et un vocabulaire
00:35:42 de cette nature qui a finalement
00:35:45 une désescalade de la nature,
00:35:47 une désescalade impossible ?
00:35:49 Parce qu'il y a des camps, c'est qu'on est
00:35:51 dans une forme d'affrontement.
00:35:53 Et est-ce que vous considérez
00:35:56 qu'on est dans cet état d'esprit
00:35:58 de camps qui se font face
00:36:00 entre les autorités de la République
00:36:02 qui assurent le maintien de l'ordre
00:36:04 et les manifestantes et les manifestants ?
00:36:07 -Merci beaucoup, M. le secrétaire général.
00:36:09 Je vous repasse la parole.
00:36:11 -Merci, M. le président.
00:36:13 Je considère, M. le député,
00:36:16 qu'à l'intérieur de la République,
00:36:18 il n'y a pas de camps, mais qu'en dehors
00:36:20 de la République, il y a des factieux
00:36:22 qui visent précisément à atteindre la République.
00:36:24 Et ce n'est pas nouveau qu'il y ait des gens
00:36:26 qui veulent tuer la gueuse.
00:36:29 Et donc le moment que vous citez
00:36:31 est un moment avec une dame
00:36:33 gilet jaune qui,
00:36:35 alors que nous étions
00:36:37 au lendemain de la manifestation de novembre
00:36:40 sur la place d'Italie,
00:36:42 alors que je venais
00:36:44 de voir le monument aux morts
00:36:46 de l'armée
00:36:48 qui a débarqué en Italie,
00:36:51 issue pour une partie
00:36:53 de ses troupes du Maghreb,
00:36:55 dans laquelle j'avais effectivement
00:36:57 dans cette armée un grand-oncle
00:36:59 qui est tombé à Monte Cassino
00:37:02 au sein d'un régiment
00:37:04 de tirailleurs algériens,
00:37:06 pour vous dire les choses.
00:37:08 Et que cette dame
00:37:10 tienne les propos qu'elle a tenus,
00:37:13 m'a effectivement fait sortir de mes gonds,
00:37:15 puisque je rappelle que la manifestation
00:37:17 avait détruit ce monument aux morts
00:37:19 pour en faire des projectiles.
00:37:21 Et j'ai considéré qu'effectivement,
00:37:24 quand on faisait ça, on n'était plus dans le camp de la République.
00:37:26 Et je le redirai exactement de la même façon.
00:37:28 Alors après,
00:37:30 il n'y a rien à en déduire d'autre
00:37:32 que ce que je vous dis.
00:37:35 Bien évidemment, le droit de manifester
00:37:37 fait partie de la condition républicaine.
00:37:39 Il est absolument
00:37:41 nécessaire,
00:37:43 il est absolument fondamental.
00:37:46 Et je crois avoir expliqué précédemment
00:37:48 que je m'étais battu pour le faire respecter.
00:37:50 Que j'avais fait en sorte
00:37:52 que les manifestations se tiennent.
00:37:54 Parce que des gens voulaient
00:37:57 justement qu'elles ne se tiennent pas.
00:37:59 Et donc, vous voyez,
00:38:01 il n'y a qu'un seul camp dans la République.
00:38:03 Mais malheureusement, aux périphéries de la République,
00:38:05 nous guettent, comme disait Gramsci,
00:38:08 dans l'entre-deux surgissent les monstres.
00:38:10 Merci beaucoup,
00:38:12 M. le secrétaire général.
00:38:14 M. Caron, je vous en prie.
00:38:16 Merci, M. le Président.
00:38:19 M. l'Allemand, nous sommes ici pour comprendre
00:38:21 la nature et les auteurs
00:38:23 des violences lors des manifestations.
00:38:25 Or, votre gestion de l'ordre
00:38:27 dans les manifestations,
00:38:30 lorsque vous étiez préfet de police,
00:38:32 a été largement remise en cause,
00:38:34 décriée par de nombreux observateurs.
00:38:36 Pour dire la chose clairement,
00:38:39 vous avez provoqué des violences
00:38:41 pendant les manifestations.
00:38:43 Notamment par l'intermédiaire des "Braves M".
00:38:45 "Braves M", on l'apprend aujourd'hui,
00:38:47 auquel a appartenu le policier
00:38:49 qui a tué Nahel, à bout portant un enterre.
00:38:52 Ce même policier
00:38:54 a aussi appartenu
00:38:56 au tristement célèbre CSI 93,
00:38:58 compagnie déployée en Seine-Saint-Denis,
00:39:00 sous votre responsabilité,
00:39:03 dont les membres ont été accusés,
00:39:05 certains condamnés d'ailleurs, de violences,
00:39:07 de viols, de mensonges,
00:39:09 de racisme, accusés, je le précise,
00:39:11 par l'IGPN,
00:39:14 suite à de nombreuses enquêtes.
00:39:16 Donc le policier qui a tué Nahel
00:39:18 a appartenu au "Braves M", à la CSI 93,
00:39:20 et, on l'a appris hier,
00:39:22 il a été décoré par vos soins.
00:39:25 Mais revenons à l'objet de cette commission
00:39:27 et à votre politique du maintien de l'ordre,
00:39:29 qui a notamment été documentée
00:39:31 par un article de Mediapart,
00:39:33 une enquête de mars 2020.
00:39:36 Et là, vous avez été interrogé
00:39:38 par un responsable de la gendarmerie,
00:39:40 jugé vos pratiques illégales.
00:39:42 Notamment parce que vous incitiez
00:39:44 vos troupes à "impacter",
00:39:47 c'est le terme, les manifestants,
00:39:49 c'est-à-dire, à rentrer dans le tas.
00:39:51 Donc ces responsables,
00:39:53 interrogés par les enquêteurs de Mediapart,
00:39:55 dénoncent vos directives.
00:39:58 Ils disent notamment que vos ordres
00:40:00 étaient volontairement dérogatoires
00:40:02 aux codes de sécurité intérieure,
00:40:04 R211/13, selon lequel l'emploi de la force
00:40:07 ne doit avoir lieu qu'en cas d'absolue nécessité
00:40:11 et de manière proportionnée.
00:40:13 L'enquête de Mediapart
00:40:15 cite plusieurs témoignages.
00:40:17 Et je vais me permettre d'en lire un.
00:40:20 C'est le témoignage d'un CRS,
00:40:24 qui a encadré des manifestants
00:40:26 sur, apprentons,
00:40:28 quasiment 14 km de parcours.
00:40:30 Et il dit ceci, lors d'une des manifestations.
00:40:33 "Les Black Blocs ne bronchaient pas.
00:40:35 "Ca a commencé à dégénérer
00:40:37 "quand les Braves ont commencé à intervenir.
00:40:40 "À la fin de la manifestation,
00:40:42 "la gare de Lyon, les Braves se sont mis
00:40:44 "à foncer dans le tas.
00:40:47 "C'est incroyable de foncer dans le tas comme ça,
00:40:49 "alors que ce n'était pas conflictuel."
00:40:51 Il ajoute encore,
00:40:53 "Parmi les manifestations,
00:40:55 "il y avait des cas sociaux."
00:40:58 Ce sont ces mots, j'ai quasiment terminé.
00:41:00 "Mais il n'y avait quasiment pas de casseurs.
00:41:02 "Ils se sont chargés gratos."
00:41:04 Et il conclut, ce sont encore ces mots,
00:41:06 "La manière d'agir des Braves démontre
00:41:09 "soit un manque d'expérience, soit un manque de lucidité,
00:41:11 "soit, je cite, "des ordres à la con."
00:41:14 M. Leman, et je pose ma question,
00:41:17 qu'est-ce que vous répondez ?
00:41:19 "A ces critiques émises
00:41:22 "par des membres des forces de l'ordre,
00:41:24 "pas par des factieux,
00:41:26 "pas par des gauchistes,
00:41:28 "par des membres des forces de l'ordre,
00:41:31 "placés sous vos ordres,
00:41:33 "qui vous accusent très clairement d'avoir été,
00:41:35 "lorsque vous étiez préfet de police,
00:41:37 "à l'origine de nombreuses violences
00:41:39 "constatées dans des manifestations
00:41:41 "dont vous aviez la responsabilité du bon déroulement ?"
00:41:46 -Bien. Je vais évidemment passer la parole
00:41:49 à M. le secrétaire général
00:41:51 pour que vous puissiez évidemment répondre.
00:41:53 Petite précision tout de même.
00:41:55 La commission d'enquête n'est pas une commission d'enquête
00:41:58 contre M. Leman.
00:42:00 Je veux que les choses soient bien claires.
00:42:02 Mais je vous passe évidemment la parole.
00:42:04 -M. le président,
00:42:06 je suis là pour répondre à toutes vos questions.
00:42:09 Donc M. le député, vous noterez
00:42:11 que je ne vous appelle pas M. Caron.
00:42:13 M. le député, je suis navré,
00:42:15 mais je ne lis pas Mediapart.
00:42:17 Donc je suis bien... Peut-être.
00:42:20 Mais j'attendrai avec plaisir
00:42:22 que vous m'offriez l'abonnement,
00:42:24 ce qui me permettra de découvrir cette littérature
00:42:26 dont effectivement...
00:42:29 dont effectivement, vous parlez beaucoup.
00:42:31 Mais pour moi,
00:42:33 ce n'est pas le journal officiel
00:42:35 et ce n'est pas la Bible.
00:42:37 Donc je ne sais pas ce qu'il s'y raconte.
00:42:39 Mais vous m'interrogez sur...
00:42:42 J'essaie de reprendre votre question,
00:42:44 indépendamment de la lecture de Mediapart.
00:42:46 Est-ce que j'ai eu des reproches
00:42:48 d'un certain nombre de fonctionnaires ou militaires
00:42:50 placés sous mon autorité
00:42:53 sur les dispositifs de manifestation
00:42:55 qui a été mis en place ?
00:42:57 Je comprends bien, c'est votre question.
00:42:59 Voir même des reproches de leur hiérarchie organique
00:43:01 en la matière.
00:43:04 Jamais. Jamais, jamais, jamais.
00:43:06 Et Dieu sait si pourtant je réunissais
00:43:08 l'ensemble des effectifs avant.
00:43:10 Par exemple, manifestation,
00:43:12 ça se passe de la façon suivante sur la préfecture de police.
00:43:15 C'est que l'avant-veille,
00:43:17 la veille lorsque les dispositifs sont compliqués,
00:43:19 l'ensemble des commandants
00:43:21 de compagnie ou d'unité sont réunis.
00:43:23 S'agissant des gendarmes,
00:43:26 puisque chaque structure,
00:43:28 CRS, gendarmes,
00:43:30 a un dispositif de transmission
00:43:32 d'informations
00:43:34 dans la gendarmerie, ça s'appelle le GOMO,
00:43:37 qui est placé auprès dans la salle de commandement,
00:43:39 c'est-à-dire le chef du dispositif gendarmerie,
00:43:41 si vous voulez,
00:43:43 le chef du dispositif CRS,
00:43:45 qui sont dans la salle de commandement,
00:43:48 qui suivent les dispositifs.
00:43:50 Jamais, jamais, aucun d'entre eux
00:43:52 ne m'a parlé de la moindre chose.
00:43:54 Jamais, jamais.
00:43:56 Et donc, comme je... Non, c'est pas étonnant.
00:43:59 Vous avez affaire à des officiers,
00:44:01 vous avez affaire à des fonctionnaires supérieurs,
00:44:03 républicains, honnêtes,
00:44:05 et qui n'auraient pas manqué,
00:44:07 s'ils avaient eu des remarques, d'en faire part.
00:44:10 Vous savez, je ne suis pas
00:44:12 aussi méchant que vous le pensez.
00:44:14 Je peux tout à fait entendre...
00:44:16 -Question. -Vous ne pensez pas.
00:44:18 Je le note, mais je ne suis pas...
00:44:21 -Vous parlez d'entendre.
00:44:23 -Non, mais je ne parlais que de ma méchanceté,
00:44:25 monsieur le député.
00:44:27 -Vous n'avez pas torté de méchants.
00:44:29 -Très bien.
00:44:32 Ne ne supputons pas ni l'un ni l'autre.
00:44:34 Voilà, donc, je n'ai jamais eu le moindre reproche
00:44:36 et de leur part de leur hiérarchie nationale non plus.
00:44:38 Jamais d'ailleurs du côté du ministre.
00:44:41 Donc, franchement, je ne vois absolument pas
00:44:44 ce dont il s'agit.
00:44:46 -Je peux me permettre un repos ?
00:44:48 -Je vous en prie. -Très rapide.
00:44:50 -Vous aviez 3 minutes, mais donc...
00:44:53 -Vous avez eu de votre largesse d'esprit.
00:44:55 Non, mais c'est quand même étonnant
00:44:57 parce qu'il n'y a pas que l'article de Mediapart.
00:44:59 J'aurais pu vous en citer d'autres
00:45:01 et je comprends que vous n'y soyez pas abonné
00:45:03 parce que la ligne éditoriale ne vous convient pas
00:45:06 et c'est votre droit le plus strict.
00:45:08 Néanmoins, vous avez quand même lu un certain nombre
00:45:10 d'articles qui ont été écrits. Vous avez quand même entendu
00:45:12 des reproches récurrents qui vous ont été faits
00:45:14 sur votre politique de maintien de l'ordre.
00:45:17 Et vous trouvez avec le recul, aujourd'hui,
00:45:19 que ce maintien de l'ordre
00:45:21 était irréprochable
00:45:23 ou qu'il n'a pas pu, à un moment, être à l'origine ?
00:45:25 Je repose ma question très clairement.
00:45:28 Est-ce que oui ou non, cette politique
00:45:30 qui consistait, effectivement,
00:45:32 à faire en sorte que les forces de l'ordre chargent
00:45:34 sans raison,
00:45:36 alors qu'il n'y avait pas de danger,
00:45:39 alors qu'il n'y avait pas d'éléments perturbateurs
00:45:41 devant eux, vous ne pensez pas, aujourd'hui,
00:45:43 que cette politique a causé des violences ?
00:45:45 Vous ne la remettez toujours pas en cause, aujourd'hui ?
00:45:47 Puisque ce n'est vraiment dans l'objet
00:45:50 de vos enquêtes, c'est ce qui se passe
00:45:52 dans des manifestations qui tournent mal
00:45:54 et où des violences sont observées.
00:45:56 Comment elles arrivent ? Comment elles sont provoquées ?
00:45:58 Et donc, pour faire simple,
00:46:01 vous ne pensez toujours pas, aujourd'hui,
00:46:03 alors que c'est documenté que votre politique
00:46:05 de maintien de l'ordre a été à l'origine
00:46:07 de nombreuses violences ?
00:46:09 -Je vais évidemment demander à M. le secrétaire général
00:46:12 de répondre. Simplement, M. Caron,
00:46:14 je vous invite, comme vous vous invitiez,
00:46:16 M. Lallemand, à lire des articles de presse,
00:46:18 je vous invite vraiment à lire l'ouvrage
00:46:20 qui a été publié par M. Lallemand
00:46:25 avec, d'ailleurs, un journaliste,
00:46:27 Jean-Jérôme Berthelus, sur "L'ordre nécessaire".
00:46:29 Et vous verrez dans cet ouvrage
00:46:31 qu'en fait, il y a une analyse
00:46:33 de la situation en parlant
00:46:36 de ce qui a évolué
00:46:38 en termes de développement
00:46:40 de la violence, des problématiques...
00:46:42 Enfin, il y a un vrai travail,
00:46:44 je vous permets de le dire,
00:46:47 de la prospection qui a été réalisée
00:46:49 et puis, in fine, des améliorations proposées.
00:46:51 Donc si on parle de documents à lire,
00:46:53 je vous assure, ça vaut la peine
00:46:55 d'être consulté. -Je m'y pencherai
00:46:58 avec grand plaisir, M. le président,
00:47:00 même si votre invitation m'étonne
00:47:02 parce qu'elle ressemble presque à un plaidoyer d'avocat
00:47:04 en faveur de M. Lallemand. Et en tant que président,
00:47:06 je suis un peu surpris. -Non, mais je crois
00:47:09 qu'en termes d'avocat, vous savez, à certains moments,
00:47:11 aussi vous exprimer en tant qu'avocat.
00:47:13 -Pour moi-même. -Oui, oui, tout à fait.
00:47:15 Je vais laisser M. le secrétaire général répondre
00:47:17 et puis ensuite, je vois que M. Lucas
00:47:20 souhaite également intervenir, donc je lui passerai la parole.
00:47:22 Est-ce qu'il y aura d'autres demandes d'intervention ?
00:47:24 Je me tourne vers les collègues. Il n'y en aura pas.
00:47:26 Donc je vous remercie. M. le secrétaire général,
00:47:28 je vous en prie. -Non, mais effectivement,
00:47:31 en n'étant pas accusé, je n'ai pas besoin d'avocat.
00:47:33 M. le député,
00:47:36 quand on veut avoir ce type de discussion,
00:47:38 il faut parler de cas d'espèce.
00:47:40 Mais Léon dit, les racontards,
00:47:43 les histoires, les histoires de la vie,
00:47:45 les racontards, ceux qui auraient été portés
00:47:47 à la connaissance de tel ou tel,
00:47:49 dont on ne sait pas qui c'est, quand et où,
00:47:51 je vais vous dire,
00:47:54 ce ne sont pas des éléments républicains.
00:47:56 Ce sont les bonnes vieilles méthodes
00:47:58 de dénonciation
00:48:00 et de...
00:48:02 de lettres anonymes,
00:48:05 de réseaux excités.
00:48:07 Moi, je veux...
00:48:09 Non, non, mais ce qui sont...
00:48:11 Ce n'est pas le journal qui est anonyme.
00:48:14 Ce sont les citations, les références.
00:48:16 Que s'est-il passé et où ?
00:48:18 Si vous avez des cas d'espèce,
00:48:20 à ce moment-là, je suis prêt à discuter des cas d'espèce
00:48:22 qui relevaient des moments où j'étais en fonction.
00:48:24 Mais je ne vais pas vous parler de façon générale,
00:48:27 encore une fois, de rumeurs, de ragots,
00:48:29 de choses qui ont été dites.
00:48:31 Moi, je vous donne des éléments objectifs
00:48:33 sur ce que j'ai fait.
00:48:35 Je vous ai dit, je n'ai jamais eu de remontée
00:48:38 des effectifs placés sous mon autorité.
00:48:40 C'est pourtant précisément tout à l'heure
00:48:42 ce que vous avez cité, c'est-à-dire l'article de Mediapart.
00:48:44 C'est compliqué de discuter avec vous.
00:48:46 Mais on pourrait peut-être en parler
00:48:49 en dehors de cette instance, si vous le voulez.
00:48:51 Moi, je pourrais en parler.
00:48:53 Pour essayer de vous répondre,
00:48:55 parce que c'est un peu compliqué,
00:48:57 bien évidemment que lorsqu'on aboutit
00:49:00 à une situation de violence
00:49:02 dans une manifestation,
00:49:04 je ne considère pas, je n'ai jamais considéré
00:49:06 que c'était une réussite.
00:49:08 Jamais, jamais, jamais.
00:49:11 La violence, c'est ce qu'il faut à tout prix éviter
00:49:13 justement pour permettre le droit de manifester.
00:49:15 Donc toute mon action
00:49:17 a visé à cela.
00:49:19 Ma seule préoccupation
00:49:22 dans les manifestations, c'était d'éviter les blessés
00:49:24 et d'éviter ce qui aurait été pour moi
00:49:26 une catastrophe, un mort, des morts.
00:49:28 Donc d'éviter...
00:49:30 -Vous ne pouvez pas provoquer les blessés.
00:49:33 -Non, ceux qui provoquaient...
00:49:35 -On n'est pas là pour faire le procès de M. Lallemant.
00:49:37 C'est pas l'objectif.
00:49:39 C'est d'aller dans l'enquête et d'aller sur des éléments
00:49:41 justement factuels.
00:49:44 Et donc on va le laisser répondre
00:49:46 et chacun s'exprime à son tour.
00:49:48 Mais on n'est pas dans un jeu de ping-pong
00:49:50 avec M. Lallemant.
00:49:52 -Ce qui provoque des blessés,
00:49:55 ce sont l'attitude de certains manifestants,
00:49:57 ceux qui cassent, ceux qui attaquent,
00:49:59 ceux qui détruisent.
00:50:01 C'est ça ce qui provoque les blessés.
00:50:03 Penser dans une...
00:50:06 Je vois bien comment le dispositif,
00:50:08 le raisonnement, si vous me permettez,
00:50:10 assez manichéen qui est le vôtre,
00:50:12 c'est-à-dire qu'à la violence d'État,
00:50:14 on doit répondre en exprimant sa violence.
00:50:17 Moi, je ne pense pas que ce soit vrai.
00:50:19 Je vous le dis les yeux dans les yeux,
00:50:21 je ne pense pas que ce soit vrai.
00:50:23 Mais toute l'histoire du maintien de l'ordre en France
00:50:25 est justement faite pour éviter
00:50:28 la violence et les morts.
00:50:30 Historiquement, d'ailleurs, le président,
00:50:32 à la gentillesse de citer mon ouvrage,
00:50:34 mais je rappelle les considérations historiques
00:50:37 des militaires du dispositif de maintien de l'ordre,
00:50:39 après des massacres terribles, fourmis,
00:50:41 ensuite, après la Première Guerre mondiale,
00:50:43 a créé les premières compagnies de CRS,
00:50:45 enfin, d'escadron de gendarmes mobiles,
00:50:47 et après la Deuxième Guerre mondiale,
00:50:50 grâce notamment à l'élan novateur
00:50:52 de la libération,
00:50:54 de créer les CRS,
00:50:56 et ce qui a permis à un certain nombre,
00:50:58 rappelez-vous, de FTP,
00:51:01 de rentrer dans les CRS,
00:51:03 qui était à l'époque constitué
00:51:05 de cette façon-là.
00:51:07 Donc, il y a une histoire du maintien de l'ordre
00:51:09 qui vise précisément en France à éviter
00:51:12 les blessés, à faire en sorte que le droit
00:51:14 de manifestation soit respecté.
00:51:16 Mais il faut être aussi réaliste...
00:51:18 -Quand vous êtes là, on charge ?
00:51:20 -Mais pourquoi, par exemple,
00:51:23 y a-t-il autant de blessés dans les violences urbaines
00:51:25 qui ont eu lieu il y a quelques jours,
00:51:27 beaucoup plus qu'en 2005,
00:51:29 quand on compare les durées des périodes ?
00:51:31 Parce que, M. le député, je suis navré de vous le dire,
00:51:34 mais ce pays est devenu infiniment plus violent
00:51:36 que lorsque j'étais jeune,
00:51:38 c'est-à-dire au lendemain de la guerre de 1914.
00:51:40 Voilà, c'est tout.
00:51:42 Parce qu'il y a une évolution sociale,
00:51:45 on peut le dire sociétale,
00:51:47 qui concourt à la violence.
00:51:49 Peut-être aussi parce qu'il y a aujourd'hui
00:51:51 des influenceurs de la vie politique
00:51:53 et de la vie sociale
00:51:56 qui, eux-mêmes, appellent à la violence.
00:51:58 Peut-être, au sens des réponses.
00:52:00 Moi, je n'en sais rien.
00:52:02 Je ne suis ici qu'un modeste fonctionnaire.
00:52:04 C'est à vous, les politiques, de vous interroger là-dessus.
00:52:08 -On va juste passer la parole à M. le rapporteur,
00:52:13 mais je n'ai pas oublié, M. le Lucac,
00:52:16 que vous souhaitiez également intervenir.
00:52:18 -Oui, merci, M. le président.
00:52:20 Je note simplement, en tant que rapporteur,
00:52:22 qui devra être lire, par conséquent,
00:52:24 un compte-rendu de nos travaux,
00:52:27 vous avez eu des propos plutôt modérés,
00:52:29 plutôt réalistes, quand vous dites, par exemple,
00:52:31 que les stratégies qui impliquaient
00:52:34 d'avoir des groupes fonctionnaires statiques
00:52:37 étaient plutôt des points de concentration
00:52:41 potentiels de violence, que, par conséquent,
00:52:43 il fallait faire évoquer le schéma national de matière.
00:52:46 Je pense que c'est plutôt un constat réaliste.
00:52:49 Lorsque vous indiquez qu'il y a une demande
00:52:51 de pénalisation forte dans la société
00:52:55 et qu'à la fois l'interdiction de manifester,
00:52:57 que nous proposerons peut-être ou pas,
00:52:59 à l'égal de l'interdiction de paraître,
00:53:02 dans les stades, vous indiquez qu'il y a à la fois
00:53:05 des avantages de cette option
00:53:08 et puis un certain nombre d'inconvénients
00:53:10 que vous avez soulignés. Je note quand même
00:53:12 que vos propos étaient, me semble-t-il,
00:53:14 construits, modérés, pas manichéens,
00:53:16 en tout cas de mon point de vue.
00:53:19 Ce n'est pas comme ça, en tout cas,
00:53:21 que je les traduirai dans le rapport
00:53:23 que je proposerai à nos collègues.
00:53:25 Une question sur la judiciarisation.
00:53:28 Je l'ai préparée à l'occasion de notre audition.
00:53:30 C'est la très grande difficulté
00:53:32 à transmettre la bonne information
00:53:34 à l'officier de police judiciaire
00:53:36 puis, bien sûr, ensuite, au magistrat,
00:53:39 concernant la réalité des comportements
00:53:43 constatés lors de l'interpellation
00:53:46 d'un individu violent.
00:53:48 Sur ce point, quelles sont les faiblesses
00:53:50 que vous avez pu constater ?
00:53:52 Quelles sont les évolutions que vous suggérez ?
00:53:55 Je le dis pour l'éclairage de chacun,
00:53:57 pour celles et ceux qui n'étaient pas là
00:53:59 à toutes les auditions.
00:54:01 Je n'en suis pas très fan.
00:54:03 Je crois que c'est le représentant de la CFDT
00:54:06 qui proposait la création de bus d'OPJ.
00:54:09 Je vois beaucoup d'inconvénients à cette solution,
00:54:11 mais je présenterai les avantages et les inconvénients
00:54:13 de cette proposition qui a été faite
00:54:15 dans le rapport de façon objective
00:54:18 et puis nous verrons si nous pouvons trancher ce point.
00:54:20 Quels sont les constats que vous avez faits
00:54:22 sur la question de l'interpellation,
00:54:24 sur la question de la transmission d'informations
00:54:27 ou de sanctionner ?
00:54:29 Et quelles sont les options que vous penseriez utiles,
00:54:31 proposition, de faire à la Commission ?
00:54:33 M. le Président.
00:54:35 -Je vous repasse la parole,
00:54:37 M. le Secrétaire général.
00:54:40 -Merci, M. le Président.
00:54:42 Oui, M. le rapporteur,
00:54:44 la judiciarisation complique singulièrement
00:54:46 le dispositif de maintien de l'ordre.
00:54:48 Pourquoi ?
00:54:51 Parce que, comme vous le savez,
00:54:53 dès lors que vous interpellez un manifestant
00:54:55 dont vous avez la preuve
00:54:57 qu'il vient de commettre une infraction ou un délit,
00:54:59 ça immobilise l'équipe
00:55:02 qui l'a fait jusqu'à ce qu'arrive
00:55:04 le moyen de transport vers le commissariat
00:55:06 pour la présentation devant le PJ.
00:55:08 Et donc ça vous immobilise des effectifs.
00:55:10 Plus vous interpellez,
00:55:13 plus vos effectifs sont immobilisés.
00:55:15 Plus il vous faut des moyens de transport.
00:55:17 Vous évoquiez des bus, mais des NORIA
00:55:19 qui vous permettent d'aller
00:55:21 vers les différents commissariats
00:55:24 pour les présentations aux OPJ.
00:55:26 Et, ce qui est l'essentiel,
00:55:28 il faut élaborer les PV d'interpellation.
00:55:30 Et donc il faut que des fonctionnaires
00:55:32 de maintien de l'ordre
00:55:35 se mettent à faire un PV d'interpellation
00:55:37 sur le trottoir,
00:55:39 décrivant les circonstances.
00:55:41 Imaginez
00:55:43 que ça se passe
00:55:46 au milieu d'un brouhaha,
00:55:48 voire au milieu de tensions extrêmes.
00:55:50 Donc il y a des moments,
00:55:52 c'est quasi de l'ordre de l'impossibilité pratique.
00:55:54 Donc ce que nous faisions
00:55:57 lorsque j'étais en charge,
00:55:59 c'était que les équipes
00:56:01 qui avaient interpellé
00:56:03 sortaient du dispositif,
00:56:05 se mettaient sur les arrières
00:56:08 pour rédiger le PV
00:56:10 et attendre le moyen de véhicule
00:56:12 qui pouvait être très long.
00:56:14 Parce que lorsqu'on essaie de faire venir
00:56:16 un véhicule au plus près d'une manifestation,
00:56:19 c'est assez compliqué.
00:56:21 Il faut que les gens se mettent à faire un PV d'interpellation
00:56:23 sur le trottoir,
00:56:25 et ensuite, il faut qu'ils repartent
00:56:27 faire le commissariat à doc.
00:56:30 Donc c'est vrai qu'une des faiblesses
00:56:32 de la judiciarisation dans les manifestations
00:56:34 est justement, en termes juridiques, celle-là.
00:56:36 Ce qui explique beaucoup
00:56:38 qu'il y ait des écarts assez forts
00:56:41 entre les gardes à vue
00:56:43 et les suites judiciaires
00:56:45 au moment de la présentation
00:56:47 devant le magistrat,
00:56:50 et je le dis souvent à juste titre,
00:56:52 qu'il n'a pas les éléments pour.
00:56:54 Et ça, je crois que, de toute façon,
00:56:56 c'est constitutif
00:56:58 de ce besoin de pénalisation.
00:57:00 Et ça oblige aussi
00:57:03 à des formations
00:57:05 des effectifs chargés du maintien de l'ordre
00:57:07 qui n'ont pas la qualité d'OPJ
00:57:09 et qui sont obligés
00:57:11 de se former à tout cela.
00:57:14 Et c'est là où les Black Blocs
00:57:16 ont une grande force opérationnelle.
00:57:18 C'est qu'ils ont, eux, parfaitement compris tout ça.
00:57:20 Et qu'ils le maîtrisent assez bien.
00:57:22 Alors,
00:57:25 est-ce qu'il y a des méthodes ? Oui.
00:57:27 La méthode que vous...
00:57:29 que j'avais mise en place,
00:57:31 que nous avions constituée
00:57:33 avec cette immobilisation des équipes.
00:57:36 Mais il faut être très clair.
00:57:38 Quand vraiment ça se passe très très mal,
00:57:40 vous avez tendance à dire
00:57:42 que l'interpellation ne se fera pas
00:57:44 tout de suite, tout de suite.
00:57:47 Vous avez des enquêtes qui sont ouvertes
00:57:49 avec les caméras, qui permettent
00:57:51 d'essayer de tracer tel ou tel individu.
00:57:53 Mais lorsqu'ils sont assez
00:57:55 aguerris, c'est-à-dire qu'ils connaissent
00:57:58 les dispositifs, qu'ils savent se changer au bon endroit,
00:58:00 c'est très très difficile.
00:58:02 Et puis apporter la preuve
00:58:04 et trouver des témoins.
00:58:06 Par exemple, je vais prendre quelque chose de très concret.
00:58:09 Vous avez une quinzaine d'individus
00:58:11 en train de casser une vitrine.
00:58:13 Les forces de police interviennent.
00:58:15 Elles sont immédiatement
00:58:17 entourées par une nuée
00:58:20 de photographes,
00:58:22 de journalistes,
00:58:24 de gens avec un smartphone
00:58:26 qui les filment.
00:58:28 Qui sont autant d'obstacles
00:58:31 à la visibilité de ce qui se passe.
00:58:33 Il faut bien concevoir au niveau du terrain,
00:58:35 vous le voyez dans les images de manifestation,
00:58:37 mais sur le terrain, vous êtes à hauteur d'homme
00:58:39 et vous avez un mur de personnes
00:58:42 qui sont comme ça.
00:58:44 Et qui sont à quelques centimètres
00:58:46 du visage des fonctionnaires.
00:58:48 Et donc, ça vous dissimule complètement
00:58:50 votre capacité d'identification.
00:58:53 Quand bien même vous arriveriez
00:58:55 à identifier,
00:58:57 vous avez tout un écosystème
00:58:59 qui se met en place autour.
00:59:01 Et notamment, vous avez énormément
00:59:04 de "streets" qu'on appelle aujourd'hui les "street medics".
00:59:06 C'est à dire des gens en blanc qui arrivent
00:59:08 et pour peu qu'il y ait une intervention
00:59:10 de police, que la personne interpellée
00:59:13 tombe à terre, immédiatement,
00:59:15 vous avez des tas de gens en blanc qui se précipitent.
00:59:17 Et qui sont autant d'éléments de déstabilisation
00:59:19 de la visibilité que vous avez.
00:59:21 C'est à dire qu'il n'y a pas que les "black blocs".
00:59:23 Vous avez un écosystème
00:59:26 qui rend difficile
00:59:28 la perception
00:59:30 et l'identification judiciaire.
00:59:32 Il faut voir que,
00:59:34 je crois le dire dans mon ouvrage,
00:59:37 il y a quelques auxiliaires
00:59:39 des dispositifs.
00:59:41 Mais qui sont très difficiles à déterminer
00:59:43 puisque par définition comme les "black blocs",
00:59:45 ils ne sont pas identifiables
00:59:48 dans l'ensemble auquel
00:59:50 ils prétendent appartenir.
00:59:52 Et tout ça rend très difficile
00:59:54 l'apport de la preuve.
00:59:56 Et l'apport de la preuve résulte souvent
00:59:59 de la déclaration des fonctionnaires.
01:00:01 Mais il est pratiquement impossible
01:00:03 de trouver un autre témoin.
01:00:05 Et la déclaration des fonctionnaires,
01:00:07 elle repose sur, en fait,
01:00:10 en termes judiciaires, ça fonctionne
01:00:12 quand vraiment vous prenez le gars
01:00:14 avec le marteau en train de taper sur la vitrine.
01:00:16 Là, effectivement, c'est incontestable.
01:00:18 Quand un gars a tapé sur la vitrine,
01:00:21 a lâché le marteau, et que vous avez une nuée de moineau,
01:00:23 vous l'avez repérée et que vous le prenez,
01:00:25 ça va être difficile au plan judiciaire
01:00:27 de dire "oui, oui, c'était bien lui".
01:00:29 C'est à dire que les fonctionnaires
01:00:32 ou les militaires l'ont suivi, etc.,
01:00:34 sont à peu près sur deux,
01:00:36 mais l'apport de la preuve est quasi impossible à faire.
01:00:38 Donc il faut voir in concreto ce que tout ça veut dire.
01:00:40 -Je vais laisser la parole ensuite à Benjamin Lucas,
01:00:47 mais deux questions.
01:00:49 Dans ce contexte,
01:00:51 démontez-vous
01:00:53 qu'il y ait eu,
01:00:55 y compris lorsque vous exerciez vos fonctions,
01:00:58 évidemment, des stratégies d'interpellation massive
01:01:00 en vue de déstabiliser
01:01:02 les effectifs violents.
01:01:04 Première question.
01:01:07 Deuxième question.
01:01:09 La Ligue des droits de l'homme
01:01:11 propose la création d'un statut d'observateur
01:01:13 identifiable, identifié
01:01:15 dans le champ des manifestations.
01:01:17 Le statut d'observateur
01:01:20 ayant vocation, alors, du point de vue
01:01:22 de la Ligue des droits de l'homme, de regarder d'abord
01:01:24 le comportement des forces de l'ordre,
01:01:26 mais dans mon esprit, ce pourrait être
01:01:28 un statut d'observateur beaucoup plus impartial,
01:01:31 si j'ose dire, qui regarde absolument tout le contexte,
01:01:33 les situations constatées,
01:01:35 au sein, notamment, des prix-courtages.
01:01:37 Est-ce que, sur ce statut d'observateur,
01:01:40 vous voyez des inconvénients ?
01:01:43 Est-ce que ça ajoute à cet écosystème
01:01:45 qui rend difficile, y compris l'intervention
01:01:47 des forces de l'ordre, ou est-ce que c'est un élément
01:01:49 qui peut participer de ce que certains appellent
01:01:51 une forme de désescalade, d'objectivation
01:01:54 des phénomènes de violence à l'occasion
01:01:56 des manifestations, des rassemblements ?
01:01:58 -Je vous en prie, M. le secrétaire général.
01:02:00 -Merci, M. le président.
01:02:02 Non, il n'y a pas de stratégie d'interpellation.
01:02:05 Vous interpellez quand il est nécessaire
01:02:07 que vous interpelliez. On ne part pas
01:02:09 dans une manifestation en se disant
01:02:11 "On va interpeller X personnes."
01:02:13 Encore une fois, l'interpellation,
01:02:16 pour les services de police et pour les services judiciaires,
01:02:18 c'est compliqué.
01:02:20 Et puis, n'oubliez pas...
01:02:22 Enfin, n'oubliez pas, je ne peux pas vous parler
01:02:24 comme ça, mais c'est pas fini.
01:02:27 Quand vous avez interpellé quelqu'un,
01:02:29 votre journée commence.
01:02:31 C'est-à-dire, quand la manifestation est finie,
01:02:33 commence le processus
01:02:35 de suite des interpellations.
01:02:38 Ca veut dire que dans les sahibs,
01:02:40 ils vont y passer la nuit, avec, malheureusement,
01:02:42 les interpellés, que pour les magistrats
01:02:44 de permanence, ils vont y passer la nuit
01:02:46 et une partie de la journée suivante.
01:02:49 Donc une interpellation, c'est le début
01:02:51 de longues heures de mobilisation
01:02:53 d'un dispositif administratif et judiciaire.
01:02:55 Pendant que les sahibs sont occupés...
01:02:57 Sahib, vous savez, c'est le dispositif
01:03:00 à l'APP de suivi judiciaire.
01:03:02 Quand le sahib est occupé à faire
01:03:04 du traitement de manifestation,
01:03:06 il ne s'occupe pas des autres affaires judiciaires,
01:03:08 des autres faits de délinquance qui arrivent
01:03:11 ou il s'en occupe moins rapidement.
01:03:13 Donc vous accroissez vos files d'attente
01:03:15 dans le traitement judiciaire.
01:03:17 Dans les services de police, c'est la principale difficulté.
01:03:19 C'est le traitement judiciaire,
01:03:22 c'est les suites qu'on donne.
01:03:24 Donc vous embolisez votre dispositif.
01:03:26 C'est exactement la même chose pour les magistrats.
01:03:28 Ils embolisent complètement au niveau
01:03:31 de la justice et de la justice judiciaire.
01:03:33 Donc tout ça pour vous dire que l'interpellation
01:03:35 est très lourde pour l'ensemble
01:03:37 des services de police ou judiciaire
01:03:39 et qu'il n'y a pas de stratégie en la matière.
01:03:41 Il y a tout simplement un moment où il le faut.
01:03:44 Alors après, je pense que la question
01:03:46 que vous posez, elle est liée
01:03:48 à ce qui est aujourd'hui la communication politique
01:03:50 où, effectivement,
01:03:52 la communication politique a tendance à dire
01:03:55 qu'il y a eu beaucoup d'interpellés
01:03:57 donc c'est la preuve que le dispositif
01:03:59 fonctionne bien.
01:04:01 Je le dis, ce n'est pas le fait de ce gouvernement.
01:04:03 Je l'observais déjà sur les gouvernements précédents
01:04:06 et même avant ces deux quinquennats-là,
01:04:08 ça a beaucoup fonctionné comme ça.
01:04:10 Je ne crois pas que l'interpellation
01:04:12 soit un critère
01:04:14 de la réussite ou non
01:04:17 d'une opération de police.
01:04:19 Elle est un élément qu'il est nécessaire
01:04:21 que le public connaisse
01:04:23 parce qu'il est assez explicite
01:04:25 dans son travail.
01:04:28 Il est assez explicite
01:04:30 sur les niveaux de violence.
01:04:32 Mais ça ne veut pas dire que c'est une manifestation
01:04:34 qui s'est bien ou mal passée.
01:04:36 Alors, les statuts d'observateurs.
01:04:39 Non, vous me demandez fort gentiment
01:04:41 M. le rapporteur, à mon avis.
01:04:43 Non, moi, je n'y suis pas favorable.
01:04:45 Enfin, on n'a pas besoin
01:04:47 dans ce pays
01:04:50 d'observateurs dans nos manifestations.
01:04:52 Nous ne sommes pas
01:04:54 comme l'ONU peut envoyer
01:04:56 des observateurs dans certains pays.
01:04:58 Nous sommes dans la République française
01:05:01 où il y a des manifestants,
01:05:03 il y a des autorités,
01:05:05 il y a des gens qui sont assermentés
01:05:07 et puis il y a le contrôle
01:05:09 de l'ensemble des journalistes,
01:05:12 des images, etc.
01:05:14 Mettre en plus au milieu de tout ça
01:05:16 des observateurs,
01:05:18 mais ça ne serait plus la République.
01:05:20 Ça serait considérer
01:05:23 que nous sommes hors du droit commun
01:05:25 et qu'on appliquerait
01:05:27 ce qu'on fait dans des terres lointaines
01:05:29 lorsque les Nations unies
01:05:31 considèrent que
01:05:34 les règles fondamentales des droits de l'homme
01:05:36 ne sont plus respectées.
01:05:38 Mais ça me heurterait assez profondément.
01:05:40 -Merci beaucoup.
01:05:42 M. Lucas, je vous en prie.
01:05:45 -Merci, M. le président. Je me permets de signer
01:05:47 avec les organes des Nations unies.
01:05:49 Ils nous interpellent régulièrement
01:05:51 sur le maintien de l'ordre dans notre pays.
01:05:54 -Pour la question, une remarque,
01:05:56 parce que j'étais assez surpris par...
01:05:58 Vous me pardonnerez le terme, je n'en trouve pas de meilleur.
01:06:00 La forme de légèreté avec laquelle vous avez répondu
01:06:02 à M. Caron sur l'article de Mediapart.
01:06:04 En disant, d'une forme de boutade, "Je ne lis pas Mediapart",
01:06:07 ce n'est, là aussi, de mémoire
01:06:09 ni la Bible
01:06:11 ni le journal officiel.
01:06:13 Bon, moi, la Bible ne fait pas nécessairement
01:06:15 partie des lectures imposées à un préfet de la République.
01:06:18 J'en conviens aisément comme vous.
01:06:20 En revanche, vous conviendrez avec moi
01:06:22 qu'un préfet de police
01:06:24 concourt dans une grande démocratie comme la nôtre
01:06:26 à la bonne information de tous,
01:06:29 y compris des autorités publiques et des acteurs publics.
01:06:31 Ce qui me surprend, et peut-être ce sera ma question,
01:06:33 c'est qu'un préfet de police
01:06:35 ne serait pas informé, parce que vous, personnellement,
01:06:37 ne soyez pas abonné à Mediapart, c'est votre liberté,
01:06:40 mais qu'il n'a pas été porté
01:06:42 à votre connaissance,
01:06:44 officiellement,
01:06:46 par vos services comme préfet de police,
01:06:48 d'accusations graves
01:06:51 de violences policières.
01:06:53 Ca me paraît assez surprenant
01:06:55 et assez inquiétant, d'ailleurs,
01:06:57 parce que je crois que beaucoup,
01:06:59 dans l'histoire de notre République,
01:07:02 vous y avez fait référence, la longue histoire républicaine,
01:07:04 c'est la presse qui a permis,
01:07:06 par des enquêtes et des travaux,
01:07:08 beaucoup de révélations
01:07:10 qui ont permis à la République, d'ailleurs,
01:07:13 de se renforcer et de s'améliorer.
01:07:15 Ma question, elle, concerne
01:07:17 le rapport à la tension,
01:07:19 le rapport de tension
01:07:21 dans la société que vous avez évoqué tout à l'heure.
01:07:24 Je ne fais pas ici de bataille d'analyse.
01:07:26 Vous avez évoqué des appels
01:07:28 à la violence de dirigeants politiques.
01:07:30 J'en ai pas lu ou entendu,
01:07:32 mais peut-être n'ai-je pas été assez assidu
01:07:35 aux mêmes lectures que vous.
01:07:37 Vous auriez pu, sans doute, dans votre intervention,
01:07:39 faire le lien avec ce que vous disiez
01:07:41 au début de votre propos, quand vous regrettiez
01:07:43 la faiblesse, finalement, des organisations syndicales.
01:07:46 On peut y voir, là aussi, une orientation politique
01:07:48 depuis un certain nombre d'années qui conduit à affaiblir
01:07:50 les corps intermédiaires, les organisations syndicales,
01:07:52 les mobilisations pacifiques et donc, de fait,
01:07:54 expliquer n'est pas excuser, mais à entraîner
01:07:57 une forme de violence.
01:07:59 Et je termine d'une chose. Vous avez tout à l'heure
01:08:01 évoqué, M. le préfet,
01:08:03 quand je posais la question sur le camp républicain ou pas,
01:08:06 vous avez dit "Il y a des gens qui veulent abattre la République".
01:08:08 C'est vrai. Et vous avez fait référence à une expression
01:08:10 "Ceux qui veulent abattre la gueuse", qui vient historiquement,
01:08:13 d'ailleurs, de l'extrême-droite, nationaliste, royaliste,
01:08:15 dans notre pays.
01:08:17 Est-ce que le syndicat de police Allianz,
01:08:19 qui, dans un communiqué récent, appelle à mettre hors d'état
01:08:22 de nuire des nuisibles, qui qualifient de "hors de sauvegarde"
01:08:24 et à être... Je termine.
01:08:26 -C'est la 2e fois que vous intervenez.
01:08:28 Normalement, c'est une interruption.
01:08:31 -Je termine. Et à être au combat
01:08:33 et à exercer une forme de pression sur le pouvoir exécutif
01:08:36 et sur les autorités, dont le préfet de police,
01:08:39 est-ce que vous considérez que le syndicat Allianz
01:08:41 est dans le camp républicain ou pas ?
01:08:46 -M. le secrétaire général, je vous repasse la parole.
01:08:49 -Merci, M. le président.
01:08:51 Ecoutez, M. le député, j'ai prêté serment,
01:08:53 et donc, je vous ai dit la vérité.
01:08:58 Je ne lis pas Mediapart. Je vous le redis.
01:09:00 Je ne vais pas vous dire que je lis Mediapart,
01:09:02 puisque je ne le lis pas.
01:09:04 Vous avez l'air de me le reprocher.
01:09:06 Je suis très surpris, mais...
01:09:11 Je vais me mettre à lire Mediapart, alors, si c'est ça.
01:09:15 -Vous lisez plus la presse que d'autres préfets ?
01:09:17 -Non, mais je ne vais pas vous dire que je lis Mediapart.
01:09:19 Je ne lis pas Mediapart. Il y a des choses que je n'ai jamais lues.
01:09:22 Je ne lis pas ce qui se passe dans les réseaux.
01:09:24 Je pense qu'il faut s'intéresser à ce qui se passe
01:09:29 dans la réalité du monde, et pas dans la tête d'un certain nombre de gens.
01:09:33 Bon.
01:09:34 -La presse, c'est correct, ou pas ?
01:09:36 -Non, mais la presse. Moi, je suis un grand clémenciste.
01:09:39 Donc, si vous voulez, je suis persuadé du rôle de la presse
01:09:43 et de son apport fondamental dans l'histoire de nos républiques.
01:09:48 Et donc, je n'ai aucun problème avec la presse.
01:09:52 Mais la question de M. Caron, tout à l'heure,
01:09:55 à moins que je l'aie mal comprise, elle portait sur le fait de savoir
01:10:00 si ce qui était relaté par Mediapart avait été porté à ma connaissance,
01:10:05 c'est-à-dire des reproches faits par des policiers et des gendarmes
01:10:08 sur la légalité des dispositifs.
01:10:12 Peut-être que j'ai mal compris, mais j'avais cru comprendre que c'était ça.
01:10:15 Et puisque vous me reposez cette question-là, je le redis,
01:10:18 je n'ai jamais eu la moindre note, le moindre élément porté à ma connaissance,
01:10:23 d'éléments oraux, faisant état d'irrégularité résultant des ordres donnés.
01:10:31 Voilà. D'irrégularité, c'est-à-dire, vous savez,
01:10:35 il y a quand même des règles juridiques qui visent à ne pas obéir à des ordres illégaux.
01:10:39 Jamais je n'ai été confronté à ça.
01:10:41 Voilà. Donc je vous le dis très directement.
01:10:44 Après, vous comprendrez que je ne peux pas répondre sur des choses
01:10:47 que je n'ai pas eues à connaître,
01:10:51 et notamment la position que vous évoquez d'un syndicat de police.
01:10:54 Moi, je ne peux pas vous répondre là-dessus.
01:10:56 Je ne suis plus en responsabilité.
01:10:58 Je m'occupe des sujets maritimes,
01:11:00 sur lesquels j'aurai le plus grand plaisir à échanger avec vous,
01:11:03 mais je ne peux absolument pas commenter des éléments récents de cette nature.
01:11:08 Merci beaucoup, M. Caron, pour une dernière intervention.
01:11:11 -Une précision. -Oui.
01:11:12 -Merci, M. le Président.
01:11:14 M. le Secrétaire général.
01:11:16 Vous ventiez tout à l'heure la politique française
01:11:22 de maintien de l'ordre, qui serait quasi idyllique,
01:11:25 qui n'utilise la force que lorsque c'est absolument nécessaire.
01:11:28 Mon collègue Lucas le rappelait, nous avons tout de même été épinglés
01:11:31 par un certain nombre d'observateurs internationaux,
01:11:36 notamment le Conseil des droits de l'homme de l'ONU,
01:11:38 mais peut-être sont-ils de parti pris,
01:11:40 peut-être n'observent-ils pas bien les choses.
01:11:43 Vous me reprochiez de faire référence à des cas
01:11:47 qui n'étaient pas suffisamment précis
01:11:49 pour vous permettre de nous livrer une analyse
01:11:52 qui serait pertinente.
01:11:54 Vous semblez découvrir aujourd'hui des éléments
01:11:56 dont vous n'aviez jamais entendu parler.
01:11:58 Vous ne saviez pas quand vous avez reproché votre politique
01:12:00 de maintien de l'ordre, qu'on la jugeait violente,
01:12:03 qu'on la jugeait responsable d'un certain nombre de problèmes
01:12:05 dans les manifestations.
01:12:07 Vous aurez donc appris quelque chose ce matin.
01:12:09 Puisque vous ne le saviez pas,
01:12:11 les Gilets jaunes, c'est des centaines de manifestants
01:12:13 blessés à la tête par des tirs de LBD,
01:12:15 une trentaine d'éborgnés.
01:12:17 Vous voulez un cas précis ? Ça va être ma question,
01:12:19 M. le Président.
01:12:21 Manuel Kwan, nous sommes le samedi 16 novembre 2019.
01:12:26 Manifestations, tout est calme.
01:12:31 Nous sommes Place d'Italie.
01:12:33 Manuel Kwan est statique sur la Place d'Italie.
01:12:36 Il discute avec d'autres manifestants
01:12:39 et il reçoit un tir de LBD dans l'œil.
01:12:43 Il sera donc éborgné.
01:12:46 Il ne représentait aucun danger.
01:12:48 Il était parfaitement pacifique.
01:12:50 C'est un exemple parmi tant d'autres
01:12:53 que je pourrais vous donner,
01:12:55 qui ont été documentés par cette presse que vous ne lisez jamais
01:12:59 et avec apparemment des gens dans votre entourage
01:13:00 qui ne sont pas non plus informés et qui ne vous disent rien.
01:13:03 Il y a deux solutions.
01:13:04 Vous l'avez rappelé, vous êtes sous serment.
01:13:06 Soit réellement vous avez,
01:13:10 je remplis vos fonctions dans des conditions qui m'interrogent,
01:13:13 c'est-à-dire en parfaite méconnaissance de ce qui se passait sur le terrain,
01:13:15 soit, et là ce sera assez grave,
01:13:17 vous avez sous serment menti.
01:13:19 Donc, je vous repose la question.
01:13:22 Est-ce que vous continuez à nier devant nous sous serment
01:13:25 que lorsque vous étiez en fonction
01:13:28 des violences gratuites et non nécessaires
01:13:31 ont été commises par des forces de l'ordre
01:13:33 contre des manifestants ?
01:13:35 Très bien.
01:13:38 Je vais évidemment passer la parole à monsieur Lallement.
01:13:40 Je rappelle simplement pour que tout le monde comprenne bien
01:13:44 que le périmètre temporaire de notre commission,
01:13:48 16 mars 2023, 3 mai 2023.
01:13:52 Donc, voilà le délai temporaire.
01:13:55 Et donc, encore une fois,
01:13:56 si je peux vous faire référence à un fait qui date de 2019,
01:14:02 il n'est pas dans le périmètre de notre commission d'enquête.
01:14:05 Si je peux vous permettre, monsieur le Président,
01:14:06 il me semble que ça l'est
01:14:07 puisque nous nous interrogeons sur des pratiques
01:14:09 qui, peut-être, ont toujours cours aujourd'hui.
01:14:11 Très bien, mais je laisse la parole à monsieur Lallement.
01:14:15 Non, mais malheureusement, monsieur le Président,
01:14:19 enfin, malheureusement, je ne peux que confirmer
01:14:24 ce que vous évoquez et dire à monsieur le député Caron
01:14:28 que le cas qu'il évoque est un cas couvert
01:14:33 par une instruction judiciaire
01:14:35 que je ne peux absolument pas commenter,
01:14:37 vous le comprendrez.
01:14:38 Ce serait contraire au principe de séparation des pouvoirs.
01:14:42 Quant aux observateurs internationaux,
01:14:44 oui, j'ai effectivement entendu récemment,
01:14:46 puisqu'il m'arrive de lire des journaux,
01:14:49 les condamnations de l'Algérie et de l'Iran,
01:14:51 je vous le confirme.
01:14:53 Vous parlez de nous.
01:14:54 Très bien, écoutez, merci beaucoup.
01:14:59 Je vous propose de clore cette audition
01:15:02 en vous renouvelant nos remerciements,
01:15:05 monsieur le secrétaire général, monsieur le chef de cabinet.
01:15:07 Je vais suspendre la séance pendant quelques minutes,
01:15:10 le temps de permettre aux auditionnés suivants
01:15:13 de prendre la place,
01:15:15 éventuellement, pour certains collègues,
01:15:17 de prendre un café.
01:15:18 A tout de suite. Merci beaucoup.
01:15:20 Merci beaucoup.